Le déconfinement se poursuit alors que les risques de reprise épidémique restent élevés

La France poursuit le déconfinement selon le calendrier annoncé par l’État. Celui-ci doit se terminer à la fin juin. Uniquement préoccupé par la relance de l’activité économique et touristique, le gouvernement ne tient pas compte de la circulation encore importante du virus et de l’apparition de variants plus dangereux comme le variant Delta, dit «indien». La situation n’est pas sans rappeler la suite du deuxième confinement. Le relâchement complet des mesures de précaution à la fin de 2020 avait permis au variant anglais de se diffuser massivement au début de 2021.

Aujourd’hui, le couvre-feu sera décalé de deux heures à 23h et les restaurants et bars pourront rouvrir leurs terrasses à 100 pour cent et leurs salles intérieures à 50 pourcent. Musées, cinémas et salles de spectacles pourront accueillir davantage de personnes. L’activité sportive reprendra en intérieur et extérieur, avec quelques restrictions; les spectateurs seront à nouveau accueillis dans les stades. Un passe sanitaire sera en vigueur au-delà de 1.000 personnes, qui permettra aussi de faciliter l’entrée des visiteurs étrangers.

La ministre du Travail, Elizabeth Borne a indiqué au Parisien que les «contraintes du 100 pour cent télétravail seront levées». Dans le privé, les employeurs soutenus par les syndicats pourront faire à peu près ce qu’ils voudront: «Nous redonnons la main aux employeurs et aux salariés pour qu'ils déterminent le nombre de jours adaptés (de présence par semaine)». Seule une présence sur site à 100 pour cent «enfreindrait le protocole». Dans la fonction publique, «le nombre de jours de télétravail va passer à trois jours».

Dans l’éducation, Blanquer, ayant délibérément favorisé la circulation de l’épidémie en 2020 et 2021 a finalement mis en place des mesures de sécurité pour ralentir la circulation épidémique lors de la réouverture du système scolaire. Les classes sont fermées dès le premier cas et les établissements lorsque plusieurs classes sont touchées. Les derniers chiffres de suivi donnent un peu plus de 5.000 classes fermées et environ 1.000 professionnels et plus de 11.000 élèves contaminés sur 7 jours. On ne note pas de tendance à la baisse ces dernières semaines comme dans le reste de la population.

Les gens devant une brasserie à Nice (source: wsws)

Pour la population générale, le nombre de cas journaliers vient de repasser le 6 juin sous les 7.000 cas en moyenne sur 7 jours. La dévastation provoquée par l’épidémie en termes de vies humaines est illustrée par le fait que les décès ne sont repassés sous les 100 décès journaliers en moyenne sur 7 jours que le 3 juin. C’est la première fois que cela se produit depuis le 18 octobre 2020! Le cap des 110.000 morts en France a été franchi le 7 juin.

On distingue les deuxièmes et troisièmes pics de diffusion de l'épidémie par rapport à l'intensité de la circulation du virus. Mais en terme de mortalité, la politique poursuivie par Macron, méprisant les avis scientifiques, consistant à laisser circuler le virus, à confiner très tardivement et partiellement et à déconfiner beaucoup trop tôt, a provoqué délibérément un unique et épouvantable carnage qui a débuté en septembre 2020 et qui se poursuit aujourd’hui encore.

La prestigieuse revue médicale BMJ (anciennement «British Medical Journal» – Revue médicale britannique) a écrit à deux reprises, en février et en juin, que la réponse du gouvernement anglais à la pandémie «pourrait être qualifiée de meurtre social». Nul doute que cela caractérise aussi la politique du gouvernement français.

Au 4 juin, 2.571 personnes étaient prises en charge en réanimation et 14.801 patients Covid étaient hospitalisés. Le taux d'occupation des lits en réanimation est d’environ 50 pour cent avec des différences importantes selon les régions, le taux d’occupation étant nettement plus élevé en Île-de-France et dans le Nord.

13,6 millions de personnes sont totalement vaccinés, soit un peu plus de 20 pour cent de la population et 27,8 millions sont partiellement vaccinées. La vaccination a été étendue à tous les adultes sans condition depuis le 31 mai 2021. À partir du 15 juin, elle sera ouverte aux adolescents de 12 à 18 ans.

La volonté de 'faire du chiffre' commence à se heurter à la nécessité de protéger en priorité les plus âgés et les plus vulnérables. Ainsi, en comptant les vaccinations complètes ou partielles, un plateau semble atteint de 82 pour cent pour les plus de 75 ans et de 81,5 pour cent des 65-74 ans. Les plus jeunes commencent à se substituer aux plus âgés qui rencontrent des difficultés pour accéder à la vaccination, même lorsqu’ils le souhaitent.

De même, la vaccination est mal priorisée pour les publics à risque qui y ont pourtant accès depuis le 1er mai. Les personnes en surpoids, particulièrement fragiles à l’égard du Covid-19, sont vaccinées à moins de 50 pour cent. Cela tient à l'absence d'accompagnement individualisé de la politique de vaccination, faute de moyens.

Le taux de reproduction du virus (R0) qui était descendu à un plus bas de 0,75 est remonté dans un intervalle de 0,8 à 0,9 depuis la mi-mai. Cela signifie que le virus recule, mais plus lentement que précédemment. De plus la situation est contrastée selon les régions et entre les départements.

Le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a fait part mercredi 2 juin de «signaux d’alerte», notamment en Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie avec un taux de reproduction qui 'est repassé au-dessus de 1, ce qui signifie que l’épidémie gagne de nouveau du terrain». Cette reprise était très marquée dans les Pyrénées-Atlantiques, mais aussi en Charente-Maritime, en Lot-et-Garonne, en Charente, dans les Landes et en Gironde.

A cela s'ajoute que le variant Delta initialement identifié en Inde en avril et qui se développe en Angleterre est aussi apparu dans plusieurs départements dont les Landes où on trouve «une cinquantaine de patients», selon l'agence régionale de santé. Une centaine de cas du variant auraient été confirmés en France dont certains d’origine inconnue. Ainsi il circule déjà de façon significative sans être détecté. Les pouvoirs publics et la plupart des médias rassurent à bon compte sur le variant Delta, où évitent complètement le sujet, pour faire croire que la situation est sous contrôle.

Il faut examiner la situation au Royaume-Uni pour savoir ce qu'il en est en réalité. On y repère déjà plus de cas de variant indien que de variant britannique (Alpha), connu pour être déjà plus contagieux que la souche initiale du coronavirus qu'il a remplacé. Les infections et les décès dus au variant Delta sont en augmentation constante à partir d’un petit nombre initial d’infections.

Selon Neil Ferguson, épidémiologiste à l’Imperial College de Londres, le nouveau variant est entre 30 et 100 pour cent, et vraisemblablement environ 60 pourcent plus transmissible que le variant Alpha.

D'après une étude du Public Health England, le variant indien pourrait entraîner la multiplication des hospitalisations. Après l'analyse de près de 38.000 séquences du virus, les chercheurs estiment que le variant Delta aurait un risque d'hospitalisation 2,61 plus élevé, par rapport au variant Alpha.

Enfin la variant Delta fait partie des variants qui ont une capacité accrue à contourner le système immunitaire, ainsi les personnes qui n'ont pas terminé le schéma vaccinal pourraient être touchées et participer à la diffusion du virus.

Avec seulement 20 pour cent de la population complètement vaccinée et avec l'accélération du déconfinement, le potentiel de diffusion de la souche Alpha anglaise dominante et de la nouvelle souche Delta est considérable.

Comme avec l'arrivée de la souche Alpha au moment des fêtes de fin d'année, Macron et son gouvernement balaient les données scientifiques et poursuivent une politique sanitaire qui risque de provoquer une quatrième vague de contagions dès l’été.

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