Twitter censure le compte de la lanceuse d’alerte de la COVID-19, Rebekah Jones

Twitter a suspendu le compte de la lanceuse d’alerte de la COVID-19 Rebekah Jones, un acte de censure ouverte contre la scientifique des données de Floride qui s’est fait connaître pour la première fois en mai 2020 lorsqu’elle a refusé de modifier le décompte des cas et des décès liés à la COVID-19 sur le tableau de bord de la COVID-19 de l’État, à la demande de l’administration du gouverneur républicain Ron DeSantis.

Rebekah Jones (YouTube/Rebekah Jones)

Rebekah Jones est l’une des opposantes les plus franches et les plus connues à la politique homicide d’immunité collective – qualifiée de «meurtre social» par le British Medical Journal (BMJ) – promue par le gouverneur de Floride DeSantis et l’ancien président Donald Trump. Elle s’est toujours prononcée contre la réouverture des écoles et les immenses dangers qu’elle représente dans un contexte de pandémie qui a tué plus de 610.000 personnes rien qu’aux États-Unis et plus de 3,7 millions dans le monde.

Le bureau de DeSantis s’est réjoui de la décision de Twitter, qualifiant Rebekah Jones de «Mary Typhoïde» de la désinformation sur la COVID-19... avec ses théories du complot diffamatoires». Matt Dixon, l’un des assistants du gouverneur, a qualifié la décision de «longuement attendue».

DeSantis a été rejoint par d’autres publications telles que Yahoo! News, qui a qualifié Rebekah Jones de «dénonciatrice frauduleuse de la COVID-19», ainsi que par des personnalités ostensiblement de gauche telles que Glenn Greenwald, qui a déclaré qu’elle «pue la fraude» et qui fait la promotion d’un article de la revue de droite National Review affirmant que Rebekah Jones utilise son compte Twitter pour escroquer de l’argent à ses abonnés.

Le prétexte invoqué par Twitter pour justifier cette suspension, selon Rebekah Jones, est qu’elle aurait posté une cinquantaine de fois un article récent du Miami Herald intitulé «Ce que Rebekah Jones a vu dans les coulisses du département de la Santé de Floride». Quelle que soit la raison technique immédiate, la cause sous-jacente est que DeSantis, Twitter et l’ensemble de l’establishment politique et médiatique sont opposés au partage de toute information montrant un compte rendu juste et précis des attaques de droite de DeSantis contre la lanceuse d’alerte.

En particulier, l’article du Herald en question contient une foule de nouvelles informations sur la bataille juridique en cours impliquant Jones et l’État de Floride concernant la plainte pour dénonciation qu’elle a déposée en juillet dernier. À l’époque, DeSantis avait prétendu qu’elle avait été licenciée pour «insubordination» et non, comme le soutient Rebekah Jones, parce qu’elle a porté plainte d’avoir à participer à un «récit trompeur et politique ignorant les données et la science».

Selon le Herald, cependant, «des dirigeants du département de la Santé ont reconnu sous serment la véracité souvent démentie de son affirmation selon laquelle on lui a demandé de retirer des données de l’accès public.» De plus, si des responsables de la santé publique du département de la Santé de Floride, dont Jones et une équipe d’épidémiologistes, avaient la responsabilité «d’élaborer de nouvelles données pour un plan de réouverture», leurs données n’ont «jamais été intégrées dans les recommandations communiquées à DeSantis». La secrétaire adjointe à la Santé, Shamarial Roberson, a nié que le département ait fait la moindre recommandation sur le plan de réouverture».

En outre, note le Herald, «garder le tout secret était la politique adoptée. On a bien demandé aux fonctionnaires de ne rien mettre par écrit en ce qui a trait à la réponse à propos de la pandémie.» Des informations cruciales ont été délibérément dissimulées, notamment «des données sur les décès et les infections dans les maisons de retraite, les prisons de l’État et les écoles» et «des informations importantes qui avaient été rendues publiques ont été supprimées des comptes rendus des médecins légistes sur les décès dus à la COVID-19».

Le Herald poursuit: «Les employés du département de la Santé interrogés par le Herald ont décrit un service des communications «hyper-politisé» qui semblait souvent essayer de se conformer au récit venant de Washington.»

En d’autres termes, l’affirmation de DeSantis selon laquelle sa stratégie de réouverture de la Floride de façon «très mesurée, réfléchie et basée sur des données» est complètement fausse. Soit il savait qu’il n’était pas sûr de rouvrir les écoles et les lieux de travail, soit ses conseillers ne lui ont pas communiqué les données réelles pour donner au gouverneur une mesure de déni plausible. Quoi qu’il en soit, l’administration DeSantis est allée de l’avant avec des politiques qui sont la principale raison pour laquelle il y a maintenant environ 37.000 décès rien qu’en Floride.

En revanche, Rebekah Jones a été l’une des rares voix à proposer une véritable approche scientifique des dangers de la pandémie. Elle s’est toujours opposée à la réouverture non sécurisée des écoles et des lieux de travail, et a utilisé sa formation de géographe et de spécialiste de la science des données pour rendre les données de la Floride sur la COVID-19 plus accessibles au grand public grâce à son tableau de bord Florida COVID Action.

Jones et deux collègues ont également publié un article dans le US News & World Report en décembre dernier qui critiquait la réouverture des écoles, notant à l’époque qu’au moins un million d’enfants avaient été infectés par la COVID-19. «Nos données démontrent que les écoles ne sont pas les refuges ou les silos que certains croyaient qu’elles seraient, et qu’elles contribuent en fait à la propagation de la COVID-19 de plusieurs façons», ont-ils écrit. «À notre avis, les données suggèrent que les écoles ne sont PAS sécuritaires et qu’elles contribuent à la propagation du virus, tant à l’intérieur des écoles qu’au sein des collectivités environnantes», conclut l’article.

Pour ses efforts, elle a dû faire face à une série de mesures de plus en plus punitives de la part de l’État. En décembre dernier, le département de la Santé de Floride a prétendu que Jones avait piraté son système de messagerie et envoyé une note de service exhortant les responsables de la santé: «parlez avant que 17.000 personnes de plus ne meurent. Vous savez que c’est mauvais. Vous n’avez pas à participer à cela. Soyez héroïque. Parlez avant qu’il ne soit trop tard!»

En réponse, la maison de Jones a été perquisitionnée et tous ses appareils électroniques ont été saisis par l’État. Jones a filmé l’invasion de son domicile et a tweeté après la descente, «C’est DeSantis. Il a envoyé la Gestapo.» Dans l’enregistrement, on peut l’entendre crier: «Mon mari et mes enfants sont en haut. Qu’est-ce que vous faites? Ils viennent de pointer une arme sur mes enfants!»

Jones est maintenant aux côtés des lanceurs d’alerte Julian Assange, Chelsea Manning et Edward Snowden, tous persécutés pour le crime de dire à la classe ouvrière la vérité sur les actions criminelles de l’élite dirigeante.

(Article paru en anglais le 8 juin 2021)

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