Des centaines de morts dans le Nord-Ouest Pacifique américain et en Colombie-Britannique lors d’une vague de chaleur «qui n’arrive qu’une fois par millénaire»

La vague de chaleur qui sévit actuellement dans l’ouest du Canada et dans le nord-ouest des États-Unis a été décrite comme un événement «qui n’arrive qu’une fois par millénaire.» Les températures ont atteint 46 degrés Celsius lundi [28 juin] à Portland, dans l’Oregon, 42 degrés Celsius à Seattle, dans l’État de Washington, au cours du week-end, et 46 degrés à Vancouver, en Colombie-Britannique.

Un ouvrier agricole au travail essuie la sueur de son cou, jeudi 1er juillet 2021, à St-Paul, Oregon. (Photo: AP Photo/Nathan Howard)

Parmi les températures les plus élevées, celle de la ville de Lytton, en Colombie-Britannique, a dépassé les 49 degrés Celsius. Lundi [28 juin], les habitants ont été évacués alors que plusieurs feux de forêt ravageaient la ville.

De telles températures sont insupportables pour la vie humaine, comme en témoignent les centaines de personnes qui sont mortes jusqu’à présent. Parmi celles-ci, on compte au moins 486 décès «soudains et inattendus» entre samedi et mercredi, et 60 autres décès dans l’Oregon ont été liés à la chaleur et plus d’une douzaine dans l’État de Washington. On s’attend à de nombreux autres décès alors que la vague de chaleur se poursuit dans le Nord-Ouest Pacifique et que les coroners terminent leurs enquêtes sur cette vague de décès.

Le Sunrise Center, un abri d’urgence à Portland, dans l’Oregon, mis en place pour se protéger de la tempête hivernale de février qui a frappé le Nord-Ouest Pacifique cette année, est maintenant utilisé comme abri pour se rafraîchir de la chaleur torride.

Caleb Coder, qui a participé à la mise en place du centre d’urgence, a déclaré au Financial Times (FT): «Les gens rampaient littéralement vers le Sunrise Center tellement il faisait chaud. Ils vomissaient, étaient brûlés et déshydratés.» «Des centaines de personnes sont passées parce que nous avions des stations d’eau, des brumisateurs et un camion douche», alors que les températures atteignaient 116 degrés. «Si Sunrise n’avait pas été là...», il a baissé la voix. «Cela a sauvé des vies.»

D’autres événements extrêmes ont récemment frappé l’Australie, la Californie et la Sibérie avec des incendies de forêt mortels causés par la chaleur extrême. La Vallée de la Mort, en Californie, a atteint une température torride de 53 degrés Celsius en juin, un record pour ce mois. La fréquence accrue de ces événements météorologiques pose la question de savoir si ces événements «uniques en un millénaire» deviendront une fois par siècle, par décennie ou même par an, et si l’humanité est préparée aux conséquences des catastrophes climatiques mondiales. Ces dernières années, l’ouest des États-Unis a particulièrement souffert d’une combinaison épouvantable de vagues de chaleur, de sécheresses et d’incendies de forêt, mettant ses infrastructures à rude épreuve.

«Un consensus émerge sur le fait qu’il s’agit d’une sorte de nouvelle normalité», a déclaré au FT la docteure Jennifer Vines, responsable de la santé pour la région des trois comtés de l’Oregon. Outre la vague de chaleur de cette semaine, elle a rappelé la «snowpocalypse» de février et les incendies de forêt de l’année dernière qui ont énormément pollué l’air de Portland. «Comment allons-nous nous structurer dans nos réponses, compte tenu de l’intensité, de la fréquence et du sentiment d’urgence auxquels nous avons été confrontés littéralement tous les quelques mois au cours de l’année écoulée?»

Les températures étouffantes enregistrées aux États-Unis et au Canada cette semaine ont été causées par une zone de haute pression atmosphérique connue sous le nom de dôme thermique. Ces conditions apparaissent lorsque le jet-stream, une bande d’air se déplaçant rapidement dans l’atmosphère, crée une grande vague qui maintient le dôme en place. Le réchauffement climatique a fait augmenter la température moyenne de la planète, qui est aujourd’hui supérieure d’environ 1,2 degré Celsius à celle de 1850. Si les vagues de chaleur ne sont pas nouvelles, elles deviennent beaucoup plus extrêmes en raison de cette tendance au réchauffement.

Les infrastructures fragiles ont volé en éclats sous la pression. Dans l’État de Washington, les routes ont commencé à se fissurer et à se déformer, et les sacs de glace se sont rapidement épuisés dans les magasins de Seattle, où moins de la moitié de la population dispose d’un système de climatisation. Les températures extrêmes sur une période de quatre jours ont été ressenties alors que la côte ouest se préparait déjà à une nouvelle saison de feux de forêt.

La chaleur a intensifié une «méga-sécheresse» qui dure depuis 20 ans et a entraîné une crise de l’eau de plus en plus grave dans la région. En plus de provoquer une évaporation accrue des réservoirs, la hausse des températures assèche le sol et augmente la quantité d’eau absorbée par les plantes, ce qui réduit le ruissellement. «Ce que nous observons dans l’Ouest américain, c’est un réchauffement et un assèchement à long terme», a expliqué au FT Brad Udall, chercheur en climatologie à l’université d’État du Colorado. L’augmentation des températures est responsable d’environ la moitié de la baisse du débit du fleuve Colorado depuis 2000.

Le débit du fleuve, source d’eau vitale pour les habitants de la Californie, de l’Arizona et du Nevada ainsi que pour les agriculteurs, a diminué d’un cinquième depuis le début du siècle. «Il y a des utilisateurs agricoles qui n’auront pas assez d’eau. C’est une réalité très dure», a déclaré Udall. Ces perturbations de plus en plus courantes ont amené de nombreuses villes et industries américaines à se demander si et comment elles peuvent gérer les inévitables événements météorologiques futurs.

Le président Joe Biden a tenu une réunion virtuelle mercredi avec plusieurs gouverneurs d’États de l’Ouest: Oregon, Californie, Nevada, Utah, Colorado, Nouveau-Mexique et Wyoming, au cours de laquelle il a énuméré une série de faits évidents: «Les changements climatiques sont à l’origine de la dangereuse confluence de la chaleur extrême et de la sécheresse prolongée», ainsi que des attaques contre les négationnistes des changements climatiques: «Mais ne vous inquiétez pas, il n’y a pas de réchauffement de la planète car c’est juste le fruit de notre imagination.»

Ces tentatives de sarcasme, cependant, tombent à plat. C’est le gouvernement américain, sous les administrations républicaines et démocrates, qui a nié les implications des changements climatiques en menant des politiques finalement vides de sens, comme la signature par Obama de l’accord «historique» de Paris, ou le vandalisme écologique pur et simple de Donald Trump.

Les propos de Biden sont également démentis par sa position agressive envers la Russie et la Chine. Les changements climatiques sont un problème intrinsèquement mondial qui nécessite une réponse coordonnée au niveau international, ce qui est impossible dans le cadre de telles tensions, qui impliquent des pays qui sont tous dotés d’armes nucléaires. En tant que tel, il incombe à la classe ouvrière, la seule force sociale internationale sur la planète, de mettre fin à la crise écologique en cours qui s’accélère.

(Article paru en anglais le 3 juillet 2021)

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