«Nous devrions avoir un autre vote négatif de 90 pour cent pour leur montrer que nous n’avons pas peur»

Les grévistes de Virginie résistent aux menaces de Volvo, tandis que les travailleurs de Volvo Cars débrayent en Belgique

La direction de Volvo Trucks a proféré jeudi une série de menaces provocantes à l’encontre des travailleurs en grève en Virginie. C’était dans un ultime effort pour les contraindre à accepter un accord de travail de six ans conclu avec les Travailleurs unis de l’automobile (UAW). Près de 3.000 travailleurs, qui sont en grève à l’usine New River Valley de Dublin, en Virginie, depuis plus d’un mois, votent aujourd’hui sur une troisième proposition soutenue par l’UAW.

Des travailleurs de Volvo Truck en grève (Source: UAW Local 2069/Facebook)

Signe de l’opposition croissante des travailleurs à l’échelle internationale, les travailleurs d’une usine Volvo Cars à Gand, en Belgique, ont interrompu la production lors d’une action sauvage jeudi, pour protester contre les projets de l’entreprise d’augmenter la semaine de travail avec l’accord des syndicats. Volvo Cars est désormais détenu séparément de Volvo Trucks, mais les usines des deux sociétés restent proches l’une de l’autre à Gand.

Volvo est conscient de l’énorme opposition des travailleurs de Virginie à ce dernier accord. Ce n’est guère plus qu’une redite des deux premiers accords que les travailleurs ont rejetés à 90 pour cent en mai et en juin. L’UAW cherche à vaincre la résistance des travailleurs à la dernière proposition. Ce contrat maintient le système de salaires et d’avantages sociaux à deux niveaux; augmente fortement les frais médicaux à la charge des travailleurs actuels et des retraités; et limite les augmentations pour les travailleurs «avec ancienneté» à une moyenne de deux pour cent par an, bien en dessous du taux d’inflation.

La première question de la section Q et R de la page Web de l’usine Volvo de New River Valley intitulée «Mise à jour des négociations», le 8 juillet, est la suivante: «Que se passera-t-il si le troisième accord de principe est rejeté?»

La réponse est la suivante: «Il est important de noter que nous avons fait savoir à la direction de l’UAW que nous reviendrions à la deuxième entente de principe – et non à la troisième – comme base de toute discussion supplémentaire sur les salaires».

L’entreprise poursuit: «Il est peu probable que nous puissions conclure un quatrième accord de principe avant l’arrêt des vacances, de sorte que les employés ne seraient pas payés pour les vacances admissibles qui auraient dû être utilisées pendant l’arrêt des vacances s’il n’y avait pas eu d’arrêt de travail».

L’entreprise conclut en affirmant qu’une poursuite de la grève mettrait en péril son projet d’expansion de 400 millions de dollars de l’usine de New River Valley, menaçant ainsi clairement les emplois des travailleurs. «Enfin, en raison de l’incertitude créée par l’absence de contrat, nous avons déjà annulé l’investissement qui aurait permis de déplacer la garniture de cabine dans l’usine 2». Elle ajoute: «L’impact sur le reste des projets n’est pas clair pour l’instant, et le risque que les investissements futurs soient rejetés augmenterait à mesure que l’incertitude opérationnelle se prolonge».

La multinationale d’origine suédoise, qui a réalisé plus d’un milliard de profit au premier trimestre 2021 et remis un montant record de dividendes à ses riches investisseurs, tente de mettre un pistolet sur la tempe des travailleurs, déclarant en fait: «Acceptez de nouvelles concessions, ou nous vous priverons de vos maigres augmentations, nous vous dépouillerons de vos congés payés et nous éliminerons peut-être votre emploi».

Le président de l’UAW, Ray Curry, et la section 2069 de l’UAW n’ont pas publié un mot sur la tentative de chantage de l’entreprise. C’est parce qu’ils sont co-conspirateurs dans la campagne qui vise à enfoncer le contrat dans la gorge des travailleurs. Les responsables de l’UAW ont refusé de publier le contrat complet pour que les travailleurs puissent le lire et l’étudier, et ils se hâtent d’organiser un vote, une semaine seulement après avoir annoncé l’accord de principe.

Les travailleurs de la base restent défiants et déterminés à faire échouer le contrat. «Il est évident qu’ils essaient de nous intimider», a répondu un travailleur en grève. Ils vont à nouveau utiliser la tactique de la peur «Nous allons déménager au Mexique». Cela pourrait énerver suffisamment de gens pour que nous obtenions un rejet massif. Nous devrions répondre par un autre 90 pour cent de 'non' pour leur montrer que nous sommes sérieux et que leurs menaces ne nous font pas peur».

Le travailleur a ajouté: «Le syndicat prétend que le contrat complet se trouve dans l’arrière-boutique du local syndical. Mais j’ai vu plusieurs messages sur Facebook de travailleurs qui sont allés au local pour le consulter, et les responsables locaux du syndicat ont dit qu’il n’était pas là ou que les travailleurs devaient attendre qu’un autre responsable se présente avant de pouvoir le voir. Les travailleurs en ont assez de l’UAW».

Faisant référence aux menaces de l’entreprise, un autre travailleur a déclaré: «Ils essaient de nous faire peur pour que nous votions en faveur de cette mesure. Si nous votons contre, ils vont dire: “Nous avons arrêté toute la construction et nous allons chercher ailleurs notre nouvelle usine”. Je vous garantis que c’est ce qu’ils diront si nous votons contre».

«Beaucoup de jeunes travailleurs risquent de perdre beaucoup d’argent s’ils retournent au deuxième accord de principe, moi je perdrai 2 à 3 dollars l’heure. Mais nous devons faire passer le mot et ne pas nous laisser intimider par ces menaces de rejet».

C’est le Comité des travailleurs de base de Volvo (VWRFC) qui a mené l’opposition à la fois à l’entreprise et à l’UAW. Dans la perspective du vote d’aujourd’hui, le VWRFC a publié une déclaration qui demande la publication du contrat complet et de toutes les lettres d’accompagnement, avec suffisamment de temps pour que les travailleurs puissent l’étudier et en discuter avant tout vote. Le comité a appelé les travailleurs à rejeter l’accord de capitulation et à étendre la grève aux usines Mack-Volvo de la société et plus largement à l’ensemble de l’industrie automobile.

L’action des travailleurs belges montre qu’une action unie est possible. Au cours des derniers jours, les travailleurs de Volvo ont établi des liens avec les travailleurs des usines Mack-Volvo de Pennsylvanie et du Maryland et ont reçu leur soutien. Ils ont également reçu le soutien des principales usines automobiles de Detroit, de Chicago et d’autres villes, ainsi que des opérations internationales de Volvo, notamment en Australie, au Canada et en Belgique.

En début de semaine, les militants du WSWS et des partis de l’égalité socialiste en Europe ont rencontré un large soutien aux grévistes de la part des travailleurs belges du complexe géant de l’entreprise à Gand, deux jours avant le débrayage chez Volvo Cars.

«Les travailleurs belges ont tout à fait le droit de se lever et nous les soutenons», a déclaré un membre du VWRFC au WSWS en réponse au débrayage chez Volvo Cars. «Si les travailleurs belges perdent leur semaine de travail plus courte, l’entreprise commencera avec 40 heures, puis ce sera 50-60 heures comme nous le faisons».

«Nous faisons tous face aux mêmes problèmes», a-t-il ajouté. «Tout comme les travailleurs belges, Volvo a dit que nous étions des travailleurs essentiels et nous à force à revenir dans l’usine après le début de la pandémie. Ils nous ont dit: “Nous apprécions que vous soyez venus travailler, prenez soin de vous”. Je leur ai dit: “Peut-être que l’année prochaine, quand notre contrat arrivera à échéance, vous prendrez soin de nous”. J’aime ce qu’a dit le travailleur belge: “Nous avons tous formé une grande équipe pendant la pandémie, alors c’est une bonne idée de former une grande équipe pour les employés de Volvo partout dans le monde”».

«Notre combat est leur combat», a dit un autre travailleur du VWRFC à propos des travailleurs belges. «Tout le monde se bat contre la même chose. J’ai regardé la vidéo des travailleurs de Détroit, et ils ont exactement le même problème que nous. C’est drôle, on a pensé pendant toutes ces années qu’on était les seuls à être confrontés à ce problème, mais il s’avère que le monde entier l’est. Tout commence à être dévoilé, et les squelettes sortent du placard».

Un vétéran de Volvo a déclaré: «Si vous n’aviez pas été là [le WSWS], comment auraient-ils su? Volvo ne leur aurait pas parlé de New River Valley, et ils ne nous auraient pas parlé de Gand. Maintenant, vous nous avez donné cette chance de communiquer. Je sais qu’au moins les médias américains n’essaient pas de partager ce genre de choses, et je doute que les médias européens soient très différents.»

Il a ajouté: «J’ai envoyé cette vidéo à de nombreux autres travailleurs de NRV, et ils m’ont répondu par texto avec des pouces levés et d’autres signes d’appréciation. Beaucoup d’entre eux n’en reviennent pas que les travailleurs de Gand nous soutiennent. Le timing de la vidéo n’aurait pas pu être meilleur. Juste au moment où Volvo essaie de nous faire peur avec sa machine de relations publiques, juste avant le vote qui aura lieu dans quelques heures, nous voyons cette vidéo et cela rallume le feu».

Les travailleurs de Volvo doivent répondre aux menaces de l’entreprise en étendant leur lutte aux travailleurs de Mack-Volvo et aux autres travailleurs de l’automobile aux États-Unis, ainsi qu’aux travailleurs de Volvo Trucks et de Volvo Cars dans le monde entier.

La grève chez Volvo Trucks doit également être liée aux luttes des travailleurs d’autres industries, y compris les travailleurs de l’acier d’ATI en Pennsylvanie et dans d’autres États, où le Syndicat des métallos tente d’imposer un contrat de concessions; les mineurs en grève de Warrior Met en Alabama et de Vale au Canada; et les travailleurs de Frito-Lay à Topeka, au Kansas, qui sont en grève après avoir rejeté un contrat soutenu par le Syndicat de la boulangerie, de la confiserie, du tabac et des minoteries.

L’expansion et l’unification des luttes de toutes les sections de la classe ouvrière nécessitent la formation d’un réseau de comités de base, qui soit indépendant des syndicats qui travaillent dans chaque pays pour faire respecter les exigences de la classe dominante.

(Article paru en anglais le 9 juillet 2021)

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