«Nous marchons les yeux fermés vers un ouragan»

Une lettre d’un parent de l’Ontario s’oppose à la réouverture des écoles

Un parent avec deux jeunes enfants a envoyé au World Socialist Web Site la lettre suivante s’opposant à la décision du gouvernement de l’Ontario de rouvrir les écoles en pleine quatrième vague de la pandémie de COVID-19 qui déferle rapidement sur le Canada. Le parent est un partisan du Comité de sécurité pancanadien du personnel scolaire de la base (CSPPB). Le CSPPB se bat pour mobiliser le personnel scolaire, les étudiants et les parents afin de fermer les écoles pour l’apprentissage en personne, de suspendre toute production non essentielle et d’obtenir une compensation financière complète pour les travailleurs afin qu’ils puissent s’abriter chez eux et s’occuper de leur famille jusqu’à ce que la pandémie soit maîtrisée. Pour assister à la prochaine réunion du CSPPB, qui aura lieu le samedi 28 août à 13h30 HNE, veuillez écrire à l’adresse suivante: cersc.csppb@gmail.com.

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En tant que parents de deux jeunes enfants, ma femme et moi nous sentons très mal à l’aise alors que l’année scolaire approche à grands pas en Ontario. Nous sommes très inquiets de ce à quoi ressembleront les prochains mois. Le variant Delta provoque déjà des augmentations alarmantes des taux d’infection, avant même que le calendrier marque septembre. De nouvelles données scientifiques nous indiquent que les enfants de moins de 12 ans, qui ne seront pas vaccinés à la rentrée des classes, sont vulnérables à des risques accrus de maladie grave, de long COVID, de déclin cognitif important et de décès. Mais ces connaissances ne seront pas d’un grand réconfort pour les parents qui sont enfermés dans un modèle d’apprentissage en personne alors que l’année scolaire commence.

Annonce de la réunion inaugurale d’avril dernier du Comité de sécurité pancanadien du personnel scolaire de la base (CSPPB)

Beaucoup de choses ont changé depuis la fermeture des écoles en juin. Les parents de toute la province devaient déclarer en juin dernier si leurs enfants seraient inscrits à l’enseignement à distance pour la rentrée de septembre. Nous n’avions alors que peu de connaissances sur la gravité du variant Delta. Ce n’est que maintenant que l’on a une idée plus précise du danger qu’il représente pour les enfants de moins de 12 ans non vaccinés. Bien que la province maintienne que les parents ont le choix entre l’apprentissage en personne et à distance, ce choix est limité et n’existe même pas dans de nombreuses régions du Canada.

Certains conseils scolaires ne vous permettront pas de retirer vos enfants avant janvier 2022. Dans les zones scolaires les plus favorisées, le passage à l’apprentissage à distance se fait au plus tôt en octobre.

Au début du mois d’août, ma femme et moi avons commencé à avoir des doutes sur la possibilité de renvoyer nos enfants à l’apprentissage en personne. Nous avons appelé notre commission scolaire et demandé le passage à l’apprentissage à distance. On nous a répondu que nous ne pouvions pas changer et qu’il était trop tard pour choisir l’apprentissage à distance pour septembre. Nous avons fait part de nos préoccupations concernant l’insuffisance du plan de retour à l’école et les nouvelles données sur les dangers du variant Delta. On nous a dit que personne ne travaillait au bureau du conseil scolaire et que nous devions contacter notre directeur d’école début septembre pour demander le passage à l’apprentissage à distance. Ce changement ne pouvait être mis en œuvre au plus tôt qu’à la fin octobre.

Lorsque ma femme et moi avons clairement fait savoir que nous ne voulions pas du tout que nos enfants aillent à l’école en septembre, on m’a dit que si mes enfants manquaient 15 jours d’école consécutifs, ils seraient retirés de l’école de notre quartier et les services à l’enfance seraient contactés puisque ma femme et moi aurions enfreint la loi. Nous sommes consternés et livides face à cette réponse à nos préoccupations légitimes en matière de sécurité. Nous appréhendons la discussion de septembre avec le directeur de l’école.

Malgré toutes les assurances et les discours des politiciens, des conseils scolaires et du médecin-chef de l’Ontario au sujet d’un retour sécuritaire à l’apprentissage en classe, je n’ai pas confiance et je ne crois pas qu’un retour sécuritaire à l’apprentissage complet en classe soit possible. Mon scepticisme ne découle pas d’une quelconque théorie du complot ou de croyances superstitieuses. Il découle plutôt de ce que je vois déjà dans le monde entier où les enfants sont retournés à l’école. Les enfants tombent déjà malades. Des parents perdent leurs enfants à cause du variant Delta en ce moment même aux États-Unis; pourtant, les sonneries d’alarme ne retentissent pas en Ontario. Nous marchons les yeux fermés vers un ouragan.

La réalité est que les salles de classe ne seront pas sûres pour un retour complet à l’école dans deux semaines. Toutes les salles de classe de l’Ontario ne seront pas équipées de filtres HEPA. Les systèmes de ventilation ne seront pas améliorés dans toutes les écoles de la province. Les masques en tissu ne seront pas efficaces contre le Delta. Les enfants ne recevront pas de masques K95. Tous ces discours sur la vaccination obligatoire de tous les adultes autour de nos enfants, dans une sorte de mur invisible de protection, ne fonctionneront pas. Le variant Delta se retrouvera dans les salles de classe bondées, et l’infection se répandra comme une traînée de poudre.

Les écoles sont des vecteurs de transmission. Elles ne sont pas des îles isolées, à l’écart de la communauté. Des enfants seront infectés, beaucoup seront malades et, malheureusement, des familles de l’Ontario perdront des enfants. La province et les conseils scolaires prennent un risque énorme qui frise la négligence criminelle. Il est tout à fait insensé que nous soyons prêts à jouer avec la vie d’enfants non vaccinés!

Tout le monde veut que ses enfants retournent à l’école. Qui ne veut pas voir les enfants s’épanouir, jouer, apprendre devant un enseignant en chair et en os dans une salle de classe avec leurs camarades? Personne ne peut nier l’importance de la socialisation avec leurs amis. Oui, l’apprentissage à distance était brutal. La santé mentale est sans aucun doute une préoccupation. Les parents veulent revenir à la normale. Combien d’entre nous ont dit qu’ils n’en pouvaient plus? Nous aimons nos enfants, mais nous ne sommes pas faits pour être coincés ensemble à la maison toute la journée, tous les jours. Ça suffit!

Mais comment sera ma santé mentale pour le reste de ma vie si j’envoie mes enfants à l’école pendant la phase la plus dangereuse de la pandémie, et que je les perds? Quel impact cela aura-t-il sur leurs frères et sœurs? Quel effet cela aura-t-il sur leurs grands-parents? Comment ma femme et moi pourrons-nous continuer à vivre? Pour parler franchement, le plan de rentrée des classes n’est pas un plan du tout. Il n’inspire aucune confiance quant à la sécurité de mes deux jeunes enfants à l’école primaire. Ils ne seront pas vaccinés et risqueront d’être infectés par un variant Delta hautement contagieux qui est un virus fondamentalement différent du COVID-19 original.

Alors, quelle est la solution? Honnêtement, je n’en ai aucune idée. Nous essayons d’y réfléchir au fur et à mesure. Les parents ont des options limitées. Combien d’entre nous peuvent se permettre de rester à la maison pour surveiller leurs enfants? Combien d’entre nous ont une famille vers laquelle ils peuvent se tourner pour obtenir du soutien?

Pourtant, au fond de moi, je sais que ma femme et moi ne pouvons pas être les seuls à ressentir cette incertitude et cette anxiété. Nous devons trouver d’autres parents, enseignants et travailleurs inquiets et agir. Nous devons exiger que les écoles restent fermées jusqu’à ce que tous nos enfants soient vaccinés. Pourquoi aucun de nos «dirigeants» ne parle d’éradiquer ce virus une fois pour toutes? Douleur à court terme, gain à long terme. Comment la Chine peut-elle contenir ce virus, alors que nous ne pouvons pas le faire dans nos sociétés occidentales avancées? Est-ce que tout est une question d’argent et de marché boursier? Nos enfants doivent-ils être sacrifiés au nom de l’économie? Dans quel genre de monde vivons-nous!

Tous les principaux commentateurs dans les médias ne cessent de nous dire que nos enfants courent peu de risques – qu’ils doivent être à l’école, que la grande majorité ne souffrira que de symptômes mineurs, que c’est important pour leur santé mentale et que l’Ontario a un plan de réouverture sûr. De l’autre côté, je vois des enfants mourir et tomber malades. Cela ne devrait pas se produire, point final! Enfin, nous avons le médecin-chef de l’Ontario qui dit que nous devons « normaliser» le COVID-19 et que les écoles ne fermeront pas à moins d’une situation catastrophique.

Les enfants qui tombent malades à cause du COVID dans les écoles ne devraient jamais être normalisés. Jamais! Ma femme et moi ne pouvons pas permettre que nos enfants fassent partie d’une expérience cet automne. Vont-ils souffrir sur le plan scolaire? Peut-être. Leur santé mentale en souffrira-t-elle? Peut-être. Mais au moins, nous essayons de faire tout ce qu’il faut pour les garder en vie et en sécurité jusqu’à ce que la quatrième vague soit terminée.

Les parents, les enseignants et les autres travailleurs partageant les mêmes idées doivent s’unir et exiger que tous nos enfants soient vaccinés avant de les renvoyer à l’apprentissage en personne, ce qui est le strict minimum. Nous ne pouvons accepter rien de moins. Sans parler de changer ces fichus filtres à air et de porter des masques en tissu inefficaces! Dans une guerre, on ne laisse jamais personne derrière sur le champ de bataille. Le gouvernement et les commissions scolaires laissent tous les enfants de moins de 12 ans derrière eux dans la guerre contre le COVID. Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre ce que nous avons de plus précieux. Nous devons protéger nos enfants à tout prix. Les enfants sont notre avenir. Nous sommes les seuls à pouvoir protéger notre avenir.

(Article paru en anglais le 22 août 2021)

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