Tandis que le COVID-19 se propage dans les usines Dana

L’entreprise et les syndicats obligent les travailleurs à faire des réserves de pièces

Le variant Delta se répand dans les usines de Dana à travers les États-Unis, mettant en danger la vie des travailleurs et celle de leurs proches, rapportent les travailleurs des pièces automobiles chez Dana. Bien que la convention collective de quelque 3.500 travailleurs du secteur des pièces automobiles ait expiré le 18 août et que les travailleurs aient rejeté à 90 pour cent une proposition d’accord de principe, les syndicats des Métallos unis (USW) et des Travailleurs de l’automobile unis (UAW) ont forcé les travailleurs à continuer à travailler – y compris à effectuer des heures supplémentaires obligatoires – pour aider l’entreprise à faire des réserves de pièces en prévision d’une grève. En conséquence, les usines deviennent des centres de propagation de la pandémie.

Le WSWS a contacté le bureau de la sécurité de Dana ainsi que les porte-parole de l’UAW et de l’USW pour demander des chiffres précis, mais n’a reçu aucune réponse au moment de la mise sous presse. Un certain nombre d’hôpitaux situés à proximité des usines de Dana ont également déclaré qu’ils ne pouvaient pas fournir d’informations sur le nombre d’hospitalisations parmi les travailleurs. L’examen suivant est basé sur les déclarations des responsables syndicaux locaux, des témoignages de travailleurs et les données des services de santé des comtés.

Dry Ridge, Kentucky

L’épidémie la plus grave semble se produire à l’usine de Dana à Dry Ridge. Un ouvrier de Dana a déclaré au World Socialist Web Site: «J’ai le COVID, ce qui fait 63 cas confirmés dans l’usine de Dry Ridge. Je souffre beaucoup». Steven Fletcher, ancien ouvrier de Dana, affirme avoir été licencié de Dana Dry Ridge après avoir manqué des heures de travail en raison du COVID au début de cette année.

Warren, Michigan

Il y a actuellement 9 cas actifs à l’usine de Warren, au Michigan, selon une mise à jour de la société datée du 9 septembre. L’entreprise affirme qu’il y avait 53 cas positifs confirmés en 2020, mais déjà 114 cette année. Au moins un travailleur de l’usine est décédé du COVID en 2021. Il semble que le coronavirus se soit propagé dans l’usine de Warren près de quatre fois plus vite que dans la ville environnante de Warren, une grande banlieue de Detroit. Cette année, la ville a enregistré 7.312 cas au total, soit 5,42 pour cent de la population de Warren, selon le tableau de bord COVID du comté. En revanche, à l’usine Dana, dont l’effectif est estimé à environ 600 personnes, les 114 cas signalés en 2021 représenteraient environ 19 pour cent de l’effectif régulier de l’usine. Il s’agit d’une forte augmentation par rapport à l’année dernière, où les pourcentages pour Warren et l’usine Dana étaient respectivement d’environ 5 et 8,8 pour cent.

Le COVID-19 se propage plus rapidement dans l’usine Dana de Warren, que dans la ville de Warren elle-même.

Chose incroyable, les travailleurs signalent que Dana et l’UAW envoient une équipe de travailleurs de Warren à l’usine de Dry Ridge pour aider à remplir les commandes. L’usine de Columbia, dans le Missouri, enverrait également un groupe de travailleurs à Dry Ridge. Un risque important existe qu’ils soient infectés à Dry Ridge et qu’ils ramènent ensuite le virus à leurs collègues.

Crossville, Tennessee

Il semblerait qu’une épidémie se propage à l’usine de Dana à Crossville, dans le Tennessee. Un avis des Métallos publié le 10 septembre indiquait qu’en raison des infections au COVID, «nous avons dû reporter le vote à la section locale de Crossville». Toutefois, même si le vote a été reporté, le syndicat maintient la production.

Fort Wayne, Indiana

Une personne qui est bien renseignée a déclaré au WSWS que «le COVID se répand» dans l’usine de Fort Wayne. Deux des personnes avec lesquelles cette source travaille sont actuellement malades du COVID. Dans un autre département de l’usine, un travailleur dit que 5 cas positifs confirmés existent. D’autres travailleurs de l’usine signalent qu’ils ont demandé des chiffres exacts, mais que les Métallos et l’entreprise ne leur ont pas répondu. Les travailleurs affirment que l’entreprise les a aspergés de pesticides à Fort Wayne au début de l’année et qu’elle les a forcés à continuer de travailler lorsque des cas positifs ont été signalés.

Paris, Tennessee

Un travailleur de l’usine de Paris rapporte qu’au moins deux travailleurs de son service sont actuellement malades du COVID et que récemment, une équipe entière de travailleurs du service de maintenance a été déclarée positive. Une autre personne qui connait la situation de l’usine de Paris a déclaré au WSWS: «Je ne connais pas le nombre exact de cas actifs. L’entreprise s’efforce de garder les cas aussi discrets que possible. Je sais avec certitude qu’on a eu deux décès, mais je pense qu’on en a eu un troisième. De nombreuses autres personnes ont attrapé le COVID qui s’est transformé en pneumonie, ce qui a rendu le rétablissement encore plus difficile».

Danville, Kentucky

Un travailleur de l’usine de Danville rapporte que cinq travailleurs de son service sont actuellement malades du COVID. Selon un avis de l’entreprise, 8 travailleurs de l’usine, sur un effectif de 300 personnes, sont actuellement en arrêt de travail avec des cas confirmés.

Lima, Ohio

Un travailleur signale qu’il y a eu au moins 5 ou 6 cas récents dans son service et que l’entreprise n’a nettoyé aucun des équipements après que les travailleurs ont été déclarés positifs. Un autre travailleur de Lima, dans l’Ohio, a déclaré: «On ne peut pas savoir [au sujet des cas actifs de COVID], ce n’est pas comme s’ils nettoyaient ou s’en souciaient de toute façon».

Les travailleurs d’autres usines n’ont pas été en mesure de confirmer le nombre total de cas, car, selon eux, l’entreprise et les syndicats ne communiquent pas les chiffres.

Un travailleur de Toledo, dans l’Ohio, a déclaré au WSWS: «Nous avons eu des employés qui ont été déclarés positifs et à qui on a dit de ne pas le dire aux autres, car ils ne peuvent pas se permettre que toute une chaine s’arrête pour un congé COVID. Je connais des gens qui sont partis pendant des jours sur ma chaine, pensant qu’ils étaient en vacances, mais on a appris plus tard qu’ils avaient le COVID. C’est la norme dans notre usine de Dana. Je travaillais tous les jours à côté de ma chef d’équipe qui a été déclarée positive, je ne l’ai su que trois jours après son départ. Je pensais qu’elle était en vacances».

Un travailleur d’Auburn Hills, dans le Michigan, déclare: «Ils ne nous informent plus par SMS comme avant. Notre propre agent de sécurité n’est pas vacciné, c’est donc difficile de le prendre au sérieux».

Les données sur les cas fournies par les organisations gouvernementales locales révèlent que dans chaque comté où se trouve une usine Dana, les cas de COVID sont en nette augmentation.

Les cas ont atteint un pic historique à Dry Ridge, Henderson, Louisville et Danville, dans le Kentucky, ainsi qu’à Paris, Humboldt et Crossville, dans le Tennessee. Les cas augmentent rapidement à Lima et Toledo, dans l’Ohio, à Fort Wayne, dans l’Indiana, à Columbia, dans le Missouri, à Pottstown, en Pennsylvanie, et à Warren, Saint Clair et Auburn Hills, dans le Michigan.

Si des travailleurs tombent malades, il est plus probable que jamais qu’ils ne pourront pas être soignés à l’hôpital. Les hôpitaux de Paris, Crossville et Danville n’ont aucun lit de soins intensifs disponible, selon les reportages publics. À Fort Wayne, dans l’Indiana, les deux seuls hôpitaux dont les données sont publiques sont pleins à 99 et 97 pour cent. À Maumee, dans l’Ohio, il ne reste qu’un seul lit à l’hôpital Saint Luke, situé sur la même sortie d’autoroute que le siège mondial de Dana.

Utilisation des lits des unités de soins intensifs dans un rayon de 50 km autour des usines de Dana (Source: Ministère américain de la Santé et des Services sociaux)

La pénurie de lits est particulièrement aiguë dans le Kentucky et le Tennessee, où se trouvent neuf des 21 usines américaines de Dana et qui connaissent actuellement l’une de leurs pires vagues de la pandémie. Pour sept de ces neuf établissements, l’utilisation des lits de soins intensifs dans un rayon de 50 km autour de l’adresse physique de l’usine est supérieure à la moyenne nationale de 81,82 pour cent, selon le ministère américain de la Santé et des Services sociaux. Pour l’usine de Louisville, selon les derniers chiffres du gouvernement, l’utilisation des unités de soins intensifs est de 110 pour cent. Pour trois usines – Danville (Kentucky), Gordonsville (Tennessee) et Crossville (Tennessee) – moins de 10 lits de soins intensifs sont disponibles dans un rayon de 50 km.

En maintenant ces usines ouvertes, Dana et l’UAW ne mettent pas seulement la vie des travailleurs en danger, mais aussi celle de leurs conjoints, de leurs enfants, de leurs parents âgés et de la communauté dans son ensemble. Le variant Delta est capable de tuer des enfants en bonne santé ou de leur laisser des séquelles à vie, notamment en s’attaquant aux fonctions cérébrales. Si le virus est déjà présent dans les usines de Dana, cela signifie qu’il est susceptible de se propager dans les écoles, les épiceries, les restaurants et partout ailleurs.

En effet, les usines de fabrication, à côté des écoles, sont connues pour être des vecteurs clés de la transmission communautaire. Au début de la pandémie, les principales épidémies dans les comtés ruraux du pays étaient fortement corrélées aux épidémies dans les usines de conditionnement de la viande. Les directions des usines, avec le soutien d’un décret du gouvernement Trump, les avaient maintenues ouvertes malgré les infections massives.

Les efforts déployés pour «atténuer» la propagation de la pandémie – notamment par le port du masque et la vaccination – ne suffisent pas à stopper la propagation. Tant que les usines seront ouvertes, le virus se propagera.

Le variant Delta se propage à l’intérieur, même avec le port du masque, et les cas d’infection chez les personnes vaccinées sont plus fréquents. Les usines sont mal ventilées, sans climatisation adéquate, ce qui signifie que les particules restent dans l’air et se propagent à chaque chaine de production et à chaque partie de l’usine.

La politique du gouvernement américain et des sociétés est de tuer les travailleurs pour le profit. En ce moment, les gouverneurs de tous les États où se trouvent les usines Dana – qu’ils soient démocrates ou républicains – ouvrent les écoles et forcent les enfants des travailleurs ainsi que les enseignants à risquer leur vie pour que les travailleurs puissent aller travailler et se faire exploiter pour le profit.

En conséquence, 660.000 personnes sont mortes aux États-Unis. Chaque jour, deux fois plus de personnes meurent du COVID aux États-Unis (environ 1.000) que les soldats des deux camps ne mouraient en un jour moyen pendant la guerre civile (environ 500). Dans le monde entier, c’est la même chose, et plus de quatre millions de personnes sont mortes. Pendant ce temps, les bénéfices des sociétés et le marché boursier atteignent de nouveaux records, tandis que les milliardaires s’enrichissent en profitant de la pandémie.

Le World Socialist Web Site et le Bulletin des travailleurs de l’automobile appellent à la fermeture immédiate de toutes les usines Dana, avec un salaire de quarantaine complet pour chaque travailleur! Les travailleurs ne doivent pas être contraints de choisir entre l’infection et l’éviction.

Le seul salaire de James Kamsickas, PDG de Dana, en 2020 (10,5 millions de dollars) est suffisant pour fournir à chaque travailleur de Dana 3.000 dollars immédiatement pour couvrir les frais pendant la quarantaine. Ajoutez à cela les 14 millions de dollars de dividendes trimestriels versés par Dana – qu’elle a repris en mars après les avoir suspendus en 2020 en raison de la pandémie – ainsi que ses 7,3 milliards de dollars d’actifs totaux, et il y a plus qu’assez d’argent pour payer les travailleurs à temps plein pendant les semaines nécessaires pour stopper la propagation.

(Article paru en anglais le 13 septembre 2021)

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