La lutte des enseignants de Chicago fait partie d’une opposition de classe montante à la politique mortelle sur la pandémie

La résistance de la classe ouvrière aux États-Unis et dans le monde entier s’intensifie contre la politique de la classe dirigeante qui permet à des millions de travailleurs et de jeunes d’être infectés par le COVID-19 dans leurs écoles, leurs lieux de travail et leurs communautés.

Des enseignants du quartier de Pilsen à Chicago marchent contre la réouverture dangereuse des écoles publiques l’année dernière (Twitter/@rcoppo1)

Jusqu’à présent, l’opposition s’est concentrée dans les écoles où les éducateurs se battent pour mettre fin à l’apprentissage en personne dans des bâtiments surpeuplés et mal ventilés, qui ont toujours été la source des plus grandes éclosions de COVID-19.

À Chicago, les enseignants de la troisième plus grande commission scolaire du pays défient les exigences du maire du parti démocrate, Lori Lightfoot, qui leur demande de retourner en classe dans des conditions où près d’un habitant de la ville sur quatre est testé positif au COVID-19, les enfants de 17 ans et moins souffrant des taux les plus élevés. Lightfoot, qui a menacé les enseignants de leur infliger une amende pour «grève illégale», a annulé les cours pour 330.000 élèves pour la troisième journée consécutive après que les enseignants ont voté à 73 pour cent mardi soir en faveur d’un enseignement exclusivement virtuel.

À San Francisco, en Californie, les enseignants ont mené des grèves sauvages jeudi pour exiger la suspension des cours en présentiel, ainsi que des congés payés COVID-19 et des masques N95, après qu’au moins 600 enseignants se sont déclarés malades mardi. Dans un geste désespéré, qui ne bénéficie d’aucun soutien, les responsables de l’école ont exhorté les parents à se faire embaucher comme «enseignants» suppléants.

De l’autre côté de la baie, à Oakland, les enseignants prévoyaient de débrayer hier après que 1.000 employés et élèves de l’école ont été déclarés positifs. Les responsables du district ont dénoncé les enseignants pour avoir mené un «arrêt maladie illégal» que l’Association de l’éducation d’Oakland ne cautionne pas.

À Boston, les autorités scolaires s’efforcent de garder les bâtiments ouverts après que 1.100 employés des écoles publiques se sont déclarés malades cette semaine, dans ce qui est probablement une combinaison de maladie de masse et de décision délibérée des éducateurs de ne pas travailler. Il en va de même à San Antonio, au Texas, où 1.000 membres du personnel ne sont pas revenus des vacances d’hiver, et à Hawaï, où 800 éducateurs sont en arrêt maladie. À Philadelphie, 92 écoles sont passées à l’apprentissage virtuel après que plus de 1.100 enseignants et près de 2.000 membres de leur famille ont signalé des cas positifs depuis le 23 décembre.

Les infections massives, le manque d’enseignants et le mécontentement général ont contraint plusieurs autres districts à passer temporairement à l’enseignement virtuel, notamment, à Atlanta, Newark, Milwaukee, Cleveland, Detroit et de l’autre côté de la frontière, en Ontario, au Canada.

Un professeur d’histoire dans un lycée de New Haven, dans le Connecticut, a tweeté: «Mon district scolaire contacte les enseignants qui ont le COVID, pas pour voir comment ils se sentent, ou même pas pour les tracer. Ils les appellent pour leur dire que leur quarantaine de 5 jours est terminée et qu’ils doivent retourner au travail. Les gens qui sont malades et symptomatiques reçoivent ces appels»!

Dans la ville de New York, le plus grand district scolaire du pays, les parents sont engagés dans un boycott de facto des écoles pour protéger leurs enfants: au moins un tiers des élèves ne se sont pas présentés en classe. Parents et éducateurs sont furieux du mensonge selon lequel «les écoles sont l’endroit le plus sûr pour les enfants», que le nouveau maire de la ville, le démocrate Eric Adams, a répété en boucle.

Dans une interview accordée à CNN, le maire Adams a été plus honnête, déclarant que «nous devons ouvrir pour alimenter notre écosystème financier». En d’autres termes, la réouverture des écoles à l’apprentissage en personne est nécessaire pour maintenir les travailleurs au travail et produire des profits, ce qui est nécessaire pour maintenir l’énorme bulle financière de Wall Street.

Résumant les sentiments des éducateurs, James, un enseignant de Virginie, a déclaré au WSWS: «Des millions de vies de travailleurs ont été sacrifiées pour préserver un statu quo mondial qui ne sert pas la classe ouvrière, y compris les enseignants, les étudiants et leurs familles. Nous devons exiger la fermeture de nos écoles maintenant. Nous sommes prêts à enseigner en ligne, et nous avons prouvé notre efficacité à le faire. Il faut abandonner le “business as usual” jusqu’à ce que la pandémie soit terminée, et que le COVID-19 devienne inoffensif en tant que maladie mortelle».

À l’Université du Michigan, à Ann Arbor, plus de 1.520 professeurs, étudiants et membres du personnel ont signé une lettre qui demande un report de deux semaines de la reprise des cours en présentiel, car la réouverture après les réunions de famille pendant les vacances «est une recette pour une épidémie majeure de COVID dans la première ou les deux premières semaines de cours». Mardi, les chargés de cours parmi les étudiants à la maîtrise et au doctorat – qui ont fait grève pendant neuf jours en septembre 2020 pour exiger des protections COVID-19 – ont voté à 95 pour cent pour demander un pivot vers l’apprentissage virtuel.

À Buffalo, dans l’État de New York, les travailleurs de Starbuck ont débrayé mercredi et jeudi pour s’opposer à des conditions de travail dangereuses après que plus de 15.000 résidents du comté d’Erie ont été déclarés positifs au cours de la semaine écoulée, un record depuis le début de la pandémie. Les travailleurs, qui ont récemment voté pour se syndiquer, demandent la fermeture temporaire du magasin après qu’environ un tiers des effectifs a été infecté.

Des milliers de vols ont été annulés pendant les vacances en raison de la maladie généralisée et du refus des équipages épuisés et infectés de travailler, même si on leur a proposé un salaire triple.

Alors qu'un hôpital américain sur cinq est déjà à 95% de sa capacité, les travailleurs de la santé, qui luttaient contre un manque chronique de personnel avant la pandémie, sont invités à reprendre le travail sans aucune mise en quarantaine, après un changement de directive des Centers for Disease Control and PreventionCentres de contrôle et de prévention des maladies (CDC).

La propagation des infections dans les usines de conditionnement de la viande est tout aussi grave, voire pire, que la première année, lorsque les travailleurs de ces usines ont lancé des grèves sauvages dans l'’Iowa, le Dakota du Sud, le Colorado et d'’autres États.

Dans les usines automobiles, le COVID-19 se répand de manière incontrôlée, et le sentiment d'grandit en faveur d’uun mouvement collectif contre le danger d'’infection et les heures supplémentaires incessantes imposées aux travailleurs,, notamment eauxeles employés temporaires à temps partiel (TPT), pour remplacer leurs collègues malades. En mars 2020, une vague de grèves sauvages dans les usines automobiles du Michigan, de l'’Indiana et de l'’Ohio a conduit à la fermeture de l'’industrie automobile nord-américaine.

Un ouvrier chevronné de l'’usine d'’assemblage de camions Stellantis (Chrysler) Warren Truck Assembly Plant (WTAP), dans la banlieue de Détroit, a déclaré au WSWS : '«Le COVID s'’aggrave dans les usines. Ce n'’est qu'’une question de temps avant que les travailleurs ne débrayent, surtout avec la façon dont ils nous imposent de plus en plus d'’heures. L'’année dernière, outre le COVID, il y a eu la pénurie de puces électroniques. IlCelasemble qu'’ils aient les puces maintenant, et ils disent : '“Au diable la sécurité, nous allons faire sortir autant de camions que possible'”».

'«Après les vacances, nous étions censés faire trois quarts de huit heures. Maintenant, ils obligent les TPT à travailler 12  heures. Je n'’ai jamais vu une équipe de 12  heures en plus de 20  ans chez Chrysler. La moitié d'’une équipe reste sur la ligne alors qu'’une autre équipe arrive, et tout le monde est empilé les uns sur les autres. Ils font cela en plein milieu d'’une pandémie mortelle, et l'e syndicat UAW collabore avec la direction et ferme les yeux sur tout cela'».

Les TPT, qui sont obligés de payer des cotisations syndicales mais n'’ont pratiquement aucun droit, ont commencé à faire circuler une pétition contre les quarts de 12  heures et exigent d’ être traités avec '«décence et respect'». On peut y lire ceci : '«NOUS SOMMES DES ÊTRES HUMAINS, PAS DES MACHINES !'»

'«Les travailleurs veulent fermer à nouveau'», a déclaré un jeune travailleur de la WTAP. '«Il y a Beaucoup de travailleurs ese trouvent en arrêt maladie, et l'’entreprise vient de mandater les TPT pour travailler 12  heures par jour. Beaucoup de ces travailleurs sont de jeunes parents et n'’ont pas de baby-sitter pour leurs enfants qui rentrent de l'’école. Nous ne pouvons pas travailler avec un tel virus. Mais cette fois, il n'y aon n’a aucuneniaide, aucunnichômage supplémentaire, aucunnistimulus. C'’est comme si on allait mourir de maladie ou de pauvreté.'»

Suite à la décision du CDC de réduire la durée de la quarantaine de 10 à 5 jours -(une mesure prise après le lobbying de l'’industrie aérienne),- Walmart, le plus grand employeur privé des États-Unis, avec 1,6  million de travailleurs, a réduit les congés payés des travailleurs infectés ou en contact direct de deux semaines à une semaine, une mesure qui sera certainement suivie par d'’autres grands employeurs.

Au sein des entreprises et de l'’establishment politique, il existe il existe un front uni contre la résistance croissante de la classe ouvrière à la politique criminelle de l'’'«immunité collective'».

Le gouvernement Biden, qui a déjà laissé expirer le crédit d'’impôt pour enfants, privant ainsi 30  millions de familles d'’une bouée de sauvetage de 300  dollars par enfant et par mois, utilise la menace de la misère pour repousser la résistance de la classe ouvrière.

AÀla question de savoir s'’il y aurait d'’autres mesures d'’aide pour les travailleurs touchés par le COVID-19, un '«haut responsable du gouvernement Biden'»a répondu à CNN : '«Non. Il y aura peut-être un petit quelque chose pour les restaurants. Mais l'’économie est en plein essor, il y a des millions d'’emplois ouverts, et nous ne pensons pas que les gens devraient rester assis à la maison s'’ils sontsont vaccinés et ont reçu une dose de rappel, comme le sont la plupart des adultes'». Le responsable a ajouté : '«Nous n'’allons donc pas faire de chèques pour inciter les gens à rester assis à la maison...…'»

La réponse à la lutte des enseignants de Chicago n'’a pas été moins brutale. La maire de Chicago, Lori Lightfoot -– l'’incarnation de la politique identitaire du parti démocrate -– menace d'’infliger une amende aux enseignants pour avoir protégé leurs vies et celles de leurs élèves.

De son côté, Trump a répondu à l'’action courageuse des enseignants de Chicago en appelant au définancement des '«écoles publiques défaillantes.'». Le gouverneur républicain de l'’Arizona, Doug Ducey, vient d'’annoncer qu'’il verserait aux parents des bons d'’achat d'’une valeur de 7 000 .000 dollars pour qu'’ils retirent leurs enfants des écoles publiques, même si celles-ci ne fermaient que pour une journée.

La lutte pour une réponse rationnelle et scientifiquement guidée à la pandémie est une question de classe. Pour imposer la fermeture des écoles et des entreprises non essentielles,, garantir des revenus aux travailleurs et aux petites entreprises touchés par les fermetures temporaires et assurer une campagne massive de santé publique faite de tests universels,, de recherche des contacts, de mise en quarantaine et de vaccinations mondiales, êtreises que paril faut un mouvement de masse de la classe ouvrière, guidé par le principe que la vie humaine doit primer sur le profit des entreprises.

L'’expérience des deux dernières années pousse les travailleurs à tirer ces conclusions.' «J'’avais espéré qu'’il y aurait un changement dans la façon dont Biden gérerait la pandémie'», a déclaré un ouvrier vétéran de Chrysler à Détroit. '«Mais il a la même politique que Trump. Le gouvernement laisse tout ouvert, même si les cas dans les hôpitaux et les écoles sont en augmentation. Le CDC dit tout ce que les grandes entreprises lui disent de dire.».

'«Les républicains et les démocrates sont les deux faces d'’une même médaille. Ils sont tous deux pour les institutions financières, les banques et les grandes entreprises. Ils utilisent la question de race pour que nous continuions à nous battre les uns contre les autres. Mais ce n'’est pas la race, c'’est les élites contre la classe ouvrière. C'’est pourquoi ils veulent nous garder divisés. Ceux qui contrôlent ne se soucient pas du sexe ou de la race, ils se soucient de l'’économie. Les 1% pour cent, les Bezos, ils veulent que nous continuions à nous battre les uns contre les autres aux États-Unis et dans le monde. Ce que font les enseignants de Chicago est juste, et nous devrions tous nous joindre à eux».'

Le 'World Socialist Web Site' appelle les enseignants, les travailleurs de l'’automobile, les travailleurs des services, les travailleurs de la santé et l'’ensemble de la classe ouvrière à former des comités de sécurité de base pour préparer et lancer des actions vqui visaent à fermer les écoles et la production non essentielle, dans le cadre d'’une politique vqui visanteà éliminer le virus qui cause le COVID-19 et à mettre fin à la pandémie une fois pour toutes.

(Article paru en anglais le 7 janvier 2022)

Loading