Modi rejette le confinement, même si un tsunami de COVID-19 dévaste l’Inde

Bien qu’une vague massive de COVID-19 frappe la population indienne et menace de provoquer une crise humanitaire dévastatrice, le Bharatiya Janata Party (BJP) du premier ministre Narendra Modi a clairement indiqué qu’il n’y aurait pas de confinement national pour enrayer la pandémie de coronavirus.

Le 9 janvier, deuxième jour où l’Inde a enregistré plus de 100.000 cas quotidiens depuis juin dernier, Modi a présidé une réunion de «haut niveau» pour «évaluer la situation de la pandémie de COVID-19 dans le pays», selon le site officiel du premier ministre. Le but de la réunion était d’assurer à l’oligarchie financière qu’il n’y aura pas de confinement, ce qui affecterait leurs profits. Les remarques de Modi lors de la réunion ne visaient pas à élaborer une stratégie pour endiguer la pandémie, mais à endormir la population alors que des centaines de milliers de personnes sont infectées chaque jour.

Des personnes se rassemblent pour écouter le premier ministre indien Narendra Modi alors qu’il pose la première pierre de l’Université sportive Major Dhyan Chand à Meerut, dans l’État d’Uttar Pradesh, le 2 janvier 2022 (AP Photo/Rajesh Kumar Singh)

Modi a participé à la réunion avec le ministre de l’Intérieur Amid Shah, le Dr Mansukh Mandaviya, ministre de la Santé et de la Famille, et le Dr V.K. Paul du groupe de réflexion NITI Aayog. Modi a «souligné la nécessité d’assurer une infrastructure sanitaire adéquate au niveau du district»; «l’utilisation de masques et de mesures de distanciation physique»; «la mise en œuvre de l’isolement à domicile pour les cas légers/asymptomatiques et la diffusion d’informations factuelles à l’ensemble de la communauté»; «le confinement intensif et la surveillance active doivent se poursuivre dans les groupes signalant des cas plus nombreux», etc.

Tous ces responsables sont cependant bien conscients que de telles mesures ne peuvent actuellement être mises en œuvre efficacement contre un virus aérien hautement contagieux comme le variant Omicron de la COVID-19. Si les entreprises et les industries non essentielles continuent de fonctionner – obligeant les travailleurs à se rendre sur leur lieu de travail, à envoyer leurs enfants à l’école et à utiliser les transports publics surchargés – le virus se propagera massivement. Cependant, ils refusent d’ordonner un confinement, la suspension de la production non essentielle et des investissements pour permettre l’enseignement à distance pour les jeunes.

Les politiques du gouvernement Modi concernant la pandémie sont manifestement fondées sur la priorité donnée aux intérêts des grandes entreprises sur les vies humaines.

Il y a quelques semaines, le 23 décembre, Modi et les mêmes fonctionnaires ont tenu une autre  «réunion de haut niveau», censée «examiner la situation de COVID-19 et d’Omicron» et discuter des mesures de santé publique. Ce jour-là, le nombre de cas quotidiens de COVID-19 était de 7495 et la moyenne sur sept jours était de 6768. Lorsque Modi a tenu la deuxième réunion, le 9 janvier, le nombre de cas quotidiens était de 159.632 (plus de 21 fois supérieur) et la moyenne des cas sur sept jours était de 91.268. Telle était l’efficacité des réunions de «haut niveau» de Modi sur la pandémie!

En permettant à la COVID-19 d’infecter une population non protégée, l’ensemble de l’élite dirigeante indienne, politiquement criminelle, a déjà sacrifié des masses de vies. Les statisticiens estiment que le nombre de morts se situe entre 3 et 5 millions de personnes en Inde, bien que le bilan officiel ne fasse état que de 483.000 morts. C’est le résultat tragique de la politique meurtrière d’immunité collective du gouvernement Modi. Tout en coûtant des millions de vies et en causant des souffrances indicibles dues à la Covid longue, cette politique a également jeté des centaines de millions de personnes dans la pauvreté, la faim, le chômage et la misère sociale.

Permettant aux élites patronales d’intensifier la surexploitation de millions de travailleurs indiens dans des usines et des bureaux non protégés, le gouvernement indien abandonne de plus en plus même les restrictions limitées adoptées après la vague pandémique de mai 2021. À cette époque, l’Inde a connu un bilan choquant, enregistrant 400.000 cas de COVID-19 et plus de 4.000 décès par jour.

Comme d’autres gouvernements capitalistes dans le monde, il promeut maintenant le mantra «vaccin seulement» pour justifier sa politique brutale d’immunité collective, bien que les vaccins ne parviennent manifestement pas à enrayer une augmentation catastrophique des infections et des décès. Le gouvernement Modi a également repris à son compte les affirmations des gouvernements américain, britannique et européen selon lesquelles le variant Omicron serait «plus bénin», une affirmation rejetée par l’Organisation mondiale de la santé. Ce faux récit a volé en éclats ce mois-ci, lorsque l’Inde a signalé ses deux premiers décès liés à Omicron, dont l’un était doublement vacciné.

Malgré les avertissements sans équivoque émis par un certain nombre d’experts médicaux et d’épidémiologistes, Modi et les ministres du BJP ont organisé des rassemblements électoraux massifs en vue des élections législatives dans cinq États, dont l’Uttar Pradesh (UP), l’État le plus peuplé de l’Inde qui compte plus de 200 millions d’habitants.

Modi et la Commission électorale de l’Inde (ECI) ont ignoré de manière criminelle une décision de la Haute Cour d’Allahabad, le 23 décembre, reportant les élections de l’assemblée de l’UP (désormais prévues à partir du 10 février) et invoquant la menace de la vague Omicron. La cour a également demandé à l’ECI d’interdire les rassemblements électoraux de type «super-propagation» impliquant des masses de personnes. Mais l’ECI a attendu près de deux semaines, jusqu’au 8 janvier, pour finalement interdire les rassemblements électoraux physiques jusqu’au 15 janvier.

En raison de ces politiques imprudentes, l’Inde a signalé le 10 janvier 179.339 nouvelles infections. Le nombre total de patients actifs confirmés en Inde est désormais supérieur à 700.000. Les médias indiens ont montré que la forte hausse enregistrée au cours de la semaine écoulée était principalement due à l’augmentation du nombre de cas dans les centres urbains : Mumbai, Delhi, Kolkata, Bengaluru et Chennai. Du 4 au 8 janvier, ces cinq villes ont enregistré entre 150 et 450% d’augmentation des infections par rapport à la semaine précédente. Le taux de positivité des tests en Inde a maintenant franchi la barre des 10%, ce qui suggère qu’un grand nombre de cas ne sont pas détectés.

Comme on pouvait s’y attendre, l’augmentation du nombre de cas entraîne une hausse des hospitalisations. Le 10 janvier, le ministère de la Santé a admis que l’Inde connaît un taux d’hospitalisation de 5 à 10% des cas, ajoutant que la situation est «dynamique et évolutive et que le besoin d’hospitalisation peut changer rapidement.» Il a également prévenu que pour 100 cas de Delta, il pourrait y avoir 400 à 500 cas d’Omicron, admettant finalement que cette poussée est «alimentée par le variant préoccupant (VOC) Omicron». Elle a également reconnu «la présence continue d’un autre VOC Delta dans de vastes zones géographiques du pays».

Au Kerala, «le taux d’occupation des unités de soins intensifs pour les patients atteints de la COVID-19 dans les hôpitaux publics et privés a légèrement augmenté et s’élève à 435 cas, tandis que le nombre de patients nécessitant une assistance respiratoire a légèrement augmenté pour atteindre 157 cas dimanche», a rapporté The Hindu le 10 janvier.

À Bengaluru, les hospitalisations liées à la COVID-19 représentent en moyenne 80% de toutes les nouvelles admissions, selon le Deccan Herald. Il cite des professionnels de la santé qui affirment que des «admissions de panique» ont lieu, entraînant une augmentation de l’occupation des lits des unités de soins intensifs et des unités de soins intensifs dotées de respirateurs. «Sur 168 admissions dans les hôpitaux publics au cours des sept derniers jours, par exemple, 22 concernaient des lits d’USI et 9 des lits d’USI-respirateur», écrit le journal.

Au Pendjab, où se déroulent les élections, 226 patients ont été mis sous oxygène le 8 janvier, contre 62 la veille, soit un bond de 264% en 24 heures. Le taux de positivité des tests de l’État a atteint 14,64% samedi, contre 2,02% il y a une semaine.

L’explosion de COVID-19 exerce une pression immense sur les travailleurs médicaux et les médecins, contraints de travailler pour sauver des vies dans des conditions extrêmement dangereuses, sans équipement de protection adéquat, depuis deux ans. Au Tamil Nadu, 200 médecins et membres du personnel ont été testés positifs à l’infection à l’hôpital CMC de Vellore le 9 janvier.

Dans le Maharashtra, le même jour, plus de 300 médecins résidents ont été testés positifs à la COVID-19, ce qui fait craindre une pénurie de personnel médical qui empêchera les hôpitaux de traiter correctement les patients cardiaques et autres cas urgents, qui sont de plus en plus abandonnés à leur sort.

Bien que l’augmentation du nombre de cas ait contraint un certain nombre d’États à imposer des mesures de restriction limitées, comme la fermeture des écoles et l’instauration d’un couvre-feu nocturne, aucun État n’est prêt à imposer un confinement strict pour enrayer la pandémie. De plus, certains chefs d’État, comme Modi, déclarent ouvertement qu’ils s’opposent à des mesures d’atténuation strictes contre la pandémie.

Le 9 janvier, le ministre en chef de Delhi, Arvind Kejriwal, également chef du parti Aam Aadmi au pouvoir dans l’État de Delhi, a déclaré: «Nous ne voulons pas imposer de confinement, nous ne le ferons pas si les gens portent le masque. Nous ne prévoyons pas imposer de confinement pour l’instant.»

(Article paru en anglais le 11 janvier 2022)

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