Quatre-vingt-un ans après la guerre d’anéantissement: Le chancelier allemand Scholz profère de nouvelles menaces de guerre contre la Russie

Il y a quatre-vingt-un ans, le 22 juin 1941, la Wehrmacht allemande a envahi l’Union soviétique. Près de 30 millions de citoyens soviétiques ont été tués au cours de la guerre. Ce furent les pires crimes de l’histoire de l’humanité, dont le point culminant fut l’extermination industrielle des Juifs d’Europe. Les nazis avaient planifié la guerre d’anéantissement de longue date et poursuivaient des objectifs politiques précis.

Le chancelier allemand Olaf Scholz, au centre, arrive pour une visite du Commandement des opérations conjointes des forces armées allemandes, à la Bundeswehr, à Schwielowsee près de Berlin, en Allemagne, le vendredi 4 mars 2022 (AP Photo/Michael Sohn) [AP Photo/Michael Sohn]

La classe dirigeante allemande avait en tête «l’espace vital à l’Est», les vastes matières premières de l’Union soviétique et la domination du monde. En même temps, elle menait une guerre d’idéologie raciste qui visait à l’anéantissement du bolchevisme et du peuple juif.

Ces crimes sont presque indescriptibles. Des millions de personnes ont été tuées de manière industrielle dans les chambres à gaz des camps d’extermination. La guerre du régime nazi consistait en une interminable orgie d’extermination. Des villes et des villages entiers ont été rasés et leurs habitants assassinés. L’un des pires massacres a eu lieu les 29 et 30 septembre 1941 en Ukraine. En deux jours, un commando spécial a abattu 33.771 Juifs – hommes, femmes et enfants – dans le ravin de Babi Yar, près de Kiev.

Dans sa déclaration gouvernementale du 22 juin, le chancelier allemand social-démocrate Olaf Scholz n’a pas du tout mentionné l’anniversaire et les crimes allemands. La raison en est aussi simple que menaçante. Soixante-dix-sept ans après la chute du Troisième Reich, la classe dirigeante suit à nouveau une voie qui – hormis l’antisémitisme agressif des nazis – s’inscrit dans la tradition de la vieille politique impérialiste de grande puissance et de guerre de la bourgeoisie allemande.

La veille du discours de Scholz, le codirigeant du SPD, Lars Klingbeil, l’a déclaré ouvertement dans un discours d’ouverture de politique extérieure. L’Allemagne est, «après presque 80 ans de retenue», à nouveau «au centre» et doit «avoir l’ambition d’être une puissance de premier plan», a-t-il déclaré au nom de l’ensemble de la classe dirigeante. Cela signifie aussi faire la guerre. La «violence militaire» est «un moyen légitime de la politique», a-t-il déclaré.

Dans son discours, Scholz a clairement expliqué ce que cela signifie. Il a commencé par saluer le «Fonds spécial de l’armée allemande (Bundeswehr)», que «cette Assemblée» a adopté «à une majorité écrasante» au début du mois. Ce fonds, d’un montant de 100 milliards d’euros, s’inscrit dans le cadre de la plus grande offensive de réarmement allemande depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

«Nous allons équiper la Bundeswehr de manière à ce qu’elle puisse défendre efficacement notre pays et nos partenaires de l’alliance contre toutes les attaques», a expliqué Scholz. «C’est le standard de la nouvelle Bundeswehr. Grâce à cela, nous offrons enfin à nos soldats le soutien qu’ils méritent pour leur important service pour notre pays.» Pour cela, il a dit «– en espérant que ce soit au nom de nous tous ici – merci».

Comme lors de la Première et de la Seconde Guerre mondiale, sous couvert de «légitime défense» – et aujourd’hui de la prétendue lutte pour les «droits de l’homme» et la «démocratie» – l’impérialisme allemand avance vers l’est et masse des troupes contre la Russie.

«Ne vous arrêtez pas aux mots», a expliqué Scholz. «Immédiatement après le début de la guerre» – le chancelier veut parler de l’invasion réactionnaire de l’Ukraine par Poutine provoquée par l’offensive de l’OTAN contre la Russie depuis des décennies – l’Allemagne «a transféré des soldats et des capacités militaires supplémentaires, par exemple pour la défense aérienne, dans la zone orientale de l’alliance».

Avec le président lituanien Gitanas Nauseda, Scholz «a convenu que nous allions renforcer durablement la présence allemande sur place et attribuer à la Lituanie une brigade robuste de la Bundeswehr». En outre, «la présence des forces aériennes et navales dans la région de la mer Baltique sera élargie», a-t-il déclaré, «des soldats seront envoyés en Slovaquie et la Slovaquie sera soutenue pour sécuriser son espace aérien».

Le discours de Scholz était caractérisé par l’aspiration au statut de grande puissance et l’enthousiasme guerrier de la première moitié du 20e siècle. «Dans la plus grande crise de sécurité que l’Europe ait connue depuis des décennies», s’est-il vanté, «l’Allemagne, le pays le plus puissant économiquement et le plus peuplé de l’Union européenne, a une responsabilité très particulière, non seulement pour sa propre sécurité, mais aussi pour celle de ses alliés.» Lors de sa visite dans les pays baltes il y a deux semaines, il n’a laissé aucun doute: «Une attaque contre vous serait une attaque contre nous tous.» Nous allons «défendre chaque mètre carré de la zone de l’alliance», a ajouté Scholz.

Scholz a choisi de ne pas entrer dans les détails de la signification de cette déclaration. Si la guerre en Ukraine devait s’étendre à un pays de l’OTAN d’Europe de l’Est – ce qu’elle risque de plus en plus de faire avec le blocus de l’enclave russe de Kaliningrad par la Lituanie – le chancelier engage l’Allemagne à entrer à nouveau en guerre contre la Russie. La conséquence serait une troisième guerre mondiale menée avec des armes nucléaires, qui pourrait tuer des centaines de millions de personnes et détruire la planète entière.

Scholz a affirmé que l’Allemagne continuerait à soutenir l’Ukraine «sans que l’OTAN devienne elle-même une partie dans la guerre». C’est une tromperie pure et simple. L’ensemble du discours du chancelier a clairement montré que la classe dirigeante est déjà dans un conflit militaire avec la Russie et qu’il est en constante escalade – avec toutes les conséquences qui en découlent.

Le chancelier a ensuite fièrement documenté les livraisons d’armes allemandes à Kiev, qui prennent de plus en plus la forme d’une intervention militaire directe.

«La formation des soldats ukrainiens sur les chars de DCA Cheetah est en cours. Elle commencera dans les prochains jours avec les lance-roquettes multiples promis. L’Ukraine et notre industrie ont signé l’accord sur le système de défense aérienne IRIS-T, qui protège une ville entière des frappes aériennes hostiles, il y a quelques jours. Un premier échange circulaire (d’armes) avec la République tchèque est terminé. Nous sommes très désireux d’avoir des discussions avec d’autres partenaires d’échange».

En outre, il a révélé: «Les obusiers automoteurs, sur lesquels nous avons formé intensivement les soldats ukrainiens ces dernières semaines, sont maintenant sur le terrain en Ukraine.» L’Ukraine allait recevoir «les armes dont elle a particulièrement besoin à ce stade de la guerre». Scholz s’est entretenu avec «le président ukrainien» précisément sur cette question. L’Allemagne les livrera «aujourd’hui et à l’avenir» – «aussi longtemps que l’Ukraine aura besoin de notre soutien».

L’objectif déclaré est la défaite militaire de la Russie. «Nous sommes loin, très loin des négociations entre l’Ukraine et la Russie, car Poutine croit encore à la possibilité d’une paix dictée», a expliqué Scholz. «C’est d’autant plus crucial» que «nous gardions le cap avec fermeté, avec nos sanctions, avec les livraisons d’armes coordonnées au niveau international et avec notre soutien financier à l’Ukraine». Pour cela, on doit faire preuve de «beaucoup d’endurance».

En fait, les «buts de guerre» allemands vont au-delà de l’Ukraine et de la Russie. Scholz n’a laissé aucun doute sur le fait que la classe dirigeante considère le sommet de l’UE en cours à Bruxelles, le sommet du G-7 à Elmau, dans le sud de la Bavière, qui commence au début de la semaine prochaine, et le sommet de l’OTAN qui suivra à Madrid comme nouvelle occasion d’accroître l’influence de l’Allemagne en Europe et à l’échelle internationale et de faire avancer ses propres intérêts impérialistes.

L’Allemagne a «fixé le cap», a investi «massivement dans notre sécurité» et ainsi résolu «la promesse de la responsabilité allemande en matière de sécurité pour l’Europe», a expliqué Scholz, ajoutant de manière menaçante: «Lors des sommets internationaux des prochains jours, nous commencerons des changements profonds similaires. L’Union européenne doit s’engager pour l’avenir européen de son voisinage et pour les réformes internes nécessaires».

Les travailleurs et les jeunes de tout le continent doivent y voir un avertissement. La classe dirigeante a l’intention de poursuivre son offensive guerrière avec une brutalité implacable et de faire supporter à la classe ouvrière les coûts gigantesques du réarmement: à travers des réductions des dépenses sociales, des attaques contre l’emploi et les salaires, des augmentations de prix massives et l’alimentation de l’inflation. Le jour du discours de Scholz, le ministre des Finances du Parti libéral démocrate, Christian Lindner, a informé la population – dans le style de l’ancienne devise nazie «des fusils au lieu du beurre» – de s’attendre à «trois à quatre, peut-être cinq ans de pénurie».

Le débat au Parlement allemand (Bundestag) a clairement montré que tous les partis du Bundestag soutiennent cette orientation essentiellement fasciste. Lorsqu’il y a eu des «critiques» à l’encontre de Scholz et de la coalition des feux de signalisation, elles sont venues de la droite. Le «chef de l’opposition» et président du groupe de l’Union chrétienne-démocrate/Union chrétienne sociale, Friedrich Merz, a «expressément» salué la livraison d’armes lourdes à l’Ukraine, mais aurait souhaité qu’elle ait lieu «plus tôt».

Le chef du Parti de gauche, Dietmar Bartsch, s’est également plaint de «sanctions mal appliquées» et a signalé son soutien à la nouvelle politique allemande de grande puissance. «Je suis d’accord avec la responsabilité, je suis très d’accord. L’Allemagne devrait prendre ses responsabilités, et volontiers davantage», a-t-il déclaré sous les applaudissements de son groupe parlementaire.

Le Parti de l’égalité socialiste (PES) est le seul parti qui s’oppose à la politique de grande puissance et qui donne une voix et une perspective à l’opposition massive au militarisme et à la guerre. Les travailleurs et les jeunes doivent répondre à la «nouvelle ère» de la politique étrangère en construisant un mouvement antiguerre de la classe ouvrière internationale dont le but sera d’éliminer la cause du militarisme et de la guerre — le système de profit capitaliste — et de construire une société socialiste mondiale. C’est la seule façon d’éviter une rechute dans la barbarie.

(Article paru en anglais le 25 juin 2022)

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