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Les États-Unis et la Grande-Bretagne isolés sur la question des frappes aériennes sur Bagdad

par Chris Marsden
20 février 2001

Les frappes aériennes sur Bagdad, vendredi dernier le 16 février, par les États-Unis et la Grande-Bretagne ont été en général décriées par les gouvernements à travers le monde.

Bien qu'ils aient cherché à faire accepter le raid aérien comme une manifestation de force nécessaire pour imposer les sanctions prises contre l'Irak suite à la guerre du Golfe de 1991, les deux pays belligérants n'ont réussi à récolter avec leur attaque unilatérale que le mécontentement international, leur attaque étant perçue comme une politique ratée et contre-productive.

Au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies, ce geste fut l'objet de critique par tous les membres permanents à l'exception des États-Unis et de la Grande-Bretagne eux-mêmes. La Russie a dénoncé «le geste sans provocation» qui «va l'encontre de la Charte de l'ONU et des autres standards légaux internationaux et vient jeter de l'huile sur le feu au Moyen-Orient où la situation est déjà explosive ».

Dmitry Rogozin, le président du comité des affaires extérieures de la chambre basse du parlement russe a explicitement avertit les puissances européennes du danger que posaient les politiques militaires agressives de l'administration Bush et ses plans pour développer un système national de défense anti-missiles. «L'Europe devrait réfléchir avec soin sur ce qu'un puissant pays d'outre-mer pourra faire s'il croyait qu'il était invulnérable, a-t-il dit. Qui sera alors la victime des bombardements américains, et pour quelles raisons? »

Un représentant de la Chine aux Nations Unies a dit qu'elle s'opposait «à toute intervention armée d'un État membre de l'ONU contre une autre nation, peu importe les circonstances, sans le consentement exprès du Conseil de sécurité. »

Le ministre des Affaires extérieures français a dit : «Nous avons souvent fait connaître notre incompréhension et notre inconfort dans lequel nous jetait les frappes aériennes menées par les États-Unis et la Grande-Bretagne. » D'autres pays, y compris l'Allemagne et l'Espagne ont aussi exprimé leur inquiétude.

La Russie et la France, plus particulièrement, se sont heurtés de plein front aux États-Unis et à la Grande-Bretagne sur la question de l'Irak. L'opposition de ces pays à ce que continuent les sanctions de l'ONU a beaucoup plus à voir avec leurs propres intérêts économiques et stratégiques dans la région du Golfe qu'avec une opposition de principes aux interventions et au militarisme de l'Ouest. La France ainsi que la Russie ont donné leur appui à la guerre du Golfe et le régime des sanctions imposé au début des 1990, mais ils ont depuis établi des relations avec l'industrie pétrolière iraquienne qui sont mises en danger par la politique dure de Washington et de Londres.

La plupart des régimes arabes ont condamné les bombardements, y compris les importants alliés des États-Unis lors de la guerre du Golfe. Dans une déclaration de la Ligue arabe, on pouvait lire qu'il «n'y avait aucune justification» pour les bombardements qui «allaient à l'encontre des résolutions de l'ONU et des standards internationaux. »

Le principal allié arabe des États-Unis, l'Égypte, a produit une déclaration samedi dernier qui décrivait les frappes aériennes comme «un pas sérieux et négatif que nous ne pouvons accepter, ni en comprendre les raisons, qui va à l'encontre de la sécurité et de la souveraineté de l'Irak. » La Syrie, un autre joueur important au Moyen Orient a dit que les attaques donnaient une bien mauvaise image à la nouvelle administration Bush.

Peut-être plus significatif, la Turquie, membre de l'OTAN et où sont situées les bases d'où décollent le plus souvent les avions américains et britanniques pour entreprendre leurs patrouilles de la zone de vols interdits au nord de l'Irak, a insisté que ses bases n'avaient pas été utilisées cette fois et qu'elle n'avait pas été informée de l'attaque. Le premier ministre de la Turquie, Bulent Ecevit, a dit : «Il est triste que le besoin s'est fait sentir pour un tel geste contre l'Irak, et que des cibles civiles tout autant que militaires furent touchées. »

Le Moyen-Orient connut des manifestations populaires, ce qui souleva de sérieuses difficultés pour les dirigeants arabes. L'opposition aux raids aériens fut la plus manifeste chez les Palestiniens.

La colère du monde arabe fut nourrie par l'hypocrisie crasse des gouvernements de Bush et de Blair qui ont voulu justifier les frappes en le présentant comme une mesure destiner à empêcher qu'un régime despotique ne se plie pas aux résolutions de l'ONU sur les inspections de ses armes. Il y a moins de deux semaines, Ariel Sharon, l'architecte du massacre des Palestiniens de Sabra et Chatilla en 1982, fut élu premier ministre de l'Israël sur la base de son hostilité aux négociations de paix menées sous l'égide de l'ONU et de promesses d'intensifier les actions militaires en Cisjordanie et la bande de Gaza. L'Israël viole sans cesse les résolutions de l'ONU dans le but de continuer à occuper illégalement les territoires qu'elle a saisis lors de la guerre de 1967.

La semaine dernière, le ministre de la Défense a tué un des gardes du corps de Yasser Arafat, ce qui représente le vingtième assassinat du genre depuis le début de l'intifida palestinienne qui a commencé en septembre dernier. Le Likoud et le Parti travailliste israélien se sont unis pour endosser l'assassinat. Les États-Unis n'ont exprimé de protestation que pour la forme.

C'est un fait que l'État du Moyen-Orient qui a ouvertement usé de terreur et d'assassinat d'état comme instrument de politique extérieur n'est nul autre que l'Israël. Pourtant, les États-Unis déclarent que l'Israël est un havre de paix et de démocratie, alors qu'ils pratiquent la politique de la terre brûlée en Irak. Les contradictions évidentes des rationalisations officielles de l'assaut contre l'Irak mené par les Américains montrent que l'on peut trouver leur véritable motivation dans les objectifs économiques et stratégiques des États-Unis dans le Golfe riche en pétrole.

L'Israël a accueilli le bombardement de Bagdad comme une preuve de l'appui des États-Unis pour la ligne dure qu'elle a adoptée contre les Palestiniens et comme un avertissement donné à l'Irak et aux autres pays arabes contre toute interférence de leur part. Dès lundi, l'Israël et les États-Unis ont commencé des exercices militaires conjoints au cours desquels ils utilisaient des missiles Patriote contre une attaque aux missiles Scud irakiens simulée.

En Grande-Bretagne, une partie du Parti travailliste s'opposa aux frappes aériennes qui fut menée par une fraction plus importante que les habituels de l'aile gauche du parti comme Tony Benn, Alice Mahon et Tam Dalyell. Parmi ceux qui ont exprimé leurs inquiétudes quant à l'appui inconditionnel du premier ministre Tony Blair pour les frappes aériennes, on trouve Clive Soley, le président de l'aile parlementaire des travaillistes, Bill Morris, à la tête du Syndicat des travailleurs généraux et du transport, et la députée européen Glenys Kinnock, la femme de l'ancien dirigeant travailliste Neil Kinnock. L'opposition du Parti libéral démocrate a aussi manifesté des réserves sur l'action militaire.

Les sources gouvernementales ont confirmé que les raisons pour l'appui militaire qu'offre Blair aux États-Unis étaient de développer «une base fondamentale» pour les relations anglo-américaines. Blair est anxieux de renforcer les soi-disant «relations spéciales» entre les deux pays depuis la mise en place de l'administration Bush à Washington.

Une partie des médias était aussi critique des priorités politiques de Blair. Une couche au sein de la classe dirigeante croit que l'orientation de Blair vers les États-Unis est contraire aux meilleurs intérêts britanniques et qu'il devrait plutôt adopter des politiques plus pro-européennes.

Le journal The Independent se plaignait : «Le premier ministre doit de toute urgence reconsidérer son irréaliste 'troisième voie' de sa politique internationale, qui voudrait placer la Grande-Bretagne au coeur de l'Europe en même temps qu'elle développerait une relation spéciale avec les États-Unis. L'attaque aux missiles contre l'Irak est opposée par les autres pays de l'Union européenne, comme les attaques précédentes. » Plus énervé, le Guardian a dit que les attaques prouvaient que Bush était «dangereux». Il lance l'avertissement que «De plus en plus, les politiques de sécurité dominatrices des États-Unis sont contraires aux intérêts de la Grande-Bretagne, et aux intérêts des partenaires européens de la Grande-Bretagne. »

Aussi, du point de vue de l'élite britannique du monde des affaires, il existe de sérieuses considérations financières qui plaident contre la prolongation des sanctions contre l'Irak, qui ont laissé la Grande-Bretagne loin derrière les autres pays européens qui ignorent les sanctions dans le but de prendre avantage du commerce lucratif du pétrole de l'Irak.

Voir aussi :

Pourquoi les États-Unis vont-ils en guerre dans le Golfe ? Mai 1998


 

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