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Berlusconi gagne les élections parlementaires

Le baron de la presse de droite se prépare à diriger le nouveau gouvernement italien

par Ulrich Rippert
15 mai 2001

Les élections parlementaires en Italie, attendues avec tension, se sont terminées avec la victoire du baron de la presse Silvio Berlusconi et sa coalition de partis de la droite rassemblée sous la bannière de la «Maison des libertés». Dès que les premiers résultats, partiels et non concluants, ont été publiés en soirée de dimanche, Berlusconi s'est couronné lui-même vainqueur. Son agent d'élection a donné l'avertissement : «Si nous ne sommes pas déclarés gagnants, nous prendrons la rue par millions.»

Au début, la presse donnait la coalition de droite comme largement gagnante, mais plus la soirée avançait, plus l'avance de Berlusconi se rétrécissait. La plus grande partie de la journée de lundi, la course entre la coalition menée par Berlusconi et la coalition sortante de centre-gauche de Francesco Rutelli, qui s'est fait connaître sous le nom de coalition de l'Olivier, a été serrée. Ce n'est qu'en soirée lundi que l'on a été certain que Berlusconi avait une majorité suffisante dans les deux chambres du parlement italien, la Chambre des députés et le Sénat, pour former un gouvernement.

Alors que les votes sont en grande partie comptés, on sait que Berlusconi a recueilli presque 45 pour cent des voix pour la Chambre des députés et plus de 42 pour cent pour le Sénat. Le complexe système électoral italien ne permettait pas de connaître la répartition exacte des sièges dans les deux chambres ce lundi soir. Mais il semble que la Forza Italia de Berlusconi détient 282 sièges et la coalition de l'Olivier 184 à la Chambre des députés.

Comparé aux résultats de la précédente élection nationale en 1996, la Forza Italia a accru sa part du vote de 9 pour cent, qui est passé de 20,6 à 29 pour cent. Dans un communiqué, Forza Italia se décrivait comme «le parti le plus puissant, et de beaucoup » en Italie.

Le principal allié de Berlusconi, l'Alliance nationale de tendance néo-fasciste, qui vient du MSI, le parti fasciste d'après-guerre, a perdu environ 4 pour cent, glissant à 12 pour cent du vote national. Le principal perdant des partis membres de la coalition menée par Berlusconi est la Ligue du Nord, un parti séparatiste dont le dirigeant Umberto Bossi a mené une campagne xénophobe et raciste qui, pourvu que soit possible, a dépassé en rhétorique anti-immigrante la démagogie du dirigeant de l'extrême-droite autrichienne, Jörg Haider.

La Ligue du Nord, selon certains articles, n'a pas réussi à récolter les 4 pour cent du vote nécessaire selon la loi électorale italienne pour pouvoir avoir des députés à la proportionnelle. L'organisation a par contre réussi à faire élire des députés directement, grâce au jeu des alliances.

Dans le camp du centre-gauche, les Démocrates de gauche, qui sont devenus dans les années 1990 la nouvelle figure du Parti communiste d'Italie, ont été les grands perdants. Ils n'ont réussi à prendre que 17 pour cent du vote, alors qu'ils avaient réussi à attirer 21,2 pour cent des voix en 1996.

La victoire électorale de la coalition de Berlusconi représente un nouveau virage à droite de la politique italienne, un de ceux qui auront un impact important sur les futurs développements en Europe. Berlusconi, qui a déclaré que Margaret Thatcher et Ronald Reagan étaient ses idoles politiques, allie ses politiques pro-affaires et pour «le libre marché» avec une rhétorique assez vague sur des réformes de l'État et de l'économie d`Italie. Il défend des diminutions draconiennes des impôts ainsi que la privatisation des entreprises gouvernementales et une prise en charge par le secteur privé de la gestion des programmes sociaux de l'État. Tout au long de sa campagne, Berlusconi a répondu aux critiques sur son immense richesse et ses pratiques véreuses en affaires en déclarant que ces accusations étaient de «la propagande communiste».

Berlusconi, qui possède trois des chaînes de télévision les plus influentes d'Italie aussi bien que le parc immobilier et la compagnie de construction la plus importante du pays est l'homme le plus riche d'Italie avec une fortune évaluée à 13 milliards de dollars américains. Il est aussi généralement considéré comme l'un des politiciens les plus corrompus de l'Europe. En 1994, il avait été forcé de démissionner du poste de premier ministre après seulement 7 mois au pouvoir lorsqu'il a été dévoilé qu'il utilisait son pouvoir gouvernemental pour améliorer la position de ses entreprises.

Depuis le début des 1990, Berlusconi fut l'objet de plus d'une douzaine d'enquêtes différentes et d'accusations criminelles. Les accusations contre lui vont de parjures, aux falsifications de documents financiers en passant par l'évasion fiscale, la corruption de fonctionnaires et la collaboration avec la mafia. À ce jour, il fut déjà trouvé coupable pas moins de quatre fois et condamné à un total de 6 ans et trois mois de prison. Toutefois, il a entrepris une série d'appels jusqu'à ce qu'il réussisse à faire lever les sentences contre lui.

À Palerme, capitale de Sicile, le bras droit de Berlusconi, ancien dirigeant de la filiale de Finivest, Pubitalia, est présentement en cour pour répondre à des accusations de connivence avec la mafia.

Avant les élections, la revue financière britannique Economist a proclamé en couverture que Berlusconi n'était pas apte à gouverner. The Economist a écrit : «Dans toute démocratie qui se respecte, il serait impensable qu'un homme qu'on suppose sur le point d'être élu premier ministre ait récemment été sous enquête pour, entre autres, blanchiment d'argent, complicité pour meurtre, liens avec la mafia, évasion fiscale et corruption de politiciens, de juges et d'inspecteurs fiscaux. Mais, nous parlons ici de l'Italie, et de Silvio Berlusconi, probablement son citoyen le plus riche. Comme notre enquête le démontre sans équivoque, M. Berlusconi n'est pas apte à diriger le gouvernement de quelque pays que ce soit, encore moins l'une des démocraties les plus riches au monde.»

L'article concluait que «l'élection de M. Berlusconi en tant que premier ministre serait un jour sombre pour la démocratie italienne et pour le règne la loi».

Qu'un homme, qui selon l'hebdomadaire italien L'Espresso mérite plus de dix ans de prison, ait pu accéder au pouvoir une deuxième fois témoigne surtout de la faillite politique du gouvernement de centre-gauche qui a pris le pouvoir il y a cinq années. Dès le début, ce gouvernement a considéré que sa principale tâche était l'imposition des mesures économiques demandées par les banques internationales comme condition de l'intégration de la lire italienne dans l'Euro, la monnaie de l'Union européenne.

Les programmes sociaux ont connu des compressions budgétaires importantes sous le gouvernement mené par les Démocrates de gauche et les attentes de larges sections de la population ont tout simplement été ignorées. Le taux de chômage est resté très élevé. Après que l'Italie ait abandonné la politique en place depuis longtemps d'ajuster les salaires pour compenser pour l'inflation, le gouffre entre le Nord industrialisé et le Sud plus défavorisé s'est creusé comme jamais auparavant.

À plusieurs occasions, le gouvernement du centre-gauche a été en position de prendre l'offensive contre Berlusconi et sa Forza Italia. Mais, craignant la réaction des masses contre elle, la coalition de l'Olivier a toujours cherché à protéger ses possibilités de coalition avec Berlusconi pour former un gouvernement d'unité nationale.

Plusieurs avant l'élection, le dramaturge italien, metteur en scène et récipiendaire du prix Nobel bien connu, Dario Fo a attiré l'attention sur cet aspect du rôle du gouvernement de l'Olivier. Sous le titre «La gauche est-elle coupable, elle aussi?», il écrivait sur une victoire électorale de Berlusconi :

«Ce qui me paraît le plus abject dans toute cette histoire, c'est le rôle du gouvernement de centre-gauche. D'une façon entièrement servile, la gauche a gardé Berlusconi dans le coup, parce qu'elle croyait que c'était la meilleure façon d'améliorer ses chances avec les partis du centre encore indécis. C'est l'unique raison pour un état des choses aussi avancé que celui que nous connaissons actuellement.»

Le choix de Francesco Rutelli, l'ancien maire de Rome, pour mener la coalition de l'Olivier était elle-même une capitulation complète devant Berlusconi. Rutelli, qui est passé du Parti vert au Parti démocrate dans le but de faire avancer sa carrière politique, s'est fait un devoir d'éviter toute confrontation sérieuse avec le baron de presse.

Ce n'est qu'à la veille du vote que les deux coalitions ont présenté leurs programmes, qui sont remarquables par le peu d'écart qu'ils offrent sur les questions économiques et sociales essentielles. Le centre-gauche s'est adapté au programme de droite de Berlusconi, reprenant à son compte son appel pour des diminutions de taux d'imposition les plus élevés et pour la privatisation des entreprises appartenant au gouvernement.

La campagne électorale n'a pas dépassé la campagne de salissage, dégoûtant de grandes parties de l'électorat. En conséquence, les instituts de recherche sur les élections avaient prédit un faible taux de vote. La démoralisation du gouvernement de centre-gauche et sa peur de tout mouvement indépendant de la population trouva expression dans la décision du ministère de l'Intérieur, supposément pour cause économique, de fermer un tiers des bureaux de vote.

À la surprise des politiciens autant que des sondeurs, près de 81,5 pour cent des inscrits à la liste électorale, bien plus que ce à quoi l'on s'attendait, sont allés voter. Ce grand nombre d'électeurs, combiné à la diminution du nombre des bureaux de scrutin, a mené à de très longues lignes d'attente et au chaos dans plusieurs parties du pays.

Après avoir attendu en ligne pendant des heures, plusieurs électeurs ont déchiré de dépit leur carte de vote. À plusieurs endroits, il fut impossible de fermer les bureaux de scrutin à l'heure prévue, soit 22 heures. À Rome, les derniers votes furent inscrits à deux heures quinze du matin. En Calabre, on votait encore à quatre heures du matin.

À Naples, où le taux de chômage est parmi les plus élevés au pays, des centaines d'électeurs en colère et frustrés par des heures d'attente, ont pris un bureau de scrutin d'assaut et détruit les bulletins de vote.

Parmi les premiers à féliciter Berlusconi, on trouve le gouvernement de droite autrichien. En faisant parvenir ses félicitations, Vienne a demandé que l'Union européenne (UE) d'accepter les résultats et de ne pas imposer de sanctions à l'Italie comme elle l'avait fait en Autriche suite à l'élection du Parti libéral autrichien et du Parti de la liberté de Haider.

Le ministre des Affaires étrangères espagnol, Josep Pique, a dit qu'il espérait que le vote mènerait à la stabilité du gouvernement. L'Union sociale chrétienne (USC), basée en Bavière, a déclaré : «La domination socialiste de l'Europe s'effrite.» Le président de l'USC au parlement allemand, Michael Glos, commentait : «Avec la victoire de Bush aux États-Unis, ceci est un autre signe encourageant pour le camp conservateur de l'UE.»

Le gouvernement allemand a refusé de commenter l'élection, disant que les résultats finaux n'étaient pas encore clairs. Le ministre des Affaires étrangères français, Hubert Vedrine, a dit que les gouvernements européens aurait le nouveau gouvernement italien à l'oeil.


 

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