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Les troupes américaines participent à l'invasion de la zone rebelle colombienne


Par Bill Vann
28 Février 2002


L'apparition des Forces Armées Spéciales Américaines dans la ville colombienne de San Vicente del Caguan est un indice clair de la montée de l'intervention américaine dans la plus vieille guerre civile de l'Amérique du Sud. San Vicente Del Caguan est la capitale de la soi-disante « zone de sécurité » qui a été envahie par les troupes colombiennes après d'intenses bombardements aériens la semaine dernière.

Le président colombien Andres Pastrana a lancé un appel à l'arrêt des négociations de paix avec le plus grand des groupes révolutionnaires, les Forces Armées Révolutionnaires de la Colombie ou FARC, après que les guérilleros aient détourné une avion et kidnappé un sénateur. Pastrana a ordonné une reprise de la zone que le FARC a occupé pendant les trois dernières années.

Bien que l'armée colombienne n'ait pas réussi dans l'invasion initiale à ouvrir le combat avec la guérilla du FARC, des bombes sont tombées sur un village isolé tuant un homme, son garçon de 2 ans et sa fille de 15 ans. Au même moment, dans les villes colombiennes, la police a attaqué des prétendus gauchistes, les accusant d'être des sympathisants du FARC.

Cette dernière aventure armée des guérilleros a procuré la justification immédiate pour le changement de la politique du gouvernement qui se dirige maintenant vers une guerre totale. Mais, le motif essentiel de ce soudain changement dans le conflit vieux de 40 ans repose dans le fait que l'armée colombienne est organisée par les États-Unis. L'administration Bush a récemment dévoilé des plans pour allouer $98 millions additionnels pour la création d'une nouvelle brigade armée colombienne qui serait conçue pour des opérations anti-guérillas et pour la défense des gisements pétroliers et des pipelines gérés par Occidental Petroleum et d'autres compagnies de l'énergie qui opèrent à partir des États-Unis.

Avec les milliards de dollars dans le programme d'aide à l'armement déjà versés par les Américains au militarisme colombien, l'armée a presque doublé son nombre de soldats dans les dernières années, pendant que Washington fournissait 50 hélicoptères de combats. Toute cette assistance militaire a été apportée au nom d'une future « guerre de la drogue » en permettant aux troupes colombiennes de chercher et de détruire les plantations de coca et les laboratoires clandestins de production de cocaïne. Le congrès américain attache beaucoup d'importance à des dispositions restreignant l'octroi de cette aide, tout en exigeant que Washington atteste la conformité du gouvernement colombien aux droits de l'homme. Plus particulièrement, le congrès américain a exigé la rupture des liens persistants entre le commandement de l'armée colombienne et les escadrons de la mort (droite paramilitaire) qui sont responsables des massacres et des meurtres qui ont enlevé la vie à plus de 40 000 Colombiens seulement dans la dernière décennie.

Pendant que des organisations indépendantes pour les droits de l'homme, incluant celles dénoncées par les groupes révolutionnaires comme étant des comparses de la CIA, affirment unanimement que l'armée continue d'aider et de soutenir les organisations paramilitaires, l'aide américaine continue d'affluer.
Le gouvernement colombien, quant à lui, n'a pratiquement rien fait pour condamner les combattants liés à ces activités même s'il sait que son armée collabore directement aux opérations sanglantes des paramilitaires.

On craint maintenant que l'incursion militaire à l'intérieur de la zone neutre de 25.000 km carrés ouvrira la voie à l'infiltration des paramilitaires, exposant une population dispersée de 100.000 paysans pauvres à des représailles parce qu'ils seront suspectés d'être des partisans de la guérilla révolutionnaire. Pendant qu'aucun combat d'importance n'était rapporté entre l'armée et les guérilleros dans les premiers jours du mouvement pour reprendre possession de la zone, des conflits entre le FARC et la droite paramilitaire appartenant aux Unités colombiennes d'autodéfense ont laissé au moins 73 personnes mortes et huit autres disparues.

L'administration Bush s'apprête à invoquer les évènements du 11 septembre et la « guerre au terrorisme » pour mettre de côté toutes les restrictions face à l'aide militaire des États-Unis et faire de l'extermination des mouvements révolutionnaires colombiens, un objectif de la politique étrangère américaine. Des fonctionnaires américains ont dit au Washington Post que l'augmentation de l'aide, incluant l'approvisionnement de l'armée colombienne en renseignements électroniques et satellites sur les déplacements des groupes révolutionnaires, peut être justifiée sous la Directive de Sécurité Nationale signée par Bush peu après les attaques sur le World Trade Center et le Pentagone. Les fonctionnaires affirment également que faire une différence entre la contre-insurrection et les opérations anti-drogues est irréaliste parce que le FARC offre une protection pour les planteurs de coca et les narcotrafiquants en retour des « taxes » qu'il perçoit dans la zone de sécurité.

Le fait que la droite paramilitaire, qui a bénéficié d'autant sinon plus de l'aide apportée par le gouvernement américain à l'armée colombienne, apporte également une protection au commerce de la drogue et soit responsable de beaucoup plus de terreur meurtrière que les groupes révolutionnaires est ignoré par les décideurs de la politique étrangère américaine.

Le Président Pastrana a déjà demandé que Washington permette l'utilisation sans restriction de l'apport militaire fourni par l'administration Clinton selon le « Plan Colombie » qui était destiné à une campagne anti-drogue pour la guerre contre les groupements révolutionnaires. Après que des images des bérets verts de l'armée américaine combattant aux côtés de l'armée colombienne dans l'invasion de la zone de sécurité aient apparu en première page du quotidien colombien El Tiempo, un politicien, le candidat à la présidence au Parti Libéral Horacio Serpa, a qualifié la présence militaire américaine de « très inquiétante » et a demandé des clarifications auprès du gouvernement.

Le général Hector Fabio Velasco s'est empressé de répondre que les Forces Spéciales Américaines étaient « venues simplement en tant qu'observateurs ».
L'opposant de Serpa à la nomination du Parti Libéral, le droitiste Alvaro Uribe Velez, s'est dit heureux de la présence des troupes américaines et a déclaré qu'il supporterait l'envoi de ces dernières pour combattre en Colombie plutôt que de recevoir seulement une aide.

Avec les élections présidentielles prévues en mai, l'éventail politique officiel en Colombie a bifurqué brusquement vers la droite. Uribe, considéré comme un réactionnaire extrémiste jusqu'à récemment, est vu comme celui qui remportera la pluralité des voix au premier tour. En tant que gouverneur de la province d'Antioquia, située dans le nord-est, il a donné carte blanche aux paramilitaires et a contribué à créer le type de groupes de défenses paysans utilisé par le régime Fujimori au Pérou et la dictature militaire au Guatemala. Conséquemment, il y a eu une sanglante répression sur la classe ouvrière, les paysans militants et tous ceux reliés à la gauche colombienne.

Uribe a été invité récemment par l'administration Bush pour rencontrer les officiels du Ministère des Affaires Étrangères. En donnant son appui pour une intervention américaine, Washington ignorera vraisemblablement, même si elle a été dénoncée par des critiques colombiens, l'implication d'Uribe dans les opérations des barons de la cocaïne comme Fabio Ochoa et Pablo Escobar dans les années 1980.

Le support actuel pour Uribe et pour l'intensification de la guerre de Pastrana, particulièrement à l'intérieur de la classe moyenne, est une manifestation de l'accroissement du poids social et politique de l'armée, qui a augmenté en volume, en pouvoir et en influence. Ceci est le résultat de l'aide à l'armement qui a propulsé la Colombie au troisième rang des plus grands récipiendaires de matériel militaire américain dans le monde.

De plus, ceci est attribuable à la faillite politique et à la duplicité des mouvements révolutionnaires eux-mêmes, qui sont parvenus à grandir et à acheter de meilleures armes en plus grande quantité en soutirant de l'argent aux narcotrafiquants, aux compagnies pétrolières étrangères et aux familles de ceux qu'ils ont kidnappés. Leur support à travers la population a même diminué.

La dernière action des guérilleros a été l'enlèvement, par le FARC, de Ingrid Bétancourt, la candidate à la présidence d'un parti minoritaire qui s'est attirée l'hostilité de l'establishment politique de droite et des trafiquants de la drogue en écrivant un livre sur la corruption à l'intérieur du gouvernement de l'ex-président Ernesto Samper. Partisane des politiques du style des Partis Verts, Bétancourt a été enlevée alors qu'elle se dirigeait vers la nouvelle zone de sécurité pour protester contre toutes formes de répression sur les civils habitant la zone. L'enlèvement, qui a provoqué du dégoût tant en Colombie qu'à l'échelle internationale, avait pour but l'amélioration de la position des groupes révolutionnaires lors des négociations avec le gouvernement.

Le FARC et la deuxième plus grande guérilla, l'armée de libération nationale ou l'ELN, ont déjà kidnappé des centaines de civils. Dans certains cas, ils ont été retournés à leur famille en échange de montant d'argent et dans d'autres, ils ont été capturés pour ensuite être échangés contre des guérilleros prisonniers. L'ELN a déjà kidnappé tous les passagers d'un avion et une autre fois, tous les fidèles à l'intérieur de l'église de Cali ont été faits prisonniers. Certaines estimations ont attribué la moitié des revenus du FARC aux enlèvements. Fondé pendant la guerre civile de 20 ans connue sous le nom de « la violencia », le FARC, comme l'ELN apparu dans les années 1960, épousent les idéologies du Maoïsme et du Guevarisme, soutenant que la révolution en Colombie sera accomplie par une armée révolutionnaire paysanne en encerclant et en conquérant les villes. Cette théorie socialement rétrograde a eu comme résultat le mépris de la lutte pour éduquer et organiser politiquement la classe ouvrière et n'a servi qu'à promouvoir des tactiques qui ne font que diviser les travailleurs urbains de la paysannerie pauvre.

Aliénées par des opérations armées qui n'ont aucun lien apparent avec ds buts révolutionnaires ou même socialement progressistes, de vastes sections de la population colombienne ont fini par voir les groupements révolutionnaires comme des sortes de mercenaires qui n'offrent aucune alternative politique à l'oppression et à la polarisation sociale qui fait rage dans les pays de l'Amérique du Sud.

La classe dirigeante colombienne et ses supporters à Washington tentent d'exploiter la confusion politique actuelle pour promouvoir une campagne de répression militaire contre les ouvriers et les paysans. Ceux qui résistent ou défient les intérêts de l'élite colombienne, des compagnies pétrolières étrangères et des banques occidentales seront la cible de l'expansion de la « guerre au terrorisme » en Amérique Latine.


 

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