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Derrière la débâcle électorale des indépendantistes du Québec: l'insatisfaction sociale des masses

par Keith Jones
18 avril 2003

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Avec 46 pour cent des voix exprimées, le Parti libéral du Québec a obtenu une bonne partie des sièges lors de l'élection provinciale de lundi dernier. C'était la fin du règne de neuf années du Parti québécois (PQ), un parti indépendantiste.

Malgré un appui important de la bureaucratie syndicale, les péquistes ont formé le gouvernement le plus à droite depuis le régime autoritaire de l'Union nationale qui était au pouvoir au Québec dans les années 1950. Sous la direction des premiers ministres Jacques Parizeau, Lucien Bouchard et Bernard Landry, le PQ a imposé des compressions des dépenses sociales et publiques, a favorisé le développement du travail forcé en échange de l'aide sociale et a utilisé toute une batterie de lois anti-syndicales pour réprimer la dissidence de la classe ouvrière.

Parce que la bureaucratie syndicale a supprimé toute lutte de classe, l'insatisfaction des Québécois envers le programme anti-social du PQ et plus généralement envers la croissance du pouvoir des grandes entreprises, de l'inégalité sociale et de l'insécurité économique n'a pu s'exprimer que de façon intermittente et le plus souvent de façon politiquement confuse.

Dans leur campagne électorale, les libéraux ont fait appel sans l'avouer ouvertement au mécontentement de la population face à la détérioration du système de santé et du système de l'éducation publics. Les libéraux ont promis d'augmenter les dépenses de façon importante dans ces deux domaines. Ils ont aussi promis que mettre un terme à l'engorgement des urgences et aux listes d'attentes pour les soins qui sont nécessaires à la survie serait la principale priorité du gouvernement.

Toutefois, le programme des libéraux est franchement à droite. Plusieurs de ces mesures sont repiquées des programmes des conservateurs ontariens et des libéraux de Colombie-Britannique, les régimes provinciaux qui sont le fer de lance du démantèlement des services publics, de la privatisation et de la déréglementation.

Les élites politiques et du monde des affaires au Québec et au Canada ont chaudement accueilli la victoire des libéraux et ce n'est pas simplement parce qu'il n'y plus menace d'un référendum sur la sécession du Québec d'avec le Canada. Ils s'attendent et demanderont que le nouveau gouvernement intensifie l'offensive de la grande entreprise contre la classe ouvrière.

Il est significatif que le premier ministre élu, le chef libéral Jean Charest et le premier ministre sortant, le chef du PQ Bernard Landry ont tout deux louangé le parti ultra droite qu'est l'ADQ dans leurs discours le soir des élections pour avoir stimulé le débat public avec sa proposition d'un taux unique de taxation, des bons scolaires et d'un système de santé à deux vitesses. «[Le chef de l'ADQ] Mario Dumont, a déclaré Charest, peut sortir de cette campagne électorale la tête très haute en ayant fait une très grande contribution à la vie démocratique québécoise.»

Les libéraux ont l'intention d'utiliser l'ADQ comme paravent à droite, présentant leurs projets de transférer la gestion de la majeure du système de santé à la grande entreprise, d'accroître la place du secteur privé pour la fourniture de soins «non essentiels» et d'éliminer les contraintes légales empêchant les entreprises d'utiliser des sous-contractants pour contourner leurs contrats passés avec un syndicat comme étant «au centre» en comparaison des politiques de l'ADQ et de Dumont.

La grande entreprise, quant à elle, a conclu que l'ADQ qui n'avait jamais eu qu'un seul député jusqu'à l'année dernière était trop faible et pas assez sûre politiquement pour qu'on lui donne le pouvoir. Elle continuera à utiliser l'ADQ pour pousser encore plus à droite le PQ et les libéraux, les deux rivaux, un indépendantiste et l'autre fédéraliste, qui ont dominé la politique québécoise depuis 1970.

Mécontentement populaire

Selon les médias de la grande entreprise, les Québécois avaient le choix entre trois partis très différents lundi passé. Mais ces affirmations ne font que confirmer combien à droite ont évolué les partis officiels depuis un quart de siècle. Le PQ, les libéraux et l'ADQ sont tous redevables à la grande entreprise. Tous veulent un budget équilibré, diminuer les impôts des sociétés, réduire les impôts pour les riches et «repenser» ou «réinventer» le gouvernement, des euphémismes pour d'autres coupes dans les services publics et pour éliminer les contraintes que la réglementation impose au capital.

Constatant qu'aucun des partis ne se préoccupait de leurs intérêts, une grande partie de l'électorat ne s'est pas rendu voter. Le taux de vote a perdu presque 10 points par rapport à la dernière élection en 1998, atteignant les 70.5 pour cent, soit le plus bas taux depuis 1927.

Que cela ne soit pas dû au désintéressement politique, mais bien à l'aliénation d'une couche toujours plus importante de travailleurs envers un système politique de plus en plus insensible à ses besoins et à ses aspirations est montré par le fait que le Québec a récemment était témoin d'une importante mobilisation populaire sans précédent contre la guerre en Irak. La profondeur et l'ampleur du sentiment anti-guerre est telle que les trois partis ont senti qu'il était préférable de déclarer qu'ils s'opposaient à l'invasion britanico-américaine de l'Irak.

Même si les médias ont déclaré que la victoire libérale était un balayage, les libéraux ont dans les faits obtenu 15.000 voix de moins que lors de la dernière élection. Et alors que les libéraux ont maintenant une inébranlable majorité à l'Assemblée nationale, obtenant 76 des 125 sièges, ils n'ont en réalité obtenu que 32 pour cent des voix de tous les électeurs inscrits.

Le PQ, quant à lui, avec ses 1.268.000 voix a vu son vote tombé de plus du quart, soit une diminution de 475.000 voix.

L'ADQ a gagné quatre sièges et a vu sa part du vote populaire augmenté de 12 à 18 pour cent, mais ces résultats étaient très loin des 30 pour cent d'appui populaire que les sondages lui donnaient l'automne passé. Clairement, plus les Québécois prenaient connaissance du programme du libre marché de l'ADQ, moins ils l'aimaient. Quatre des cinq députés sortants de l'ADQ ont perdu leur siège et aucune de ses recrues étoiles n'a été élue, y compris l'ancien maire de Montréal, Pierre Bourque.

Intensification de la lutte de classe

Il ne sera pas long avant que la classe ouvrière entre en conflit avec le gouvernement libéral de Charest. Les libéraux ont promis de geler les dépenses gouvernementales hormis les ministères de la Santé et de l'Éducation pour les cinq prochaines années, une promesse qui ne peut signifier rien d'autre que des coupes massives dans les services sociaux et publics, spécialement si l'économie américaine entrait dans une deuxième récession.

En dehors des rangs du Parti libéral, il y a un bon consensus que les projections budgétaires des libéraux sont une fiction, qu'il sera impossible pour les libéraux de maintenir l'équilibre budgétaire tout en augmentant les dépenses en santé et en éducation et en diminuant les impôts de 15 milliards, soit d'un milliard pour chacune des cinq prochaines années. En d'autres termes, les coupes vont aller beaucoup plus loin que ce qui était annoncé par les libéraux.

Bien qu'elle se soit aventurée à chuchoter quelques critiques du programme de droite des libéraux, la bureaucratie syndicale a offert au nouveau gouvernement de collaborer étroitement avec lui. Avant l'élection, elle avait utilisé la menace d'une victoire de l'ADQ pour à la fois tenter de mobiliser l'appui envers ses alliés traditionnels, les péquistes, et pour ouvrir de nouveaux canaux de communication avec les libéraux. «Nous étions bien satisfaits du bilan du gouvernement du PQ» a déclaré le soir des élections le secrétaire général de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ), René Roy. «On devra maintenant travailler avec le Parti libéral et ce que nous avons été capable de faire par le passé, nous devrions être en mesure de la réussir dans le futur aussi.»

Les mobilisations de masse contre la guerre et les élections indiquent un profond mécontentement envers le fait que la politique officielle va toujours plus à droite. Mais si les travailleurs au Québec ne veulent pas d'une nouvelle ronde de reculs et de défaites, ils doivent consciemment répudier l'alliance qui dure depuis des dizaines d'années entre la bureaucratie syndicale et le PQ et faire de l'internationalisme socialiste l'axe de leur lutte. Les travailleurs n'ont aucun intérêt à appuyer un secteur de la bourgeoisie québécoise dans son projet réactionnaire d'établir un Québec capitaliste indépendant. Plutôt, la guerre totale de la grande entreprise sur les emplois, les salaires et les droits sociaux doit avoir comme réponse la lutte pour mobiliser les travailleurs anglophones, francophones et immigrants aux côtés de leurs frères et soeurs aux États-Unis, au Mexique et à travers le monde dans une lutte commune contre le système du profit.


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