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Provocations américaines et repression castriste

Washington intensifie les attaques sur Cuba au sujet des procès de dissidents

Par Bill Vann
24 Avril 2003

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Suite aux mesures de répression prises par le régime de Fidel Castro, l'administration Bush serait en train d'envisager de nouvelles mesures draconiennes à l'encontre de Cuba, comme de mettre fin aux versements envoyés par les américains d'origine cubaine à des membres de leur famille sur l'île et l'arrêt de vols charter directs utilisés principalement par des émigrés cubains vivant aux USA pour se rendre dans leur pays d'origine. Ces sanctions visent toutes deux à renforcer le blocus vieux de quarante ans exercé contre la nation des Caraïbes tout en accroissant les difficultés économiques et affectives des Cubains des deux côtés du détroit de Floride.

La campagne internationale menée par Washington pour isoler Cuba au motif de violations des droits de l'homme est incontestablement le spectacle d'une hypocrisie débridée. Ce même gouvernement américain qui détient, sans chef d'accusation, plus de 600 prisonniers, dont des enfants, à la base navale de Guantanamo Bay s'en prend à Cuba pour avoir condamné 75 dissidents, soutenus par les USA, à des peines de prison lors de procès sommaires. George Bush, qui en qualité de gouverneur du Texas a ordonné l'exécution de 152 personnes et porte la responsabilité du massacre de milliers de civils iraquiens le mois dernier, a exprimé son horreur et son effroi pour l'exécution par Cuba de trois terroristes ­ premières exécutions soutenues par l'état en trois ans - qui s'étaient emparés d'un ferry cubain et avaient menacé de tuer les passagers.

Que la Commission des Nations Unies chargée des droits de l'homme décide de passer une résolution hypocrite exhortant Cuba à recevoir un inspecteur des droits de l'homme alors qu'elle passe sous silence les attaques féroces des militaires américains en Irak ainsi que l'existence du camp de concentration de Guantanamo, donne la mesure de la lâcheté des gouvernements du monde, et plus particulièrement de ceux de l'Union européenne, face à l'intimidation américaine.

Il est incontestable que Washington a joué un rôle central en provoquant les actions du régime cubain, et à présent les exploite de manière calculée pour préparer de nouvelles agressions contre la nation des Caraïbes aguerrie.

Le mépris à l'égard de l'administration Bush qui se pose en champion des droits de l'homme et le soutien à Cuba pour son droit à se défendre contre les USA ne signifient cependant pas que l'on justifie les actions draconiennes du régime de Fidel Castro.

Les socialistes sont contre la peine de mort aux Etats-Unis et doivent rejeter aussi cette pratique à Cuba. Des procès sommaires d'un jour qui aboutissent soit à des exécutions soit à des peines d'emprisonnement de 28 ans sont une parodie de droits démocratiques fondamentaux, quel que soit l'accusé ou le gouvernement responsable de l'accusation.

Le recours à de telles méthodes révèle une crise interne profonde au sein du régime de Castro. Cette crise est le résultat à la fois de la pression exercée par les USA et des décisions politiques prises par le parti dirigeant à Cuba depuis son arrivée au pouvoir en 1959 après le renversement de la dictature de Fulgencio Batista soutenue par les USA.

L'administration Bush fut installée à la Maison Blanche en 2000 grâce, pour une part non négligeable, au soutien décisif de la communauté d'exilés cubains de Droite en Floride qui contribuèrent à arrêter le dépouillement du scrutin dans cet état. Bush fit entrer dans son gouvernement un grand nombre de gens de Droite d'origine cubaine, conduits par Otto Reich [ voir " Bush nominee linked to Latin American terrorism "], qui fut chargé de la politique en Amérique latine dans l'administration Bush.


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Provocations américaines et menaces de guerre

L'administration Bush envoya à la Havane un nouveau chef de la Section pour les intérêts américains, James Cason, avec pour mission de fomenter une opposition au gouvernement cubain. Tout d'abord, le diplomate américain utilisa les bureaux de la Sections pour les intérêts américains pour y tenir des réunions avec des dissidents, puis le mois dernier il amena ces personnes dans sa résidence pour une conférence. Il a travaillé pour la création de groupes d'opposition à Cuba et fait des déclarations publiques dénonçant le régime de Castro tout en saluant ses opposants comme les 'futurs dirigeants' du pays.

Cason a reconnu qu'il a pour but de regrouper les divers groupes dissidents en un seul parti d'opposition unifié et qu'il rencontre régulièrement la Fondation nationale américano-cubaine et d'autres groupes d'exilés qui ont été impliqués dans des complots terroristes contre Cuba afin de discuter de ce projet.

Entre temps la déclaration publique de l'administration Bush en faveur d'une politique de 'guerre préventive', alliée aux accusations infondées l'an dernier de John Bolton, troisième en grade au Département d'état, selon lesquelles Cuba possède un programme de guerre biologique [voir Les Etats-Unis préparent-ils une guerre avec Cuba ?] conduisent La Havane à craindre, et avec raison, que la politique américaine à l'égard de Cuba soit en train de prendre la tournure d'une agression militaire ouverte. Suite à la guerre en Irak, la question se pose inévitablement de savoir si Cuba sera l'une des cibles prochaines pour un 'changement de régime' par agression militaire.

Récemment, l'Ambassadeur américain en République dominicaine aborda précisément cette question. " Je pense que ce qui se passe en Irak en ce moment va envoyer un message très positif et est un très bon exemple pour Cuba ", dit l'Ambassadeur Hans Hertell aux médias dominicains. Il ajouta que la guerre au Moyen Orient n'était que le commencement d'une " croisade libératrice qui englobera le monde entier, y compris Cuba ". Des déclarations similaires ont été faites par Jeb Bush, frère du président et gouverneur de Floride.

La campagne extraordinairement provocatrice menée par Cason au sujet des dissidents de Cuba semble avoir été calculée pour provoquer la réaction qu'a eue Castro.

Wayne Smith, ancien diplomate américain qui démissionna en 1982 de son poste à la tête de la Section pour les intérêts américains de La Havane au sujet d'un désaccord avec la politique cubaine de l'administration Reagan, a suggéré dans des articles publiés ces dernières semaines qu'avec les exécutions et les emprisonnements à Cuba l'administration Bush avait fondamentalement obtenu la réaction escomptée.

"Les signes de plus grande tolérance de la part de Castro dérangeaient l'administration Bush, car cela ne faisait qu'encourager ceux qui aux Etats-Unis voulaient assouplir les contrôles sur les voyages vers Cuba et commencer à démanteler l'embargo, " écrivit Smith dans le Los Angeles Times du 7 avril. " On attendait au Congrès ce printemps de nouvelles initiatives dans ce sens. Que faire pour les empêcher ?

"Ce que l'administration Bush a fait est suffisamment clair. Elle a donné l'ordre au chef de la Section pour les intérêts américains à la Havane d'entamer une série de réunions bien en vue et provocatrices avec des dissidents, d'aller jusqu'à organiser des séminaires dans sa propre résidence et de leur distribuer des équipement de toutes sortes. Il a même tenu des conférences de presse après certaines de ces réunions. L'administration Bush savait bien que ces tactiques d' 'éléphant dans un magasin de porcelaine' provoqueraient une réaction de Cuba- et de préférence une réaction excessive. "

L'administration Bush tenait tout particulièrement à miner le désir grandissant parmi les Républicains des états fermiers, reflétant les intérêts des agro-industries américaines, de se débarrasser des restrictions sur le commerce avec Cuba. Ce conflit de destruction réciproque entre ces éléments et les exilés farouchement anti-castristes, qui constituent une base très importante de soutien pour les Républicains, posait des problèmes politiques à l'administration Bush à l'approche d'une année d'élections. Les partisans au Congrès d'une législation visant à lever les sanctions commerciales reconnaissent à présent que cette proposition n'est plus viable.

Vétéran pendant plus de quarante ans des attaques américaines, tentatives d'assassinat et provocations, il semble cependant très peu probable que Castro soit tout simplement tombé par mégarde dans le piège tendu par Bush. La décision de procéder aux exécutions et d'emprisonner 75 personnes était, sans aucun doute, tout aussi calculée politiquement que les provocations américaines.

Les USA ont subventionné des dissidents cubains

Washington n'a pas essayé de façon crédible de réfuter les preuves détaillées, rendues publiques par le gouvernement cubain, selon lesquelles bon nombre des personnes jugées et condamnées recevaient le soutien financier total des Etats-Unis pour leurs activités anti-gouvernementales.

Les procès n'étaient pas ouverts à la presse et les preuves apportées par le gouvernement cubain ne concernaient pas tous les accusés. Il se peut que sur les 75 inculpés, il y ait des opposants politiques au régime de Castro qui ne soient pas payés par les USA ou ne soient un de leurs agents. Cependant, les preuves soumises par le gouvernement cubain montrent clairement que l'axe du soi-disant mouvement dissident est le Département d'état américain, la CIA et la Section des intérêts américains de la Havane.

Felipe Perez Roque, Ministre cubain des affaires étrangères a présenté une profusion de preuves à la presse étrangère lors d'une conférence qui s'est tenue à la Havane au début du mois. L'importance de ce matériel tenait en grande partie au fait que le gouvernement cubain avait fortement infiltré les groupes dissidents.

Huit agents secrets se sont présentés aux procès, et certains d'entre eux travaillaient depuis dix ans avec les organisations dissidentes financées par les USA. On croit qu'il y a encore un certain nombre d'agents qui opèrent toujours parmi ces groupes, et le ministre cubain des affaires étrangères a déclaré que son gouvernement détenait davantage encore d'informations, que celles rendues publiques, sur les activités cachées des USA parmi les dissidents..

Les preuves présentées par Pérez Roque contre les personnes jugées pour subversion se fondaient à la fois sur le passé politique américain d'agression envers Cuba et l'analyse détaillée le flux d'argent en provenance de Washington dans la poche de gens qui se disent militants des droits de l'homme et journalistes indépendants.

" Nous considérons, et les juges considèrent, et le peuple de Cuba considère qu'une personne qui reçoit de l'argent d'une puissance étrangère, qui soutient le blocus, qui contribue à répandre des informations tendancieuses pour justifier le blocus... commet des actes au service de la puissance étrangère, et donc de ce fait, nos lois devraient nous servir à nous défendre d'une telle conduite, " dit-il.

Le ministre des affaires étrangères cita un témoignage du Congrès confirmant que l'Agence américaine au développement international (AID) avait dépensé la somme de 22 millions de dollars depuis 1977 pour mener à bien les dispositions de la loi Helms-Burton rendant obligatoire le soutien financier aux opposants du régime de Castro à Cuba. D'autres fonds encore sont fournis dans un effort de déstabilisation politique par le biais caché de la CIA.

Une bonne partie de l'argent de AID passait par de soi-disant organisations non-gouvernementales (ONG), dont pas mal sont dirigées par des exilés cubains anticastristes, d'après les chiffres cités par Pérez Roque. Le Centre pour un Cuba libre recevait 2.3 millions de dollars ; Le Groupe de travail Dissidence Interne, 250 000 dollars ; la Maison de la liberté, plus de 1.3 million ; le Groupe de soutien Dissidence, 1.2 millions ; Cubanet, site internet, 800 000 dollars et l'Institut pour la Démocratie à Cuba, 1 million de dollars.

L'AFL- CIO passeur de fonds

Parmi les organisations qui passent des fonds pour la subversion, il y a par exemple l' American Center for International Labor Solidarity [Centre américain pour la solidarité internationale du travail], (ACILS), couverture pour la CIA et dirigé par la bureaucratie de l'AFL-CIO. L'ACILS, qui a joué un rôle dans le soutien au coup d'état avorté monté il y a un an contre le gouvernement d'Hugo Chavez au Vénézuela, a reçu la somme de 168 575 dollars pour un projet ayant pour but de décourager les investissements étrangers à Cuba.

La National Policy Association [Association pour une politique nationale], organisme qui compte dans ses rangs, non seulement des bureaucrates syndicaux comme le président de l'AFL-CIO, John Sweeney et le président d'UNITE Jay Mazur, mais également des chefs d'entreprises tels que Frank Carlucci, président du groupe Carlyle et ancien employé de la CIA et du Pentagone, a reçu pour le même projet une somme trois fois plus importante.

Les procureurs cubains ont pu présenter des fiches de dépenses et des reçus pour une partie de cette somme, remontant la piste partant du gouvernement américain pour arriver aux dissidents cubains. Outre des salaires mensuels, l'argent a été consacré à des achats divers ( ordinateurs, télévisions, ameublement ou batterie de cuisine) . Dans certains cas ces biens ont été revendus à d'autres personnes dans le but de s'assurer divers appuis.
Parmi les reçus on a trouvé ceux qui avaient été signés par Osvaldo Alfonso Valdés du groupe "Todos Unidos" ainsi que des lettres qu'il avait reçues de Carlos Alberto Montaner. Ces lettres confirmaient l'envoi et la réception de plusieurs centaines de dollars de paiement par mois. Montaner est un journaliste d'extrême droite établi à Madrid. Il est largement suspecté de travailler comme agent secret de la CIA.

Dans la déclaration qu'il fit devant la Cour, Alfonso Valdés reconnut que
" dans notre travail d'opposition, il est possible que nous ayons été utilisés par des représentants de la Section des Intérêts" et que les dissidents savaient que "les finances qui nous parvenaient pour notre travail avaient leur origine dans des fonds approuvés par le gouvernement des Etats Unis.". Il a également reconnu avoir rencontré un représentant de USAID qui était venu vérifier que l'argent lui parvenait bien ainsi qu'aux autres et pour discuter des moyens les plus sûrs de transférer les fonds.

Le Ministre cubain des Affaires Etrangères a également prouvé que les publications éditées par les groupes d'opposition, comme la revue Revista de Cuba étaient soit imprimées dans les locaux mêmes de la Section des Intérêts, soit publiées à l'étranger, comme la revue El Disidente .Le gouvernement américain assurait le financement et ces revues entraient à Cuba par le truchement de la valise diplomatique.

"C'est pour cette raison que, quand elles essaient de se présenter comme des organisations non gouvernementales, j'essaie toujours de démontrer qu'elles sont « gouvernementales » parce qu'elles appartiennent au gouvernement des Etats Unis et agissent à son service" a déclaré Pérez Roque.

Que peut-on dire d'écrivains cubains ou de militants politiques financés par le gouvernement américain ? Ce ne sont pas vraiment des dissidents, mais ce sont plutôt des conformistes ­ des gens qui se sont alignés du côté des gagnants. Dans un pays où la culture nationale dans sa totalité s'est toujours définie par la lutte contre la domination américaine, de telles personnes peuvent difficilement prétendre représenter une quelconque forme de libération.

Néanmoins, il y a eu de vrais dissidents à Cuba. Au début des années 60, les trotskistes cubains ont mis en avant un programme socialiste basé sur la mobilisation indépendante du prolétariat comme unique moyen de défendre la révolution cubaine contre l'impérialisme. Dans leur cas, de quelconques liens avec des puissances extérieures n'ont jamais été prouvés. Ceci n'a pas empêché le régime castriste de les mettre en prison, de confisquer leurs publications et de détruire leurs imprimeries.

Il est hors de doute que les agissements de Cason et que le financement des dissidents par les Etats Unis représentent une violation flagrante de la souveraineté de Cuba ainsi qu'une ingérence dans les affaires intérieures de ce pays par une administration qui souhaite par tous les moyens renverser le régime de Cuba.

 

Des agents de Castro ont dirigé des groupes "dissidents"

Ceci dit, il apparaît que les groupes dissidents en tant que tels ne présentent pas un vrai danger pour le régime de Fidel Castro. Le fait que plusieurs des agents secrets de sécurité soient parvenus au sommet de la pyramide de ces organisations donne toute la mesure de la faiblesse politique des groupes et de leur soumission au gouvernement américain.

Il est apparu que la principale association de "journalistes indépendants" était dirigée par deux agents de sécurité cubains. Cason a été obligé de reconnaître que l'un d'entre eux avait été le principal organisateur de la réunion qui s'était tenue chez lui. De même, le président du "Parti de Défense des Droits de l'Homme à Cuba" appartenait aux forces de sécurité cubaines. Il est difficile de croire que des agents secrets de sécurité parviendraient au sommet de n'importe quelle organisation avec un soutien important de la base.

Pourquoi était il donc si urgent d'organiser desprocès d'un jour ou d'envoyer tous ces dissidents en prison pour de longues périodes? Si l'on voulait adresser un signal aux Etats Unis pour les prévenir de la détermination de Cuba à résister à une agression militaire, il aurait été plus approprié d'expulser le provocateur Cason. Lui, par contre reste bien implanté à la Section des Intérêts Américains à La Havane.

En ce qui concerne l'exécution des trois personnes accusées de détournement de bateaux, le recours à la peine de mort dans ce cas est non seulement injustifiée par rapport à la nature du délit (aucun des passagers n'a été blessé) mais ne servira guère à dissuader d'autres personnes pauvres et désespérées cherchant à émigrer pour des raisons, en général plus économiques que politiques. Les personnes qui ont voulu justifier ces exécutions ont qualifié les accusés de terroristes ou suggéré qu'ils travaillaient pour les Etats Unis.

Il ne fait aucun doute que les Etats Unis ont une part de responsabilité non négligeable dans ces détournements- en quelques mois on en a dénombré sept- par leur refus de délivrer des visas qui avaient été promis comme clause d'un accord sur l'immigration signé sous l'administration Clinton. A peine 700 visas ont été délivrés au cours des six derniers mois, alors que le quota annuel en prévoit normalement 20 000. Mais le régime castriste lui même a utilisé l'émigration ­ le détournement du Mariel en 1980 ainsi que le grand nombre de fuites sur des radeaux au milieu des années 90- comme moyen d'exercer une pression sociale à Cuba ou une pression politique sur Washington.

Il est très probable que le message qui a été envoyé par l'intermédiaire de ces actes de répression d'une extrême sévérité ne visaient pas tant Washington, des groupes isolés de dissidents ou des pirates potentiels mais visaient plutôt des éléments appartenant au sein même du régime castriste. Après plus de 40 années de pouvoir, les contradictions politiques et économiques qui sous tendent le régime se sont énormément développées.

La révolution cubaine n'a pas apporté le socialisme ni un état prolétarien dans l'île. Le pouvoir politique est tombé dans les mains d'une armée de guérilla menée par Fidel Castro et se basant sur la petite bourgeoisie nationaliste cubaine. Même si son programme initial était de nature démocratique et de réformisme national, le mouvement castriste fut contraint de prendre des mesures plus radicales aussi bien du fait des revendications de plus grande envergure des masses cubaines que de l'intransigeance de l'opposition des Etats Unis à toute amélioration des conditions sociales aux dépens des intérêts du profit privé et des multinationales américaines.

La réponse de Castro a été une série de nationalisations, tout d'abord de sociétés américaines et ensuite de sociétés cubaines, tout en se tournant vers l'Union Soviétique. L'alliance entre le régime castriste et la bureaucratie stalinienne de Moscou, associée à l'émulation de la guérilla castriste par les forces de gauche en Amérique Latine a contribué à la désorientation du mouvement ouvrier dans le continent tout entier et à une suite de défaites catastrophiques conduisant à des dictatures militaires. (voir " Le castrisme et la politique de nationalisme de la petite bourgeoisie")

L'impasse économique et politique de Cuba

La dissolution de l'Union Soviétique par les bureaucrates du Kremlin et l'adoption de la politique de retour au capitalisme a entraîné un marasme économique pour Cuba, qui comptait beaucoup sur le soutien économique des soviétiques. Le bloc soviétique constituait un marché pour 83% des exportations cubaines et était le principal fournisseur de pétrole fortement subventionné.

Cuba ne s'est pas encore remis des conséquences de la dissolution de l'URSS. Son économie est toujours en lambeaux. Les exportations de l'année dernière sont tombées de 1,7 milliards de dollars à 1,4 milliards de dollars et on prévoit que cette baisse va continuer cette année. Avant la chute de l'Union Soviétique, les exportations cubaines s'élevaient à 5,4 milliards de dollars.

La crise a été accentuée par la baisse de l'industrie mondiale du tourisme- principale source de revenus de Cuba ces dernières années. En 2002, Cuba a enregistré une chute de 5% par rapport à 2001 du nombre de touristes qui ont visité l'île. L'augmentation du prix du pétrole importé a aggravé ces difficultés.

L'orientation vers le tourisme et vers une économie basée sur le dollar a amené une polarisation sociale aiguë à Cuba et une érosion des conquêtes sociales, de santé et d'éducation de la révolution cubaine.

Alors que Fidel Castro approche des 77 ans, on spécule de plus en plus pour savoir pour combien de temps encore il sera en mesure de diriger le pays et pour savoir à quoi ressemblera sa succession. Dans ces conditions, il est tout à fait possible qu'une partie de la classe dirigeante elle -même puisse pousser à un retour total à l'économie de marché ainsi qu'à un rapprochement avec Washington.

C'est pour cette raison qu'il est très probable que les procès et les exécutions soient un avertissement à l'égard des éléments au sein même du régime castriste.

Ce ne serait pas la première fois que Fidel Castro utilise les pelotons d'exécutions comme moyen d'affirmer son contrôle monolithique. En 1989, le Général Arnaldo Ochoa et trois autres personnes avaient été exécutées après avoir été condamnées par une cour martiale expéditive sur des accusations de trafic de drogue montées de toute pièce.

Ochoa rejoignit la guérilla anti-Batista en 1958 quand il était encore adolescent. Il servit pendant 30 ans dans l'armée cubaine, de la bataille de la Baie des Cochons qui repoussa l'invasion menée par la CIA jusqu'à la campagne d'Angola contre les forces sud-africaines et les forces soutenues par la CIA dans les années 80. C'était le chef le plus populaire de l'Armée Révolutionnaire Cubaine et il était considéré comme un pôle d'attraction possible pour les opposants, au moment où la bureaucratie soviétique dirigée par Gorbachev se rapprochait du retour au capitalisme et qu'elle prenait ses distances par rapport à La Havane.

Le message était clair : aucune remise en question de l'autorité de Fidel Castro ne serait tolérée.

Il y a une dimension tragique dans l'impasse actuelle où se trouve la révolution cubaine et les conditions de plus en plus dures imposées aux cubains par 40 années de sanctions. Cependant, ceci ne change en rien le caractère essentiellement social bourgeois et la nature autoritaire de la politique du régime castriste. Tout au contraire, le déclin de la révolution cubaine est indissolublement lié à ces éléments politiques.

Les décisions politiques ne sont pas sans conséquence. Ceux qui présentèrent le castrisme et la guerrilla guevariste comme de nouvelles stratégies de lutte révolutionnaire, supplantant la nécessité de se battre pour le développement d'une direction socialiste consciente et pour l'indépendance politique du prolétariat portent la lourde responsabilité de la crise actuelle de la perspective révolutionnaire, non seulement à Cuba mais dans l'Amérique Latine toute entière.

Défendre Cuba d'une agression américaine c'est avant tout une question politique plutôt que militaire. La défaite de toute intervention militaire américaine dépend du développement d'une nouvelle perspective révolutionnaire qui s'oppose à la politique de nationalisme bourgeois pratiquée par le régime de Fidel Castro. Cette perspective exige la mobilisation de la classe ouvrière ­ à Cuba même, aux Etats Unis et dans toute l'Amérique Latine ­ en tant que force politique indépendante unifiée sur le plan international et luttant pour le socialisme. C'est la perspective pour laquelle se battent le Socialist Equality Party aux Etats Unis et ses partis frères du monde entier au sein de la Quatrième Internationale.


 

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