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Un million de salariés manifestent contre la réforme des retraites en France

Par Antoine Lerougetel et Stephane Hughes
26 mai 2003

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Plus d'un million de salariés ont manifesté dans toute la France dimanche 25 mai contre les propositions du gouvernement Chirac-Raffarin de réduction des retraites. A Paris seulement plus de 600 000 personnes ont battu le pavé, dont plus de 100 000 étaient venus de province dans 35 trains spécialement affrétés pour l'occasion et 1 000 autocars.

Les organisateurs avaient sous-estimé le nombre de personnes vivant hors de la région parisienne qui souhaitaient participer à la manifestation, il fallut donc rapidement organiser des rassemblements dans de nombreuses grandes villes dans tout le pays. Des manifestations de grande ampleur eurent lieu dans des villes comme Marseilles, Bordeaux et Toulouse.

La manifestation était appelée par tous les syndicats qui ont refusé la proposition de réforme présentée par le président Jacques Chirac et le premier ministre Jean-Pierre Raffarin. L'unique syndicat représentatif à signer est à ce jour la CFDT, traditionnellement proche de l'aile droite du Parti socialiste.

Des sympathisants du World Socialist Web Site ont distribué à Paris plus de 7 000 tracts de la Déclaration du Comité de Rédaction du WSWS intitulée "Une stratégie politique pour la défense des retraites des salariés en France ».

Les manifestations de dimanche se sont déroulées dans un climat de grèves reconductibles par des milliers de salariés de l'éducation depuis le 13 mai. Ils sont en grève non seulement sur la question des retraites mais aussi en opposition aux attaques du gouvernement sur le système d'Education nationale. On pouvait se faire une idée de la détermination des salariés de l'éducation au vu des banderoles personnalisées provenant des quelques 2 500 établissements en grève reconductible.

Les plus gros contingents de manifestants étaient composés d'enseignants du primaire et du secondaire ainsi que des personnels non enseignants de l'Education nationale. Il y avait aussi des délégations de la Poste, des hôpitaux, des cheminots, des prisons, du transport urbain et bien d'autres secteurs du service public. Le secteur privé était aussi représenté, avec des délégations de la SNECMA, compagnie aérospatiale, Ericson Telephones, Aventis, Pechiney et la FNAC, pour n'en citer que quelques uns.

Tous les groupes d'âge étaient représentés, du collégien au retraité. De nombreux manifestants vinrent défiler en famille. Il y avait une profusion de drapeaux et bannières de syndicats dont la CGT, syndicat majoritaire traditionnellement aligné au Parti Communiste, Force Ouvrière (FO), autre syndicat proche du Parti Socialiste ; SUD, syndicat radical dissident et bien d'autres syndicats plus petits. De nombreux salariés sans affiliation syndicale prirent aussi part à la manifestation, brandissant des pancartes qu'ils avaient faites eux-mêmes.

Les regroupements variés de ce qu'on appelle en France l'extrême-gauche n'avaient rien à proposer qui aille plus loin que la politique discréditée du précédent gouvernement de la Gauche Plurielle conduit par Lionel Jospin alors dirigeant du Parti Socialiste. Le tract de quatre pages de la Ligue Communiste Révolutionnaire ne critique en rien le gouvernement de Jospin et évite toute suggestion que la lutte pour défendre les retraites et autres acquis sociaux nécessite un combat pour faire tomber le gouvernement centre-droit de Chirac et Raffarin.

Dans l'éditorial de son dernier numéro, Lutte Ouvrière déclare que seule une pression massive réussirait à arrêter les attaques du gouvernement : « Le mouvement doit se développer le 25 et après. Laissons le mouvement de grève se développer jusqu'à ce que le gouvernement Chirac-Raffarin soit obligé de retirer leur projet, tout comme Juppé fut obligé de retirer le sien ». Encore une fois, aucune critique du gouvernement de la Gauche Plurielle de Jospin.

Tandis que ces organisations cherchaient à répandre un faux optimisme et à embrouiller les questions politiques, l'état d'esprit des manifestants exprimait le sérieux et l'anxiété quant à l'issue de cette confrontation avec le gouvernement. Beaucoup doutaient que des manifestations de masse suffiraient à elles seules.

"Nous sommes venus ici pour nos enfants. Si ça s'arrête là, on est perdus, » dit Philippe, salarié à EDF (Electricité de France), la quarantaine, venu d'Angers avec son épouse Bernadette et leurs deux enfants. Elle ajouta : « Oui on est là pour les enfants. Je suis mère au foyer, mais je m'implique entièrement dans cette lutte pour l'avenir des enfants ».

Philippe expliqua: "Je suis venu ici pour le combat contre le capitalisme et la haute finance, pour la défense de retraites convenables pour tous. Bien qu'à EDF on ne soit pas immédiatement concernés, on sait qu'on n'est pas sauvés. Je suis à la CGT, et la CGT est toujours dans le combat. Je suis aussi membre d'ATTAC.

"Nous savons bien que les Socialistes n'ont pas abrogé les réformes de Balladur. La politique de la Gauche Plurielle c'était la politique du ventre mou. C'est pour ça que Jospin a perdu les élections ».

Un reporter du WSWS lui demanda ce qu'il pensait de la politique du Parti Communiste et de son ancien dirigeant, Robert Hue. Il répondit : « Hue ne savait pas où se placer, il s'est fusillé tout seul. On ne pouvait pas gagner les dernières élections après que Jospin ait signé le document de l'Union Européenne à Barcelone sur l'allongement de la durée des années de travail ».

Quand on lui demanda ce qui représenterait pour lui la victoire dans cette lutte, Philippe répondit : « Que les 'gens d'en bas' en France n'aient pas à payer pour la politique d'emploi désastreuse du gouvernement, que les revenus et les bénéfices de la production soient taxés, qu'une portion des richesses aille aux 'gens d'en bas' ».

Le WSWS signala le rôle de la CGT qui apporta son soutien au relevé de conclusions de la direction d'EDF en vue de préparer la privatisation d'EDF-GDF, dont un élément était une augmentation de 50% des cotisations- retraite des salariés.

Philippe répondit: "Bon, on croyait que c'était bien au début. La direction a essayé de nous précipiter. On a réfléchi, depuis. Et on s'est rendu compte que les propositions n'allaient pas. Les salariés ont bien fait de voter contre ».

Quand le WSWS fit remarquer que la CGT avait fait campagne pour que les salariés votent 'oui' pour le relevé de conclusions, projet allant clairement à l'encontre des intérêts des salariés, Philippe dit : « Je ne me l'explique pas ».

De même, Philippe a dit qu'il ne s'expliquait pas pourquoi Bernard Thibault, dirigeant de la CGT, n'avait pas appelé la confédération toute entière à faire grève, malgré les mouvements de grève actuels de certaines sections de cheminots et de la RATP ainsi que des enseignants.

Le WSWS a aussi interviewé un groupe d'étudiants parisiens dans la manifestation. Cécile, étudiante en philosophie à la Sorbonne, et Jean-Baptiste étudiant à l'IPAG, école de commerce, ont dit qu'ils n'étaient encartés dans aucune organisation politique mais qu'ils avaient des amis au partis Socialiste et Communiste et dans le mouvement anti mondialisation, ATTAC.

Quand on leur demanda ce qui les avait motivés à participer à la manifestation, Cécile répondit: "Amener un renversement du gouvernement. C'est à l'horizon ».

Jean-Baptiste renchérit: "Quand Raffarin a dit 'Ce n'est pas la rue qui gouverne', ça m'a fait bondir. Nous sommes ici pour faire retirer la réforme des retraites. On ne peut pas accepter des retraites à 85% du SMIC [salaire minimum]. Je pense aux hospitaliers et à la façon de calculer les retraites.

On a l'impression qu'on peut faire reculer le gouvernement. Mais avec ça, quand on pense à ce qui vient après, la réforme de la sécurité sociale, je suis sceptique ».

Et Cécile d'ajouter: "Ce qu'il faut c'est reprendre l'intégralité du problème, et cela devra être fait à l'échelle européenne ».

Jean-Baptiste reprit: "Nous sommes réformistes. Nous pensons qu'il est possible de résoudre cette question des retraites et des droits sociaux à l'échelle de l'Europe ».

Le reporter du WSWS leur demanda s'ils pensaient vraiment que les grandes entreprises accepteraient de réduire leur taux de profits lorsque la tendance dominante dans l'Europe entière est à la réduction du coût de la main-d'oeuvre et des charges sociales. Cécile répondit : « Je sais que Jospin et la Gauche Plurielle n'ont pas su résister aux pressions du libéralisme. Mais nous comptons sur une reconstitution de la Gauche qui viendrait de l'aile gauche du PS.

Hervé, salarié cégétiste de la DDE [direction départementale de l'équipement] du Calvados, en Normandie, a dit au WSWS qu'il craignait la destruction complète du système de retraite datant de 1945. Son collègue Albert dit : « Avec la décentralisation, ils veulent casser le service public ».

Hervé ajouta: "La lutte doit s'amplifier si on veut faire céder le gouvernement. C'est en juin que tout va se décider. Si les cheminots et les routiers se mettent en grève, ça va péter. Il ne faut pas que le gouvernement mette le privé sur notre dos, qu'il réussisse à nous diviser. C'est dommage que les cheminots ne soient pas partis en grève illimitée après le 13 mai.

"Pour moi, gagner cette lutte c'est négocier sur une base complètement différente: c'est taxer les bénéfices des entreprises. Il faudra des négociations au niveau européen, et même mondial au moyen de l'OMC [Organisation mondiale du commerce].

"Il n'y a pas de solution nationale. Si on forçait le gouvernement à démissionner, les Socialistes, ce serait kif-kif. Les Socialistes ont été au pouvoir dans bien des pays en Europe et ils n'ont rien fait pour les retraites. Jospin était au pouvoir quand la France était présidente de l'Union européenne. Il aurait pu faire quelque chose, mais il n'a rien fait.

" Ce qu'il faut c'est essayer de canaliser une mouvance internationale. Je suis à la recherche d'un mouvement politique ».

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