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Le coût social du « paradis pour investisseurs » slovaque

Robert Stevens
Le 17 octobre 2003

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Durant l'année 2003 les travailleurs de Slovaquie ont vu leurs salaires, leurs conditions de vie et leurs conditions de travail attaquées massivement. Cela a provoqué de nombreuses grèves dans le secteur public et le secteur privé contre la politique économique du gouvernement dirigé par Mikulas Dzurinda.

Le gouvernement Dzurinda, une coalition de « centre droit », est arrivé au pouvoir en octobre 1998. Cette coalition fut réélue en octobre 2002.

Le 29 janvier, une grève de 6 heures des cheminots fut suivie à plus de 70%. Ceux-ci voulaient s'opposer à l' intention du gouvernement de supprimer 25 lignes de chemin de fer locales. Cette grève, la première depuis la séparation de la Slovaquie d'avec la République Tchèque en 1993, entraîna l'immobilisation complète du réseau ferroviaire national et eut des conséquences sur le trafic ferroviaire international.

L'élimination de certaines lignes de chemin de fer faisait partie d'une coupe générale opérée dans les dépenses publiques, le gouvernement cherchant à se montrer à la hauteur des exigences de l'Union Européenne. L'adhésion de la Slovaquie à l'Union Européenne est prévue pour l'année prochaine.

Une deuxième grève des chemins de fer débuta le 31 janvier et se termina le 3 février, après qu'un arrêt de la première Cour de justice de la capitale, Bratislava, eut déclaré que, même si la constitution de la Slovaquie reconnaît le droit de grève, cette grève était illégale. Le comité central de grève des syndicats de cheminots accepta cette décision et mit fin au mouvement.

Le 4 septembre, plusieurs centaines de travailleurs manifestèrent à Bratislava. Ils réclamaient un changement de la politique qui avait transformé la Slovaquie en « mendiant de l'Europe ». Certains manifestants ont également réclamé la tenue d'un référendum afin de décider de la tenue éventuelle d'élections générales anticipées.

Le 26 septembre, plus de 500 000 travailleurs slovaques participèrent à une grève générale d'une heure afin d'obliger le gouvernement à ouvrir des négociations sur les salaires, les conditions de travail, et sur la réforme des impôts et des retraites. Cette grève, à laquelle avait appelé la Confédération slovaque des syndicats (KOZ), toucha l'usine Volkswagen de Bratislava, presque 70% des écoles primaires et secondaires ainsi que le personnel civil de l'armée. Elle fut suivie par des cheminots, des employés des secteurs de l'énergie et du chauffage, des employés des hôpitaux de Kosice et de Banska Bystrica, des travailleurs de l'industrie alimentaire, des mineurs et des ouvriers des chantiers Vahostav.

Cette grève générale protestait contre un plan du gouvernement consistant à diminuer la TVA sur les produits courants et à introduire un impôt direct d'un taux uniforme de 19% en compensation. Ces mesures doivent être mises en place le 1er janvier 2004. Le KOZ réclame également que les salaires passent de 136 euros à 198 euros par mois. La fédération a aussi réclamé une augmentation des retraites jusqu'à un minimum « vital » de 103 euros.

Au cours des cinq dernières années, le gouvernement slovaque a mis en place une « thérapie de choc », encouragée par le Fond Monétaire International (FMI) et comprenant une série de privatisations et de réductions d'impôts pour les sociétés et pour les plus riches. Ce gouvernement a maintenant l'intention de réformer les retraites et de diminuer les impôts qui servent à payer les soins de santé. La récente vague de lois antisociales voulue par le gouvernement Dzurinda est la continuation de cette stratégie de préparation à l'entrée de la Slovaquie dans l'Union Européenne en mai 2004.

Au cours de cette période, l'afflux d'investissements étrangers directs, déjà important, a été encouragé par des mesures visant à réduire le coût de l'embauche ainsi que celui de l' investissement pour les compagnies transnationales. Depuis 1999, le montant des investissements étrangers directs est passé de 2 milliards de dollars US (56 milliards de couronnes slovaques) à 10 milliards de dollars US . Une augmentation considérable pour un pays qui compte à peine 5,4 millions d'habitants.

Un article de Steve Forbes paru dans le numéro du 28 aôut du Prague Post et intitulé Le Paradis des Investisseurs - La Slovaquie : la prochaine nouvelle dynamo de l'économie mondiale a insisté sur ces points. Forbes est le rédacteur en chef du magazine Forbes. Il présente l'économie slovaque comme une « merveille » et il commence son article en proclamant que « La Slovaquie est appelée à devenir pour le monde le prochain Hong Kong ou la prochaine Irlande, c'est à dire que ce petit pays va devenir un générateur économique. »

Il poursuit : « La Slovaquie est sur le point d'instaurer une taxe fixe de 19% pour les particuliers aussi bien que pour les sociétés. On est en train de supprimer la « taxe de décès » et les taxes sur les dividendes seront abolies. Le gouvernement a l'intention de réduire progressivement l'impôt élevé sur les salaires qui finance divers programmes sociaux, comme les soins de santé. Il essaie également de trouver un moyen de réformer radicalement le système des retraites, en en privatisant probablement une partie. »

Forbes insiste sur le fait que « la main d'oeuvre est qualifiée, a un bon niveau d'étude et est stable . Quand des gens entrent dans une société en Slovaquie, ils ont l'intention d'y rester jusqu'à leur retraite. Les résultats des étudiants slovaques en mathématiques et en sciences sont parmi les meilleurs du monde.»

Il ajoute : « Le gouvernement a fait passer récemment une nouvelle législation du travail sur les heures supplémentaires et les travaux saisonniers qui est une des plus souples en Europe. Le niveau des salaires est vraiment très attirant (approximativement 3 ou 4 dollars US de l'heure - soit seulement 15% de la moyenne européenne et 11% de la moyenne allemande. Le taux de chômage est toujours très élevé (approximativement 15%). Le nombres d'employés expérimentés et avec un bon niveau d'étude est assez élevé. Le coût de la vie est également assez bas ­ 41% de la moyenne de l'Union Européenne. »

L'article fait remarquer qu'un marché de 350 millions de personnes se trouve « à une journée de camion de la Slovaquie » et que l'adhésion de la Slovaquie à l'Union Européenne le printemps prochain ne favorisera pas seulement les relations avec cet immense marché, mais fournira également un tremplin pour ceux qui veulent faire des affaires avec la Russie, avec l'Ukraine et avec d'autres marchés de l'Est et du Sud. »

De plus en plus de sociétés multinationales se sont établies en Slovaquie parce qu'elles veulent profiter de la conjoncture économique ainsi que de la législation du gouvernement Dzurinda, très favorable aux entreprises, comme de la situation géographique, des ressources et du bas prix de la main d'oeuvre qualifiée. Parmi les investisseurs en Slovaquie on compte des sociétés comme IBM, Kimberly-Clark ou Volkswagen. Volkswagen y fabrique 300 000 automobiles par an. La transnationale française Peugeot est sur le point d'investir dans une usine de 750 millions de dollars qui devrait produire 300 000 voitures d'ici 2006. Les fournisseurs de pièces pour automobiles tels que Dura, Johnson Controls, Delphi et Molex ont des usines en Slovaquie et d'autres sociétés du même secteur ont l'intention de suivre cet exemple.

La société d'équipements électroménagers Whirlpool a fermé ses usines en France et a transféré son unité de production de machines à laver près de Poprad. Une enquête récente a révélé que 91% des investisseurs étrangers actuels en Slovaquie souhaitaient augmenter le montant de leurs investissements.

Les fluctuations des investissements étrangers directs

Même s'il est sûr que le nombre d'investissements étrangers directs a clairement augmenté au cours de la dernière décennie en Slovaquie comme dans toute l'Europe Centrale et Orientale, les experts économistes ont démontré que ce phénomène n'est pas statique. Des études récentes menées par L'Economist Intelligence Unit (EIU) prévoient que les investissements étrangers directs se désintéresseront des nouveaux adhérents à l'Union Européenne au cours de 2004. Leurs chiffres montrent que si les investissement étrangers directs ont été égaux ou supérieurs au chiffre record de 34 milliards de dollars (montant atteint en 2002), malgré l'adhésion à la Communauté Européenne en 2004, le montant des investissements étrangers directs ira en baissant.

Au cours de six premiers mois de 2003, l'EIU a remarqué une baisse importante et continue des investissements étrangers directs dans les économies des principaux pays d'Europe Centrale (République Tchèque, Pologne, Hongrie et Slovénie). Il remarque aussi une tendance à la hausse pour toutes les autres sous-régions. Au cours de la période 1998-2002, huit pays d'Europe de l'Est qui adhèreront bientôt à l'Union Européenne ont attiré presque deux tiers des 143 milliards de dollars d'investissements étrangers directs. Il est prévu que le montant des investissements étrangers directs baisse jusqu'à moins de la moitié des 200 milliards de dollars prévus pour la période 2003-2007. L'EIU explique ce phénomène par le fait que les « entreprises privatisables » sont de moins en moins nombreuses et par une augmentation de la masse salariale au cours de ces dernières années.

L'étude montre qu'il y a eu une délocalisation des investissements étrangers directs vers les pays d'Asie et d'autres sous-régions, beaucoup moins onéreux.

Cette compétition perpétuelle et implacable pour attirer les investissements dans les économies des anciens états staliniens, a alimenté des attaques répétées contre les acquis sociaux de la classe ouvrière.

En Slovaquie, le revenu national moyen monte tout juste à 3760 dollars.

Des statistiques publiées en octobre ont révélé que le salaire moyen dans l'industrie slovaque a baissé de 4% au cours du mois d'août, ceci après une baisse de 2,9% en juillet. Selon l'Office des statistiques de Slovaquie, le salaire moyen réel dans l'industrie slovaque (dans les secteurs des mines, de la production et de la distribution de l'électricité, du gaz et de l'eau) a baissé de 3,7% sur un an.

La rationalisation et la privatisation des anciennes entreprises publiques a été la pierre angulaire de la politique du gouvernement Dzurinda et a engendré une montée du chômage qui a atteint plus de 20% à son maximum et qui été officiellement estimé à 14,5% en août. Le ministre slovaque de l'Economie, Robert Nemcsics, avait annoncé alors que les nouveaux investissements étaient cruciaux, ce qui devait entraîner une baisse du chômage. Ce qu'il considère comme une baisse du chômage laisserait celui-ci à un taux de 12% selon ses propres dires.

La perspective de futurs investissements est assez aléatoire et dépend d'un certain nombre d'éléments. Un de ces projets d'investissements étrangers directs met en compétition la Slovaquie, la République Tchèque et la Hongrie pour ce qui est de l'implantation d'une nouvelle usine du fabricant d'automobiles coréen Hyundai.

Les grèves et les manifestations anti-gouvernementales de cette année ont mis en évidence une montée du mécontentement engendré par l'accroissement du niveau des inégalités sociales. La Confédération des syndicats a réagi en lançant une campagne de pétitions en vue de rassembler les 350 000 signatures nécessaires pour réclamer la tenue d'élections anticipées d'ici deux mois.

Le gouvernement est actuellement embourbé dans un scandale de corruption touchant Dzurinda lui-même ; sa démission entraînerait de nouvelles élections. Un sondage commandé par le Service d'enquêtes de la radio slovaque a révélé que 40% des personnes interrogées étaient favorables à la tenue d'élections anticipées.

 

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