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L'administration Bush et le 11 Septembre : les implications des révélations de Richard Clarke

Par Patrick Martin
29 Mars 2004

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Dans sa comparution le 24 Mars devant la commission nationale enquêtant sur les attaques terroristes du 11 Septembre, et dans un entretien d'une heure durant le programme d'information de la chaîne NBC - Meet the Press du 28 Mars - l'ancien responsable de l'anti-terrorisme de l'administration Bush, Richard Clarke, a réitéré ses accusations quant à la sous-évaluation par l'administration Bush de la menace d'attaques terroristes venant d'Al Qaeda jusqu'aux détournements d'avions et à leur chute sur le Pentagone et sur le World Trade Center, et quant à l'utilisation de ces attaques comme prétexte pour mettre en application des plans d'invasion de l'Irak prévus de longue date.

Les accusations de Clarke sont couchées sur papier dans son livre récemment paru, Against All Enemies [NdT : pas encore traduit en français] et sont amplement corroborées par les documents versés au dossier et par les témoignages d'autres participants. La controverse a engendré la plus grande crise politique qu'ait connu l'administration Bush depuis son entrée en fonction en janvier 2001.

Une ribambelle de représentants officiels de l'administration, de leaders Républicains au Congrès et d'experts médiatiques de droite ont contesté vivement les affirmations de Clarke, sans pour autant fournir de réfutation des faits exposés par celui-ci. Pas plus qu'ils n'ont pu justifier pourquoi l'ancien assistant du président en charge du contre-terrorisme, qui est officiellement membre du Parti Républicain, voudrait détruire la crédibilité politique de Bush sur le point précis sur lequel le président Bush a largement basé sa campagne de réélection - c'est à dire sa gestion de "la guerre à la terreur".

Les accusations de Clarke attirent l'attention sur la question politique la plus explosive : la connexion entre les attaques terroristes du 11 septembre 2001 et la décision de l'administration Bush de déclarer la guerre à l'Irak. Clarke lie explicitement et à plusieurs reprises l'inaction de l'administration Bush, avant le 11 septembre et à propos de la menace d'attaques d'Al Qaeda, avec son obsession de l'envahissement de l'Irak. Il maintient que le consensus au sein des agences de renseignement américain était que l'Irak n'avait aucun lien avec les attaques terroristes du 11 Septembre, et dénonce la guerre en Irak comme une déviation de "la guerre à la terreur" et comme une gaffe stratégique qui a enflammé le monde musulman et a renforcé politiquement Al Qaeda.

Avec 30 ans d'expérience dans les agences de sécurité nationale américaines, incluant des postes stratégiques sous les administration Reagan, Bush père et Clinton avant de servir Bush fils, Clarke n'est pas un dissident anti-guerre. Il est un défendeur impitoyable d'actions militaires directes ou discrètes au service des intérêts de l'impérialisme américain. Cela rend son témoignage contre l'administration Bush d'autant plus dévastatrice.

A la fois dans sa déclaration devant la "commission du 11/9" et dans l'entretien télévisé du 28 Mars, Clarke a mis en exergue la différence entre l'approche de l'administration Clinton face à une croissance de la menace terroriste et celle de l'administration Bush dans des circonstances similaires.

Dans la période précédant les célébration du nouveau millénaire en Décembre 1999, les services de renseignements américains ont rapporté un accroissement dramatique des interceptions de communications menaçantes mettant en cause Al Qaeda. A la demande de Clinton, son conseiller à la sécurité nationale, Samuel Berger, participa à des réunions quotidiennes avec les plus hauts dignitaires des agences de sécurité, incluant les dirigeants de la CIA et du FBI, pour suivre les efforts entrepris pour devancer une attaque. Cette pression continuelle, d'après Clarke, avait permis de contrecarrer une attaque planifiées pour la Saint Sylvestre contre l'aéroport de Los Angeles, quand les membres opérationnels d'Al Qaeda enrôlé dans cette action avaient été arrétés dans leur tentative de franchir la frontière américano-canadienne prés de Vancouver, British Columbia.

Clarke insiste sur le fait que si un effort d'une intensité similaire avait été mise en oeuvre durant l'été 2001, quand les services de renseignement ont commencé à nouveau à intercepter un nombre croissant de messages sur des menaces d'Al Qaeda, les attaques du 11 Septembre auraient pu être perturbées ou empêchées.

Une grande part de l'attention des médias sur ce témoignage a concerné une série de réunions et d'échanges de mémos entre les officiels de la Maison Blanche durant les huit premiers mois de 2001, et sur les différences supposées entre les déclarations de Clarke alors qu'il était le conseiller de Bush et ses déclarations actuelles. Mais Clarke insiste sur le fait que l'administration a traîné les pieds, bureaucratiquement, et que cela a eut des conséquences réelles sur les efforts en vue de prévenir une attaque terroriste sur le sol américain.

Des faits bien documentés viennent confirmer cette thèse. Quand, par exemple, la CIA a appris que deux membres opérationnels d'Al Qaeda, qui avaient participé à une réunion d'organisation à un haut niveau en Malaisie, étaient entrés aux USA, cette agence n'a pas informé le FBI, et ce pendant plus d'un an. Cette agence n'a pas, non plus, informé Clarke ou ses collaborateurs de l'équipe du contre-terrorisme de la Maison Blanche. Ces deux membres opérationnels d'Al Qaeda, connus, faisaient partie des pirates de l'air qui, sous leurs vrais noms, ont pris place à bord de quatre avions commerciaux le 11 Septembre, sans rencontrer la moindre opposition de la part d'officiels gouvernementaux, ni de la part des compagnies aériennes.

Clarke fit remarquer, acerbe : "Je pense que nous disposions même de leurs photos. J'aimerai penser que j'aurais rendu public, ou fait rendre public par le FBI, un communiqué de presse avec leur nom, ainsi que leur description, j'aimerais penser que j'aurais organisé une conférence de presse, essayé d'avoir leur nom et leur photo en première page de tous les journaux, parmi la liste des "America's Most Wanted" [NdT : liste tenu par l'administration qui énumère les personnalités les plus recherchés par les USA], dans tous les journaux du soir ; j'aimerais penser que nous aurions organisé avec succès une chasse à l'homme sur tout le territoire pour intercepter ces deux des dix-neuf pirates de l'air."

Le manque de communication était patent, malgré le fait que Clarke ait organisé, afin de prévenir une attaque terroriste d'Al Qaeda, une réunion à haut niveau en Juin 2001 entre les responsables des agences - parmi lesquelles la CIA, le FBI et la FAA (Federal Aviation Administration, qui s'occupent entre autres des questions de sécurité aérienne); cette réunion avait été programmée en réponse au niveau plus élevé des menaces rapportées.

Clarke déclara mercredi dernier à la commission sur le 11 Septembre : "J'ai dit au FBI et aux autres agences chargées de l'application des lois fédérales, ainsi qu'à la CIA, qu'au vu des renseignements faisant état de quelque chose sur le point de se produire, ces agences devaient abaisser leurs seuils de transmission d'information, c'est à dire nous communiquer quoi que ce soit d'un tant soit peu inhabituel."

"Rétrospectivement, leur ayant fait ces recommandations à maintes et maintes reprises, le fait qu'ils aient eu cette information [à propos des deux futurs pirates] quelque part au FBI et que cette information ne soit pas remontée jusqu'à moi, est toujours absolument incompréhensible, pour moi."

Dans la même partie de son témoignage, Clarke dit que le FBI n'a pas alerté le bureau du contre-terrorisme à la Maison Blanche du cas de Zacarias Moussaoui, un membre présumé d'Al Qaeda qui fut arrêté après sa tentative de participer à une formation sur des jets 747 dans une école de vol du Minnesota. Un membre de la commission, Richard Ben-Veniste, un ancien procureur de l'affaire du Watergate, demanda : "Auriez vous compris à partir de tout cela qu'il y avait un "jihadiste" qui avait été identifié, arrêté sur le sol américain avant le 11 Septembre, et qui se comportait étrangement durant ses leçons de pilotage..."

Clarke répondit : "Je voudrais croire, monsieur, que même sans le bénéfice d'une rétrospection 20-20, j'aurais pu relier ces points."

Le World Socialist Web Site a longtemps maintenu que, lorsqu'on analyse les événements du 11 Septembre, l'explication la moins plausible est la version officielle de l'administration Bush, répétée sans fin par les médias Américains depuis deux ans et demi : c'est à dire que 19 membres opérationnels d'Al Qaeda ont pénétré le territoire américain, ont détourné quatre avions le même jour et les ont fait s'écraser sur le World Trade Center et le Pentagone - en utilisant des pilotes kamikazes entrainés dans des écoles de vol américaines - sans qu'aucune agence gouvernementale américaine ait la moindre idée de ce que les terroristes faisaient.

Le témoignage de Clarke confirme que les attaques d'Al Qaeda furent rendues possibles par un affaiblissement virtuel des planifications du contre-terrorisme qui avaient été mises en place durant la dernière année de l'administration Clinton - certainement depuis les attaques à la bombe contre les ambassades américaines du Kenya et de Tanzanie en Août 1998.

Ce que ni Clarke, ni ses interrogateurs, pas plus que les médias, n'ont exprimé est la question de savoir si cet affaiblissement était délibéré : c'est à dire de savoir si à un quelconque niveau du gouvernement américain une décision a été prise, décision qui a permis à une attaque terroriste d'avoir lieu en vue de fournir le prétexte nécessaire pour des actions militaires américaines au Moyen Orient et en Asie Centrale, une étape qui jusqu'alors était politiquement impossible.

Non seulement Clarke, mais tout le collège d'ancien et actuels officiels de la sécurité nationale qui ont témoigné mardi et mercredi dernier devant la commission sur le 11 Septembre, ont été d'accord sur le fait que l'opposition du public rendait impossible de telles interventions militaires avant les attaques du 11 Septembre. Il s'agissait là d'un fait de la vie politique confirmé à la fois par Madeleine Albright, Secrétaire d'Etat de Clinton, et par Donald Rumsfeld, Secrétaire d'Etat à la Défense de Bush.

Clarke - suivant en cela les traces de Paul O'Neill, ancien Secrétaire d'Etat au Trésor, et d'autres témoins oculaires - confirme que l'administration Bush était focalisée dès son premier jour aux affaires sur la préparation d'une guerre contre l'Irak. Initialement, Rumsfeld et les autres bellicistes ont espéré utiliser les actions d'autodéfense des Irakiens, comme par exemple des tirs anti-aériens sur les avions américains patrouillant les zones interdites à l'aviation au nord et au sud de l'Irak, comme prétexte approprié pour la guerre. Mais cela c'était avéré comme ayant peu d'impact sur l'opinion publique.

Clarke n'a jamais suggéré que l'administration Bush a délibérément décidé de "subir" une attaque terroriste afin de générer un soutien populaire à la guerre, mais de toute évidence, il ne dit pas tout ce qu'il sait sur les coulisses du 11 Septembre. Il faut considérer, par exemple, ses commentaires durant l'audition de mercredi : "Vous savez, malheureusement, que ce pays prend des sacs à corps et a parfois besoin de ces sacs à cadavres pour prendre des décisions vraiment difficiles à propos des finances et à propos des arrangements gouvernementaux."

Un autre détail significatif est le fait suivant, rapporté par Clarke : après que son bureau ait déclenché une alerte nationale du contre-terrorisme durant l'été 2001, basée sur des renseignements interceptés, il fit face à des pressions de la part du Pentagone, qui prétendait que les unités militaires en alerte commençaient à souffrir de la fatigue. L'alerte, qui incluait la FAA, fut allégée à la fin du mois d'Août, deux semaines avant que les 19 pirates-suicides prennent place à bord des avions. Le timing suggére que ceux qui ont envoyé les pirates savaient quand la sécurité avait été relâchée. Quel était leur source de renseignement ?

Il y a plus de deux ans, le WSWS avait exposé en détail la preuve que le gouvernement américain avait été alerté des attaques terroristes bien avant le 11 Septembre. L'administration Bush se préparait non pas pour empêcher de telles attaques et sauver les milliers de vies perdues ce jour-là, mais pour exploiter une atrocité terroriste comme prétexte pour mettre en oeuvre des opérations prévues de longue date dans les régions pétrolifères d'Asie Centrale et du Moyen Orient.

Les révélations de Richard Clarke apportent de nouvelles preuves que quelquechose de bien plus sinistre et bien plus sombre qu'une simple incompétence ou un simple échec dans la "connections des points" était derrière l'incapacité du gouvernement à prévenir la pire attaque terroriste de l'histoire des Etats Unis.

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