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La grève des transports publics de New York : un nouveau stade de la lutte des classes

Par la rédaction du World Socialist Web Site et le Parti de l'égalité socialiste (USA)
Le 21 décembre 2005

Le World Socialist Web Site salue les 34 000 travailleurs des transports publics de la ville de New York dont le courage, face à des menaces draconiennes, est, pour la classe ouvrière de tous les Etats-Unis et du monde en fait, un exemple de détermination et de solidarité et une inspiration. La grève des transports publics est un événement d'importance internationale. Bravant des amendes énormes et même la menace de la prison, cette grève est un défi direct lancé à l'élite ultra-riche de Wall Street qui a l'habitude d'imposer ses intérêts économiques et sa volonté non seulement à New York mais au monde.

Il n'y a pas de pays au monde où on nie avec autant de véhémence l'existence des classes sociales (sans même parler de la lutte des classes) qu'aux Etats-Unis. Mais dans aucun autre pays la division entre les classes n'est aussi profonde. Et nulle part la guerre de classe n'est pratiquée de façon aussi haineuse que par la classe dirigeante américaine aux Etats-Unis. Moins de 24 heures de cette grève des transports ont suffi pour dévoiler aux yeux du monde entier la brutale réalité de la société américaine.

Cette grève illustre les divisions de classes irréconciliables de la société américaine, société dans laquelle une oligarchie financière corrompue et réactionnaire se sert des méthodes les plus brutales afin de briser toute résistance à sa boulimie de profits et d'enrichissement personnel. Il suffit de regarder les personnalités qui mènent l'assaut contre les travailleurs des transports publics pour se faire une idée des véritables questions sociales en jeu dans ce conflit.

Tout d'abord il y a le maire de New York, Michael Bloomberg, qui a déboursé avec prodigalité une partie de sa vaste fortune personnelle, estimée à plus de cinq milliards de dollars, pour s'acheter la mairie de New York. Il eut le culot de se mettre devant les caméras de télévision et d'y accuser les travailleurs des bus et du métro d'être des « égoïstes », des « voyous », d'agir de façon « ignoble» et de se comporter « honteusement ».

Ensuite, il y a le roi de l'immobilier, Peter Kalikow, qui vaut, net, plus d'un milliard de dollars et qui négocie au nom de l'Autorité des transports métropolitains (MTA).

Puis, en tête de la campagne hargneuse de la presse à scandale contre les travailleurs des transports, on a Rupert Murdoch, propriétaire du New York Post et de Fox News. Sa fortune personnelle est estimée à près de huit milliards de dollars.

Ces individus empochent en un jour plus que le travailleur le mieux payé des transports le fait en un an.

Et ce sont ces gens qui exigent des travailleurs des transports publics, dont les salaires suffisent tout juste à couvrir les nécessités élémentaires de la vie à New York, une des villes les plus chères du monde, de sacrifier salaires, retraites et allocations pour que soit honoré le paiement des intérêts versés à de riches investisseurs, qui étoffent leurs fortunes en achetant les titres de la MTA qui rapportent bien.

L'administration Bloomberg et la MTA ont obtenu de la part des tribunaux de nombreux jugements contre les travailleurs des transports publics. En vertu de la Loi Taylor, loi anti-ouvrière de l'Etat de New York, chaque travailleur est menacé d'amendes se montant à deux jours de salaires pour un jour passé sur le piquet de grève. La municipalité a aussi convaincu un juge d'imposer des amendes d'un million de dollar par jour de grève à l'Union locale 100 de la TWU (Syndicat des travailleurs des transports) qui représente les travailleurs des bus et du métro.

La Ville de New York a aussi demandé que les grévistes soient frappés d'une amende individuelle de 25 000 dollars pour le premier jour de grève, amende doublée pour chaque jour supplémentaire de grève et qui atteindrait plus d'un million de dollars en moins d'une semaine et pousserait les travailleurs et leurs familles à la faillite en bien moins de temps que cela. La MTA a aussi menacé de licencier tout travailleur ayant déjà participé à la grève de 1980 et qui aurait rejoint ses collègues dans le débrayage actuel. Il y eut aussi des appels insistants à incarcérer le président de l'Union locale 100 du TWU, Roger Toussaint, ainsi que d'autres permanents et des militants de base du syndicat.

L'énorme importance internationale de la grève des transports publics new-yorkais est qu'elle a fracassé l'image d'« unité nationale » monolithique américaine, que le gouvernement et les médias proclament à tout moment. Il y a aux Etats-Unis une force sociale puissante capable de lutter et de résister à la politique réactionnaire et inhumaine de l'oligarchie dirigeante, politique imposée non seulement aux Etats-Unis mais aussi internationalement.

De ce point de vue, il est particulièrement important de faire remarquer la diversité nationale, religieuse et ethnique des new-yorkais engagés dans cette bataille. Les travailleurs qui forment les piquets de grève viennent des quatre coins du monde. La solidarité des travailleurs des transports publics en grève représente, en microcosme, l'unité naissante de la classe ouvrière internationale.

Ceci est la première grève des travailleurs des transports publics de New York en 25 ans. Le débrayage de onze jours de1980 avait presque forcé la municipalité et l'Etat de New York à jeter l'éponge, mais il fut trahi par la direction syndicale qui signa un accord et accepta l'imposition d'amendes énormes entraînant pour chaque travailleur la perte de près d'un mois de salaire.

La trahison de cette lutte a crée les conditions pour une vague d'assauts contre les grèves et les syndicats et une vague de licenciements qui fut lancée un an plus tard par l'administration de Reagan (le président Ronald Reagan) avec le licenciement de 11 000 aiguilleurs du ciel et qui se propagea à travers toute l'industrie de base.

Ces attaques signifièrent la quasi élimination de la classe ouvrière comme force sociale visible, pendant toute une période aux Etats-Unis, et créèrent les conditions pour l'accumulation de vastes richesses telles celles des Bloomberg, Kalikow et Murdoch. Les administrations successives, démocrates comme républicaines, à tous les niveaux, national d'état ou de la municipalité, président depuis au vaste transfert de richesses de la classe ouvrière vers les élites financières et les couches supérieures des classes moyennes privilégiées. Les salaires réels stagnent ou baissent depuis des décennies, pendant que les acquis sociaux sont systématiquement démantelés.

Dans la ville de New York, les riches et les grandes sociétés ont été, en grande partie, soulagés du fardeau du financement d'un système de transports en commun public dont leurs affaires dépendent, puisque c'est sur le dos des travailleurs et des passagers que le coût a été transféré. L'émission de titres, comme source principale de financement de capital, a fait du travail des salariés des bus et du métro une source de profit de plus liée à la spéculation financière.

La signification internationale immense de cette grève des transports en commun c'est qu'elle projette la classe ouvrière américaine sur le devant de la scène comme une force sociale puissante propulsée dans la lutte sous la poussée impitoyable des grandes sociétés et des entreprises publiques qui cherchent à accroître leurs bénéfices en réduisant les emplois, les pensions et les droits médicaux.

Les travailleurs sont en position de force. La MTA et l'establishment au pouvoir ne peuvent remplacer 34 000 travailleurs et faire fonctionner l'énorme système de transports urbains avec de la main d'oeuvre jaune, comme cela fut fait avec les aiguilleurs du ciel de PATCO. Ils ne peuvent pas sous-traiter les transports en commun ni les délocaliser dans un pays à bas salaires. En plus, le coût du débrayage pour les sociétés de la ville est évalué à des centaines de millions de dollars par jour. Les ultimatums et menaces frénétiques ne peuvent cacher la position de faiblesse de la municipalité et de l'état.

En même temps, la grève souligne l'énorme crise de perspectives et de direction politiques au sein de la classe ouvrière.

L'obstacle majeur à la victoire des salariés des transports en commun vient de leur propre direction syndicale. La TWU Internationale, syndicat dont l'Union locale 100 fait partie, a qualifié la grève d'illégale et de non autorisée. Le président du syndicat international, Michael O'Brien, intervint dans la réunion du conseil d'administration de l'Union locale 100 qui vota la grève. Il demanda à l'Union locale 100 d'accepter la proposition de la MTA et refusa d'autoriser la grève, ce qui prive les travailleurs des transports urbains de la ville du soutien logistique, juridique et financier payé par leurs propres cotisations. Lors des délibérations de la Cour, mardi, pour imposer des amendes à l'Union locale 100, les avocats de la TWU intervinrent pour préciser avec insistance que le syndicat ne portait aucune responsabilité pour la grève, car il s'y opposait.

Le site Internet de la TWU Internationale a affiché une déclaration qui appelle l'Union locale 100 à mettre fin à sa grève et à reprendre le travail. Des informations provenant de l'Union locale 100, entre temps, font savoir que la TWU menace de placer la section sous règlement judiciaire, démarche utilisée habituellement dans les cas de corruption avérée, où les dirigeants locaux sont remplacés par du personnel nommé par la TWU. Si elle entame cette procédure, la TWU donnera l'ordre aux travailleurs de quitter les piquets et ajoutera ses propres amendes à celles de la municipalité et de l'état à l'encontre de ceux qui refusent d'obtempérer.

On ne peut démontrer plus clairement la façon dont les syndicats officiels se sont transformés en instruments pour étouffer les luttes des travailleurs et pour faire obstacle à toute contestation du capitalisme américain. Ils ont intégré le Parti démocrate, défenseur sans faille de l'oligarchie financière, tout en encourageant des illusions infondées selon lesquelles ce parti est en quelque sorte « l'ami des travailleurs ».

La grève actuelle des transports urbains démontre encore une fois la nature frauduleuse de telles prétentions. Aucun dirigeant démocrate n'est monté au créneau pour défendre les salariés des bus et du métro contre les attaques brutales dont ils sont l'objet. La sénateur Hillary Clinton, par exemple, proclama sa « neutralité » dans cette bataille féroce, proposant ses services comme médiatrice, tout en déclarant son soutien à la Loi Taylor, arme principale utilisée pour forcer les travailleurs à se soumettre.

Plus clairement que tout autre événement de ces vingt dernières années, l'actuelle grève des travailleurs des transports urbains de la ville de New York confronte la classe ouvrière toute entière à la nécessité de développer une direction et une stratégie politiques nouvelles pour faire avancer sa lutte, basée sur un programme qui articule les intérêts et les besoins des travailleurs contre la chasse aux profits de l'élite financière.

Du fait que la grève des transports, comme toute lutte sociale sérieuse, oppose les travailleurs au système capitaliste tout entier, elle met à l'ordre du jour le besoin urgent de créer un mouvement politique de la classe ouvrière.

Pour que cette grève réussisse, les travailleurs des transports urbains doivent être guidés par une perspective qui rejette les prémisses sociales, économiques et politiques de l'oligarchie financière et de ses partis politiques. Les exigences incessantes de réductions du niveau de vie des travailleurs démontrent clairement que les intérêts de ces derniers sont incompatibles avec les exigences du système capitaliste.

Nous appelons tous les travailleurs et tous les jeunes qui sont en accord avec cette perspective à lire le World Socialist Web Site et à adhérer au Parti de l'égalité socialiste.


 

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