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Une autre provocation de la part de Bush : Wolfowitz nommé pour diriger la Banque mondiale

Par Kate Randall
19 mars 2005

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La décision de George W. Bush la semaine dernière de proposer la nomination du secrétaire adjoint à la défense Paul Wolfowitz à la tête de la Banque mondiale constitue une mesure agressive qui souligne à quel point l'administration Bush n'a pas l'intention d'abandonner sa politique unilatéraliste et militariste de domination mondiale. La nomination de cet homme justement méprisé à travers le monde pour être un artisan majeur de la guerre illégale contre l'Irak - et considéré comme un criminel de guerre - représente une provocation politique, particulièrement à l'endroit des alliés européens de l'Amérique.

Ce geste devient encore plus provocateur en considérant qu'il survient tout juste après le choix de Bush plus tôt ce mois-ci de nommer John Bolton, agent de droite de longue date en matière de politique étrangère, comme ambassadeur à l'Organisation des Nations Unies.

La nomination de Wolfowitz doit être approuvée par les 23 membres du Conseil d'administration de la Banque mondiale.

La réponse de la plupart des gouvernements européens face à cette annonce fut résumée par la publication allemande Spiegel Online (17 mars) : « Trois semaines à peine se sont écoulées depuis le passage à travers l'Europe du président des États-Unis George W. Bush. Celui-ci distribuait les sourires et les paroles de bonne volonté comme une reine de défilé du 4 juillet lancerait des bonbons à la foule. Il lance maintenant, selon la perspective d'un grand nombre d'Européens, des oeufs pourris. Le continent n'est pas satisfait. »

L'ancienne Secrétaire d'État au Développement international du Royaume-Uni, Clare Short, a affirmé : « Ceci est vraiment scandaleux. C'est comme s'ils essayaient de détruire nos systèmes internationaux. » Michael Müller, vice-président du groupe parlementaire social-démocrate à la chambre des députés allemands, a décrit ce choix comme étant « horrifiant. »

Le niveau de cynisme associé à cette nomination est vraiment remarquable si l'on considère que Wolfowitz le belliciste a été sélectionné à la tête du corps des Nations Unies qui déclare que sa mission est de « combattre la pauvreté et améliorer le niveau de vie des gens des pays en développement. » Wolfowitz est après tout l'homme dont les plans d'attaquer et de soumettre le peuple irakien ont entraîné la mort et la misère pour des centaines de milliers de personnes dans ce pays.

La nomination de Wolfowitz par l'administration Bush ne constitue pas simplement un geste symbolique. Cela témoigne d'une détermination de transformer la Banque mondiale en un instrument direct de la campagne de l'impérialisme américain pour l'hégémonie mondiale -punissant les « états voyous » considérés comme faisant obstacle aux objectifs américains et garantissant des prêts et subventions aux pays les plus pauvres afin de les intégrer aux politiques austères du « marché libre » et de les rendre vulnérables à l'exploitation illimitée des entreprises et des banques.

Un éditorial du Wall Street Journal dans l'édition du 17 mars donne l'allure de l'activité d'une Banque mondiale qui serait dirigée par Wolfowitz. L'éditorial déplore le fonctionnement actuel de la banque qualifié de « bureaucratie dysfonctionnelle nécessitant une profonde réforme si elle veut regagner la confiance des contribuables américains et survivre en tant qu'institution pertinente au 21me siècle. » L'article critique l'actuel président de la Banque mondiale, James Wolfensohn, qui se retirera en juin. Celui-ci consacrerait « beaucoup de temps à réprimander les états démocratiques donateurs pour leur réticences à accorder des largesses, comme si un autre 100 milliards de dollars serait tout ce qui séparerait les pauvres de leur rédemption. »

Les références de Wolfowitz pour le poste à la Banque mondiale, selon le Wall Street Journal, sont rehaussées par ses rôles de secrétaire d'état adjoint aux affaires du Pacifique et de l'Est asiatique (1982-1986) et d'ambassadeur en Indonésie (1986-1989). Le journal décrit son temps passé à ces postes comme une époque «où les avantages des réformes vers le libre marché s'épanouissaient dans cette partie du monde». En réalité, ce butin était réservé à la minuscule élite économique asiatique au moment même où les masses de la région étaient plongées encore plus profondément dans la pauvreté.

L'éditorial du Journal conclut avec cette déclaration remarquable : « En réalité, ce sont les dictateurs du monde qui représentent les causes maîtresses de la pauvreté mondiale et il nous apparaît que si quelqu'un peut tenir tête aux Robert Mugabe de ce monde, cela doit être celui qui a tenu tête à Saddam Hussein. »

La signification de ces lignes est claire : à travers la position de Wolfowitz comme tête dirigeante de la Banque mondiale, l'administration Bush cherche à utiliser l'organisme comme une matraque financière contre tout pays qui ne se conformerait pas à sa version de la « démocratie » - code signifiant l'ouverture des ressources et de la force de travail d'une nation à l'exploitation d'entreprises américaines transnationales.

Paul Wolfowitz a, depuis des décennies, affiné ses aptitudes pour mener une telle tâche, tant d'un point de vue idéologique que pratique. En tant que sous-secrétaire d'état à la politique du Pentagone dans l'administration de George Bush père, il supervisa la rédaction du « Guide de planification de la défense pour les années fiscales 1994-1999. » Ce document, émis pendant les contrecoups de la chute de l'Union Soviétique, décrivait clairement une politique militaire unilatéraliste de domination mondiale visant à repousser toute menace provenant de rivaux actuels ou potentiels de Washington. Il statuait que le but central de la politique américaine était d'empêcher la montée de toute puissance internationale ou régionale qui pourrait concurrencer les intérêts américains.

Le document faisait la promotion d'une doctrine d'action militaire unilatérale et de guerres préventives par les États-Unis, affirmant que « l'ordre mondial est soutenu au bout du compte par les États-Unis » et que « les États-Unis devraient être positionnés pour agir indépendamment lorsque l'action collective ne peut être orchestrée » ou lorsque les autorités américaines détermineront qu'une réponse militaire immédiate serait nécessaire pour défendre les intérêts américains.

Le document constituait un horrible présage des actions qui seraient prises une décennie plus tard contre l'Irak : « Les États-Unis seront peut-être confrontés à la problématique d'utiliser la force militaire pour empêcher le développement ou l'utilisation d'armes de destruction massive punissant les attaquants ou menaçant de châtiment les agresseurs à travers divers moyens. »

Suite à la première guerre du Golfe, Wolfowitz ne fut pas d'accord avec la décision de George Bush père de laisser Saddam Hussein au pouvoir mais il fut forcé d'attendre une décennie pour obtenir une autre opportunité d'envahir l'Irak et d'évincer le chef irakien. Quelques jours seulement après les attaques terroristes du 11 septembre 2001, il plaida dans l'administration Bush pour un assaut sur l'Irak, un plan qui s'est concrétisé voilà maintenant deux ans.

Wolfowitz était un des principaux personnages de l'administration à argumenter en faveur de l'invasion sur la base de fausses affirmations qui stipulaient que le régime Hussein possédait des armes de destruction massive et qu'il possédait des liens avec le réseau Al Quaida et les attaques du 11 septembre. Lorsqu'il devint clair, après un an de recherche, que ces affirmations étaient fausses, il soutena que « les renseignements flous » étaient suffisants pour justifier le déclenchement d'une attaque préventive sur l'Irak, ou tout autre pays.

Quelles sont les autres compétences de Wolfowitz pour le poste de la Banque mondiale ?

* Il est chef idéologique et membre fondateur de l'organisme d'extrême droite, Projet pour un nouveau siècle américain. La Déclaration de Principes de celui-ci, en 1997, appelle à l'établissement d'un empire américain mondial qui soumettrait les pays « hostiles envers nos intérêts et nos valeurs » par la force militaire.

* Il est un personnage central de la direction du Pentagone, celle-ci incluant le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld ainsi que d'autres fonctionnaires civils et militaires, qui autorisa la torture de prisonniers en Afghanistan, en Irak, à Guantanamo Bay et ailleurs.

* Sioniste de ligne dure et ennemi de longue date des masses palestiniennes et arabes, il dénonce les militants palestiniens qu'il qualifie de « meurtriers » et il défend la répression du peuple palestinien par l'État d'Israël.

John Cavanagh de l'Institut pour l'évaluation des politiques écrit que Wolfowitz « pourrait poursuivre la grande tradition du président de la Banque mondiale Robert McNamara, qui a lui aussi, avant d'obtenir le poste, participé à la mort de dizaines de milliers de personnes dans un pays pauvre qui ne saurait être trouvé sur une carte géographique par une majorité d'Américains. »

Cavanagh fait ici référence à la nomination en 1967 par Lyndon Johnson du secrétaire à la Défense Robert McNamara - un des principaux artisans de la « guerre non conventionnelle » et de la « contre-insurrection » dans le massacre au Vietnam - pour diriger la Banque mondiale. Des comparaisons ont ainsi été faites entre la promotion de McNamara du ministère de la Défense à la Banque mondiale et la nomination de Wolfowitz par Bush.

Les parallèles que l'on peut tirer ont toutefois des limites bien précises. McNamara était à l'époque, et à juste titre, considéré comme un criminel de guerre par des millions de gens à travers le monde. Il était par contre un démocrate libéral de la guerre froide à une époque où l'élite dominante américaine cherchait encore à allier sa politique étrangère impérialiste à une politique intérieure de réformes sociales. Malgré les crimes des États-Unis au Vietnam, la désignation de McNamara à la Banque mondiale ne signifia pas, et ne fut pas perçue comme une déviation de l'image soigneusement cultivée de largesse humanitaire de cet organisme.

De plus, Johnson fit, en grande partie, le choix de McNamara pour le poste à la Banque mondiale car le secrétaire à la Défense était devenu critique de la politique de l'administration face à la guerre du Vietnam. Si ce n'est pas un secret que Wolfowitz est méprisé par certaines sections de l'état-major militaire américain, aucun signe ne permet d'affirmer qu'il est catapulté à un poste supérieur pour avoir développé des doutes sur le programme militariste du gouvernement.

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