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47.600 travailleurs de GM et Delphi acceptent des départs volontaires: un vote de non-confiance envers les Travailleurs unis de l’automobile

Par Andre Damon et Barry Grey


Dans ce qui constitue la plus grande restructuration corporative dans l’histoire de l’industrie automobile aux États-Unis, General Motors a annoncé lundi que 47.600 travailleurs de GM et Delphi avaient accepté le programme de retraites anticipées et départs volontaires.

Le nombre de travailleurs prêts à accepter les offres de départ a même excédé les prévisions les plus ambitieuses, atteignant ainsi deux ans plus tôt que prévu l’objectif de réduction de 30.000 travailleurs que s’était fixé GM. Ces chiffres sont l’expression renversante et indubitable du mépris des travailleurs de l’automobile pour les dirigeants des Travailleurs unis de l’automobile (TUA), et de leur conclusion tout à fait justifiée que le syndicat ne veut pas et ne peut pas défendre leurs intérêts.

L’exode massif atteste du fait que le syndicat a été transformé en un instrument d’une bureaucratie privilégiée et corrompue qui n’a pas à répondre de ses actes devant les membres, et qui est perçue par eux comme une force étrangère et hostile. Si les TUA étaient d’une quelconque façon une véritable organisation ouvrière, à laquelle pourraient s’identifier les travailleurs et qui serait contrôlée démocratiquement par eux, les travailleurs rejetteraient en masse les pressions de la compagnie visant à les expulser et se tourneraient vers le syndicat pour qu’il les défende. Ici, c’est plutôt le contraire.

Coincés entre la possibilité d’accepter une offre de départ ou demeurer à l’emploi et devoir faire face à des réductions toujours plus importantes en termes de salaire, indemnités et pension, en plus de la menace constante d’être congédié, un tiers de la main d’oeuvre américaine de GM a décidé de quitter, même si les conditions de départ offertes par la compagnie, et acceptées par les TUA, assurent qu’un grand nombre aura à faire face à des difficultés et de l’insécurité économiques.

Les travailleurs qui ont accepté les offres de départ – 35.000 de GM et 12.600 du fabriquant de pièces automobiles Delphi – l’ont fait en sachant que les TUA s’apprêtent à aller plus loin que leurs précédentes trahisons et à collaborer avec GM dans la destruction des gains les plus fondamentaux que les travailleurs de l’automobile ont arrachés aux patrons durant plus de 70 années de lutte.

Le «Programme spécial de réduction» de GM est conçu pour inciter les travailleurs qui ont beaucoup d’ancienneté à prendre leur retraite plus tôt, permettant aux travailleurs qui ont été employés par la compagnie durant plus de 26 ans de prendre une retraite avec complètes prestations. Bien sûr, ces travailleurs devront renoncer à des années de travail et aux chèques de paye qui y sont associés, et ils devront vivre avec des régimes de pension beaucoup moins importants.

Les travailleurs qui ont moins d’ancienneté pourront conserver leur fond de pension, mais n’auront pas droit aux prestations de retraite.

Pour les employés qui ont plus que les 30 ans d’ancienneté requis pour les prestations complètes, le programme de réduction leur fournit un maigre $35.000 s’ils choisissent de quitter maintenant.

Le programme offre aussi des indemnités forfaitaires allant de $70.000 à $140.000. Les travailleurs employés par GM durant plus de 10 ans sont éligibles à une prime de départ de $140.000, impliquant l’annulation totale des indemnités (excluant les sommes investies dans le régime de retraite). Les employés avec moins de 10 ans d’ancienneté obtiennent un paiement de $70.000 sous des conditions similaires.

Des 35.000 travailleurs de GM qui ont accepté les offres de départ, 30.400 ont choisi la retraite anticipée et 4.600 le départ volontaire. Parmi les travailleurs qui quittent, 33.800 sont représentés par les TUA et 1.200 par le IUEW (International Union of Electrical Workers – Syndicat international des travailleurs de l’électricité). Delphi a mis de l’avant un programme semblable d’indemnité de départ, que 12.600 de ses 33.000 travailleurs syndiqués ont accepté.

GM avait planifié de couper 30.000 emplois des 113.000 de sa main-d’oeuvre américaine d’ici 2008, mais la vague de travailleurs qui quittent lui permettront d’atteindre son quota de réduction d’ici la fin de l’année. Cette réduction de la main-d’oeuvre s’ajoute à celle de l’année dernière, où 6.500 emplois syndiqués avaient été éliminés.

Malgré le plus grand nombre de départs de ses employés, GM a déclaré qu’elle ne fermera pas plus d’usines à court terme. Les analystes ont indiqué que cela pourra résulter en une pénurie de travailleurs et une production chaotique alors que la société tente de réorganiser ses employés. GM considère fermer 12 usines et centres d’ingénierie d’ici 2008.

Le programme de retraite anticipée et d’incitations au départ coûtera environ 3,8 milliards de dollars à GM en paiements et en ajustements de primes, mais il lui permettra de réduire ses frais d’exploitation de façon importante. Lors d’une conférence de presse qu’il donnait lundi dernier, le PDG Rick Wagoner a annoncé que le nombre de départs plus élevé que prévu permettait à la société de réviser sa cible de réduction de coûts structuraux à 8 milliards $ (7 milliards $ auparavant).

Selon l’analyste David Healy de Burnham Securities, beaucoup des travailleurs qui laisseront GM seront remplacés par des travailleurs temporaires payés à 19 dollars l’heure, soit 30 pour cent moins que le salaire horaire d’un travailleur permanent. De plus, ils ne reçoivent aucun avantages sociaux.

Il faut contraster ces chiffres avec les travailleurs sortants qui reçoivent 80 dollars l’heure en salaire, avantages sociaux et retraites. Annuellement, ceci se traduit par des économies de coûts d’environ 129.000 $ par travailleur, en ne comptant pas les heures supplémentaires.

Chez Delphi, les nouveaux embauchés se verront offrir 14 dollars l’heure sans avantages sociaux. La société a déjà embauché 2000 travailleurs temporaires pour remplacer une partie des employés sortants.

Les nouveaux travailleurs temporaires seront forcés, en vertu de l’entente intervenue entre les TUA et les patrons de l’industrie automobile, d’adhérer au syndicat et de payer leurs cotisations à la bureaucratie des TUA.

Le fait qu’un grand nombre de travailleurs de l’automobile décident d’accepter une offre de départs volontaires et de retraites anticipées est le résultat de plusieurs décennies de trahison par la bureaucratie des TUA. Le rôle du syndicat dans la répression de la résistance des travailleurs et sa collaboration dans les attaques de la compagnie est reflété par l’effondrement presque total du nombre d’adhérents aux TUA. Plus tôt ce mois-ci, dans son rapport à la convention des TUA à Las Vegas, les dirigeants du syndicat ont reconnu que le nombre d’adhérents avait chuté de son niveau le plus haut de 1,5 million à 557,000, le plus bas niveau depuis 1942.

Ne voyant que d’autres trahisons dans le futur, beaucoup de travailleurs plus âgés voient ces offres de départs volontaires et de retraites anticipées de GM comme la seule manière de conserver une certaine partie des indemnités pour lesquelles ils auront travaillé durant la majeure partie de leur vie.

Les travailleurs de GM et Delphi n’ont pas accepté les conditions offertes dans le programme de réduction parce qu’ils les considéraient justes ou adéquates. Un grand nombre de travailleurs devront faire face à des difficultés financières sans garantie sérieuse que les prestations de retraite promises par GM seront honorées. Delphi en est un bon exemple. La plus grande compagnie de pièces automobiles, créée à partir d’une division de GM en 1999, s’est mise sous la protection de la loi sur la faillite en octobre dernier et a rapidement exigé que ses employés syndiqués acceptent de baisses de salaire de 60 pour cent et de larges réductions dans l’assurance santé, les régimes de pensions et autres indemnités.

GM et les TUA ont tous deux fait comprendre aux travailleurs de GM que le fabricant d’autos pourrait bien suivre la même voie comme moyen de chantage pour les forcer à accepter d’autres concessions et coupures d’emplois.

Le sort des employés ayant accepté des départs volontaires est particulièrement tragique. Au lieu des prestations de retraite le reste de leur vie que plusieurs attendaient, les travailleurs qui choisissent un départ volontaire n’auront finalement que l’équivalent d’une année ou deux de salaires et primes.

L’automne dernier, GM et les TUA ont imposé un programme sans précédent de concessions selon lequel les travailleurs à la retraite devront payer des centaines de dollars pour contribuer à leur assurance médicale et les travailleurs actifs retarder les hausses salariales auxquelles ils ont droit pour subventionner les frais médicaux de la compagnie.

Les remarques faites par le président des TUA Ron Gettelfinger au congrès du syndicat ce mois-ci n’ont laissé aucun doute que ces concessions n’étaient qu’un début. Il a déclaré que les fabricants d’auto faisaient face à une crise sans précédent et à long terme, et fait comprendre que le syndicat y répondrait en acceptant d’autres coupures dans l’assurance santé, les pensions, les salaires et les emplois. Le discours, prononcé quelque deux semaines avant l’échéance qu’avait chacun des travailleurs pour décider d’accepter ou non l’offre de départ, visait en grande partie à convaincre le plus grand nombre possible de travailleurs à partir.

Les TUA ont adopté une politique consistant à travailler avec les compagnies pour sabrer dans la force de travail actuelle et la remplacer par du sang frais – des travailleurs plus jeunes qui seront forcés de remplir les mêmes tâches à une fraction du salaire et sans les avantages sociaux (couverture médicale, pensions) des travailleurs plus âgés. Ils ont entrepris délibérément de réduire de façon significative le coût du travail, dans l’espoir de pouvoir stopper le déclin des revenus tirés des cotisations en garantissant aux compagnies d’automobile, à la manière d’une agence de placement, qu’elles auront accès à une source de travailleurs pas chers et très exploités, qui devront payer des cotisations syndicales comme condition pour trouver un emploi.




 

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