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La conférence de presse de Bush sur l’Irak : « Nous ne nous retirerons pas tant que je serai président. »

Par Patrick Martin
24 août 2006

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Lundi, la conférence de presse du président Bush a donné un aperçu de l’aggravation de la crise politique de l’administration Bush à propos de l’échec de ses politiques en Irak et au Moyen-Orient. Durant toute la conférence, Bush a été sur la défensive, ayant de la difficulté à répondre à des questions qui, si elles n’étaient pas ouvertement hostiles, attiraient l’attention sur les contradictions des raisons données pour son changement par rapport à la guerre en Irak.

Même si Bush a débuté par une déclaration sur le Liban, la presse est revenue sans cesse sur la guerre en Irak, sur l’état de sécurité qui se détériore dans le pays et sur l’appui en baisse de la population américaine pour la guerre.

Le changement de l’opinion publique par rapport à la guerre a été si grand que Bush lui-même a été forcé d’admettre l’étendue de l’opposition des masses. Il a fait plusieurs commentaires à ce sujet, de toute évidence préparés d’avance, reconnaissant l’opposition tout en déclarant que c’était une erreur :

 « Il y a beaucoup de personnes, de bonnes et de braves personnes, qui disent : retirez-vous maintenant. Ils ont complètement tort. Ce serait une grave erreur pour ce pays. »

 « Il y a beaucoup de bonnes et de braves personnes qui disent : sortez maintenant ; votez pour moi ; je ferai tout ce que je peux pour couper les vivres, et je crois que c’est ce qu’ils tentent de faire pour faire sortir les troupes. C’est une grave erreur. »

 « Et il y a une différence fondamentale entre beaucoup de démocrates et mon parti. C’est ceci : ils veulent se retirer avant que la tâche ne soit complétée en Irak. Et je le répète encore : ce sont de braves personnes. Elles sont aussi américaines que je le suis. Je suis simplement en total désaccord avec elles. »

 « Je ne mettrai jamais en doute le patriotisme de quelqu’un qui n’est pas d’accord avec moi. Cela n’a rien à voir avec le patriotisme. Cela a tout à voir avec la compréhension du monde dans lequel nous vivons. »

Ces questions ont été évidemment les principaux sujets que Bush a dû pratiquer avant la conférence de presse. Elles reflètent les inquiétudes devant le fait que les attaques à la Mccarthy sur les opposants de la guerre en Irak par le vice-président Cheney, l’adjoint politique en chef de Bush, Karl Rove, et d’autres porte-parole républicains se sont retourné contre l’administration, provoquant une opposition populaire encore plus grande envers elle.

À un certain moment, on demanda directement à Bush de parler des récents commentaires de Cheney. Il avait dit que les électeurs du Connecticut qui avaient refusé de voter pour le sénateur démocrate Joseph Lieberman à cause de son appui pour la guerre en Irak « encourageaient les gens du type al-Qaïda. »

Bush a répété le mantra que « quitter l’Irak avant la fin de la mission enverrait le mauvais message à l’ennemi et créerait un monde plus dangereux ». Il a cherché à adoucir les calomnies contre les opposants de la guerre, ajoutant « Ceci est un débat honnête et il est important que les Américains écoutent et participent à ce débat. »

Ce changement de position est purement cosmétique. Malgré la rhétorique conciliante de lundi, la Maison-Blanche et le Comité national républicain cherchent à fouetter l’appui de droite pour les élections de novembre en suggérant que l’opposition à la guerre en Irak est une trahison.

Pour cette raison, Bush exagère grossièrement la crédibilité de la position « anti-guerre » des démocrates au Congrès, qui appuient les buts de la guerre — la conquête de l’Irak pour le contrôle des ressources en pétrole et l’avantage stratégique au Moyen-Orient — mais ont critiqué l’incompétence de l’administration dans l’exécution de son exercice néocolonial.

Le vide des déclarations de Bush sur la nécessité et la légitimité du débat politique est révélé par son refus d’actuellement engager la discussion et de répondre aux arguments de ceux qui s’opposent à la guerre. Sa version du « débat » était de répéter, presque comme un robot, son autre point principal du jour, la nécessité de « terminer le travail » en Irak.

Bush a écarté une question à savoir si l’invasion américaine avait empiré la situation en Irak, repétant pour la millième fois la prétention de son administration depuis longtemps discréditée selon laquelle Saddam Hussein était une menace pour le monde et était sur le point de construire des armes de destruction massive.

Il refusa de considérer sérieusement le conflit croissant entre les sunnites et les chiites en Irak, malgré les déclarations de ses principaux généraux selon lesquels le pays est peut être sur le bord de la guerre civile et que les morts du conflit sectaire, non pas d’attaques terroristes, sont les principales menaces à la stabilité du régime d’occupation américaine.

Le refus de faire face à la réalité est devenu la cible des critiques dans la plupart des principaux journaux. Le commentateur Eugene Robinson du Washington Post, par exemple, cite Bush concernant l’augmentation du nombre de morts dans la population civile et demande : « Croit-il que ce serait un signe de faiblesse que d’admettre que l’éclosion de la démocratie en Irak ne va pas comme prévu ? Croit-il que de dire que tout est correct va arranger les choses ? Est-il dans le déni ? Ou bien, 3438 morts coulent-elles comme de l’eau sur le dos d’un canard après ses exercices et sa belle randonnée à bicyclette ? »

A un moment donné, questionné si l’Irak avait quelque chose à voir avec les attaques terroristes du 11 septembre 2001, Bush admit gaiement, « rien ». Il ajouta ensuite « Jamais personne n’a suggéré que les attaques du 11 septembre avaient été commandées par l’Irak. »

En fait, virtuellement tous les hauts dirigeants de l’administration ont fait ce lien, incluant le vice-président Dick Cheney, qui colporta la prétention, longtemps après qu’elle ait été discréditée, que le dirigeant allégué des attentats du 11 septembre, Mohammed Atta avait rencontré des agents irakiens en République Tchèque avant l’attaque. Condoleezza Rice disait que le prochain 11 septembre serait un « nuage en forme de champignon » si le cas de Saddam Hussein n’était pas réglé.

Bush a aussi déformé la base de l’opposition à la guerre, suggérant qu’elle n’était simplement que de la sensiblerie envers le bain de sang en Irak. « Vous savez, personne n’aime voir des innocents mourir, a-t-il dit. Personne ne veut voir tous les jours à la télévision le chaos résultant de l’action des terroristes. »

L’opposition à la guerre est alimentée, toutefois, par la révulsion populaire envers le chaos résultat de l’action des Etats-Unis, ainsi que des ses alliés britanniques et israéliens, dans la région. Plus fondamentalement, les éléments les plus conscients politiquement de l’opposition populaire à la guerre en Irak ne rejettent pas seulement les méthodes employées par les impérialistes, mais leurs objectifs. Ces objectifs ne consistent pas à la soi-disant démocratisation du Moyen-Orient, mais à la réduction de l’Irak, le Liban, la Syrie, l’Iran et les autres pays au statut de semi-colonie entièrement subordonnée aux intérêts du capitalisme américain.

Alors que Bush a plusieurs fois déclaré que l’objectif des Etats-Unis en Irak était de développer la démocratie, il a été clair qu’il ne se sentait pas lié par la volonté démocratique du peuple américain. Peu importe le sentiment populaire aux Etats-Unis, il a déclaré : « Nous ne nous retirerons pas tant que je serai président. »

Cette contradiction a été énoncée dans deux commentaires de Bush lors de la conférence de presse. Il a déclaré que la « guerre au terrorisme » était dirigée contre une idéologie opposée à la démocratie : « Et la seule façon de défaire cette idéologie à long terme est de la défaire au moyen d’une autre idéologie, une idéologie concurrente, une qui — où le gouvernement répond à la volonté du peuple. »

Mais vers la fin de la conférence de presse, lorsqu’on lui demanda s’il espérait toujours convaincre le peuple américain ou « si c’était le genre de chose que vous faite parce que vous pensez que c’est juste et que vous n’êtes pas préoccupé par le fait que vous n’aurez jamais l’appui populaire pour la réaliser », Bush répondit carrément : « Regardez, je vais faire ce que je crois être juste et si, vous savez, si les gens ne m’aiment pas pour cela, ça sera comme ça. »

La politique de Bush n’est pas plus imputable devant la « volonté du peuple » irakien, les troupes américaines demeurant en Irak peu importe ce qui arrivera, jusqu’à la fin de son mandat.

De telles assertions soulèvent inévitablement la question de ce que fera Bush si la majorité du peuple irakien ou du peuple américain cherche à mettre fin au bain de sang avant le 20 janvier 2009.

Les déclarations catégoriques de Bush impliquent que son administration ne reconnaît aucune contrainte sur ces pouvoirs de guerre et sera prête à défier le Congrès dans le cas improbable où ce dernier lui imposerait une date butoir pour le retrait des troupes américaines. Quant à la situation politique en Irak même, si le régime prétendument souverain et élu démocratiquement tentait de couper ses liens et de répondre aux sentiments populaires en demandant le retrait des forces américaines, les Etats-Unis n’auraient aucun scrupule à organiser un coup et installer un nouveau gouvernement.

 

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