wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

Collecte de fonds record pour l’élection présidentielle américaine : la meilleure élection que l’on puisse trouver sur le marché

Par Bill Van Auken
9 avril 2007

Imprimez cet article | Ecrivez à l'auteur

Les responsables de la campagne de Barack Obama ont annoncé jeudi que le sénateur de l’Illinois avait amassé au moins 25 millions $ depuis le début de l’année dans la course à la nomination présidentielle pour le Parti démocrate. Avec cette annonce, le rôle prépondérant que jouera l’argent dans les élections 2008 est apparu encore plus clairement.

Les sommes colossales à la disposition d’Obama sont comparables à celles dont dispose Hillary Clinton, qui a déclaré avoir amassé 26 millions $ au premier trimestre de 2007. Ces sommes sont au moins trois fois plus élevées que ce qui avait été amassé à la même date dans les campagnes précédentes par n’importe quel candidat, tous partis confondus. John Edwards détenait le  précédent record de 7,4 millions $ en 2003.

Pour la campagne Clinton, le résultat inattendu d’Obama représente un coup politique. Ses responsables avaient espéré écraser les rivaux potentiels de Clinton en annonçant une avance insurmontable dans la course à l’argent.

En tête de peloton chez les républicains, on trouve l’ancien gouverneur du Massachusetts et spécialiste du capital risque Mitt Romney, qui a amassé 23 millions $, bien que, selon les sondages, il n’obtienne le soutien que d’un peu plus de 3 pour cent des électeurs républicains.

Entre temps, la campagne d’un des principaux rivaux républicains de Romney, le sénateur de l’Arizona John McCain, se trouve dans une crise sérieuse du fait qu’il n’a réussi à récolter que 12,5 millions. Des reportages font état de remaniements de personnel et du report de l’annonce officielle de sa candidature.

Les fonds de campagne annoncés à ce jour par les candidats des deux principaux partis se chiffrent à un total de 130 millions $. Des chiffres plus précis — qui détailleront combien d’argent a été récolté pour les primaires des partis contrairement aux sommes pour l’élection générale, combien a déjà été dépensé et quelques indications sur la provenance de ces sommes — sont attendus pour le 15 avril.

Ce qui est le plus frappant en ce début de course présidentielle 2008, c’est l’acceptation universelle par l’establishment politique, les deux principaux partis et les médias, que de telles sommes d’argent, provenant pour la plupart d’une élite financière et de grandes entreprises fabuleusement riches, puissent jouer un rôle aussi important pour déterminer la viabilité et, en fin de compte, la sélection du candidat.

Cette acceptation ne trouve, en aucune façon, d’écho dans l’ensemble de la population. Le spectacle qu’offrent les candidats se rendant d’un endroit à l’autre du pays dans un tourbillon incessant de campagne de financement visant à obtenir les faveurs de la mince couche des multimillionnaires et des milliardaires ne fait que renforcer le cynisme et l’aliénation envers tout le processus électoral.

Associated Press a rapporté un incident révélateur mercredi. Barak Obama, prenant la parole dans la Salle Vétérans des guerres à l’étranger, à Rochester dans l’état du New Hampshire « a été confronté par un membre de l’auditoire qui lui a dit "Je ne veux pas que ce soit l’argent qui choisisse mon prochain président. Je veux le choisir moi-même." »

Ces sentiments sont sans aucun doute partagés par beaucoup, mais ils sont peu exprimés dans les deux partis contrôlés par la grande entreprise. Les réalités de la vie politique dans ces institutions corrompues et réactionnaires s’expriment parfaitement à travers les paroles d’un des plus importants collecteurs de fonds de Hillary Clinton, John Catsimatidis, magnat multimillionnaire des supermarchés à New York qui se décrit comme un ancien républicain de l’ère Reagan.

Ne prenant pas au sérieux la montée rapide des contributions pour Obama, Catsmatidis a prédit qu’il ne serait pas en mesure de maintenir des entrées d’argent comme celles de Clinton qui peut compter sur de solides connections avec les grandes compagnies pharmaceutiques, Wall Street et les propriétaires d’empires médiatiques comme Rupert Murdoch de Fox News. « Peu importe ce qu’il annonce, a déclaré Catsimatidis, au bout du compte, ce sont les Clinton qui sont choisis ».

La reconnaissance officielle du rôle déterminant joué par ces immenses sommes d’argent a été exprimée par le président de la Commission fédérale des élections, Michael Toner, qui a déclaré le mois dernier au Washington Post : « On sent de plus en plus qu’il y aura un droit d’entrée de 100 millions $ à la fin de 2007 pour être considéré comme un candidat sérieux. »

On pense que l’élection de 2008 devrait sonner le glas pour le système de financement public des campagnes mis en place en 1976 en tant que soi-disant remède à la corruption totale en matière de financement des campagnes, une question sous-tendant la crise du Watergate qui avait entraîné la chute de Richard Nixon.

Pour la première fois, on anticipe que les candidats des deux principaux partis se passeront du financement fédéral — qui impose des limites sur les dépenses et les collectes de fonds privées — à la fois pour les primaires et l’élection générale étant donné leur capacité à récolter beaucoup plus du privé et des donateurs des grandes entreprises. Hillary Clinton a déjà annoncé que le financement de sa campagne reposerait uniquement sur des fonds privés.

Une chose est sûre, c’est que le système actuel constitue une méthode de corruption légale des représentants publics, bien plus omniprésente et efficace que celle qui existait à l’époque de Nixon. Décrivant le processus, le Washington Post notait que « L’effet concret d’une course accélérée de collecte de fonds est que les candidats qui ne bénéficient pas d’une reconnaissance nationale ou d’un réseau national de donateurs doivent ratisser le pays avec acharnement afin d’établir des liens avec de riches individus dans des Etats donateurs clé comme New York, la Californie et la Floride. »

Cette semaine, le New York Observer a décrit de façon juste la très longue parade de candidats qui a afflué à New York City au cours des derniers mois : « Certains soirs, ils se dirigent vers Park Avenue, d’autres, vers la Cinquième Avenue. Mais quelles que soient la variété des lieux ou des scènes — des complets à fines rayures de Wall Street un soir, des représentants des médias le jour suivant — l’objectif est toujours le même : faire des courbettes devant les riches et devant ceux qui ont des relations et recueillir le plus d’argent possible pour les primaires. »

La candidature « insurgée » de Barack Obama, qui a réussi à défier Hillary Clinton dans la si importante primaire de l’argent, est soutenue par exactement le même genre de personnes parmi lesquelles on compte des membres des familles milliardaires les plus en vue de Chicago, les Crown et les Pritzker.

Le gros de l’argent amassé par tous les candidats se présente sous forme de contributions « en liasses » (« bundled ») constituées par les collecteurs de fonds de l’élite financière, où les donateurs individuels donnent le maximum autorisé par la loi, soit 4600 $ — 2300 $ pour les primaires et 2300 $ pour les élections générales.

La campagne pour la réélection de Bush avait perfectionné cette méthode, donnant des titres à ces collecteurs de liasses (bundlers en anglais) : le titre de « pionnier » à celui qui collecte 100 000 $, de « combattant d’élite » à celui qui collecte 200 000 $ et « super combattant d’élite » à celui qui collecte 300 000 $.  De telles sommes sont accumulées par les très riches, qui puisent dans leur réseau de relations sociales, financières et d’entreprises.  C’est précisément ces types de réseaux qui sont utilisés par la campagne des Clinton et des autres aspirants démocrates. Dans le cas de Clinton, il est attendu que des collecteurs de fonds clés organisent des événements rapportant un million $ ou plus.

Le changement des dates de tenue des primaires en 2008 est une des raisons qui expliquent l’intensification de la pression pour amasser des contributions électorales toujours plus élevées, plusieurs États clés, comme la Californie et la Floride ayant avancé la date des élections au mois de février. Cela laisse prévoir que les deux principaux partis vont choisir, presque neuf mois avant l'élection, des candidats de droite défendant la grande entreprise et déterminés à continuer la guerre à l’étranger et la réaction sociale dans le pays.

L’augmentation vertigineuse du financement privé pour les campagnes électorales aux États-Unis, va de pair avec le virage à droite des deux partis, et ce n’est certainement pas une coïncidence.  Il y a, à n’en pas douter, un élément significatif de donnant-donnant dans ce processus  où de riches donateurs s’assurent un appui pour la défense de leurs intérêts politiques et sociaux en retour de généreuses contributions.

Plus fondamentalement, cependant, le resserrement accru de l’étau exercé par l’élite financière sur la politique officielle reflète l’inégalité sociale sans précédent qui prévaut dans tous les aspects de la société américaine.

Le rôle excessif joué par l’argent dans la vie politique du pays reflète la réalité sociale où l’on voit les 300 000 Américains les plus riches, soit 0,1 pour cent de la population, recevoir un revenu combiné plus élevé que celui des 150 millions de personnes, soit la moitié de la population, qui se trouvent en bas de l’échelle économique.

Aujourd’hui, un PDG moyen a un salaire 821 fois plus élevé que celui d’un travailleur au salaire minimum. En 1978 seulement, un PDG recevait 78 fois le salaire versé à un travailleur au salaire minimum.

Ce niveau de polarisation sociale rend impossible l’existence d’une véritable forme de représentation démocratique. Au lieu de cela, les institutions politiques et les deux partis de la grande entreprise gouvernent au nom d’une oligarchie financière, mettant en œuvre des politiques — allant des diminutions d’impôt pour les riches à la guerre d’agression — qui visent à accélérer le transfert de la richesse sociale de la vaste majorité de la population laborieuse aux Etats-Unis et du monde entier entre les mains d’une infime minorité. 

Pour assurer leur emprise sur ce système, cette élite injecte de plus en plus de ressources dans un processus qui devient de plus en plus vide et corrompu, et duquel la vaste majorité de la population est aliénée, réduite au statut de spectateur hostile à une mascarade dans laquelle l’argent choisit son représentant.

Cette lutte grotesque entre des candidats quasiment interchangeables du Parti démocrate et du Parti républicain pour gagner « les primaires de l’argent » ne fait que souligner la nécessité pour les travailleurs de construire leur propre alternative politique indépendante au système biparti.

(Article original paru le 5 avril 2007)


Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés