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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Grande-Bretagne : les travaillistes attisent les préjugés anti-immigrés

Par Chris Marsden, candidat du Parti de l’égalité socialiste en Écosse de l’Ouest
28 avril 2007

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Une fois encore, un gouvernement travailliste désespéré et craignant l’effondrement électoral se lance dans une campagne xénophobe contre les immigrants. Et encore une fois, les quotidiens le Guardian et l’Observer, prétendus bastions de l’opinion libérale, se sont fait les porte-parole de la propagande gouvernementale et les apologistes des pires sentiments de droite.

Le 18 avril, le ministre de l’Immigration Liam Byrne, a déclaré que l’immigration nuisait aux pauvres de Grande-Bretagne et avait profondément nui au pays. En rendant publique sa contribution à une brochure intitulée Repenser l’immigration et l’intégration, publiée par le groupe d’experts, Policy Network, il a annoncé que de nouvelles mesures de contrôle de l’immigration seraient mises en oeuvre en Grande-Bretagne l’an prochain.

Cette déclaration fut faite alors que le Parti national britannique (BNP), un parti fasciste, organise une campagne électorale majeure dans les élections du Parlement écossais et de l’Assemblée galloise ainsi que dans les élections pour les conseils municipaux en Angleterre même. Quelques jours avant la déclaration de Byrne, plusieurs travailleurs avaient été horrifiés par l’exemple de sentiments racistes répugnants qui sont attisés par l’élite et les médias, lorsqu’une Algérienne demandant l’asile politique et son fils d’un an ont été assaillis sexuellement dans une attaque motivée par le racisme. La femme de 33 ans a été insultée, lapidée et frappée à coups de pieds par un groupe de jeunes hommes alors qu’elle promenait son fils dans son landau à Glascow. Un des assaillants s’est exhibé devant la femme et a sexuellement assailli la femme et l’enfant.

Au cours de la même semaine, la publication de données officielles établissant l’immigration nette en 2005 à 185 000 personnes, a été l’occasion pour David Conway, du groupe d’experts de droite, Civitas, d’accuser le gouvernement Blair d’avoir autorisé une « immigration de masse sans fin ». Selon Conway, le gouvernement Blair abandonnait son objectif de limiter le nombre de nouveaux travailleurs en provenance des pays de l’Europe de l’Est nouvellement membres de l’Union européenne. La Grande-Bretagne perd son identité en tant que nation et confronte la « désintégration politique », a-t-il ajouté.

Il n’y pas loin des déclarations de Byrne aux divagations de Conway, à part que le premier accepte les demandes de l’industrie pour une immigration accrue, jugée  vitale pour l’économie. À l’exception des immigrants essentiels au marché du travail britannique, toutefois, Byrne insiste que l’immigration doit être freinée.

Le fait qu’il présente ses arguments comme le fruit de ses « préoccupations » pour les travailleurs rend les affirmations de Byrne encore plus grotesques.

« L’immigration doit servir les intérêts nationaux de la Grande-Bretagne, a-t-il déclaré. Un nouveau système de pointage à l’australienne serait plus simple, plus clair et plus facile à imposer », ce qui donnera au gouvernement « la meilleure façon de ne laisser entrer au pays que les personnes qui ont quelque chose à offrir à la Grande-Bretagne. »

Dans sa brochure, Byrne ajoute : « Nous devons accepter que le laisser-faire en immigration augmente le risque pour les communautés où des éléments de notre stratégie anti-pauvreté ont de la difficulté à s’installer. »

L’augmentation brusque de l’immigration dans les quartiers pauvres de la Grande-Bretagne nuit aux tentatives du gouvernement d’améliorer la vie des gens d’origine britannique, a-t-il dit, passant sous silence le fait que le gouvernement ait adopté une politique délibérée consistant à diriger les demandeurs d’asile vers ces mêmes quartiers pauvres pour diminuer les coûts et se plier aux préjugés des ses supporteurs mieux nantis.

Un système basé sur le pointage avec cinq catégories est la solution, a-t-il dit. Les travailleurs hautement qualifiés, ceux de la première catégorie, seraient admis en Grande-Bretagne même s’ils n’avaient pas une offre d’emploi ferme.  Les travailleurs spécialisés, comme les infirmières et les enseignants, ne seraient admis que pour remplir les besoins et les travailleurs non spécialisés ne seraient autorisés à immigrer que pour remplir des besoins précis et pendant une durée fixe. De plus, Byrne est en faveur de mesures qui assureraient que les immigrants assimilent la « culture britannique ».

Le Telegraph, associé de longue date au Parti conservateur, a été favorablement impressionné par la conversion de Byrne à ses positions. La chroniqueuse Alice Thomson a contacté Byrne en Chine après qu’il ait, pour la première fois, présenté publiquement son point de vue en Australie. Elle a noté « qu’il a ri lorsque j’ai suggéré qu’il laissait loin derrière William Hague et Michael Howard [qui furent chefs du Parti conservateur ] sur la question de l’immigration. La personne qu’il cite le plus souvent maintenant est Sir Andrew Green du Migrationwatch, le groupe d’experts autrefois honni par son parti. »

Byrne a averti Thomson que l’immigration non contrôlée « nuira sérieusement à notre pays ». Il a défendu une « attaque beaucoup plus dure envers l’immigration illégale, car c’est cela qui fait diminuer les salaires. Cela signifie arrêter les voyages illégaux en créant un point de contrôle hors frontières. Cela signifie mettre fin aux emplois illégaux et cela signifie l’introduction de cartes d’identité. »

Il a appelé à un nouvel examen de « la façon dont les individus peuvent obtenir la citoyenneté » et affirmé qu’« il est essentiel qu’ils s’intègrent ». Le Telegraph a noté favorablement qu’il veut aussi créer un jour national pour célébrer ce qu’il y a de mieux en Grande-Bretagne. « Tous devraient s’asseoir une fois l’an et penser à la chance qu’ils ont d’être Britanniques. »

Pour finir en beauté, Byrne a attaqué les conservateurs de la droite, se plaignant : « La façon dont les tories parlaient de l’immigration était grandement irresponsable, ils semaient la peur. Mais maintenant, ils n’en parlent pratiquement plus. » [Italiques par l’auteur de l’article]

Byrne n’est pas un franc-tireur. Le chancelier Gordon Brown, possiblement le prochain chef du Parti travailliste, avait déclaré qu’on devrait forcer les immigrants à faire des travaux communautaires lors de leur intégration dans la société britannique. Et dans la même lignée que Byrne, l’Observer rapporta que l’ancien ministre de l’Intérieur David Blunkett avait déclaré que des logements sociaux devaient être réservés pour les Britanniques afin « d’apaiser la colère grandissante suscitée par la croyance que les immigrants et les mères monoparentales seraient privilégiés pour l’obtention d’un logement ».

En plus de rapporter sans la moindre critique les paroles de Blunkett, l’Observer a vanté le soi-disant courage de Byrne. En appelant à un « débat ouvert » sur l’immigration, il a insisté sur le fait que « ceux qui pensent que la question de l’immigration est importante ne sont pas tous des racistes. »

Ajoutant que « M. Byrne avait raison d’aborder la question des effets sociaux de l’immigration », il a averti qu’« il a tort, cependant, de répéter que la solution se trouve dans les contrôles “rigoureux”... On doit contrer la peur de l’immigration en visant ceux qui sont contraints d’entrer en compétition avec les immigrants. Ce qui veut dire davantage de logements abordables et plus de cours de formation. »   

Le désaccord de l’Observer avec le message de Byrne n’est qu’apparence. En compagnie du Guardian, il a encouragé et défendu le tournant dans la politique d’immigration du Parti travailliste. Cela a commencé dès février 2004, lorsque le Guardian a publié un article de David Goodhart, le rédacteur en chef du magazine Prospect.

Goodhart, un soi-disant libéral, soutenait essentiellement qu’ il était impossible, à cause de l’immigration, de maintenir un État-providence car les gens ne sont prêts à partager des ressources matérielles qu’avec ceux qui partagent une culture et des valeurs communes. Il se plaignait de la nécessité de partager les services publics, « des parts de notre revenu de l’État-providence » et même « les espaces publics dans les villes où nous sommes entassés dans les autobus, les trains et les métros » avec des « citoyens étrangers ». Il se demandait alors s’il était encore possible de mettre de l’avant des politiques sociales progressistes tout en s’opposant aux contrôles rigoureux sur l’immigration.

Le Guardian a appelé à un débat national sur l’article de Goodhart. La réaction ne s’est pas faite attendre de la part d’une tendance à l’intérieur du Parti travailliste qui s’est spécialisée dans les appels à des mesures plus drastiques pour restreindre l’immigration, affirmant que là se trouve la clé pour regagner les partisans ouvriers du Parti travailliste et combattre la montée du PNB. Son plus fervent représentant est John Cruddas, député de Dagenham et candidat à la vice-présidence du Parti travailliste. Ce dernier soutient que l’appui au PNB peut s’expliquer par les plaintes des travailleurs blancs motivées par l’immigration illégale et les fausses demandes d’asile, ainsi que par des politiques sociales discriminatoires envers la « classe ouvrière blanche ».

Ainsi, la menace du PNB est utilisée pour justifier l’adoption de politiques sociales encore plus à droite par les travaillistes. Les immigrants et les demandeurs d’asile deviennent les boucs émissaires de toutes sortes de problèmes sociaux créés par l’exacerbation des inégalités sociales, la destruction de mesures sociales telles que le Service de santé national et le manque de logements sociaux dont le Parti travailliste est responsable.

Le Guardian a demandé à Cruddas et Byrne qu’ils exposent leurs perspectives sur les « dangers » de l’immigration. Le 19 avril, sur le site web Comment Is Free du journal, Cruddas écrivait : « Au cours des dernières années, de nombreuses communautés ont connu des changements extraordinaires en raison d’une immigration massive », entraînant des problèmes qui sont « aggravés par le fait que les plus touchés par les rapides changements démographiques sont les plus pauvres de notre société qui sont les moins bien positionnés pour y faire face ».

Trois jours plus tard, Comment Is Free publiait un article rédigé conjointement par Byrne et Jeroen Dijsselbloem, le porte-parole du ministère de l’Intérieur du Parti travailliste hollandais. La Hollande est l’un des pays européens dont les lois sur l’immigration sont les plus sévères, y compris l’obligation pour les futurs immigrants de passer un test linguistique de hollandais dans leur pays d’origine, coûtant plus de 400 $US, et un « test » pour établir s’il y accord avec la soi-disant culture « libérale » de la Hollande, qui comprend le visionnement d’un film de deux heures comportant des scènes d’homosexuels qui s’embrassent et de personnes qui se baignent nues. Pas besoin d’être un génie pour comprendre qui seront exclus par le test : les pauvres et les musulmans dévots.

On peut se faire une idée du message véhiculé par Byrne et Dijsselbloem en considérant le fait qu’ils se sentent obligés de déclarer : « Ceci n’est pas un programme de droite enragé. »

 « La gauche hollandaise a clairement fait savoir que si nous souhaitons maintenir notre État-providence, nous allons devoir nous débarrasser des parasites », insistent les deux auteurs.

La transformation politique du Parti travailliste en un véhicule pour la grande entreprise — qui a tout d’un parti néo-conservateur sauf le nom — est imitée par la marche forcée d’une section de la petite bourgeoisie libérale vers la droite. Le Guardian et l’Observer incarnent ce tournant vers la xénophobie et la poursuite de l’enrichissement personnel. C’est un phénomène qui a été soulevé par Stephen Glover, qui écrit dans Daily Mail, jadis le bastion de tout ce à quoi l’intelligentsia libérale devait s’opposer.

Vantant les mérites de Byrne en disant « Enfin, un ministre qui ose parler honnêtement des effets de l’immigration massive sur la Grande-Bretagne », Glover poursuit ainsi : « Chose intéressante, la gauche semble plus motivée que la droite pour s’attaquer à ces questions difficiles.

« Je ne pense pas seulement à monsieur Byrne. David Goodhart, l’éditeur gauchisant de la revue, Prospect, questionnait, il n’y a pas si longtemps, le consensus libéral selon lequel une immigration illimitée était une bonne affaire, alors que la grand prêtresse de la rectitude politique, Polly Toynbee, écrivait un commentaire remarquable dans le journal le Guardian, suggérant que l’Immigration de masse enrichissait les plus riches et appauvrissait les plus pauvres. Même la BBC diffuse de plus en plus volontairement sur le sujet, si on en juge par son traitement du Migrationwatch de Sir Andrew Green. »

La supposée préoccupation de Byrne, Cruddas et de leurs supporteurs dans les médias pour les pauvres est entièrement cynique. Les mesures qu’ils proposent visent à semer la division et sont vouées à l’échec. Le nivellement des salaires par le bas est réel, autant que la pénurie dans le logement et la santé. Mais des mesures prises contre l’immigration ne vont pas combattre cette réalité. Elles ne vont qu’affaiblir la classe ouvrière dans sa lutte contre la grande entreprise vorace.

Le niveau de salaires est forcé à la baisse par l’inexorable logique de la concurrence mondiale et ne peut être contrée en fermant les écoutilles et en adoptant des mesures protectionnistes telles que le contrôle de l’immigration. Tout dépend plutôt de la lutte unifiée de la classe ouvrière coupant court aux tentatives de la diviser sur des bases nationales ou ethniques.

De la même manière, la défense du droit universel et gratuit aux soins de santé, à un logement décent et à une éducation de qualité présuppose une opposition à toute tentative d’utiliser les immigrants comme boucs émissaires – non seulement par le BNP, mais également de la part des travaillistes qui depuis longtemps s’efforcent de légitimer le racisme et le chauvinisme.

Le Parti de l’égalité socialiste se présente aux élections pour le Parlement écossais et l’Assemblée galloise afin de mettre de l’avant un programme socialiste internationaliste contre les défenseurs du nationalisme de tout acabit.

(Article original paru le 26 avril 2007)

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