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WSWS : Nouvelles et analyses : Moyen-Orient

L’administration Bush menace le premier ministre irakien tout en préparant un bain de sang à Bagdad

Par James Cogan
17 janvier 2007

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L’administration Bush a encore menacé de déposer le premier ministre irakien Nouri al-Maliki s’il ne collabore pas entièrement avec son augmentation du nombre des soldats américains en Irak et ses plans pour un assaut brutal contre le mouvement fondamentaliste chiite dirigé par l’imam Moqtada al-Sadr.

Depuis le discours de Bush qui donnait des précisions sur l’intensification de la guerre en Irak mercredi de la semaine passée, la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice a déclaré à plusieurs reprises que Maliki « vivait sur du temps emprunté ». Le nouveau secrétaire à la Défense Robert Gates a fait les menaces les plus crues. Lorsqu’il a comparu devant le comité du Sénat sur les questions de l’armée, on a demandé à Gates ce qui adviendrait si le premier ministre irakien refusait de se plier aux plans américains. Gates a répondu : « Je crois que la première conséquence d’un tel refus sera qu’il devra faire face à la possibilité de perdre son emploi. »

Que la destruction du mouvement de Sadr soit un objectif prioritaire du déploiement de 17 000 soldats américains supplémentaires à Bagdad est un secret de polichinelle aux Etats-Unis et en Irak. Alors qu’elle continue sur la voie téméraire dictée par l’objectif d’établir sa domination sur les ressources pétrolières du Moyen-Orient, l’administration Bush n’est pas prête à tolérer un mouvement qui a un appui de masse au sein de la classe ouvrière irakienne chiite et qui a promis que sa milice, l’Armée du Mahdi, prendra les armes pour défendre l’Iran si jamais les Etats-Unis l’attaquaient. L’armée américaine considère que l’Armée du Mahdi est une dangereuse cinquième colonne iranienne et a fait pression pour sa destruction depuis qu’une trêve difficile fut établie pour mettre fin au soulèvement sadriste contre l’occupation en 2004.

Une force conjointe des Etats-Unis et de l’Irak se rassemble pour une offensive sur Sadr City, une banlieue chiite de Bagdad densément peuplée dans laquelle Sadr trouve la plus grande partie de son soutien. Une brigade de la 82e division aéroportée américaine a quitté le Koweït pour se rendre à la capitale irakienne où elle rejoindra deux autres brigades blindées américaines ainsi que trois brigades de l’armée irakienne à prédominance kurde. Le commandement de l’armée américaine insiste sur le fait pour avoir des unités de combat kurdes puisque la majorité des troupes gouvernementales irakiennes sont chiites. Plusieurs soutiennent ou sont sympathiques à la cause de Sadr et pourraient refuser de se battre.

Dès la mi-février, environ 40 000 soldats américains et irakiens, appuyés par une force de frappe aérienne considérable, seront en position pour entreprendre une sauvage guerre urbaine dans les rues de Bagdad. Les sadristes font leurs propres préparations. Selon plusieurs rapports, on a demandé à chaque famille de Sadr City, comptant un total de deux millions d’habitants, de donner un homme âgé entre 15 et 45 ans pour servir dans l’Armée du Mahdi, ce qui fait que la milice pourrait compter plus de 100 000 soldats. Abdul Razzaq al-Nidawi, un porte-parole sadriste en vue, a déclaré la semaine passée : « Nous appelons le peuple américain à s’opposer à ce que l’on envoie d’autres fils américains en Irak ce qui les empêchera d’avoir à revenir dans un cercueil. »

Bien que les pertes du côté américain augmenteraient de façon considérable lors d’une offensive, les pertes les plus importantes seraient encourues par le peuple irakien. Les miliciens chiites équipés seulement d’armes modestes risquent d’être massacrés par les avions, les hélicoptères et les tanks américains.

Rien ne pourrait démontrer de manière plus évidente à quel point le gouvernement irakien est un pantin des États-Unis que son approbation de l’attaque qui se prépare. Les sadristes seraient le mouvement politique le plus populaire parmi les chiites irakiens, qui constituent 60 pour cent de la population. Ils ont fait appel aux sentiments anti-occupation de la très grande majorité en exigeant un échéancier de retrait des États-Unis et en demandant au gouvernement qu’il s’attaque aux conditions sociales désastreuses du pays. Au même moment, ils ont rejoint le gouvernement fantoche et forment la plus grande faction de la coalition dirigeante des partis chiites, l’Alliance irakienne unifiée (AIU). Maliki lui-même est un proche allié de Sadr et il a réussi à obtenir la candidature de premier ministre de l’AIU grâce aux votes de législateurs sadristes.

Inquiet de perdre potentiellement un important appui, Maliki a résisté durant plusieurs mois aux plans américains. En novembre dernier, il a déclaré à Bush qu’il voulait que tous les soldats américains se retirent de Bagdad. Gates a admis à la commission sénatoriale des Forces armées que Maliki « souhaitait mener cette opération seul » — autrement dit, laisser la capitale aux mains de l’armée irakienne à majorité chiite qui se concentrerait à combattre les guérillas arabes sunnites et qui ne lancerait pas d’attaque contre les sadristes.

Toutefois, Maliki a fait savoir qu’il se pliait aux exigences de Washington. L’élite chiite qu’il représente n’est pas prête à risquer le pouvoir et le privilège qu’elle a obtenus sous l’occupation américaine. Le week-end dernier, à la suite de la déclaration de Gates et après plusieurs jours sans commentaires sur le discours de Bush, son cabinet a finalement publié une déclaration affirmant que l’augmentation du nombre de soldats américains « représente la vision commune et la compréhension mutuelle entre le gouvernement irakien et l’administration américaine ».

Au cours des derniers jours, des représentants de Bush ont insisté sur le fait que Maliki avait approuvé qu’un assaut soit lancé sur les sadristes. Vendredi, le porte-parole de la Maison-Blanche, Tony Snow, s’est adressé aux journalistes : « Je crois que par ses paroles et ses actes il s’attaque aux principales inquiétudes des États-Unis, comme le fait de dire aux milices chiites qu’elles ne s’en tireront pas. Et il a même donné des noms. Il a mentionné les sadristes et il a mentionné Moqtada al-Sadr. »

Dimanche, Fox News a demandé au vice-président Dick Cheney : « Si les forces américaines veulent entrer dans Sadr City et s’en prendre à Moqtada al-Sadr, promettez-vous, pouvez-vous promettre au peuple américain que nous le ferons peu importe ce que Maliki dira ? » Cheney a répondu que l’administration et Maliki « avaient une compréhension des choses qui nous permettent d’aller de l’avant pour accomplir le travail ».

Si Maliki hésite, des candidats alternatifs attendant dans les corridors pour le remplacer. Abdul Aziz al-Hakim, qui s’est entretenu en privé avec Bush en décembre et dirige le Conseil suprême de la révolution islamique chiite en Irak (CSRICI), a exprimé son appui total pour le « plan de sécurité de Bagdad », disant que le « gouvernement devait frapper d’un poing de fer contre ceux qui mettent en danger la sécurité du peuple ». L’ambassadeur américain en Irak, Zalmay Khalilzad, est apparemment encore en train d’assembler une nouvelle coalition composée du CSRICI, de partis kurdes et d’organisations sunnites pour remplacer l’actuel gouvernement si nécessaire.  Selon le Guardian britannique, le dirigeant chiite, Ali al-Sistani, a donné son accord la semaine dernière et ne s’opposera pas aux opérations militaires visant à désarmer l’Armée du Mahdi.

Aux États-Unis, les supporteurs les plus virulents de la guerre en Irak appellent pour un massacre à Sadr City et l’assassinat de Moqtada al-Sadr. Mick Reagan , le fils de l’ancien président Ronald Reagan, a écrit dans le Frontpage Magazine : « Si nous ne permettons pas à nos forces armées de faire ce qu’elles font le mieux – détruire les choses et tuer les personnes – alors nous sommes aussi bien d’emballer et de partir à la maison… Moqtadar al-Sadr doit partir, de préférence pour aller rejoindre Saddam Hussein. Et bientôt, très bientôt. »

Ralph Peters, un commentateur d’extrême droite qui a écrit un article l’an dernier avec pour titre « Tuer Moqtada maintenant », a déclaré dans le New York Post la semaine dernière que le « grand test » de l’escalade de Bush va ou non inclure « l’occupation, le désarmement et la désinfection idéologique de Sadr City ».  Il demanda : « Que les règles d’engagement soient élargies. Nous devons arrêter de jouer Barney Fife et combattre. Et le président doit appuyer ses troupes quand les choses se corseront. » (italiques dans l’original)

Seulement deux mois après que le peuple américain eut rejeté la guerre en Irak lors des élections de mi-mandat au Congrès et clairement indiqué qu’il en souhaitait la fin, l’administration Bush prépare des crimes encore plus grands.

(Article original anglais paru le 15 janvier 2007)

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