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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

Les leçons politiques de la trahison des UAW

Par le comité de rédaction
24 novembre 2007

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Les nouvelles ententes contractuelles de quatre ans intervenues entre le syndicat des ouvriers de l’automobile, les Travailleurs unis de l’automobile (UAW) et les trois grands de l’automobile de Détroit, General Motors, Ford et Chrysler, représentent un énorme recul pour les travailleurs de l’auto.

Les contrats, qui impliquent 175.000 ouvriers, vont éliminer les gains de plus de cinquante ans de lutte et transformer l’industrie américaine de l’automobile, qui fut le secteur où l’on trouvait les ouvriers industriels les mieux payés au monde, en un centre de main d’œuvre à bon marché et de manufactures surexploitées.

En vertu du nouveau système de salaires et d’avantages sociaux à deux vitesses, les nouveaux ouvriers seront payés 14,20 $ l’heure au lieu de 28,75 $. De plus, ils auront des avantages sociaux sous la moyenne, ce qui permettra aux compagnies de réduire les coûts horaire de main d’œuvre de 68 pour cent. Cela ouvrira la voie au remplacement de dizaines de milliers d’ouvriers plus expérimentés par une force de travail plus petite et plus brutalement exploitée.

Les contrats dégagent les compagnies de l’automobile de leur obligation d’offrir une assurance-maladie aux retraités. Plutôt, un fonds de couverture santé des retraités portant l’acronyme de VEBA sera créé. Les compagnies contribueront pour moins de la moitié des cent milliards de dollars d’assurance-maladie qu’elles doivent.

Les UAW contrôleront un fonds VEBA estimé à une valeur de 54,4 milliards de dollars, un des principaux fonds d’investissement privés  aux Etats-Unis. Les principaux représentants des UAW deviendront des cadres riches alors que les retraités verront leurs avantages fondre et leurs coûts augmenter sous l’assurance-maladie de second ordre du syndicat.

Une grande partie des VEBA est financée  par des notes convertissables en actions, ce qui fait des UAW l’un des principaux actionnaires de GM et de Ford, ayant quatre fois plus d’action que la famille Ford dans ce dernier cas.

Les UAW seront liés d’encore plus près aux sociétés, avec un incitatif financier direct pour diminuer le nombre des emplois, les salaires et les avantages sociaux. Le dernier stade de la dégénérescence des UAW est leur transformation en une entreprise associée aux compagnies de l’automobile pour intensifier l’exploitation des ouvriers.

La fermeture d’au moins 30 usines de GM, de Ford et de Chrysler a aussi été acceptée ainsi qu’une autre réduction du nombre des emplois chez les Trois Grands, ce qui, avec les coupes dans les usines de pièces, signifie la perte de plus de 150.000 emplois au cours des trois dernières années seulement. Le nouvel accord permet aux compagnies d’ajuster la quantité des emplois à la demande du marché, ce qui signifie que les ouvriers peuvent perdre leur emploi aussitôt que les ventes déclineront.

Comment est-il possible que des contrats qui sont un recul si flagrant ont été acceptés dans les trois compagnies ? Ce ne fut pas la conséquence de la défaite ou de l’écrasement de grèves, mais le résultat des efforts délibérés des UAW eux-mêmes, qui ont conspiré avec les patrons de l’auto pour briser la résistance des membres de la base et pour imposer les demandes de la direction.

Pour les UAW, les deux derniers mois de « négociations » furent un exercice de cynisme le plus pur. Cela comprend les mini-grèves contre GM et Chrysler. Le Detroit News a rapporté qu’une entente avait déjà été conclue entre GM et les UAW lorsque le président des UAW, Ron Gettelfinfer, a soudainement annoncé une grève.

Les grèves n’avaient rien à voir avec la défense des ouvriers contre les demandes draconiennes des compagnies. Plutôt, les UAW ont conclu qu’ils ne pourraient jamais faire accepter l’entente sans des actions qui évacueraient la pression et qui donneraient au syndicat la possibilité de prétendre qu’il a obtenu des concessions de la direction.

Tout au long du processus de ratification des contrats, les UAW ont menti de façon éhontée sur le contenu des ententes et ont cherché à susciter les peurs économiques, particulièrement dans des régions dévastées comme Détroit. Les représentants du syndicat ont fait la menace que plus d’emplois seront éliminés si les contrats étaient rejetés, alors que d’autres ouvriers se sont fait dire que leur usine avait été « sauvée » et qu’on leur accorderait la production de nouvelles produits. Ce que valaient ces déclarations a été démontré quelques jours après l’acceptation des contrats, quand les compagnies ont annoncé leurs plans pour éliminer des milliers d’emplois supplémentaires.

Les UAW ont été aidés par divers dissidents syndicaux, dont le président du Local 1700 des UAW, Bill Parker, qui n’a pas présenté d’alternative sérieuse à Gettelfinger et aux dirigeants des UAW. Au lieu d’organiser une véritable opposition, Parker soutint que les pressions de la base allaient contraindre la direction des UAW à lutter. À la veille de votes décisifs tenus à quatre usines de la région de Détroit, y compris la sienne, Parker se plia aux dirigeants des UAW et laissa tomber son appel à un « non ».

Les contrats qui ont été adoptés ne signifient pas que les membres étaient d’accord. L’opposition était très répandue, près du tiers des employés de GM, la moitié de ceux de Chrysler et le quart des travailleurs chez Ford ayant voté contre l’entente. Des dizaines de milliers d’autres se sont abstenus alors que beaucoup d’autres encore, sachant que le syndicat n’allait pas lutter, ont voté pour à contrecœur.

Cependant, en dernière analyse, la ratification du contrat a reflété l’impact sur les travailleurs de l’automobile des décennies de trahison orchestrées par la bureaucratie des UAW et l’impact de la campagne résolue menée par celle-ci contre toute forme de conscience de classe au nom d’une collaboration accrue entre travailleurs et employeurs et par le biais de campagnes nationalistes de type « acheter américain ».

Que sont les UAW ?

La ratification des contrats témoigne de l’impossibilité pour les travailleurs de défendre leurs intérêts dans le cadre de cette organisation.

Par le passé, et ce malgré leur allégeance au capitalisme américain, les UAW et l’AFL-CIO ont tenté dans une certaine mesure d’améliorer les salaires et les conditions de travail des travailleurs dans le cadre politique et économique existant.

Cela fait maintenant près de 30 ans que les UAW ont abandonné ce rôle modeste et accepté l’attaque contre les emplois, les conditions de travail et le niveau de vie des travailleurs. Au cours de cette période, une couche de la classe moyenne aisée de l’appareil des UAW s’est protégée des conséquences désastreuses que ses politiques ont entraînées pour les membres syndiqués en mettant sur pied divers projets d’investissements avec les employeurs, ce qui a permis à ses revenus de s’accroître pendant que le nombre de syndiqués était réduit des deux tiers par rapport à 1978. Les contrats de 2007 constituent le point culminant de ce processus.

Ces accords prouvent ce que le Parti de l’égalité socialiste et son prédécesseur, la Workers League, soutiennent depuis plus de 15 ans. Pour mener à bien la moindre lutte qui vise à défendre leurs emplois et conditions de vie, les travailleurs de l’automobile doivent d’abord rompre avec les UAW et raviver la lutte de classe sur une toute nouvelle base politique.

L’effondrement des UAW est le produit inévitable du programme politique réactionnaire qu’ils ont adopté presque dès leur naissance et qui est basé sur deux prémisses fondamentales : la défense du système capitaliste et le nationalisme. L’état actuel de cette organisation est la preuve qu’il est impossible de créer un véritable mouvement ouvrier sur la base d’une opposition au socialisme et de la subordination de la classe ouvrière aux intérêts nationaux de l’élite dirigeante des Etats-Unis.

Cette trajectoire réactionnaire fut tracée lors des purges anticommunistes des années 1940 et 1950, lorsque le président des UAW Walter Reuther chassa les militants de gauche et socialistes, les dirigeants des luttes de masse qui avaient créé le syndicat dans les années 1930. Rejetant toute lutte visant à mettre un terme à la domination économique et politique de la grande entreprise, Reuther allia les UAW au Parti démocrate et s’opposa à la construction d’un parti politique indépendant de la classe ouvrière.

Le mythe que le Parti démocrate est un parti des travailleurs est de plus en plus démasqué à chaque jour, alors que les démocrates se joignent au Parti républicain dans le déclenchement de guerres, la destruction des droits démocratiques et l’augmentation des inégalités sociales.

Les travailleurs les plus sérieux ont déjà tiré des conclusions sur les UAW et cherchent des solutions de remplacement. Dans ces conditions, une myriade de « gauchistes » de la classe moyenne et d’organisations libérales se sont ralliés à la défense de la bureaucratie des UAW.

Une organisation, la Ligue spartaciste, a récemment dénoncé le Parti de l’égalité socialiste pour leur opposition aux UAW en le décrivant comme « des socialistes briseurs de grève ». Selon ce groupe, les syndicats sont « les organisations de défense de base de la classe ouvrière » et les socialistes qui cherchent à briser l’influence de ces organisations moribondes ne sont pas différents des « briseurs professionnels de syndicats du Comité national pour le droit au travail ».

Cela n’est qu’une défense crasse de la bureaucratie des UAW. Lorsque vient le temps de prendre position entre les travailleurs et les chefs corporatistes des UAW, les spartacistes se rangent derrière ces derniers contre les travailleurs.

Quelle « organisation de défense de la classe ouvrière » impose à ses propres membres des conditions brutales d’exploitation et reçoit en retour le contrôle d’un fond d’investissement de plusieurs milliards de dollars et des centaines de millions d’actions de compagnie ? Les UAW ne sont pas une organisation de travailleurs. Ils ne représentent pas les intérêts de la classe ouvrière, ne sont pas contrôlés par les travailleurs et ne leur sont pas redevables.

Le fait que les travailleurs soient pris au piège dans cette organisation et que leurs chèques de paie soient amputés pour payer les cotisations syndicales n’en fait pas une organisation ouvrière. Ceux qui font la promotion des UAW et insistent pour que les travailleurs y canalisent leur lutte désarment les travailleurs et jouent un rôle réactionnaire.

La défense de telles organisations n’est pas seulement un signe de cécité complète et de banqueroute politique. Des groupes tels que les spartacistes ont longtemps été opposés à la lutte contre différentes bureaucraties — que ce soit les syndicats, les staliniens ou la social-démocratie — qui dominaient le mouvement ouvrier, pour s’appuyer plutôt sur eux et avancer leur propre politique petite bourgeoise de « gauche ».  Dans les dernières années, alors que ces bureaucraties se sont effondrées, plusieurs de ces anciens radicaux ont fait avancer leur carrière en quittant la politique de « gauche » pour joindre une de ces bureaucraties syndicales, où ils défendent sa politique de droite et luttent contre l’opposition venant de la base.

Donc, prétendent les spartacistes, le seul problème avec les UAW et les autres syndicats c’est la « mauvaise direction ». Si la « haute direction » était remplacée par une « nouvelle direction consacrant ses énergies à la lutte de classe » — présumément eux-mêmes ou d’autres radicaux — les UAW seraient transformés en un puissant instrument de lutte pour les travailleurs.

Il s’agit d’une autre fraude.

La dégénérescence des UAW n’est pas seulement le produit d’une direction lâche et corrompue. Si de tels laquais patronaux se sont élevés au sommet c’est plutôt en raison du fait que les syndicats ont depuis longtemps été vidés de tout contenu progressiste du point de la classe ouvrière.

Ce serait une autre affaire si les trahisons étaient confinées aux UAW, mais chaque syndicat est engagé dans la collaboration de la gestion des relations de travail contre ses membres. De plus, ce n’est pas uniquement un phénomène américain. Dans tous les pays, les syndicats font pression sur leurs membres pour des concessions et établissent des relations toujours plus étroites avec les employeurs et le gouvernement.

La mondialisation de la production capitaliste a fatalement miné les syndicats, dont l’influence de jadis était liée à leur capacité à influer le marcher national. Les travailleurs doivent opposer à la stratégie globale des compagnies transnationales leur propre stratégie internationale pour unifier la classe ouvrière aux États-Unis, au Canada, au Mexique en Amérique latine, en Europe et en Asie dans une lutte commune pour la défense des emplois et des conditions de travail.

La chute des syndicats et de toutes les organisations ouvrières basées sur un programme nationaliste dévoile les limites inhérentes du syndicalisme et la nécessité d’un mouvement indépendant de la classe ouvrière basé sur une perspective internationaliste et socialiste.  Aucune des questions auxquelles est confronté la classe ouvrière aujourd’hui ne peut être résolue sur la base de la conception syndicaliste qui consiste à appliquer de la pression sur les employeurs et l’État-nation.

Plutôt, les ouvriers doivent entreprendre une lutte politique pour prendre le pouvoir et réorganiser la vie économique et politique dans l’intérêt de la grande majorité, pas dans celui de quelques riches. Les ressources productives et technologiques de l’industrie automobile mondiale — le produit du travail physique et intellectuel de générations de travailleurs — ne peuvent plus demeurer la propriété privée des dirigeants des grandes entreprises et des gestionnaires de fonds spéculatifs. Elles doivent être mises à la disposition de la société dans son ensemble en faisant de l’industrie automobile une propriété publique et sous le contrôle démocratique des travailleurs.

Pour cela, les ouvriers de l’automobile doivent rompre avec les deux partis de la grande entreprise et construire un nouveau parti politique basé sur programme socialiste international. Ce parti est le Parti de l’égalité sociale.

Nous appelons les travailleurs de l’automobile à lire le World Socialist Web Site, à étudier le programme et à connaître l’histoire du Parti de l’égalité sociale et à prendre la décision de joindre et de construire le PES en tant que la nouvelle direction révolutionnaire de la classe ouvrière.

(Article original anglais paru le 19 novembre 2007)


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