La déclaration suivante est distribuée aux
grévistes d'American Axle (AAM) et à d'autres ouvriers de l'automobile qui
participent à une manifestation organisée par le syndicat United Auto Workers
(UAW) à Détroit lors de la réunion des actionnaires de la compagnie.
Les ouvriers qui se rassemblent devant les
quartiers généraux d'American Axle à Detroit sont légitimement indignés par le
fait que la réunion des actionnaires envisage un plan de motivation à long
terme, qui donnerait des millions de plus au PDG Richard Dauch et à d'autres
dirigeants haut placés.
Dauch, qui a empoché 10,2 millions de dollars
en 2007 et 258 millions depuis 1997, a provoqué cette grève de huit semaines en
demandant que 3600 travailleurs acceptent une réduction de 50 pour cent de leur
salaire. Dans des déclarations faites cette semaine, Dauch a réitéré sa menace
de fermer les usines en grève si ses demandes ne sont pas acceptées.
Vraiment, la rétribution de Dauch mériterait
d'être fortement réduite et il faudrait qu'il soit forcé à rendre les millions
qu'il a arrachés à la compagnie. Cependant, il faut le dire crûment : les
appels adressés aux actionnaires de l'entreprise et aux grands investisseurs sont
infructueux et autodestructeurs. De telles tactiques, mises en avant par l'UAW,
sont une diversion de la lutte pour mobiliser toute la classe ouvrière derrière
les grévistes d'American Axle.
Qui sont ces actionnaires ? Ils comptent
parmi eux certains des plus importants investisseurs institutionnels et des
plus importantes firmes de Wall Street, dont Fidelity, Dimensionnal Fund
Advisors et Barrow, ainsi que le Sandra J. Dauch Gift Trust. Pour ces grands
actionnaires, les dirigeants font précisément ce qui est nécessaire pour
garantir le meilleur retour sur investissement.
Aux yeux des grands investisseurs, plus les
dirigeants soutirent aux travailleurs plus ils méritent d'être rétribués.
Faisant appel à leur égoïsme, la compagnie a écrit dans un communiqué à ses
actionnaires, « Nos dirigeants ont fait montre d'une gestion proactive en
ramenant AAM à la profitabilité en 2007 pendant qu'AAM continuait à se
redimensionner, à se restructurer et à se remettre sur pied. » Des bonus
additionnels, des primes et des ajustements de salaire sont garantis aux
dirigeants si Dauch et les autres parviennent à soutirer encore plus aux
ouvriers par un nouvel accord avec l'UAW.
Cet état de fait ne peut pas être renversé par
des appels à la compassion et à la conscience d'actionnaires individuels. Le
comportement antisocial d'American Axle n'est pas simplement le produit de la
cupidité individuelle, mais c'est l’expression de la crise de tout le
système économique capitaliste, qui appauvrit les travailleurs aux États-Unis
et dans les autres pays tout en octroyant des richesses disproportionnées aux
super-riches.
Cette attaque contre les salaires des travailleurs
d'American Axle fait partie d'un processus plus large. Tout au long des trente
dernières années, l'offensive ininterrompue contre les emplois et le niveau de
vie des travailleurs a produit un transfert de richesses massif vers le haut de
la société. Aujourd'hui, moins de 2 millions d'ouvriers de l'industrie aux
États-Unis gagnent plus de 20 dollars de l'heure, soit une baisse de 60 pour
cent – en comptant l'inflation – depuis 1979. Durant la même
période, le 1 pour cent le plus riche de la population a vu sa part du revenu
national plus que doubler. Selon le magazine Fortune, le salaire moyen
d'un PDG est passé de 36 fois le montant du salaire moyen d'un ouvrier en 1976
à 369 fois en 2005.
Dans des remarques faites la semaine dernière
lors d'une campagne de financement du Parti démocrate du Michigan, le président
de l'United Auto Workers, Gettelfinger, a fait référence à ces statistiques sur
les rétributions des dirigeants, déclarant au public rassemblé, « Ce que
ces administrateurs gagnent sur le dos des travailleurs me fait enrager. »
En fait, la bureaucratie de l'UAW a joué le
rôle décisif en permettant à ce processus de se dérouler. Le syndicat accepte
complètement le principe du profit privé – c'est-à-dire que les grandes
compagnies devraient être dirigées dans l'intérêt d'une poignée d'individus
plutôt que dans l'intérêt des travailleurs et de la société dans son ensemble.
Au nom de la plus grande « compétitivité » des entreprises, le
syndicat a contribué ouvertement et de manière répétée à la réduction drastique
des coûts du travail.
Rien que ces deux dernières années, l'UAW a
négocié des renonciations aux droits acquis et des plans de départs en retraite
anticipés qui ont permis aux Trois Grands de l'automobile – General
Motors, Ford, Chrysler – et à Delphi de se débarrasser de plus de
100 000 ouvriers expérimentés mieux payés.
Dauch a mentionné les concessions que l'UAW a
accordées à d'autres fabricants de pièces détachées pour justifier ses demandes
de larges réductions des salaires. Cela comprend les accords qu’il a
signés avec UAW dans d’autres usines American Axle, qui ont un contrat
différent, dont Colfor dans l’Ohio où les travailleurs ne gagnent pas
plus de10 dollars de l’heure.
Si le président de l'UAW exprime des
inquiétudes quant au salaire de Richard Dauch c'est parce qu'il sent que cela
rend plus difficile de faire accepter des concessions aux ouvriers d'American Axle.
La conséquence inévitable du soutien apporté
par le syndicat au système capitaliste a été la transformation de l'UAW
lui-même en une grande entreprise, qui contrôle des dizaines de millions de
parts dans le capital de GM et de Ford.
De nombreux ouvriers à American Axle
considéraient le rassemblement qui avait été appelé la semaine dernière comme
un moyen de mobiliser un grand nombre d'ouvriers de l'automobile dans la grève.
Mais l'UAW a annulé ce rassemblement parce que la direction de la Solidarity
House est opposée à ce genre de lutte qui minerait ses relations avec les
entreprises.
Plutôt que d'en appeler aux actionnaires, le
Parti de l'égalité socialiste encourage les travailleurs d'American Axle à
faire directement appel à leurs frères et sœurs de toute l'industrie
automobile pour engager une lutte afin d’annuler les réductions de
salaire et de prestations sociales acceptées par l'UAW. Un comité de grévistes
et autres ouvriers de l'automobile devrait être élu pour retirer des mains des
bureaucrates syndicaux la conduite de la grève et lancer une grève qui s'étende
à toute l'industrie.
Pour lancer une véritable lutte contre
l'inégalité sociale, les travailleurs doivent se débarrasser de leurs préjugés
contre le socialisme – qui sont le produit d'années de propagande
pro-capitaliste par les syndicats, les médias et les deux partis financés par
les entreprises – et développer leur combat sur la base d'une perspective
qui s'appuie sur les besoins de la classe ouvrière et non sur le caractère
sacré de la propriété privée capitaliste.
L'industrie automobile ne peut plus être
laissée aux mains de dirigeants d'entreprises, d'administrateurs de fonds
spéculatifs et de fonds d'investissement dont les seuls intérêts consistent à
enrichir encore plus la classe capitaliste au détriment des travailleurs et des
communautés où ils vivent. Les grandes forces productives de l'industrie
automobile mondiale – construites par le travail de générations
d'ouvriers – doivent être placées sous le contrôle des travailleurs et
fonctionner en s'appuyant sur un plan démocratique et scientifique pour répondre
aux besoins de la société, et non à ceux d'une minorité fortunée.
Ce sont des questions fondamentales qui se
posent aux travailleurs dans tout le pays et partout dans le monde, pas
seulement à American Axle et pas seulement dans l'industrie automobile. La
crise économique actuelle qui engloutit Wall Street et qui menace d'entraîner
une récession globale expose une fois de plus la banqueroute du système de
profit et son incapacité à répondre aux besoins humains fondamentaux –
tous les besoins, depuis la nourriture et le logement jusqu'à un emploi décent.
Pour combattre ce système, les travailleurs
ont besoin de leur propre parti politique, qui soit indépendant des
politiciens, du Parti démocrate comme du Parti républicain, qui sont acquis à
la cause du système de profit immoral. Nous incitons les ouvriers de
l'automobile à étudier notre histoire et notre programme et à prendre la
décision de nous rejoindre et de participer à la construction du Parti de
l'égalité socialiste et la nouvelle direction révolutionnaire de la classe
ouvrière.