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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

Meeting secret à la Maison-Blanche pour préparer une escalade militaire américaine au Pakistan

Par Bill Van Auken
14 janvier 2008

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Le New York Times a rapporté la semaine dernière que de hauts responsables de l’administration Bush, des chefs militaires et des services du renseignement américains se sont rencontrés en secret à la Maison-Blanche afin d’élaborer des plans pour un élargissement de l’intervention militaire au Pakistan.

Citant sans les nommer de hauts responsables de l’administration, l’article du Times indique que l’administration vise à exploiter ce qu’elle considère comme une nouvelle occasion, créée le mois dernier par l’assassinat de l’ex-premier ministre, Benazir Bhutto.  

Selon les responsables cités par le Times « plusieurs parmi ceux qui ont participé au meeting ont avancé l’argument que la menace à laquelle faisait face le gouvernement de Pervez Moucharraf était à présent si grande que M. Moucharraf et la nouvelle direction militaire du Pakistan allaient probablement donner plus de latitude  aux Etats-Unis ». L’article ajoutait : « A la Maison-Blanche et au Pentagone, les responsables voient dans le changement de la structure du pouvoir une occasion permettant aux Américains de préconiser une extension de leur autorité au Pakistan, un pays détenteur de l’arme nucléaire. »

Ont participé à cette réunion le vice-président Cheney, la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice, le chef d’état-major des armées, l’amiral Mike Mullen, le conseiller à la sécurité nationale de Bush, Stephen Hadley et de hauts responsables des services du renseignement. Cette réunion n’avait pas été annoncée et tant la Maison-Blanche que d’autres agences gouvernementales ont refusé de la commenter. 

Les préparatifs d’une escalade militaire au Pakistan impliquent, selon le Times, l’utilisation de la CIA et des forces du Commandement des opérations spéciales de l’armée américaine.

Officiellement, Washington n’a que cinquante militaires au Pakistan où ils s’occupent de l’entraînement des forces pakistanaises. Des sources familières avec les opérations américaines, ont cependant rapporté que des soldats américains participaient déjà à des attaques menées par l’armée pakistanaise dans les régions tribales frontalières avec l’Afghanistan.

De plus, les Etats-Unis ont lancé un certain nombre d’attaques unilatérales sous prétexte de « guerre contre le terrorisme » frappant de soi-disant cibles « talibanes » à l’intérieur du Pakistan. Il s’agit de tirs de missiles et de mortiers effectués par les forces américaines d’occupation de l’autre côté de la frontière, en Afghanistan.  Lors d’un incident particulier, des forces américaines avaient participé en octobre 2006 à une attaque aérienne contre une école religieuse dans la région de Bajaur, le long de la frontière afghane, tuant 80 personnes.

On a rapporté que les forces spéciales américaines ont aussi reçu la permission de poursuivre les forces anti-occupation afghanes qui passent la frontière, sans autorisation préalable de la part d’Islamabad.

Ces attaques ont provoqué une colère généralisée au Pakistan et ont augmenté le soutien en faveur des islamistes militants dans les régions tribales habitées par des clans principalement pachtounes (le principal groupe ethnique de l’Afghanistan voisin). Ces clans ont farouchement gardé leur indépendance vis-à-vis du gouvernement central.

Le plan d’une escalade considérable de l’intervention militaire américaine au Pakistan a été précédé d’une campagne de propagande concertée soutenant l’affirmation douteuse du régime de Moucharraf selon laquelle l’assassinat de Bhutto était l’œuvre d’al-Qaïda et ayant pour but de transformer sa mort en une justification pour amplifier la « guerre mondiale contre la terreur ».

Cela s’est accompagné d’affirmations selon lesquelles al-Qaïda avait opéré un tournant stratégique et pris le Pakistan pour cible afin de le déstabiliser. La remarque faite à la fin du mois dernier par le ministre de la Défense, Robert Gates qui a dit « al-Qaïda semble en ce moment précis s’être tourné vers le Pakistan et vers des attaques contre le gouvernement et le peuple pakistanais » est de ce point de vue typique.

Le but apparent de ces remarques est de donner l’impression que quelque commandement central terroriste a donné des ordres pour que des militants convergent vers le Pakistan. En réalité, le conflit s’est développé dans le pays durant les sept ans écoulés depuis l’invasion américaine de l’Afghanistan et le renversement du gouvernement taliban et il s’est intensifié du fait des interventions militaires répétées, américaines et pakistanaises, dans les régions tribales.  

Quant aux « attaques contre le peuple pakistanais », c’est le dictateur militaire Moucharraf, le principal allié de Washington, qui les a menées de façon répétée. Au Pakistan même, une grande partie de la population le considère, lui et l’armée, comme les suspects les plus probables dans le meurtre de Bhutto.

Le but principal de toute escalade militaire américaine dans les régions tribales du Pakistan ne sera pas de faire la chasse aux terroristes d’al-Qaïda, mais bien plutôt d’attaquer la population, qui sympathise fortement avec ceux qui résistent à l’occupation en Afghanistan et qui a fourni des refuges et des combattants aux forces anti-occupation afghanes. En même temps, elle servira à soutenir le régime corrompu et répressif de Moucharraf que Washington a considéré pendant longtemps comme son principal allié dans la poursuite de ses intérêts géostratégiques en Asie centrale.

La grande majorité de la population pakistanaise est hostile à la politique américaine dans la région et considère déjà Washington comme le protecteur de l’impopulaire Moucharraf. Toute intervention américaine aura, en fin de compte, pour effet non un renforcement du contrôle exercé par Moucharraf sur le pouvoir, mais le contraire. Elle est certaine de causer la colère générale et des soulèvements de plus en plus importants au Pakistan. 

C’est pour cette raison que le gouvernement Moucharraf a insisté publiquement pour dire qu’il n’avait jamais autorisé les attaques américaines à l’intérieur du Pakistan, qu’il a dénoncé les discussions sur une action militaire américaine unilatérale et les a qualifiées d’irresponsables et de dangereuses. Bien que ces dénégations de routine soient faites en grande partie pour apaiser le public, elles reflètent l’extrême nervosité du régime pakistanais vis-à-vis du potentiel qu’ont ces actions de déclencher une explosion politique.

Lors d’une conférence de presse tenue jeudi dernier, Moucharraf a répété ses avertissements contre une action militaire dans les régions tribales. Parlant de Baitullah Mehsud, un chef de clan que le régime pakistanais avait accusé de commanditer l’assassinat de Bhutto, Moucharraf a déclaré : « Il se trouve dans le district du Waziristan du Sud, et permettez moi de vous dire qu’aller le chercher là-bas signifie se battre contre des milliers de personnes, des centaines de personnes qui sont ses partisans, la tribu des Mehsud, si vous arrivez jusqu'à lui, et cela voudra dire des dommages collatéraux ».

L’armée pakistanaise qui comporte une importante partie de pachtounes et qui a des liens étroits, datant de l’époque de la guerre soutenue par la CIA contre le régime prosoviétique en Afghanistan, avec les milices de la région, est profondément divisée sur les exigences de Washington de transformer les régions de la frontière en zone où l’on peut ouvrir le feu à loisir. 

L’article du Times sur le meeting de la Maison-Blanche fait suite à un certain nombre d’articles de presse indiquant que les plans pour une intervention militaire américaine plus agressive au Pakistan étaient déjà en discussion depuis un certain temps quand Bhutto fut assassinée. Cet événement est considéré maintenant comme un prétexte bienvenu pour accélérer leur réalisation.

Le chef du Commandement des opérations spéciales américaines, l’amiral Eric Olson est venu au Pakistan trois fois depuis le mois d’août, il a rencontré Moucharraf et les hauts responsables militaires pakistanais et il a visité le quartier général du Frontier Corps, une force paramilitaire composée de membres des clans de la frontière.

Le chef du Commandement central américain, l’amiral William Fallon, a fait l’éloge des opérations pakistanaises de contre-terrorisme dans une interview avec Voice of America le mois dernier, tout en suggérant qu’un accord avait déjà été obtenu pour une extension des opérations militaires américaines. 

« Ce que nous avons vu ces quelques derniers mois est une volonté accrue d’utiliser leurs unités militaires régulières » dans les régions proches de la frontière, a dit Fallon. « Et c’est là, je pense, où beaucoup d’aide peut venir des Etats-Unis dans le type d’entraînement, d’assistance et de supervision qui s’appuie sur l’expérience que nous avons faite récemment avec des insurrections et avec le problème terroriste en Irak et en Afghanistan. Je pense que nous partageons beaucoup de choses avec eux et nous sommes contents de le faire. » 

Dans un article publié la veille de l’assassinat de Bhutto, William Arkin, l’éditorialiste du Washington Post pour les questions de sécurité nationale, avait cité des sources du Pentagone disant que la présence militaire américaine renforcée serait « sur le terrain au début de la nouvelle année ».

Le débat qui a eu lieu samedi soir entre les candidats démocrates à la candidature présidentielle dans le New Hampshire a montré qu’une marche vers l’intervention militaire au Pakistan jouit du soutien des démocrates comme des républicains.

Lorsqu’on lui a demandé s’il confirmait un discours prononcé dans lequel il avait exprimé son soutien à des frappes américaines unilatérales contre de soi-disant cibles al-Qaïda au Pakistan, le sénateur Barack Obama a répondu: « Je le maintiens absolument ». Il a ajouté : « Mon travail en tant que chef des armées sera de garantir que nous frapperons tous ceux qui pourraient nuire à l’Amérique lorsque nous aurons des renseignements qui nous permettront de le faire. »

Obama a parlé du régime de Moucharraf comme d’un « gouvernement légitime avec lequel nous allons coopérer », affirmant même que celui-ci oeuvrait pour « encourager la démocratie ».

Les principaux rivaux d’Obama dans la course à la nomination, la sénatrice Hillary Clinton et l’ex-sénateur John Edwards, ont repris à leur compte sa menace de frappes unilatérales contre le Pakistan.

(Article original paru le 7 janvier 2008)


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