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WSWS : Nouvelles et analyses : Canada

Québec : des étudiants en grève font face à des mesures anti-démocratiques

Déclaration de l’Internationale étudiante pour l’égalité sociale (ISSE) à l’UQAM
17 mars 2008

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Devant le prolongement du mouvement de grève étudiante au Québec et la demande d’injonction déposée par la direction de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), la question de la perspective politique à adopter pour mener une lutte contre l’assaut sur le système d’éducation se pose de façon cruciale.

Depuis le 11 février dernier, les 5400 étudiants de l’Association facultaire des étudiants en sciences humaines (AFESH-UQAM) sont en grève. Depuis, ils ont été rejoints par d’autres associations étudiantes de l’UQAM, notamment par l’association facultaire des arts (AFEA-UQAM) et celle de communication (AFELLC-UQAM) qui ont déclenché la grève la semaine dernière. Certaines associations de l’Université de Montréal se sont aussi jointes au mouvement. Au total, environ 15 000 étudiants au Québec sont maintenant en grève.

Bien que les revendications des associations étudiantes puissent différer légèrement d’une à l’autre, elles s’opposent principalement au dégel des frais de scolarité (ceux-ci auront augmenté de 30% à 40% d’ici 2012) du gouvernement libéral de Jean Charest et elles prônent un réinvestissement massif en éducation afin de contrer le sous-financement des universités. À l’UQAM, les étudiants s’opposent aussi au plan de redressement du nouveau recteur de l’université Claude Corbo. Endettée de plus de 200 millions de dollars suite à un scandale financier, la direction de l’UQAM tente essentiellement d’assainir ses finances en faisant porter le fardeau de la dette sur le dos des étudiants et des employés (coupures de cours, hausse de frais afférents, embauche de moins de professeurs…)

Devant le prolongement du mouvement de grève, l’administration de l’UQAM a eu recours à des mesures anti-démocratiques pour faire retourner les étudiants en classe. En 2007, elle avait eu recours au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) lors de la grève étudiante partielle. La police avait alors matraqué des étudiants qui manifestaient leur mécontentement envers Claude Corbo. La semaine dernière, la direction de l’UQAM a fait appel à l’escouade tactique du SPVM afin de déloger des étudiants qui occupaient une salle où devait avoir lieu une rencontre de la Commission des études de l’UQAM (une instance dirigeante composée de 26 membres dont 7 représentants des associations étudiantes), qui s’apprêtait à statuer sur une résolution qui obligerait les professeurs et les chargés de cours à dispenser leurs cours.

Dans un autre geste répressif posé un peu plus tôt, à la fin février, l’université a renvoyé trois étudiants pour une période d’environ trois semaines pour avoir supposément intimidé des membres du personnel de l’UQAM  lors d’une action de protestation. Contacté par l’ISSE, un des étudiants concernés a démenti la version donnée par la direction de l’UQAM : sa présence à l’action en question n’a duré que quelques minutes au cours desquelles aucune altercation n’a eu lieu avec du personnel de l’UQAM.

Dans un contexte où plusieurs votes de reconduction de la grève se tiendront dans la semaine du 17 mars, l’UQAM a émis une demande d’injonction à la Cour en prétextant des « perturbations étudiantes », c’est-à-dire l’occupation de la salle où devait avoir lieu la réunion de la Commission des études.

La demande d’injonction est rédigée de façon très large et peut servir à criminaliser toute activité politique à l’intérieur de l’université et autour de celle-ci. Elle ordonne aux étudiants de « s'abstenir d'intimider, de menacer, d'importuner, de molester ou de séquestrer » toutes les personnes qui circulent à l’UQAM. De plus, elle ordonne « de s'abstenir d'ordonner ou de conseiller, de quelque façon que ce soit, directement ou indirectement, à toute personne, de commettre les actes mentionnés [dans la demande d’injonction] et de les soutenir, les encourager ou les appuyer ».

Elle a aussi « ordonné aux associations concernées, à leurs représentants, leurs officiers et à toute autre personne agissant ou non sous leurs instructions de cesser immédiatement tout attroupement ou manifestation aux accès, sorties et à l'intérieur des pavillons et résidences de l'UQAM et dans un rayon de 100 mètres de ceux-ci. » Que dire, donc, d’un étudiant qui distribue des tracts ? Est-il en train d’ « importuner » des gens ? Que dire des étudiants qui décident d’organiser une activité quelconque à l’UQAM pour manifester leur opposition ? Les représentants de leurs associations seront-ils tenus responsables pour les avoir « encouragés » ?

Pour toute personne qui ne respecte pas cette demande d’injonction, une amende de 50.000$ avec ou sans peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à un an pourrait être imposée.

Cette demande d’injonction constitue une flagrante attaque sur les droits démocratiques. Incapable de répondre aux besoins des étudiants, l’université n’a d’autre choix que de recourir à de telles méthodes anti-démocratiques. Celles-ci sont un avant-goût de ce qui attend ceux qui, dans les années à venir, tenteront de s’opposer aux attaques sur leur condition de vie.

Une nouvelle perspective politique est nécessaire

L’Internationale étudiante pour l’égalité sociale salue le courage des étudiants qui, même dans des conditions où le mouvement étudiant est isolé et fait face à des mesures anti-démocratiques, ont été en mesure de reconduire plusieurs fois la grève et de continuer à lutter pour défendre le système d’éducation.

Cependant, pour contrer l’assaut sur le système d’éducation et l’érosion de leurs droits démocratiques, les étudiants doivent adopter une toute nouvelle perspective politique.

Ils doivent élargir leurs demandes et chercher à rompre leur isolement en faisant un appel énergique aux autres associations étudiantes et aux travailleurs en s’opposant de façon inconditionnelle à la bureaucratie syndicale et à ses tentatives pour isoler, une fois de plus, le mouvement étudiant.

Lors de la grève étudiante de 2005, la plus longue grève étudiante de l’histoire du Québec, la bureaucratie syndicale est intervenue afin d’isoler le mouvement étudiant. Henri Massé, alors président de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ), avait dit que les étudiants devaient faire des « compromis » dans leurs revendications. Cette intervention, en plus de délégitimer les revendications du mouvement étudiant,  bloquait à celui-ci l’accès aux travailleurs – notamment ceux du secteur public du Québec qui étaient alors en période de renouvellement de leur convention collective et qui faisaient face à des offres gouvernementales « non négociables » impliquant une baisse de leur salaire réel.

Il existait alors un fort sentiment d’opposition populaire au gouvernement Charest, sentiment qui avait fait surface un peu plus d’un an plus tôt, à la fin de 2003, dans une série de manifestations anti-gouvernementales de masse. C’est précisément la raison pour laquelle la bureaucratie syndicale, en tant que défenseur endurci du système capitaliste existant, voulait éviter une confrontation avec le gouvernement en isolant les étudiants en grève et en étouffant les demandes des travailleurs du secteur public.

Tout aussi significative a été l’élection québécoise de 2007 qui a démontré, sous une forme confuse, un rejet par la population des deux partis traditionnels de pouvoir de la classe dirigeante québécoise, les Libéraux et le Parti québécois (PQ). La réponse de la bureaucratie syndicale a été de renforcer ses liens de longue date avec le parti de la grande entreprise qu’est le PQ, la forme principale que prend sa politique de subordination politique des travailleurs à l’ordre politique existant.

L’attitude de la bureaucratie syndicale n’a pas changé depuis. Par exemple, les quatre syndicats de l’UQAM refusent de demander à leurs membres de se prononcer sur l’actuelle grève étudiante, prétextant qu’ils sont dans une « escalade de moyens de pression ». De plus, avec leur campagne intitulée « J’appuie l’UQAM », ils tentent essentiellement de ramener les étudiants et les travailleurs derrière la direction de l’université et son plan de redressement en demandant au gouvernement un « réinvestissement pour l’UQAM ».

Cette politique visant à isoler les étudiants est facilitée par l’Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante (ASSÉ), l’association qui avait dirigé la grève de 2005. Celle-ci n’avait pas alors mis en garde les étudiants contre les manœuvres de la bureaucratie syndicale et s’était concentrée principalement sur la question limitée des coupures de 103 millions de dollars dans les prêts et bourses. Au mois de février 2008, l’ASSÉ a décidé d’abandonner sa campagne de grève générale illimitée en disant que le militantisme des étudiants n’était pas au rendez-vous. C’est dans les semaines qui ont suivi cet abandon que le mouvement étudiant s’est élargi quelque peu.

Le rôle conservateur de la bureaucratie syndicale, en 2008 tout comme en 2005, a un impact indéniable sur la lutte des étudiants, dont l’isolement crée les conditions pour les mesures anti-démocratiques que la direction de l’UQAM met sur pied en ce moment.

En opposition à la politique pro-capitaliste des directions syndicales, les étudiants en grève doivent élargir leurs demandes et lancer un appel ouvert à tous les étudiants et aux travailleurs pour qu’une lutte politique commune soit entreprise contre toutes les attaques sur l’éducation et les programmes sociaux et pour une nouvelle société basée sur l’égalité sociale.


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