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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

La tension croît avant le sommet de Washington

Par Peter Schwarz
17 novembre 2008

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Les dirigeants des pays membres du G20 se réunissent à Washington ce week-end pour un sommet spécial sur la crise financière et économique mondiale.

Le Groupe des 20, les 20 plus grands pays industrialisés et les soi-disant économies émergentes, représente 85 pour cent de la production économique mondiale et les deux tiers de la population mondiale. Il est improbable toutefois que le sommet qui a lieu à partir de vendredi débouche sur un accord concret, les désaccords et les tensions entre les participants étant tout simplement trop importants.

Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, qui représente aussi l’Union européenne (UE) à cette réunion a déjà averti que ce sommet n’était que « le début d’un processus. » Le « travail difficile » commencé cette semaine devra être poursuivi, a-t-il dit. Kouchner a explicitement désigné le président américain sortant et hôte du sommet, George W. Bush, comme étant l’un des problèmes potentiels.

Malgré les faibles attentes de résultats concrets, le sommet ne manque pas de revêtir une signification politique. Il ne se concentrera pas sur Bush mais sur son successeur Barack Obama, qui ne sera pas présent à la réunion.

Obama a dit qu’il ne participera pas au sommet pour ne pas brouiller la lisibilité des responsabilités entre lui et le président sortant. Il y envoie toutefois certains de ses conseillers les plus proches, dont l’ancienne secrétaire d’Etat, Madeleine Albright. De plus, selon le conseiller de Bush, Dan Price, il sera tenu informé des développements du sommet par l’actuelle administration.

Les participants, et notamment les Européens, considèrent que le sommet est une occasion de faire connaître leurs revendications au nouveau président et de tester les concessions qu’il est prêt à faire. L’UE a réclamé un nouveau sommet dans 100 jours, un mois après la prise de fonction d’Obama, afin de parvenir à des décisions concrètes.

Après les huit années de la présidence Bush, qui avaient été marquées par la poursuite agressive et unilatérale des intérêts américains, les participants du sommet espèrent qu’un changement à la Maison-Blanche leur permettra de faire valoir plus fermement leurs propres intérêts. Ils exigent plus ou moins ouvertement que les Etats-Unis leur cèdent de leur influence politique et renoncent à leur rôle de superpuissance.

Ils croient que les Etats-Unis sont tellement affaiblis par la crise financière et les bourbiers militaires en Irak et en Afghanistan qu’ils devront immanquablement faire des concessions. Ils espèrent qu’Obama tiendra ses promesses électorales en acceptant une collaboration plus étroite avec les autres dirigeants mondiaux, notamment d’Europe.

Derrière les coulisses officielles du sommet, les séances photo, les dîners et les déclarations vides de sens, des débats passionnés auront lieu sur ces questions. La tension qui couvait depuis des années s’est intensifiée au fur et à mesure que la crise financière et la récession se sont aggravées.

Sur les marchés financiers, des milliards de dollars sont détruits tous les jours alors que la récession menace de faillite des secteurs industriels entiers. Dans ces conditions, aucun gouvernement capitaliste n’est prêt, et sûrement pas aux Etats-Unis, à sacrifier ses intérêts financiers et économiques nationaux au principe de la coopération internationale. Ceci vaut également pour Obama qui entretient des liens étroits avec Wall Street.

Derrière les débats concernant les plans de sauvetage, les nouvelles régulations financières pour les marchés financiers mondiaux et un contrôle international des institutions financières, qui se trouvent au cœur du sommet de Washington, se cache une lutte féroce pour des avantages économiques en matière d’influence et de profits.

Deux articles parus dans la presse allemande sont révélateurs à ce sujet. Le ton qu’ils affichent à l’égard des Etats-Unis est d’autant plus remarquable si l’on tient compte que le partenariat entre les Etats-Unis et l’Allemagne était passé pendant longtemps pour la doctrine officielle d’Etat en Allemagne.

Dans sa dernière édition, Der Spiegel reproche ouvertement au gouvernement américain de défendre, « au nom des intérêts de Wall Street sa suprématie sur les marchés des capitaux » en bloquant pour ce faire les efforts européens visant à appliquer davantage de régulations aux banques et aux bourses.

L’enjeu pour le gouvernement américain est en premier lieu la défense des énormes profits de « son industrie financière mondiale », écrit Der Spiegel. En 2007, l’industrie financière a contribué à raison de 30 pour cent à l’ensemble des profits des entreprises américaines. Le magazine ajoute : « Aucun des dirigeants politiques actuels ne souhaite compromettre cette profitabilité qui n’est normalement atteinte que dans des secteurs illicites de l’économie tel le trafic de drogue et la prostitution, malgré un désastre qui a coûté des milliards, malgré la nationalisation d’institutions financières et malgré des millions en créances hypothécaires pourries et l’implosion de Wall Street. Si les Allemands venaient à s’imposer, alors les marges bénéficiaires élevées seraient une chose du passé. »

Le 13 novembre, le journal Süddeutsche Zeitung a publié un éditorial similaire sur les conflits au sujet des nouvelles régulations financières internationales. Il a écrit : « Un obstacle encore plus important sur la voie vers une nouvelle architecture financière est le rôle joué par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne : ils perdront pouvoir et revenu. Si l’Etat devait exercer davantage de contrôle et si les institutions financières et leurs directeurs étaient forcés d’accepter plus de responsabilités… alors, le secteur verrait ses profits fondre. »

Les revendications de la France et de l’Allemagne visant à la régulation du système financier international sont cependant loin d’être désintéressées. Elles ne sont nullement destinées à protéger les travailleurs, les épargnants et les propriétaires immobiliers privés contre les spéculateurs et l’impact de la crise financière. Au lieu de cela, elles font la promotion des intérêts économiques français et allemands à l’encontre de ceux de Wall Street et de la City de Londres, les deux plus importantes places financières du monde.

A ceci sont étroitement liés les efforts entrepris par les Européens pour se libérer de leur dépendance politique vis-à-vis des Etats-Unis et pour assumer de plein droit le rôle d’une grande puissance impérialiste.

Un article paru le 12 novembre dans le Süddeutsche Zeitung affiche cette même opinion ouvertement. Il presse instamment les gouvernements européens de profiter du changement de président à Washington pour appliquer une « stratégie transatlantique modifiée. » Le journal poursuit : « Le monde a changé. De nouvelles puissances émergent en Asie et en Amérique du Sud. La Russie revient en tant que grande puissance. Et l’Union européenne joue entre-temps un rôle majeur sur la scène mondiale. Il n’existe plus de superpuissance exclusive. »

Les Etats-Unis continuent pourtant d’avoir de l’importance pour l’Europe, « mais il ne devrait plus revenir aux seuls Américains de décider qui est "partenaire" », réclame le journal. « Qui donc attend de voir ce que le nouvel homme à la Maison-Blanche exigera des Européens se retrouvera en fin de compte à nouveau dans la position où l’un est le chef et l’autre le serviteur. » Pour un nouveau partenariat, l’Europe doit poser les conditions suivantes, écrit la Süddeutsche Zeitung : « Il faut en finir de l’usage abusif de l’OTAN comme d’une "boîte à outil" servant les intérêts américains, et de la division entre "vieille" et "nouvelle" Europe et ne plus ignorer les Nations unies et la loi internationale. »

Le journal doute cependant si l’Europe est « politiquement suffisamment unifiée pour se positionner sur un pied d’égalité avec les Etats-Unis ». Il en rejette la responsabilité sur l’Europe de l’Est. Les nouveaux membres de l’UE veulent que les Etats-Unis demeurent « la puissance dirigeante selon l’ancien style. » Mais cette exigence du passé « ne sert à rien pour maîtriser les défis du présent… L’instant est propice si l’Europe veut saisir la balle au bond. »

La lutte pour l’influence économique et politique, pour les marchés, les matières premières et l’avantage stratégique ont provoqué au siècle dernier deux guerres mondiales. De nos jours, les conflits croissants entre les grandes puissances mènent à nouveau dans la même direction. La crise du système capitaliste menace des millions de personnes non seulement de pauvreté, de perte d’emploi et de perte de leurs économies, de leur retraite et de leur maison, mais aussi de guerres impérialistes.

(Article original paru le 14 novembre 2008)


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