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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

Nomination de la candidate républicaine à la vice-présidence

Les démocrates taisent les menaces de la droite religieuse

Par Bill Van Auken
8 septembre 2008

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Le principal événement de la convention nationale républicaine, qui en était alors à son troisième jour, fut le discours d’acceptation de la candidate du parti à la vice-présidence, Sarah Palin, gouverneure de l’Alaska.

La candidature de Palin, dont l’annonce a suscité l’étonnement, pour ne pas dire l’incrédulité générale la semaine dernière, a été présentée dans une atmosphère politique bien particulière. La direction républicaine l’a protégée de l’extérieur, annulant toutes ses apparitions en public et empêchant les médias d’accéder à sa candidate.

La seule indication d’une quelconque activité politique de la part de Palin lors de la convention, avant son discours de mercredi soir, préparé par un ancien rédacteur de discours de George W. Bush, est venu d’AIPAC, le groupe de lobby sioniste. AIPAC a dit qu’elle avait rencontré certains de ses membres en privé, leur promettant d’« œuvrer pour étendre et approfondir le partenariat stratégique entre Israël et les Etats-Unis ».

Dans l’intervalle, des agents du Parti républicain ont été dépêchés en Alaska, où ils ont instruits les amis et la famille de Palin de ne pas parler aux médias.

Pour leur part, les démocrates ont maintenu dans une large mesure un silence discret sur la candidate et ses opinions politiques. Le Parti démocrate a évité toute confrontation politique avec les républicains durant la convention républicaine de Minneapolis. 

Les démocrates ont bien annoncé initialement qu’ils allaient ouvrir un centre de campagne dans cette ville afin de contrer les républicains et qu’ils allaient appeler l’opération « On prend les mêmes et on recommence » (faisant allusion au candidat républicain à la présidence et à l’administration Bush) mais ce centre a à peine fonctionné pendant les trois premiers jours de la convention. Invoquant l’unité bipartite observée à l’occasion de l’ouragan Gustav, les démocrates ont annulé leurs séances quotidiennes d’information à la presse ainsi que d’autres réunions prévues. Le résultat fut de permettre à la candidature controversée de Palin de se faire en toute liberté.  

Dans le cadre de ce vide politique, imposé par les deux principaux partis, les médias se sont concentrés intensément sur la vie personnelle de la candidate, en particulier sur le fait que sa fille de 17 ans était enceinte, ce qui a été révélé quelques jours seulement après sa nomination en tant que numéro deux du « ticket » républicain.

Le fait de transformer cet événement personnel de la vie d’une adolescente et de sa famille en cirque médiatique est symptomatique du caractère malsain de la politique américaine et des médias eux-mêmes. Les républicains ont néanmoins salué en secret cette controverse comme le moyen de détourner l’attention du public de questions politiques plus importantes. Cela lui permettait d’attaquer les traditionnels méchants dans sa démagogie populiste droitière : les médias « libéraux » et les « élites » de Washington.

Le fait que ce soit Palin elle-même qui ait décidé de livrer sa fille aux feux de l’actualité nationale en acceptant la nomination et qu’elle soit assimilée à l’opposition d’extrême-droite à l’éducation sexuelle, la contraception et une politique anti avortement qui menace le bien-être d’innombrables adolescentes, tout cela est balayé du revers de la main.

Les médias et les démocrates ont tourné autour de l’implication la plus importante de la nomination de Palin, sans en parler vraiment : le fait qu’un des deux principaux partis américains est effectivement contrôlé par des forces dont la description la plus appropriée est celle de fascistes théocratiques et que ceux-ci voient sa nomination comme un moyen d’imposer leur idéologie à l’ensemble du pays.

S’il y a eu une avalanche d’articles sur le fait que Bristol, la fille de Palin, était enceinte, les grands médias se sont fort peu penchés sur les associations politico-religieuses de la gouverneure de l’Alaska.

Depuis sa nomination en tant que candidate républicaine à la vice-présidence, on a appris que Palin et son mari était des partisans de l’AIP (Parti pour l’indépendance de l’Alaska) une organisation d’extrême-droite qui préconise une sécession d’avec les Etats-Unis et la dissolution du gouvernement fédéral.

Si les responsables républicains ont contré ces articles en faisant état de listes d’électeurs montrant que Sarah Palin était adhérente du Parti républicain depuis 1982, les mêmes listes indiquent que son mari était effectivement membre de l’AIP et des dirigeants de ce parti disent que le couple était présent à sa convention de 1994 et soutenait son programme. Sarah Palin était présente à la convention de ce parti en 2000, une présence pour laquelle les républicains ont avancé l’alibi peu convaincant qu’il s’agissait d’une participation de pure forme qui s’expliquait par sa fonction de mairesse de Wasilla, un faubourg d’Anchorage. 

Ils n’ont pas expliqué le fait que, cette année, Palin a envoyé un message vidéo à la convention de l’AIP, introduite par le vice-président du parti George Clark, et qui la décrit comme « une adhérente de l’AIP avant qu’elle ne trouve un emploi de mairesse dans une petite ville ». 

Ce qu’il y eut d’attention pour ce lien politique de la part des médias s’est surtout concentré sur le slogan du parti « Alaska d’abord » qui représente une contradiction de forme avec le slogan de la campagne de McCain de « Le pays d’abord ». Mais ce qui revêt une plus grande signification c’est le fait que l’AIP est l’associé, en Alaska, du Constitution Party, un parti électoral d’extrême-droite issu du mouvement des milices, de l’extrémisme anti-impôt et de la droite chrétienne intégriste. 

Le Constitution Party avance un programme qu’on peut définir exactement comme du fascisme théocratique. Il engage le parti « à faire revenir la jurisprudence américaine à ses fondements d’origine dans la loi biblique ». C’est le programme qu’on associe habituellement à un mouvement connu sous le nom de « théologie des dominions » et qui exige la subordination de tout gouvernement et de toutes institutions à l’intégrisme chrétien, non seulement aux Etats-Unis mais dans le monde entier, ceci allant de pair avec une mise hors-la-loi de toute autre religion et avec la répression de l’athéisme. 

En plus de l’imposition de peines criminelles sévères, y compris la peine de mort, pour l’homosexualité, l’adultère et pour les médecins procédant à des avortements, ceux qui croient à cet Etat biblique proposent aussi un ordre du jour social correspondant parfaitement aux objectifs des sections les plus réactionnaires du grand patronat. Il appelle à l’élimination de pratiquement toutes les réformes sociales réalisées depuis plus d’un siècle, y compris des lois sur le salaire minimum, la protection sociale, les réglementations concernant l’environnement et la sécurité du travail, l’éducation publique et pratiquement toute forme d’assistance publique. 

Il y a peu de doute que Palin soit extrêmement proche de ces gens. Parmi les choses révélées ces dernières semaines, il y a fait qu’elle fut candidate à la mairie de Wasilla, une ville d’à peine 5000 habitants, sur la base d’un programme chrétien d’extrême-droite s’opposant à l’avortement et faisant la promotion du droit à posséder des armes, tout en incluant dans sa littérature la promesse que sa victoire signifierait que la ville « aurait son premier maire chrétien ».

Après être devenue mairesse, Palin essaya de licencier le bibliothécaire de la ville parce qu’il avait refusé d’interdire certains livres. Elle fut forcée d’abandonner son plan dû à l’opposition des habitants.

Des vidéos ont fait surface qui montrent Palin parlant devant son église à peine trois mois avant qu’on la pressente comme numéro deux du « ticket » républicain, décrivant la guerre en Irak comme une guerre sainte.

S’adressant en juin à la congrégation de son église, l’Assemblée de Dieu de Wasilla, Palin déclarait : « Priez pour nos militaires hommes et femmes qui aspirent à faire ce qui est juste. Priez aussi pour ce pays, pour que nos dirigeants nationaux déploient [des troupes américaines] pour une tâche qui est divine. C’est pour cela que nous devons prier, pour qu’il y ait un dessein et pour que ce dessein soit le dessein de Dieu. » Puis elle suggéra que sa proposition de gazoduc à partir de l’Alaska fasse aussi partie du « dessein de Dieu ».

On a entendu le pasteur de son église, Ed Kalnins, avertir ses paroissiens en 2004 que ceux qui votaient pour le candidat démocrate à la présidence des Etats-Unis, le sénateur John Kerry, pourraient être damnés et aller en enfer. Il dénonçait de la même manière ceux qui critiquaient l’administration Bush à cause de sa négligence criminelle lors de l’ouragan Katrina, disant : « Je hais les critiques envers le président, parce que c’est comme des critiques envers le pasteur : c’est presque pareil, cela ne nous conduira nulle part, vous savez, sinon en enfer. C’est là que cela nous conduira. »

Kalnins partage aussi la croyance des « derniers jours » qui est celle d’une partie des intégristes chrétiens et qui dit que l’apocalypse est proche. Il a pressé ses ouailles à se préparer à une migration en masse en Alaska, qui, croit-il, sera un des derniers refuges pour ceux qui fuient la destruction.

Dans un de ses prêches, Kalnins dit : « Nous devons penser comme Jésus. Nous sommes dans une époque et un temps de guerre et nous devons penser comme cela. Nous devons développer cet instinct. Nous devons développer comme croyants l’instinct que nous sommes en guerre et cette guerre consiste en une compétition pour notre foi… Jésus nous appelle à mourir. Vous vous en faites parce que vous pouvez avoir mal ? Il nous demande de mourir. »

Ce discours correspond à celui d’une partie croissante de l’Eglise de la Pentecôte, connue sous le nom d‘« armée de Joël » et dont les appels visent en priorité de jeunes adolescents et ceux dans leur vingtaine, les appelant la génération finale avant l’Apocalypse, celle qui doit être organisée en une armée divine. Dans certains cas, la terminologie militaire va jusqu'à parler des prêtres comme de « commandeurs » et suggère clairement que la mission est d’imposer la domination chrétienne par la force. 

Un récent article sur cette tendance et publié par le Southern Poverty Law Center cite des critiques venant du sein de l’Eglise et avertissant de ce que « les actions sanglantes ne sont peut être qu’une question de temps pour un mouvement qui se présente comme l’armée vengeresse de Dieu ».

Il y a le net danger qu’on prépare, sous le manteau de la religion, des forces fascistes pour attaquer la classe ouvrière.

Si les implications de ce mélange toxique d’intégrisme religieux et de politique droitière sont inquiétantes il y a peu de signes que Palin sera elle, soumise au genre de frénésie déclenchée contre Barack Obama au début de cette année à propos des déclarations faites par le pasteur de sa propre église, le révérend Jeremiah Wright, qui mêlait nationalisme noir et critiques à la politique étrangère américaine.

Au sein du Parti républicain, aucune de ces révélations n’a eu d’impact visible sur la popularité immense de la nomination de Palin parmi ceux qui étaient présents à la convention de Minneapolis. La raison en est que la « base » du parti est composée en grande partie par la droite chrétienne qui considère Palin comme l’une des leurs.

Cette couche a fortement dicté la plateforme républicaine, y compris une politique d’immigration qui appelle à des déportations de masse, à la construction d’un mur entre les Etats-Unis et le Mexique et à la reconnaissance de l’anglais comme langue officielle, s’arrêtant de justesse à un retrait de la citoyenneté américaine pour les enfants d’immigrés sans documents nés sur le territoire américain. A présent, elle se réjouit de la perspective qui verra une politicienne de droite intégriste chrétienne à « deux pas » de pouvoir assumer la fonction de « grand commandeur ».  

Ce qui est plus important, ni Obama, ni aucune partie de la direction du Parti démocrate n’a eu le courage de faire de ces liens une question politique.

On pourrait aisément monter une campagne révélant la menace qu’une telle politique basée sur la religion pose aux droits démocratiques élémentaires en Amérique. Un sondage d’opinion réalisé par le Pew Research Center le mois dernier montrait qu’une nette majorité d’Américains était en faveur d’une séparation de l’Eglise et de l’Etat et exprimait l’opinion que les églises devaient rester en dehors de la politique.

Il y a des millions et des millions de salariés à qui des politiciens de droite, se servant d’un discours religieux pour justifier l’inégalité sociale, les guerres d’agression, les réductions d’impôts pour les riches et autres revendications de l’élite financière, font avaler du christianisme intégriste et qui en ont plein le dos.  

Et pourtant, les démocrates n’ont aucune intention de faire appel à ces sentiments et de mettre la droite chrétienne au défi. Leur objectif est bien plutôt de lui faire concurrence et d’obtenir des votes en s’y adaptant. C’est la source réelle de la délicatesse avec laquelle les démocrates traitent la nomination de Palin.

La convention républicaine, le caractère d’extrême droite de la campagne présidentielle républicaine et le silence lâche et complice du Parti démocrate souligne l’immense danger pour la classe ouvrière que représente le monopole politique bipartite exercé par les deux partis contrôlés par le grand patronat.

(Article original anglais paru le 4 septembre 2008)


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