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WSWS : Nouvelles et analyses : Moyen-Orient

La crise de Gaza et la perspective de la révolution permanente

Par Bill Van Auken
12 janvier 2009

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Le massacre perpétré contre Gaza a provoqué une indignation populaire de par le Proche-Orient et dans le monde entier, alors même que les gouvernements du monde arabe et d’ailleurs se liguent pour fournir des justifications à ce crime de guerre américano-israélien.

La déclaration par Israël d’une « guerre totale » contre une population en grande partie sans défense et à moitié affamée de 1,5 millions de personnes emprisonnées dans une bande de terre assiégée, provoque de façon justifiée la fureur et la révulsion. Il en est de même des reportages hypocrites et mensongers des médias qui ne cessent de décrire le blitz aérien d’Israël sur des appartements, des commissariats de police, des universités, des mosquées et des bâtiments officiels comme un acte de « légitime défense », mettant sur un pied d’égalité les assiégeants et les assiégés, des roquettes artisanales inefficaces et des F-16, et autres  missiles Hellfire et ‘bombes  intelligentes’ fournis par les Etats-Unis.

L’indignation et la condamnation morales d’Israël ne sont pourtant en aucune manière une réponse suffisante aux atrocités de Gaza. Ce qu’il faut avant tout c’est une perspective politique.

Une grande partie de ceux qui sont actuellement attaqués sont les enfants des réfugiés soumis à la violence et forcés par Israël de quitter leur foyer lors de sa guerre d’expansion de 1967. A cette époque, tout comme aujourd’hui, le destin tragique des Palestiniens avait été largement ignoré par les gouvernements du monde entier, tandis que leurs intérêts étaient trahis par les régimes nationalistes bourgeois arabes qui prétendaient parler en leur nom.

Avec le développement des terribles événements de Gaza de ces derniers jours, il devient clair que les gouvernements bourgeois arabes d’aujourd’hui agissent soit en complices directs dans cette attaque contre les Palestiniens soit accordent à cette attaque leur soutien politique tacite.

Le rôle le plus criminel est joué par le régime d’Etat policier d’Osni Mubarak en Egypte et soutenu par les Etats-Unis. L’Egypte a collaboré avec Israël pour consolider le blocus économique punitif de Gaza en fermant le passage de Rafah entre Gaza et l’Egypte. Après le commencement des bombardements, des Palestiniens terrorisés cherchant à fuir par la frontière égyptienne ont été accueillis par des tirs de mitraillette.

Beaucoup soupçonnent le régime du Caire d’avoir intentionnellement trompé la direction du Hamas à Gaza, l’assurant juste quelques heures avant le début des bombardements qu’Israël n’avait aucune intention de lancer une attaque. Des représentants du Hamas disent avec insistance que c’est cette assurance de l’Egypte qui a fait que les bâtiments n’ont pas été évacués, ce qui a eu pour résultat un nombre plus élevé de tués et de mutilés.

Le journal en langue arabe, basé à Londres al-Quds al Arabi a cité des sources diplomatiques rapportant que le ministre égyptien des services secrets, Omar Suleiman, avait averti un certain nombre de dirigeants arabes qu’Israël préparait justement une telle attaque sur Gaza.

Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Ahmed Aboul Gheit, a dit lors d’une conférence de presse samedi que le Hamas était responsable de la violence contre Gaza. « L’Egypte a mis en garde pendant longtemps et quelqu’un qui ignore les avertissements est responsable des conséquences, » a-t-il dit.

Des journaux proches de la monarchie Saoudite ont fondamentalement favorablement accueilli le massacre israélien, le décrivant comme une attaque contre « les agents de l’Iran » au Proche-Orient.

Des représentants de l’Autorité palestinienne à Ramallah, conduite par le président Mahmoud Abbas ont dit aux médias israéliens qu’eux aussi considéraient le massacre de Gaza comme une opportunité pour reprendre le pouvoir, assurant à l’establishment sioniste qu’ils sont prêts à revenir à Gaza si Israël réussit à renverser le gouvernement du Hamas à l’aide de puissants explosifs.

Même ces régimes qui ont officiellement dénoncé les attaques et critiqué d’autres gouvernements arabes pour leur complicité, tels l’Iran et la Libye, le font avec l’objectif de promouvoir leurs propres intérêts politiques bourgeois et régionaux.

Un symbole significatif de la nature réactionnaire de l’ensemble de ces régimes arabes est qu’un « sommet exceptionnel » des ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe a été reporté à mercredi, donnant ainsi à Israël cinq jours entiers de bombardement avant d’être confrontée à une déclaration inefficace de plus.

Et bien qu’il soit nécessaire de défendre le Hamas contre cet assassinat de ses dirigeants et la diffamation incessante de ses sympathisants qualifiés de « terroristes » par ceux-là même qui infligent un terrorisme d’Etat à grande échelle sur leur population civile, ce mouvement islamiste n’a aucune perspective réelle pour confronter et vaincre l’offensive américano-israélienne.

Le lancement de roquettes sur le sud d’Israël avait pour but de convaincre Israël de négocier une levée des sanctions économiques, de même que la menace de renouveler les « opérations martyre » consistant à envoyer de jeunes Palestiniens se faire exploser dans des cafés ou des bus israéliens est aussi destinée à faire pression sur le régime sioniste.

Personne n’a plus tiré profit de la domination du nationalisme et de l’islamisme dans les pays arabes que le régime sioniste lui-même. Il n’existe pas d’issue à ce bourbier par la voie du nationalisme.

Créer un mini-Etat de plus dans cette région n’apportera pas de solution à la dépossession des Palestiniens qui date de plusieurs décennies. La séparation de la Cisjordanie et de Gaza par des colonies israéliennes, des routes de sécurité, des postes de contrôle et des murs montre clairement qu’un tel territoire ne serait jamais qu’une prison de type bantoustan, avec un régime nationaliste bourgeois palestinien jouant le rôle de gardiens.

Les représentants israéliens ont clairement fait entendre qu’ils considèrent le soi-disant « processus de paix » comme un moyen de créer une telle monstruosité, appelée « solution des deux Etats, » afin de poser les fondations politiques permettant  d’expulser d’Israël la population arabe d’un million de personnes, soit un exercice de nettoyage ethnique de grande envergure.

Cette perspective insensée, autant que l’est cette attaque sur Gaza, témoigne de la faillite politique et de la crise du sionisme. L’Etat israélien et tous ses principaux partis sont soumis à une clique de militaires. Le régime titube d’une aventure militaire téméraire à une autre, du Liban à Gaza et avec à l’horizon l’Iran, infligeant la destruction sur les populations civiles tout en épouvantant et démoralisant de larges sections de la population- même d’Israël.

Alors que le gouvernement cherche à maintenir son pouvoir en mettant constamment en avant la peur et le chauvinisme, il y a de nombreux Israéliens qui voient ce développement de violence avec révulsion et la conviction que cela ne peut que conduire à de nouvelles catastrophes.

Finalement, ce militarisme offensif de l’Etat israélien est l’expression non pas seulement de l’idéologie sioniste mais de fissures de classe politiques et sociales profondes qui traversent la société israélienne. C’est une société qui se caractérise par de vastes inégalités sociales et un régime conduit par un individu, le premier ministre Ehud Olmert, dont les démêlées avec la Justice pour corruption politique et financière et sa presque condamnation, expriment la corrosion de l’ensemble de l’establishment sioniste.

Dans une remarque révélatrice, Mark Regev, le porte-parole d’Olmert, a déclaré après une réunion du gouvernement, faisant suite à la première série de bombardements de Gaza: « Aujourd’hui dans la salle du conseil il y avait de l’énergie, le sentiment qu’après avoir fait si longtemps preuve de retenue, nous avions enfin agi. » Que le massacre d’innocents par des bombardements aériens soit une source de renouvellement de l’« énergie » politique en dit long sur la nature de ce régime.

Une lutte authentique contre le sionisme ne se conçoit que sur la base d’une lutte de classe qui transcende les frontières nationales, qui unisse les travailleurs arabes et juifs sur la base de leurs intérêts de classe communs. Hors de cette perspective qui recherche la mobilisation indépendante et unifiée des travailleurs arabes et juifs, il n’existe pas de vrai moyen de donner un coup d’arrêt mortel au sionisme et à l’impérialisme au Proche-Orient.

Les manifestations qui ont éclaté du Caire à Bagdad en soutien à Gaza sont dirigées non pas seulement contre Israël mais contre les régimes arabes décrépits qui sont les alliés les plus fidèles d’Israël. Ce mouvement populaire n’est pas juste une réaction aux récents événements mais participe plutôt d’une radicalisation grandissante de la classe ouvrière au Proche Orient ainsi qu’en Europe, aux Etats-Unis et de par le monde, suscitée par la crise très grave du capitalisme mondial.

Aussi héroïques que soient les Palestiniens confrontés aux F-16 israéliens et aux hélicoptères Appache à Gaza, la plus grande menace pour le régime sioniste, son talon d’Achille, est l’intensification de la lutte de classe et la perspective d’une révolution socialiste en Egypte, dans les autres Etats arabes et en Israël-même.

Une alternative révolutionnaire authentique ne peut se construire que sur la base de la théorie de la révolution permanente telle qu’elle fut développée par Léon Trotsky. Trotsky a établi qu’à l’époque de l’impérialisme, la réalisation des tâches nationales et démocratiques  basiques dans les nations opprimées, tâches associées à la période historique antérieure liée à la montée de la bourgeoisie, ne peut être accomplie que par la mobilisation politique indépendante de la classe ouvrière, fondant ses actes sur une perspective internationaliste et socialiste.

La question palestinienne, au centre des conflits acharnés et de la tragédie politique dans la région est, en dernière analyse, inséparablement liée au destin de la révolution socialiste au Proche-Orient et internationalement. L’évolution des événements de Gaza pose de toute urgence la question de la lutte visant à unifier la classe ouvrière arabe et juive dans un combat pour créer une fédération du Proche-Orient, participant de la lutte pour mettre fin au capitalisme à l’échelle mondiale.

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