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WSWS : Nouvelles et analyses : Moyen-Orient

La réponse socialiste à la crise de Gaza

Par le comité de rédaction du World Socialist Web Site
14 janvier 2009

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Le caractère criminel de la guerre éclair israélienne contre Gaza apparaît plus clairement de jour en jour. Selon les Nations unies, près de 800 hommes, femmes et enfants ont été tués jusqu’à maintenant par l’armée israélienne et plus de 3200 personnes ont été blessées. Des universités, des écoles, des maisons, des ponts et des systèmes d’égouts ont été détruits par les bombes. L’étendue du désastre humanitaire dans la bande de Gaza excède toute description.

Israël poursuit l’intensification de la guerre. Jeudi, les Nations unies ont mis fin à l’approvisionnement vital de nourriture destiné à la population de Gaza après que l’armée israélienne eut délibérément attaqué des travailleurs de l’ONU.

Les gens de partout dans le monde réagissent avec consternation et colère au massacre de la population palestinienne sans défense aux mains de la machine militaire moderne israélienne. Les manifestations internationales se multiplient, tout comme le nombre de personnes qui y participent. De nombreuses manifestations ont pris place le week-end dernier aux Etats-Unis ainsi que dans de nombreuses villes européennes dont Paris, Londres et Berlin.

Comment peut-on stopper la terreur semée par Israël ? Comment l’avenir du peuple palestinien souffrant peut-il être assuré ?

Les organisateurs des manifestations n’ont aucune réponse à offrir. Ce qu’ils proposent principalement est d’exhorter les gouvernements occidentaux et les Nations Unies à intervenir et faire pression sur Israël. Cela mène invariablement à un cul-de-sac. En réalité, seule une offensive socialiste de la classe ouvrière internationale peut amener la paix au Moyen-Orient et assurer un futur viable à sa population, palestinienne, israélienne et arabe.

L’offensive génocidaire déclenchée par le gouvernement israélien est liée inextricablement à la crise de l’économie capitaliste mondiale. Après des décennies d’enrichissement effréné, les classes dirigeantes à travers le globe n’ont rien à offrir aux masses ouvrières, excepté la pauvreté, le chômage, l’exploitation, la répression et la guerre.

Israël démontre ce développement dans un microcosme. La société israélienne est déchirée par de profondes divisions sociales. Son gouvernement nage dans la corruption. L’un des objectifs de l’attaque sur la bande de Gaza consiste, en pleine campagne électorale, à détourner l’attention des tensions sociales bouillonnantes à l’intérieur même d’Israël.

Le sionisme s’est avéré être un piège pour le peuple juif. Les socialistes ont toujours mis en garde que la question juive ne pouvait être résolue en établissant un Etat national capitaliste sur une base religieuse. La victoire contre l’antisémitisme et la persécution des juifs est complètement liée à l’abolition de la société de classe capitaliste et au sort de la classe ouvrière internationale. L’Holocauste n’a été possible que par la destruction préalable du mouvement ouvrier allemand aux mains des nazis.

En terrorisant les Palestiniens, l’Etat israélien a perdu toute légitimité morale. Cela se reflète à l’intérieur même d’Israël, où la vie politique est de plus en plus dominée par des fanatiques religieux et de droite qui intimident la population israélienne. C’est une ironie tragique que le plus proche parallèle de l’offensive israélienne sur la population encerclée de Gaza soit le nettoyage ethnique meurtrier du ghetto de Varsovie par les nazis.

Israël peut mener sa guerre uniquement grâce au soutien inconditionnel des Etats-Unis et la complicité des bourgeoisies arabes et européennes.

Les Etats-Unis versent annuellement 3 milliards de dollars à l’armée israélienne, l’alimentant avec l’artillerie la plus moderne. Non seulement le président Bush et les républicains, mais les démocrates au Sénat soutiennent sans équivoque Israël. Le successeur de Bush, Barack Obama, est demeuré silencieux, ce qui équivaut à un accord tacite.

Les élites dirigeantes européennes jouent un rôle plus camouflé mais tout aussi perfide. Pas une d’entre elles n’a condamné l’agression israélienne. Plutôt, elles ont justifié l’agression israélienne comme un acte d’auto-défense légitime et ont déclaré le Hamas responsable de la souffrance des Palestiniens. Selon la chancelière allemande Angela Merkel, la responsabilité repose « clairement et exclusivement » sur le Hamas.

Les Européens, toutefois, sont inquiets des possibles conséquences des actions imprudentes d’Israël et des Etats-Unis. Ils demandent donc un cessez-le-feu. Ils craignent que la guerre déstabilise les régimes arabes bourgeois et affaiblisse leur propre influence dans la région. Ils appréhendent aussi une augmentation des tensions dans leurs propres pays où, particulièrement en France, habitent des millions d’immigrants de l’Afrique du Nord et des pays arabes.

Alors qu’Israël continue d’intensifier sa terreur contre les Palestiniens, l’Europe, menée par le président français Nicolas Sarkozy, cherche à imposer un cessez-le-feu dans des termes acceptables à Israël et aux Etats-Unis.

Gaza passerait d’une prison à un ghetto sous haute surveillance. La petite bande de terre frontalière entre Gaza et l’Égypte, la seule qui n’est pas contrôlée par Israël, serait scellée hermétiquement et supervisée par une force de sécurité internationale. Le régime autoritaire égyptien d’Hosni Moubarak et l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas soutenue par les Etats-Unis se verraient offrir la tâche de contrôler Gaza. Israël serait conséquemment libéré de toute responsabilité de nourrir les 1,5 million d’habitants de Gaza et Moubarak prendrait la relève comme gardien de prison.

Moubarak hésite encore, effrayé des répercussions domestiques d’une telle issue. Mais si le pot-de-vin est suffisant, il acceptera. Son gouvernement est largement dépendant de l’aide financière internationale.

Moubarak a joué un rôle important dans la préparation de la guerre. Il partage l’objectif d’Israël de détruire le Hamas, qu’il craint en raison de ses liens avec la confrérie des Frères musulmans de l’Egypte. Deux jours avant qu’Israël ne déclenche la guerre, la ministre israélienne des Affaires étrangères, Tzipi Livni, s’est rendue au Caire pour informer Moubarak des plans d’Israël. Lorsque la guerre a éclaté, l’Egypte a assuré que sa frontière avec Gaza demeurerait fermée, bloquant ainsi la seule route d’évasion possible pour les Palestiniens encerclés.

Bien qu’il faille défendre le Hamas de l’assassinat de ses dirigeants et de la diffamation envers ses partisans comme des terroristes par ceux-là mêmes qui infligent le terrorisme d’Etat à une population civile, ce mouvement n’offre aucune perspective pour confronter et défaire la conspiration existante entre les Etats-Unis, Israël et les régimes arabes bourgeois. Organisation islamique, le Hamas rejette la lutte de classe. Plutôt que de chercher à obtenir le soutien de la classe ouvrière arabe, juive et internationale, cette organisation tente d’arriver à un accord avec les régimes arabes et les puissances impérialistes. Cela est tout à fait en ligne avec la perspective de faire pression sur Israël en lançant des roquettes sur les villages israéliens.

Le Hamas dépend principalement de la Syrie, qui n’aura aucun scrupule à laisser tomber le Hamas si Israël payait ce qu’il faut. C’est le sens de l’intervention de Sarkozy et du premier ministre turc Erdogan (un ancien islamiste). Les deux ont des rapports étroits avec Israël et la Syrie et font pression sur la Syrie pour qu’elle force le Hamas à mettre fin à sa résistance ou encore qu’elle répudie entièrement son soutien à cette organisation.

Le sort de la population de Gaza est intimement lié à la classe ouvrière internationale. Le peuple palestinien ne peut attendre aucun soutien de la part des Nations unies, des régimes arabes ou des gouvernements européens, qui l’ont trahi à maintes reprises et qui ont leur part de responsabilité pour la condition dans laquelle il se trouve aujourd’hui.

La crise économique internationale va inévitablement produire des luttes de classe explosives, au Moyen-Orient, en Europe et aux Etats-Unis. Ces luttes vont former la base pour une offensive unifiée de la classe ouvrière internationale. La condition préalable pour une telle lutte est la rupture avec tous les partis et organisations qui subordonnent la classe ouvrière aux intérêts nationaux de la bourgeoisie. Il faut une perspective indépendante et socialiste.

Ce n’est pas cette orientation qui est majoritaire dans les manifestations. Plutôt, plusieurs organisations qui se proclament de « gauche » et même « anticapitalistes » tentent de détourner les mouvements de protestation derrière leur gouvernement respectif.

En Allemagne, la position prise par le Parti de la Gauche n’est à cet égard pas différente de celle du gouvernement Merkel. Les dirigeants du Parti de la Gauche, tels Gregor Gysi, considèrent que le Hamas est responsable pour l’éclatement de la guerre. Un autre dirigeant du Parti de la Gauche allemand, Norman Paech, demande l’envoi de troupes de l’ONU pour bloquer l’approvisionnement en armes de la bande de Gaza. D’autres, comme Wolfgang Gehrcke, louangent les initiatives du président français Sarkozy. Monika Knoche demande au gouvernement allemand de soutenir « l’initiative du président égyptien Hosni Moubarak ».

En France, la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) en appelle à la « communauté internationale », c’est-à-dire les gouvernements impérialistes regroupés au sein des Nations unies. Sur son site web, le « Nouveau Parti anticapitaliste » créé par la LCR a mis bien en évidence un appel du pacifiste israélien Michel Warschawski qui demande « à l'ensemble des militants de la société civile… qu'ils fassent pression sur leurs gouvernements afin que ceux-ci interviennent pour mettre fin à l'effusion de sang, et d'intervenir maintenant » en envoyant leurs troupes.

Alors qu’un nombre croissant de travailleurs et de jeunes entrent en conflit avec leur propre gouvernement et le système capitaliste, de telles organisations cherchent à détourner l’opposition à l’impérialisme en un soutien pour leur régime bourgeois respectif et les politiques qu’ils mettent de l’avant.

Aux Etats-Unis, les organisateurs des manifestations tentent de les subordonner au Parti démocrate. Ils font des appels au président désigné, Barack Obama, qui a depuis longtemps exprimé clairement que sur les questions de politique étrangère, il continuera essentiellement dans la même voie que George W. Bush.

Le World Socialist Web Site  et le Comité international de la Quatrième Internationale appellent tous les participants aux manifestations en défense de Gaza à rejeter cette orientation. Les événements de Gaza soulèvent de façon urgente la nécessité d’unir la classe ouvrière juive et arabe dans une lutte pour une fédération socialiste du Moyen-Orient. Cette perspective est liée de façon inséparable à la lutte pour renverser le capitalisme dans le monde entier.

(Article original anglais paru le 10 janvier 2009)

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