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Québec : Pour défendre l’accès à l’éducation, les étudiants doivent se tourner vers les travailleurs

Déclaration de l’Internationale étudiante pour l’égalité sociale
6 décembre 2010

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Des milliers de jeunes étudiants et travailleurs sont attendus dans une manifestation à Québec aujourd’hui pour s’opposer à la hausse des frais de scolarité que veut leur imposer le gouvernement libéral de Jean Charest. Ce même jour aura lieu la rencontre des partenaires en éducation regroupant, entre autres, des représentants des administrations d’université et de cégep, les organisations représentant la grande entreprise, des associations étudiantes et les grandes centrales syndicales. Le sujet principal de cette réunion sera une hausse significative des frais de scolarité universitaire au Québec. Les recteurs demandent une augmentation des droits de scolarité de 500 $ chaque année pendant trois ans à compter de 2012. Ils seraient presque doublés si cette proposition était mise en œuvre par le gouvernement Charest. Depuis le dégel des frais de scolarité en 2007, les frais de scolarité ont déjà augmenté de 30 pour cent.

La manifestation a été appelée par deux syndicats étudiants, la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ, 55.000 membres) et l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSE, 40.000 membres), afin de protester contre cette nouvelle hausse des frais de scolarité universitaire. La Fédération des étudiants universitaires du Québec (FEUQ), qui regroupe 125.000 membres, n’a pas appelé à la manifestation et participera à la rencontre, tout comme la FECQ.  Plus de 50.000 étudiants dans 34 institutions ont voté pour une journée de grève le 6 décembre en soutien à la manifestation à Québec.

Les rencontres gouvernement-patronat-syndicats ont une histoire au Québec. La plus importante a sans doute eu lieu en 1996, lorsque le gouvernement péquiste de Lucien Bouchard avait convié « les forces vives » du Québec au sommet sur le déficit zéro pour montrer que les syndicats collaboraient à un ensemble de compressions budgétaires brutales qui ont résulté en la fermeture d’hôpitaux, le départ de 30.000 travailleurs du secteur public, la diminution des services publics et des attaques contre les plus démunis, dont les étudiants.

En participant à cette rencontre, la FECQ, la FEUQ et les centrales syndicales ne veulent en fait que faire sortir un peu de pression et préparent le terrain pour faire accepter l’augmentation des frais de scolarité, comme le montre par exemple la demande pour « une loi-cadre balisant les frais de scolarité universitaire ».

Et il faut le dire franchement : une campagne de protestation et des manifestations, malgré le militantisme et la colère sincère des étudiants face à ce qui est une attaque flagrante sur leurs conditions de vie et leur droit à une éducation de qualité, ne sont pas suffisantes. Pour que leur large opposition à la hausse des frais de scolarité puisse se concrétiser,  les étudiants doivent se tourner vers la classe ouvrière, la principale force sociale ayant intérêt à défendre l’accès de tous à l’éducation. Ils doivent adopter une perspective socialiste et internationaliste autant en opposition à tous partis de l’establishment qui défendent l’ordre établi qu’à la bureaucratie syndicale qui les soutient.

Les augmentations des frais de scolarité ne sont qu’une partie des attaques du gouvernement Charest contre tous les acquis des travailleurs depuis la Deuxième Guerre mondiale. Dans le budget qu’il a présenté en mars 2010, le ministre libéral des Finances, Raymond Bachand, un ancien président du Fonds de solidarité de la FTQ (Fédération des travailleurs du Québec), imposait une réduction sévère des dépenses gouvernementales (qui se traduiront au cours des prochaines années par une diminution des services et des mises à pied dans le secteur public), un gel salarial de quatre ans pour le secteur public, un ticket modérateur en santé, une hausse régressive de la taxe de vente et des frais d’électricité tout en maintenant la totalité des baisses d'impôts aux entreprises, sur les gains en capital et sur les particuliers qu’ont instaurées à tour de rôle les gouvernements québécois successifs du Parti libéral et du Parti québécois au cours des quinze dernières années.

Cette politique du gouvernement Charest, critiquée de la droite par Pauline Marois qui affirmait que personne ne croyait que le gouvernement Charest allait imposer de telles coupes, est la manifestation québécoise d’une vaste offensive mondiale des élites financières et de la grande entreprise pour faire payer la crise aux travailleurs du monde.

En Grèce, en Irlande, au Portugal, les grandes banques exigent des coupes drastiques dans les programmes sociaux et les salaires. En France, on vient d’augmenter l’âge de retraite à 67 ans. En Grande-Bretagne, la coalition conservateur-libérale démocrate a annoncé plus de 100 milliards de dollars de compressions budgétaires qui entraîneront, entre autres, le triplement des frais de scolarité dans certains cas. Aux États-Unis, malgré un chômage record depuis la Grande Dépression des années 1930, les profits sont revenus au niveau d’avant la crise à cause des attaques féroces sur les salaires et les conditions de travail.

Selon les élites, il est maintenant temps de faire payer aux travailleurs pour les milliers de milliards de dollars qui ont été mis à la disposition des dirigeants des grandes institutions financières et des grandes entreprises pour défendre leurs salaires et leurs bonus qui atteignent pour une année ce qu’une famille de travailleurs bien payés ne gagnera pas dans toute une vie, après que leurs plans spéculatifs pyramidaux se soient effondrés.

Une alliance des étudiants avec la classe ouvrière est l’opposée de l’« alliance sociale », une coalition récemment réalisée entre la majorité des syndicats (FTQ, CSN, CSQ) et les deux principales associations étudiantes, la FEUQ et la FECQ, prétendument pour faire « contrepoids au discours de droite ».

Les étudiants ne doivent pas se laisser berner par cette alliance qui dans les faits servira plutôt à contrer le mouvement des étudiants qui s’annonce et à empêcher qu’il ne devienne l’étincelle pour un mouvement de masse des travailleurs contre les mesures de droite.

C’est le rôle qu’a essentiellement joué la bureaucratie syndicale, apportant une aide précieuse à la bourgeoisie québécoise en étouffant l’opposition de la classe ouvrière à maintes reprises. C’est justement ce rôle traître qui a favorisé une certaine montée des couches les plus à droite de la bourgeoisie québécoise, regroupées surtout à travers les lucides et qui sont depuis plusieurs années insatisfaites du gouvernement Charest et cherche à le pousser encore plus à droite.

La bureaucratie syndicale a d’ailleurs rendu de précieux services au gouvernement de droite de Charest depuis sa première élection en 2003 afin de lui permettre d’aller de l’avant avec son programme de coupes, de privatisations des services publics et de hausses de frais. Lorsque la classe ouvrière québécoise s’était opposée massivement à la « réingénierie » de l’État que Charest voulait mettre en branle après son élection en avril 2003, les dirigeants syndicaux avaient été forcés de tenir des votes de grève générale au début de 2004. Dépités de voir les votes positifs en faveur de cette grève, ils ont ensuite manœuvré durant l’été pour la saboter.

En 2005, lors d’une des grèves étudiantes ayant mobilisé le plus grand nombre d’étudiants de l’histoire du Québec, les syndicats avaient de nouveau aidé le gouvernement Charest à mettre un terme au mouvement. L’ancien chef de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ), Henri Massé, s’en était pris aux demandes modestes des étudiants qui réclamaient le retrait des coupes de 103 millions de dollars dans le système de prêts et bourses, affirmant « C'est clair que les associations étudiantes, si elles veulent négocier, devront faire des compromis. On ne peut pas régler des affaires comme ça sans compromis. »

Par-dessus tout, Massé craignait que ce mouvement étudiant en défense de l’éducation publique ne serve de catalyseur aux travailleurs du secteur public sans contrat depuis deux ans. D’un côté, les grandes centrales avaient refusé de mobiliser leurs membres pour appuyer les étudiants, alors que ces derniers avaient le soutien de plus des deux tiers de la population. De l’autre, ils ont organisé les rencontres entre les dirigeants étudiants et les représentants gouvernementaux pour mettre un terme à la grève étudiante.

Plus récemment, la bureaucratie syndicale a accepté le budget 2010 du gouvernement Charest. Même s’ils avaient appelé une conférence de presse pour le critiquer, ils n’ont même pas organisé une manifestation contre le budget. L’appui de la bureaucratie syndicale aux compressions budgétaires de Bachand avait ensuite préparé le terrain pour les négociations d’une nouvelle convention collective dans le secteur public, où les syndicats ont une nouvelle fois négocié les conditions de travail de leurs 500.000 membres à la baisse.

Quant à la FEUQ et la FECQ, elles sont toutes les deux proches du Parti québécois (PQ), un parti indépendantiste dont le programme économique et social est pratiquement interchangeable avec celui du Parti libéral au pouvoir. Le PQ a lui-même largement contribué aux attaques sur l’éducation lorsqu’il était au pouvoir en faisant des coupes massives.

Pour ce qui est de l’ASSE, elle se présente comme étant plus militante en appelant à un boycott des négociations le 6 décembre. Cependant, sa politique se limite à appeler pour un plus grand mouvement de pression. Plus fondamentalement, elle refuse de dénoncer le rôle traître joué par les syndicats et l’alliance sociale. Elle a récemment louangé la FTQ pour avoir voté une résolution demandant la gratuité scolaire. « Espérons maintenant qu’elle joindra l’acte à la parole et qu’elle portera ce message le 6 décembre prochain » écrit l’ASSE, contribuant à semer des illusions dans la bureaucratie syndicale.

Partout, les travailleurs et les étudiants qui entrent en lutte, de la Grèce à l’Irlande, en passant par les États-Unis, font face à l’hostilité de leurs chefs syndicaux, qui font tout pour canaliser l’opposition montante des travailleurs dans la voie réactionnaire du nationalisme.

Afin que le mouvement contre la hausse des frais de scolarité aille de l’avant, les étudiants doivent tirer les leçons de leurs précédentes luttes et de celles de la classe ouvrière. Seulement une rupture consciente des étudiants et des travailleurs d’avec les syndicats et un tournant vers une perspective socialiste leur permettra de défendre leurs intérêts indépendants de classe et d’aller de l’avant dans leurs luttes pour la défense de leurs conditions de vie.

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