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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

La trahison de la grève chez Verizon

Par Joseph Kishore
30 août 2011

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La décision de la Communications Workers of America (CWA) et de l'International Brotherhood of Electrical Workers (IBEW) de mettre fin à la grève par les 45 000 travailleurs de Verizon démontre que les travailleurs ne peuvent pas mener une lutte victorieuse contre les attaques des sociétés à moins de rompre avec le carcan organisationnel des syndicats officiels.

Même à partir des standards misérables de l’AFL-CIO, la terminaison de la grève après deux semaines sans un nouveau contrat ou sans que la compagnie ait retiré aucune de ses demandes de concessions brutales est une démonstration de la traîtrise et du cynisme des syndicats.

La direction de Verizon a fait savoir clairement qu’elle ne retirait pas ses demandes de 1 milliard de dollars en concessions, incluant l’élimination des retraites des nouveaux embauchés et le gel des retraites pour les travailleurs actuels, des augmentations très importantes des coûts de la santé pour les travailleurs, l’élimination de toutes les clauses sur la sécurité de l’emploi, la réduction des congés maladie et la fin des limitations sur la sous-traitance.

Les travailleurs vont retourner au travail avec un accord qui élimine les plafonds sur les heures supplémentaires, permettant à la compagnie de les faire travailler impitoyablement afin de reprendre le temps perdu et de réparer les dégâts causés par les tempêtes dans le nord-est des États-Unis. Les syndicats ont mis fin à la grève sans garantir la réintégration des travailleurs suspendus par la compagnie pour des activités supposément reliées à la grève et sans obtenir l’abandon des accusations contre ceux arrêtés sur les piquets de grève.

Dans le cadre de l’accord de retour au travail, ils ont stipulé que, advenant le cas où la grève recommence, toutes les injonctions destinées à briser la grève demeureraient effectives. La compagnie a accepté de garder l’ancien contrat tout en continuant les négociations pour une nouvelle convention collective.

L’affirmation faite par les syndicats selon laquelle la grève a forcé Verizon à « négocier sérieusement » est une supercherie. Dans la mesure où cela veut même dire quelque chose, cela signifie que la compagnie affirme qu’elle est prête à discuter du programme des chefs syndicaux, qui est de maintenir les cotisations syndicales en échange de la collaboration des syndicats pour l’imposition de concessions qui coûteront aux travailleurs des milliers de dollars chaque année.

Le moment où la décision a été prise met en évidence le caractère complètement manipulateur des agissements des syndicats. Ils ont mis fin à la grève au moment même où les travailleurs devenaient éligibles aux prestations de grève payées par le syndicat et à un point où la grève commençait à affecter sérieusement les opérations de la société. Le résultat : les travailleurs ont sacrifié deux semaines de paies pour rien, alors que les dirigeants syndicaux n’ont pas perdu un sou de leurs salaires à six chiffres.

Il y avait une autre considération. Comme les syndicats, la compagnie et l’administration Obama le savaient tous très bien, plus longtemps les travailleurs demeuraient sur les piquets de grève, plus grand devenait le danger que la grève pût échapper au contrôle des syndicats et devînt un point de ralliement pour une lutte plus large de la classe ouvrière contre les sociétés et le gouvernement.

Au fur et à mesure que la grève se développait, l’alignement de classe devenait de plus en plus clair. La compagnie a fait appel aux ressources de l’État, incluant les tribunaux et la police, afin d’imposer des injonctions antidémocratiques limitant sévèrement le piquetage. L’administration Obama a soutenu les accusations non fondées de Verizon selon lesquelles les travailleurs faisaient du « sabotage », lançant une enquête du FBI et liant les actions prétendument faites par les travailleurs de Verizon au dixième anniversaire des attaques terroristes du 11 septembre 2001.

Tandis que les travailleurs de Verizon faisaient preuve de détermination et de solidarité face à l'opération antigrève du gouvernement et de la direction, les CWA et l'IBEW ne faisaient rien pour s'y opposer. L'AFL-CIO a littéralement ignoré le plus important débrayage aux États-Unis depuis des années, a isolé la lutte et refusé de mobiliser un appui plus large dans la classe ouvrière.

L'attitude des syndicats a été déterminée par les intérêts sociaux qu'ils représentent. On ne peut plus décrire ces organisations comme représentant la classe ouvrière. Elles ont cessé depuis longtemps de défendre les intérêts des travailleurs, et elles ne sont pas soumises au contrôle démocratique des travailleurs. Ces soi-disant syndicats fonctionnent en tant qu'agences du patronat et sont dirigés par de riches cadres de la classe moyenne aisée qui profitent des bénéfices soutirés à travers l'exploitation de la classe ouvrière, agissant ainsi en tant que partenaires juniors du patronat et de l'État.

Depuis leur trahison de la grève des contrôleurs aériens de PATCO en 1981, les syndicats ont encouragé une défaite après l'autre. Tandis qu'explosaient les inégalités et que la classe dirigeante démantelait d'immenses pans de l'infrastructure industrielle pour se concentrer sur la spéculation financière, les syndicats se consacraient avec détermination à la suppression de la lutte des classes. Le fait que seulement quelques grèves majeures, dont celle chez Verizon, se soient produites au cours de la dernière décennie est un constat accablant du rôle de l'AFL-CIO.

L'effondrement des syndicats – dont l'appui parmi les membres dans le secteur privé a chuté à des niveaux jamais vus depuis la première décennie du siècle dernier – et leur transformation en agences des sociétés et de l'État sont le verdict rendu par l'histoire sur la possibilité d'un mouvement ouvrier basé sur la défense du capitalisme et du nationalisme.

Les germes de l'effondrement des syndicats étaient déjà présents dans le rejet par le Congrès des organisations industrielles (CIO) – les syndicats industriels qui ont émergé des occupations et luttes de masse explosives des travailleurs américains durant la Grande Dépression des années 1930 – de l'organisation politique indépendante de la classe ouvrière et de toute contestation de la propriété capitaliste des moyens de production. Ces fondements politiques réactionnaires – qui ont pris la forme de l'alliance des syndicats avec le Parti démocrate, l'un des deux partis de la grande entreprise américaine – ont été solidifiés par la purge, dans les syndicats, des éléments socialistes et de gauche après la Deuxième Guerre mondiale. Ils ont pris une forme achevée lors de l'unification en 1955 du CIO et de la vieille Fédération américaine du travail (AFL) sur la base explicite d'une opposition au socialisme et en défense de l'impérialisme américain.

Après la guerre, sous la domination mondiale du capitalisme américain et dans le contexte du boum économique d'après-guerre, les travailleurs ont pu faire des gains économiques à travers les syndicats officiels. Mais vers la fin des années 1960 et au début des années 1970, le capitalisme américain entrait déjà dans une longue période de déclin. Durant la décennie suivante, la classe dirigeante des États-Unis déclenchait une offensive contre la classe ouvrière qui n'a jamais cessé depuis.

L'immense développement de la mondialisation économique des trente dernières années a miné davantage les syndicats et toutes les vieilles bureaucraties ouvrières basées sur l'État national et l'économie nationale.

Écrivant en 1937, Trotsky notait que le caractère d'un syndicat est déterminé par « son rapport à la distribution du revenu national ». Advenant que les dirigeants syndicaux officiels « défendent les revenus de la bourgeoisie des attaques de la part des travailleurs ; advenant qu'ils mènent une lutte contre les grèves, contre la hausse des salaires, contre l'aide aux chômeurs, alors nous parlerions d'une organisation de briseurs de grève, et non d'un syndicat ».

La grève chez Verizon est une démonstration de plus qu’en fait, c’est le rôle des syndicats officiels aujourd'hui. Ces organisations sont non seulement inutiles du point de vue de la défense des intérêts des travailleurs, ils font obstacle à une telle lutte.

La fin de la grève chez Verizon se déroule au moment où la classe dirigeante intensifie son assaut sur la classe ouvrière. L'administration Obama a déjà conclu un accord avec les républicains pour supprimer 2,4 billions de dollars dans les programmes sociaux. Ce n'est qu'une première étape dans une campagne pour le démantèlement des programmes gouvernementaux de soins de santé et de retraites. Bien que l'AFL-CIO, y compris les CWA et l'IBEW, se prépare à une campagne tous azimuts pour réélire Obama, le président fait pression pour des coupes encore plus grandes.

Et comme Obama rejette toute mesure sérieuse pour créer des emplois ou fournir de l’aide aux chômeurs, des sociétés comme Verizon utilisent la crise de l’emploi comme un levier afin d'éliminer les avantages, réduire les salaires et intensifier l'exploitation des travailleurs.

Les travailleurs résisteront à cette attaque, mais cela nécessite une nouvelle perspective de lutte.

Au cours de la grève de deux semaines, le Parti de l'égalité socialiste et le World Socialist Web Site ont mené une campagne déterminée auprès des travailleurs de Verizon. Le succès de la grève, avons-nous insisté, nécessitait la formation de comités de travailleurs de la base, indépendants et en opposition aux syndicats. Il était nécessaire de mobiliser l’ensemble de la classe ouvrière, transformant ainsi la lutte en un mouvement de masse contre les diktats de l'élite patronale et financière. Cette perspective était reçue de plus en plus positivement parmi les travailleurs de Verizon.

Au cours des prochaines semaines, la PES va intensifier sa lutte pour la mobilisation indépendante industrielle et politique de la classe ouvrière. Nous allons nous battre pour que les travailleurs de Verizon rejettent l'accord pourri que les syndicats se préparent à faire accepter.

Les syndicats officiels réussiront peut-être à mettre fin à la grève chez Verizon, mais ce faisant, ils ne feront que se discréditer davantage et paver la voie pour que les travailleurs se libèrent de leur emprise et prennent le chemin de la lutte politique contre le système capitaliste et pour le socialisme.

Ce qui est nécessaire avant tout est la construction d'une nouvelle direction politique basée sur le rejet du système capitaliste, dans lequel chaque institution économique et politique est contrôlée par une classe dirigeante déterminée à appauvrir la majorité de la population. Nous demandons instamment à tous les travailleurs et les jeunes qui voient la nécessité d'un tel combat de lire notre programme et de prendre la décision d'adhérer au Parti de l'égalité socialiste.

(Article original paru le 22 août 2011)

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