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WSWS : Nouvelles et analyses : Asie

Les inondations au Sri Lanka et en Australie

Par Mike Head
26 janvier 2011

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Les graves inondations survenues au Sri Lanka et en Australie qui sont causées par le même phénomène météorologique régional et appelé La Niña ont eu des conséquences dévastatrices dans les deux pays. Plus d’un million de personnes ont été touchées par les crues provoquées par des pluies torrentielles au Sri Lanka, notamment dans les districts orientaux de Batticaloa et d’Ampara. En Australie, des milliers de personnes ont vu leurs habitations inondées par des eaux de crue, surtout dans le Nord Est de l’Australie, dans l’Etat du Queensland et sa capitale Brisbane.

A première vue, les circonstances semblent être tout à fait différentes. Le Sri Lanka est un pays économiquement arriéré qui a souffert durant un quart de siècle d’une guerre communautariste et d’un tsunami destructeur en décembre 2004, et manquant d’une infrastructure de base. L’Australie est un vaste pays économiquement développé disposant d’installations modernes et ayant accès à une technologie sophistiquée.

Toutefois, dans les deux pays, les gouvernements se sont révélés tout à fait incapables d’avertir la population à l’avance et de la protéger contre ces vastes phénomènes météorologiques, adverses mais prévisibles. Si l’impact de forces naturelles d’une telle envergure et d’une telle force posent des défis majeurs, les conséquences sociales et économiques ont été considérablement aggravées par la subordination de chaque aspect de la vie, y compris la gestion des terres, l’urbanisme, l’approvisionnement en eau et les services de secours, aux dictats du profit.

Il y a d’importants traits communs entre les deux pays : une réduction des dépenses publiques, une infrastructure pauvre et décrépite, une privatisation ou une commercialisation des services de base, un aménagement du territoire et de l’immobilier poussé par le profit, des services d’urgence inadéquats et un niveau lamentable de l’aide et de la compensation d’Etat aux victimes des inondations. Ceci n’est pas seulement la conséquence de l’indifférence ou de la négligence mais provient de décisions définies prises dans l’intérêt des élites d’affaires.

Les conséquences sociales sont plus évidentes au Sri Lanka en raison de la grande détresse de nombreuses victimes, du manque de mesures préventives et d’une infrastructure élémentaire et du détournement massif des ressources par les gouvernements successifs vers la guerre communautariste contre les Tigres de Libération de l’Eelam tamoul (LTTE). Un grand nombre parmi les 350.000 personnes qui ont été obligées de quitter leurs foyers pour vivre dans des camps de fortune, avaient également été déplacées durant la guerre qui avait duré 25 ans ainsi que lors du tsunami de 2004.

Certains de ces camps sordides ont aussi été inondés, forçant les gens à fuir une nouvelle fois. Des réservoirs d’irrigation mal entretenus se sont rompus en inondant des fermes. La plupart des morts officiellement enregistrés ont été dues à des coulées de boues occasionnées par la déforestation et la construction d’immeubles à flanc de coteau en raison d’une pénurie de terres disponibles à la construction et d’une mauvaise planification de la part du gouvernement. Le plan de catastrophe du gouvernement consiste en fait à renvoyer l’armée dans les régions où, il y a deux ou trois ans, elle avait de manière aveugle bombardé les bastions du LTTE, en tuant des centaines, sinon des milliers de civils tamouls.

Alors que ce qui s’est passé en Australie depuis que la crise des inondations a débuté à la mi-décembre est à maints égards, plus révélateur encore. En dépit de la disponibilité d’une technologie et de télécommunications de pointe, des citoyens ordinaires ont été laissés seuls à affronter les éléments, sans avertissements sérieux et avec une aide insuffisante, mis à part celle de volontaires. De vastes portions en bordure de rivière de la banlieue de Brisbane, la troisième ville du pays et une métropole de plus deux millions d’habitants, ont été inondées. Des villes et des petites communes dans tout le Queensland et dans certains autres Etats ont été soit inondées soit coupées par les eaux pendant plusieurs jours. De grandes mines, des usines, des routes, des lignes de chemins de fer, des ports et des aéroports ont été paralysés aux grands dépens de l’économie et de la société.

Il y a eu des scènes terribles de gens emportés par des crues subites ou suppliant, impuissants, depuis des voitures ou des toits de maisons pour qu’on les sauve ; ou bien de gens obligés d’abandonner leurs maisons à la dernière minute sans pouvoir rien emporter. Des preuves sont apparues que les gouvernements ont, des années durant, ignoré ou étouffé les rapports et les mises en garde de météorologistes et d’ingénieurs relatifs à des digues ne résistant pas aux flux d’eau maxima, à l’urbanisation non contrôlée dans des zones inondables et aux réductions des programmes de prévention d’inondation. Les décisions ont été dominées par le besoin d’accroître le profit des investisseurs, y compris la transformation en une entreprise commerciale et lucrative de l’agence du Sud Est du Queensland qui est responsable des barrages, de l’approvisionnement en eau et de la prévention des inondations.

Selon toute norme objective ceci représente une défaillance monumentale du gouvernement et de l’actuel système économique. Les inondations continuent dans diverses parties du pays et il est probable qu’on en voie encore davantage avant la fin de la saison des pluies qui dure quatre mois. Le coût économique et social sera énorme quand les gens tenteront de refaire leurs vies. De nombreuses maisons et de petits commerces ne sont pas couverts par une assurance contre l’inondation que la plupart des assureurs se refusent de couvrir, ou s’ils le font, seulement contre une prime bien plus élevée. Etant donné le caractère dérisoire des aides gouvernementales, nombre de gens, comme au Sri Lanka, galèreront pour s’en remettre en ne comptant que sur leurs propres ressources et la générosité des amis, des parents et des services de volontaires.

Le gouvernement travailliste australien de la première ministre, Julia Gillard, tout comme son homologue sri lankais dirigé par le président Mahinda Rajapakse, a déclaré que toute dépense faite pour des travaux de reconstruction devra être compensée par d’autres coupes budgétaires. Gillard a insisté pour dire que sa promesse faite aux marchés financiers pour éliminer, d’ici 2013, le déficit budgétaire de l’après-2008 sera tenue, avertissant que cela impliquera des « choix difficiles ». Rajapakse s’est engagé à satisfaire l’exigence du Fonds monétaire international de réduire de moitié le déficit du budget 2009 d’ici 2013. Dans les deux pays, malgré tous les discours officiels « d’union nationale » et de « se serrer les coudes », ceci signifie imposer directement le fardeau de la crise en matière d’inondation sur le dos de la population laborieuse.

Ces questions ne se limitent nullement au Sri Lanka et à l’Australie. Plus de 500 personnes ont été tuées cette semaine dans des inondations et des glissements de terrains dans des régions montagneuses près de Rio de Janeiro dans le Sud Est du Brésil où les gouvernements ont échoué à contrôler correctement le secteur de la construction. Des inondations et un temps froid inhabituel ont fait des ravages partout en Europe et en Amérique du Nord ces dernières semaines. Des millions de personnes démunies au Pakistan et à Haïti attendent toujours en vain l’aide et l’assistance à la reconstruction suite aux inondations et aux séismes de 2010.

Ceux-ci sont les symptômes d’une économie et d’un ordre social décrépits qui sont de plus en plus incapables de fournir même les protections les plus élémentaires aux gens ordinaires. Après avoir renfloué les banques et les institutions financière qui avaient causé l’effondrement financier mondial ayant débuté en 2008, les gouvernements du monde entier, y compris ceux du Sri Lanka et de l’Australie, sont à présent en train d’imposer des mesures d’austérité qui ne feront qu’aggraver la situation. Pour l’humanité, trouver une voie pour aller de l’avant, une nouvelle direction socialiste révolutionnaire est nécessaire, une qui soit capable de mettre en œuvre un programme mondialement coordonné pour une reconstruction totale de la société en suivant un projet rationnel de planification démocratique et égalitaire, en se servant de toutes les ressources scientifiques et technologiques disponibles à la date d’aujourd’hui afin d’éviter et de gérer les pires effets d’événements naturels extrêmes.

(Article original paru le 15 janvier 2011)

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