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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

Après la fusillade à Tucson

Par David North
20 janvier 2011

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Qui est responsable de la violence survenue samedi à Tucson qui a causé la mort de six personnes et blessé 14 autres dont une élue membre du Congrès luttant à présent contre la mort ?

Il est absolument vrai qu'il existe un lien direct et immédiat entre le déchaînement meurtrier du tireur, Jared L. Loughner, et le flot interminable de propos fascistes rageurs des politiciens du Parti républicain, des organisations « Tea Party » financées par le patronat et des démagogues de la télévision et des émissions radio interactives. L'avertissement du Washington Post disant que « cela semble être une supposition non soutenue que de faire porter, soit sur le climat politique soit sur un seul groupe en particulier, la responsabilité d'avoir incité le tireur », défie les faits bien connus de la dynamique de la politique, de la constitution sociale et de la psychologie de l'extrême droite aux Etats-Unis. L'affirmation du Post selon laquelle M. Loughner n'est simplement qu'« un jeune homme dérangé sans philosophie politique cohérente » est foncièrement malhonnête. La droite américaine est depuis longtemps au fait que les gens souffrant de graves formes de désordre psychotique sont susceptibles de se laisser influencer par son message de haine, de bigoterie à relents paranoïaques et d'anticommunisme.

Toutefois, il serait inadéquat d'expliquer les actions de Loughner comme n'étant que la conséquence de la propagande de la droite politique et de son écurie de démagogues des talk shows télévisés. Il y a des causes sociales plus profondes aux événements sanglants de Tucson.

Dans un état de démoralisation politique continuel, le Parti démocrate et la gauche libérale se consolent avec l'idée que l'Amérique serait un endroit bien plus agréable à vivre si seulement on y promouvait une forme de rhétorique plus civilisée et plus polie. La tâche qui incombe aux gens raisonnables, affirment-ils, conformément à l'évangile de Jon Stewart [humoriste], est de convaincre tout un chacun, à « gauche » comme à « droite », d'« adoucir » la rhétorique, de discuter moins et d'écouter plus, et de trouver un terrain d'entente.

Cet esprit malsain de conciliation universelle a trouvé une expression franchement réactionnaire suite à la tentative d'assassinat de la député du congrès Giffords. Richards Kim du journal The Nation propose, comme antidote à la violence de la droite, que la population américaine « apprécie plus chèrement la pratique de la politique et de la citoyenneté comme quelque chose de noble dans son intention, quelque chose à développer et à célébrer - au lieu d'être quelque chose à dénigrer comme l'ennemi du peuple. »

Ces paroles sont une auto-révélation dévastatrice de la faillite politique de ce qui passe pour être la « gauche » aux Etats-Unis et montrent pourquoi l'extrême droite réussit (malgré son total financement par l'argent du patronat) à exploiter les griefs populaires et à monopoliser la rhétorique du mécontentement social.

Les Etats-Unis entrent dans la quatrième année du pire déclin économique depuis la Grande dépression des années 1930. Le taux de chômage officiel tourne autour de 10 pour cent (un chiffre ne tenant pas compte de ceux qui ont renoncé à chercher un emploi), l'effondrement des prix de l'immobilier a réduit le revenu net de dizaines de millions de familles américaines et plusieurs millions de familles ont perdu leur maison suite à des ventes sur saisie. L'inégalité sociale a atteint un niveau jamais vu depuis les années 1920. Durant les 40 dernières années, le revenu des travailleurs américains a stagné. L'ensemble de la croissance du revenu est quasiment passée dans les poches du un pour cent le plus riche de la population.

Après le déclenchement de la crise financière en septembre 2008, les gouvernements Bush et Obama ont consacré toute leur énergie à protéger la richesse et les intérêts de l'élite financière et corporatiste dont les spéculations irresponsables ont mené tout droit à la catastrophe. Sous Obama, la mainmise des intérêts financiers sur l'Etat s'est même davantage renforcée. Non seulement personne dans l'industrie financière n'a été tenu pour responsable du désastre, mais le pouvoir politique et la richesse des parasites économiques ont même atteint de nouveaux sommets. En effet, sous Obama, la Maison Blanche s'est transformée en une espèce de succursale commune de Goldman Sachs et JPMorgan Chase.

Des millions de travailleurs américains ressentent instinctivement, et à juste titre, que les politiciens des deux partis, Républicain et Démocrate, ne valent plus rien et que toutes les décisions importantes prises par le gouvernement sont pour les riches. Et pourtant, c'est ce système politique que The Nation veut voir la population « apprécier », « développer » et « célèbrer ». Comment un tel message peut-il attirer les masses de la population au milieu d'une terrible crise sociale ? Est-il surprenant que les hommages de The Nation et de publications pareillement « progressistes,» rendus à la gloire de la politique américaine en général et au gouvernement Obama en particulier tombent dans l'oreille d'un sourd?

La frustration et la colère d'une partie grandissante de la population s'accroît au fil des mois. Les gens sont en quête et à l'écoute d'une issue à la crise grandissante. Mais qui leur dit quoi faire, contre qui lutter et, question primordiale, comment lutter ? Il y a un moment inoubliable dans l'adaptation cinématographique du réalisateur John Ford des Raisins de la colère de John Steinbeck, où un fermier miséreux confronté à l'expropriation des terres sur lesquelles il a travaillé sa vie entière, demande avec désespoir, « Sur qui dois-je tirer ? » Incapable d'obtenir une réponse claire, désespéré il se jette à terre.

Des millions de personnes se trouvent aujourd'hui dans une situation identique. Elles sont menacées par une catastrophe. Non, elles ne veulent abattre ou tuer personne. Mais elles veulent un changement et elles sont prêtes à lutter pour cela. Mais l'ensemble de la structure sociale, et le système politique érigé par-dessus, ne semble permettre aucune possibilité de protestation et de changement progressiste. Une majorité écrasante de travailleurs américains n'a jamais eu l'occasion de participer à la moindre action de protestation sociale organisée.

Avant 1980, les grèves et les autres formes de protestation de masse - y compris les manifestations massives et même les soulèvements urbains - faisaient partie de la vie américaine. La lutte de classe était, d'une manière ou d'une autre, le moteur du progrès social. Il faut remarquer qu'au début des années 1980, l'Arizona était un important centre de la grève des mineurs de cuivre contre Phelps Dodge. L'un des points de mire importants de cette grève était une grande mine de cuivre de la ville d'Ajo, non loin de Tucson. Cette grève, tout comme n'importe quelle autre des années 1980, fut trahie.

Pendant près de 30 ans, les syndicats officiels et les organisations de droits civiques - qui sont nés des grandes luttes sociales menées entre 1930 et 1965 - se sont consacrés à bloquer et à supprimer toute expression de mécontentement populaire. Les grèves et littéralement toute autre forme de protestation sociale ont disparu. Durant la même période, les gouvernements, démocrates, au même titre que républicains, ont réduit les impôts des riches et les ont aidés à accumuler leurs énormes fortunes personnelles.

Mais le mécontentement grandit inlassablement et cherche une issue. Dans la mesure où il ne peut trouver une expression progressiste et optimiste sous la forme d'une lutte de classe collectivement organisée, il trouve une expression maligne dans des accès de colère d'individus désespérés. Des sections de la société, et pas seulement celles qui sont psychologiquement dérangées, se laissent influencer par les démagogues de l'extrême droite pour qui le financement des grandes entreprises et la publicité sont toujours disponibles.

Les événements de Tucson sont un avertissement. L'accumulation du mécontentement social doit trouver une voie d'expression nouvelle et progressiste. Cette voie ne peut être ouverte que par la lutte pour le socialisme et la construction d'un nouveau mouvement révolutionnaire de la classe ouvrière.

C'est pour développer cette lutte que le Socialist Equality Party (Etats-Unis) organise le 19 avril 2011 une conférence publique à Ann Arbor. Des conférences publiques auront lieu à Los Angeles le 16 avril et à New York le 30 avril. Nous invitons tous ceux qui veulent rejoindre cette lutte à planifier leur participation à ces importants événements.

(Pour plus d'informations sur les conférences, cliquez ici).

(Article original paru le 11 janvier 2011)

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