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Le Nouveau Parti anticapitaliste salue la guerre en Libye

Par Kumaran Ira
10 septembre 2011

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Le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) a salué la guerre de l’OTAN qui a renversé le régime du colonel Mouammar Kadhafi en Libye tout en la louant comme une victoire pour la démocratie.

Le 22 août, il a publié une déclaration, « Kadhafi tombé, aux populations de décider. » On peut y lire, « La chute du dictateur Kadhafi est une bonne nouvelle. Le NPA est entièrement solidaire du processus révolutionnaire qui continue dans la région arabe. »

L’affirmation du NPA que l’éviction du régime Kadhafi par l’intervention impérialiste de l’OTAN est « une bonne nouvelle », et encore plus un « processus révolutionnaire » est un mensonge politique réactionnaire.

Ce qui se passe en Libye est une atrocité impérialiste dirigée par les grandes puissances et visant à établir un contrôle direct sur la richesse pétrolière de la Libye. Afin de permettre aux « rebelles » de s’assurer le contrôle de Tripoli, l’OTAN a effectué des milliers de frappes aériennes et déployé des forces spéciales et des agents du renseignement. Des milliers de personnes ont été tuées, l’infrastructure de Tripoli a été en grande partie détruite et sa population se voit confrontée à une crise humanitaire dans un contexte de pénurie de médicaments, de nourriture et d’électricité.

L’OTAN s’est servi du prétexte de protéger la population civile contre Kadhafi – prétexte accepté par le NPA – pour légitimer une guerre afin de mettre en place un régime fantoche. Dans le même temps, l’assujettissement de la Libye vise à réprimer les luttes de la classe ouvrière qui ont renversé en Tunisie et en Egypte des régimes soutenus par les Etats-Unis.

Le NPA ne tient pas compte des questions les plus fondamentales impliquées dans la guerre en prétendant que le renversement du régime Kadhafi sera pour le peuple libyen une ouverture vers la démocratie. « C’est une nouvelle vie qui s’ouvre pour le peuple libyen. La liberté, les droits démocratiques, l’utilisation des richesses dues aux ressources naturelles pour la satisfaction des besoins fondamentaux du peuple sont maintenant à l’ordre du jour. »

Non seulement le NPA avance des mensonges absurdes pour défendre une guerre impérialiste, mais il le fait tout à fait consciemment. Il ne croit pas lui-même que des « richesses dues aux ressources naturelles » en Libye seront utilisées au profit du peuple libyen. Comme il le remarque plus loin dans sa déclaration, les « objectifs [de l’OTAN] étaient clairs : faire oublier leur soutien jusqu’au bout passé et présent, aux dictatures en place, mettre la main sur un pays riche en ressources pétrolières et gazières. »

En fait, le Conseil national de Transition (CNT) poursuivra une politique droitière à l’encontre de la classe ouvrière et réprimera l’opposition populaire à l’intérieur du pays. Il est dirigé par divers éléments droitiers : d'anciens ministres du régime Kadhafi, le groupe islamique combattant libyen (LIFG) lié à Al Qaïda, des agents de la CIA et divers dirigeants tribaux libyens.

Le NPA tente de donner un vernis pseudo-révolutionnaire à ces forces droitières en les présentant comme partie intégrante d’une « révolte » qui dure depuis six mois contre Kadhafi. Le NPA écrit, « Durant ces six derniers mois, la révolte s’est développée et en même temps, sous couvert d’une résolution de l’ONU, un mois plus tard, les pays membres de l’OTAN ont voulu s’accaparer le processus en cours par une intervention militaire aérienne. »

C’est un tour d’adresse cynique pour tenter de fournir une couverture au soutien du NPA pour la guerre. Le NPA soutient les forces droitières du CNT tout en affirmant dans le même temps s'opposer aux frappes aériennes et aux agents du renseignement de l’OTAN qui dirigent ces mêmes forces lors des combats !

Dès le début de la guerre, le NPA a soutenu l’intervention militaire en Libye. En justifiant la guerre, il a adopté la ligne pro-impérialiste selon laquelle la guerre protégerait la population libyenne. Dans un article publié en mars sur le site Internet du NPA, Gilbert Achcar écrivait : « Nous avons ici une situation où une population est véritablement en danger et où il n’y a pas d’alternative plausible pour la protéger… On ne peut pas, au nom de principes anti-impérialistes, s’opposer à une action qui éviterait un massacre de la population civile. »

La catastrophe humanitaire qui frappe à présent les villes ciblées par l’OTAN et le CNT est une réfutation dévastatrice de cette perspective anti-marxiste qui fait implicitement valoir que les travailleurs ne doivent pas tenir compte des questions de perspective de classe et accepter aveuglément la propagande de guerre.

Le NPA a insisté pour que la France arme le CNT. Le 18 mars, le NPA écrivait : « Notre solidarité pleine et entière va au peuple libyen auquel il faudrait donner les moyens de se défendre, les armes dont il a besoin pour chasser le dictateur, conquérir la liberté et la démocratie. »

Au fur et à mesure que la guerre devenait de plus en plus impopulaire, le NPA a cherché à modérer son soutien pour la guerre en organisant en avril un « débat sur l’intervention en Libye » dans le parti. Tout ce processus était profondément cynique vu que le NPA soutenait la guerre. Toutefois, il a permis au NPA de s’afficher comme critique de « gauche » de la guerre libyenne tout en continuant à soutenir la logique de la guerre impérialiste – affirmation en faillite que l’OTAN soutenait d’une façon ou d’une autre une révolution pour la démocratie.

En tout état de cause, l’impérialisme français a pour une grande part adopté la politique que lui conseillait le NPA qui appelait à l’armement des « rebelles » du CNT. Officiellement, Paris a reconnu qu’ils fournissaient début juillet des armes au CNT. Le NPA a réagi en restant pour ainsi dire muet sur la guerre en Libye, ne publiant au cours de l’été que de courtes dépêches sur la Libye sur son site Internet.

Quelques jours avant que les forces menées par l’OTAN ne pénètrent dans Tripoli, les 20-21 août, le NPA publiait un nouvel article de Gilbert Achcar qui citait le chroniqueur droitier du Wall Street Journal, Max Boot, et suggérait que l’OTAN ne bombardait pas la Libye avec suffisamment de puissance. Boot comparait de manière défavorable les 11.107 sorties en 124 jours de guerre des avions bombardiers de l’OTAN contre la Libye au 38.004 sorties des bombardiers de l’OTAN au-dessus du Kosovo.

Achcar avait commenté, « Les questions cruciales sont donc les suivantes : pourquoi l’OTAN la campagne aérienne de la guerre menée pour l’OTAN en Libye est-elle de si basse intensité, non seulement en comparaison de la composante aérienne de la guerre menée pour la mainmise sur l’Irak, également riche en pétrole, mais aussi en comparaison de la guerre aérienne pour le Kosovo, territoire peu important sur le plan économique ? Et pourquoi l’Alliance s’est-elle abstenue en même temps de fournir des armes aux insurgés comme ils l’ont demandé à maintes reprises ? »

Ce commentaire était tout aussi absurde et mensonger que tout le reste. Le massacre de l’OTAN en Libye n’est pas « bas en intensité » – c’est une fiction qu’Achcar a inventée pour présenter le soutien du NPA à l’intervention sous un jour soi-disant critique.

En dernière analyse, la position fondamentale du NPA sur la guerre en Libye n’est pas différente de celle des sections les plus puissantes et les plus réactionnaires de l’impérialisme mondial. Tout comme l’avait fait le gouvernement Bush lors de l’invasion de l’Irak, le NPA fait valoir le mensonge que la guerre impérialiste peut aider à apporter un changement démocratique. Il s’est installé sans détour dans le camp de la réaction sociale.

(Article original paru le 6 septembre 2011)

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