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Canada : Une deuxième ville rurale voit son réseau de distribution d'eau potable contaminée

par Guy Charron
13 mai 2001

Depuis le 25 avril, les habitants de North Battleford, une ville rurale de 14 000 habitants au centre de la province de la Saskatchewan, doivent faire bouillir leur eau avant de la boire, de s'en servir pour cuisiner ou de se laver.

Plus d'une centaine de personnes ont été intoxiquées parce que le parasite cryptosporidium a pu infiltrer le réseau de distribution de l'eau potable de la ville. Des centaines de personnes ont consulté un médecin à cause de crampes et diarrhées et au moins cinq personnes ont dû être hospitalisées pour cause de déshydratation.

Les autorités médicales ont établi que pour au moins une personne, et peut-être deux autres, le parasite avait joué un rôle secondaire dans leur décès. La contamination par le cryptosporidium n'est habituellement pas fatale sauf pour les personnes dont le système immunitaire est déjà affaibli par la maladie ou des traitements médicaux. Des milliers de personnes ont aussi pu être contaminées sans développer de symptômes apparents.

Ces événements se produisent onze mois après une de pires contaminations au E.Coli au monde ait frappé la ville de Walkerton en Ontario. Officiellement, cette contamination a entraîné sept morts et indisposé gravement plus de deux mille personnes. Plusieurs parmi ces derniers ne s'en sont pas encore remis et devront peut-être continuer à prendre des médicaments pour le reste de leur vie.

Walkerton fut une démonstration tragique de l'impact d'années de dégradation des infrastructures pour cause de compressions de personnel, de déréglementation et de sous-financement chronique. Une deuxième crise de l'eau potable démontre la profondeur de cette dégradation et combien peu fut fait pour remédier aux problèmes cruciaux de l'approvisionnement en eau potable, malgré des surplus budgétaires de plusieurs dizaines de milliards de dollars au niveau fédéral et provincial.

À North Battleford, c'est la désuétude du système de traitement des eaux usées et de l'usine de traitement de l'eau potable tous deux datant presque d'un demi-siècle qui est le principal facteur responsable de la contamination avec le manque de formation du personnel et représentants.

À la suite d'un entretien de routine d'une cuve de filtration le 21 mars dernier, le filtre qui est formé par une couche de particules agglutinées qui se déposent au fond de la cuve ne se serait pas formé à cause de la faible concentration des particules dans la rivière à ce temps-ci de l'année. Ce n'est que le 17 avril que l'erreur fut corrigée.

Les représentants de la ville ont révélé que durant trois semaines, de la fin mars à la mi-avril, des millions de litres d'effluents contaminés par le cryptosporodium ont débordé du réseau de traitements des eaux usées de la ville dans la rivière Saskatchewan Nord. La prise d'eau pour l'usine de filtration se trouve deux kilomètres plus bas. Malgré que la loi oblige la ville à faire rapport sur tout débordement sans traitement, le gouvernement provincial n'en a trouvé aucune trace dans ses registres.

Wayne Ray, le maire de la ville a dit que cela n'avait jamais causé de problème auparavant. «Ça fait des années, des décennies en fait, que ça se passe ainsi, et rien dans les résultats de nos tests ne laissait croire qu'il y avait un problème.» À l'exception de quelques villes au Canada, la présence du cryptosporidium n'est pas testée sur une base régulière dans les systèmes de distributions d'eau potable au Canada.

La ville avait déjà entrepris de remplacer son usine de traitement des eaux usées, mais la construction de la nouvelle usine ne devrait pas être complétée avant 2003. «Cela représente un investissement majeur et demanderait probablement l'aide des autres paliers de gouvernement» a déclaré Ray.

Même si le crypotsporodium résiste à un traitement au chlore, il existe des dispositifs de traitement de l'eau à l'aide de rayons ultra-violets, qui endommagent son ADN et le rendent inoffensif.

Un rapport préliminaire déposé par les représentants provinciaux après quelques jours d'enquête a montré une série de problèmes à l'usine de filtration, tel que des employés mal entraînés, des infestations de rongeurs et l'absence de directeur depuis décembre dernier.

Symptôme d'une crise plus profonde

Un événement du type de celui qui a frappé North Battleford était prévisible. Un document de travail remis au gouvernement néodémocrate de la Saskatchewan en septembre dernier indiquait que 121 municipalités avaient un système de traitement de l'eau déficient et que plusieurs usines et réseaux de distribution avaient dépassé leur durée prévue d'opération.

Bien que North Battleford ne faisait pas partie de ces 121 municipalités, la province avait ordonné à la ville de préparer un plan pour améliorer son système de distribution d'eau.

Le rapport ajoutait que : «La sécurité du système d'eau potable de Saskatchewan est menacée et le potentiel pour une crise comme celle de Walkerton est là.»

Le maire de Battleford a commenté sur ce rapport : «Si ce rapport avait identifié des problèmes sans tenter de les résoudre, alors ce n'est pas que moi mais tous les gens de la province qui devrait être enragés.»

La situation ne se limite pas à la Saskatchewan, mais englobe l'ensemble du Canada, un territoire où l'on trouve 9 pour cent de toute l'eau potable sur Terre.

En janvier, le Sierra Legal Defense Fund a publié un rapport qui disait que l'état du système de distribution d'eau potable et le manque de réglementation entraînaient que d'autres Walkerton étaient presque inévitable.

Entreprenant la première enquête jamais faite sur l'état de l'eau potable au niveau national, il concluait : « Parce qu'il n'y a pas une approche complète et nationale pour protéger l'eau potable, d'autretragédiesie (comme celle de Walkerton) nous attendent presque certainement.»

Et selon John Lawrence, à la tête de l'Institut national de recherche sur l'eau, les communautés autochtones sont encore plus vulnérables. L'Assemblée des premières nations signalait que 79 communautés autochtones, soit 12 % du total, ont une eau potable que le ministère fédéral de la Santé qualifie de «potentiellement dangereuse».

Devant la pression du public, le gouvernement conservateur ontarien a dû formé une commission d'enquête pour étudier les événements de Walkerton, y inclus les effets de son propre programme de privatisations et de coupures budgétaires. Toutefois, avant même que la commission ait terminé son enquête, le gouvernement Harris cherche à utiliser la crise produite par son propre programme de démantèlement des services publics pour privatiser des parties importantes, sinon l'ensemble, du système de l'eau potable en Ontario.

Retard à réagir à North Battleford

En plus des irrégularités et des déficiences de l'usine de filtration et de l'usine de traitements des eaux usées qui n'ont été communiquées aux représentants de la ville et de la province, encore moins à la population, les premiers signaux d'avertissement d'une contamination généralisée de la population n'ont pas reçu l'attention qu'ils méritaient.

Dès le 12 avril, le médecin de famille, Dr Geoff Lipset, faisant le lien entre la contamination par le cryptosporidium de sa patiente et une remarque d'un pharmacien que son stock de médicaments anti-diarrhée était épuisé, a appellé le soir même le chef médical du district de santé des Battlefords, Dr Gerhard Benade.

«Je ne l'aurais jamais appelé pour un cas isolé. Mais un cas isolé plus l'Immodium qui disparaît des tablettes plus vite que l'on peut en commander, voilà pourquoi j'ai téléphoné», a dit Dr Lipset.

Dr Benade explique qu'il n'a pas pu faire plus de vérifications avant quatre jours à cause des congés de Pâques. «Un cas de cryptosporidium n'est pas une crise de santé publique... Vous avez besoin de tout le personnel régulier pour faire la collecte d'information. Je peux vous assurer que nous avons suivi le protocole » tel que définit la province pour un tel cas.

En 1993, le même parasite avait contribué à la mort de 100 personnes et indisposé 400 000 autres à Milwaukee, et en 1996, 10 000 personnes ont souffert de la contamination au cryptosporidium à Kelowna en Colombie britannique.

Un résidant de North Battleford a déclaré à GlobalTV : «Notre santé demande une implication de 24 heures sur 24, 7 jours par semaine, et si les personnes sur le site ne sont pas prêts à faire cela, et bien il faut en trouver d'autre, parce qu'il est impossible que nous attendions plus longtemps.»

Un autre a déclaré que le délai causé par les congés de Pâques est «une terrible critique de la société dans laquelle nous vivons».

Ce n'est que le 25 avril, après que les habitants de la ville se soient rendus par centaine à l'hôpital pour des problèmes intestinaux et que deux nouveaux cas de contamination furent confirmés, que la recommandation de faire bouillir l'eau fut émise.

«Même alors, nous n'avions aucune raison de suspecter et d'être certain que l'eau potable pouvait avoir contribué à la contamination», a dit le Dr Benade. Finalement, le 27 avril, « nous avons appris qu'il pouvait y avoir eu un problème avec l'usine de filtration».

Dans un monde de plus en plus complexe, où l'agriculture devient chaque jour plus industrielle et moins familiale, où la puissance des industries mal contrôlée peut détruire et profondément déséquilibrer de larges écosystèmes, la question de la gestion de l'eau et de l'environnement devient de plus en plus un problème qui nécessite une attention soutenue et générale qui n'est compatible qu'avec un système socialisé de production.

Au lieu de cela, les gens de bonne volonté, malgré toutes les bonnes intentions, sont confrontés à un manque de ressources chroniques, tant pour la formation du personnel que pour l'équipement. C'est ce qui a mené dans ce cas-ci à des problèmes de santé publique dramatiques.

Il est impossible de soutenir que la société ne puisse offrir les ressources nécessaires alors que la productivité atteint des sommets inégalés et que les gouvernements encaissent des surplus budgétaires de plusieurs milliards de dollars.


 

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