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France: le gouvernement offre des mesures d'austérité pour le Nouvel An

Par Alex Lefebvre
10 janvier 2003

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Le président français Jacques Chirac a annoncé, lors de son discours du Nouvel An, que l'année 2003 verrait des «réformes» importantes dans presque toutes les grandes catégories de dépenses sociales, y compris les retraites, la santé, et l'éducation.

Comme dans la plupart des discours du nouveau gouvernement conservateur, des phrases solennelles et banales ­ «Aujourd'hui, j'en suis persuadé, le rassemblement du plus grand nombre est devenu possible» ­ tentaient de donner aux travailleurs l'impression que des manipulations technocratiques permettraient d'articuler une politique d'austérité qui préservera miraculeusement leurs intérêts.

La presse française indique cependant les inquiétudes au sein de la classe politique sur les limites imposées au gouvernement par l'économie maussade et la difficulté grandissante de dissimuler le sens de la politique d'austérité alors que le mécontentement monte chez les travailleurs.

Négocié en fin septembre 2002, le budget 2003 du premier ministre Jean-Pierre Raffarin faisait des réductions importantes aux budgets de l'éducation nationale, des transports, et de la culture. Cependant, c'était un budget moins dur que ce que la droite gouvernementale avait proposé auparavant.

Celle-ci a justifié son relatif adoucissement des mesures d'austérité budgétaire avec de très optimistes prédictions de croissance économique nationale pour 2003. Ces prédictions d'une croissance de 2,5 pour cent, qui ont suscité un vif débat parmi les cercles dirigeants à l'époque, sont de nouveau un sujet de controverse, car l'INSEE, l'institut de statistiques nationales, vient de prédire une croissance de 1 à 1,5 pour cent.

Les dépenses des ménages sont la principale source de croissance en France. L'investissement des entreprises a chuté légèrement pendant les trimestres pour lesquels les chiffres sont disponibles. Tout en prédisant avec optimisme qu'une amélioration du climat économique mondial encouragera les entreprises françaises à investir, l'INSEE craint que l'endettement croissant des ménages et l'appréhension d'une reprise de la croissance de l'inflation fassent chuter leurs dépenses. Raffarin lui-même a récemment avoué que le chiffre de 2,5 pour cent était «volontariste».

L'Union européenne (UE) a déjà prévenu la France que son déficit budgétaire pourrait dépasser la barre des 3 pour cent du PIB imposé aux Etats membres. L'UE a récemment remarqué qu'il était urgent de faire des «réformes à grande échelle» dans le système de retraites des fonctionnaires français. Sans faire de propositions concrètes, l'UE a observé qu'il y avait «une augmentation très large de l'offre» parmi les travailleurs plus âgés. Comme l'a remarqué la presse française, l'UE a fait ces remarques le même jour que le Royaume-Uni a augmenté l'âge de la retraite de 60 à 65 ans pour ses fonctionnaires.

Tandis que les difficultés budgétaires du gouvernement s'aggravent, on commence à voir des signes de difficultés financières. Le gouvernement a commencé fin décembre à travailler une loi de sécurité financière, dont le passage est prévu pour le mois de mars. Elle créerait une agence indépendante chargée de surveiller les compagnies d'assurance et d'investissement, imposant des restrictions aux activités des conseillers en investissement et interdisant aux comptables d'offrir des services de conseil. Le 3 janvier, on a liquidé l'assureur CGA (Caisse générale d'assurance); la presse a remarqué que beaucoup des sociétés de ce secteur «affichent une santé précaire».

Le gouvernement Raffarin a illustré ses méthodes et ses buts fondamentaux lors de la réforme de l'Unedic, l'assurance-chômage. Il a augmenté les impôts que paient les travailleurs pour financer le programme, les impôts que paient les chômeurs pour financer leurs propres retraites de 1,2 pour cent à 3 pour cent, augmenté l'âge de la retraite de 55 à 57 ans, et diminué la couverture des travailleurs ayant plus de 50 ans de 45 à 36 mois.

Il a aussi augmenté la durée de travail nécessaire pour qu'un travailleur obtienne des financements pour «travail précaire», qui passent de 4 mois sur 18 à 6 mois sur 22. Certains syndicats ont refusé de signer l'accord, mais un, la CFDT, a accepté et selon les lois du travail en France, c'est assez pour le mettre en place.

Les «réformes» du gouvernement en matière de santé et d'éducation rassemblent des réductions massives et des gestes cosmétiques, ces derniers destinés à tromper l'opposition du public. En éducation nationale, le gouvernement a éliminé environ 5000 non enseignants et des centaines de milliers d'emplois-jeunes, beaucoup desquels étaient des positions d'enseignant.

Ayant déjà déclaré qu'il souhaite une privatisation partielle du système médical, le ministre de la Santé Jean-François Mattéi a récemment annoncé son intention de fermer les maternités dans les zones rurales. Les bébés verront le jour dans des centres régionaux de maternité et, si l'accouchement se déroule normalement, les mères seront renvoyées à des centres médicaux non-spécialisés sept heures après.

Le gouvernement considère la réforme à venir des retraites avec grande anxiété. Le pouvoir d'achat de la moyenne des retraites a baissé chaque année depuis 1996. La dernière fois qu'un gouvernement a essayé d'imposer des réductions massives aux retraites, sous Alain Juppé en novembre-décembre 1995, une vague de grèves a éclaté dans le secteur public, indépendamment des syndicats. Celles-ci ont joui d'un grand soutien populaire, ont immobilisé le gouvernement et l'ont forcé à retirer une portion de son programme.

On a finalement pu maîtriser les grèves à l'aide des syndicats officiels et des partis «d'extrême gauche», mais la coalition centre-droite de Juppé a essuyé une défaite massive aux élections parlementaires de juin 1997; une coalition dirigée par Lionel Jospin du Parti socialiste est arrivée au pouvoir.

Il y a une nouvelle montée de radicalisation de la classe ouvrière en France. Aux mois de novembre et de décembre, il y a eu des manifestations massives dans les secteurs de l'énergie, des télécommunications, des chemins de fer, des routiers, et de l'éducation.

Même si les confédérations syndicales nationales n'ont pas organisé d'actions à grande échelle depuis la manifestation de l'éducation nationale du 9 décembre à Paris, les travailleurs ont répondu à la vague actuelle de mesures d'austérité par des grèves et des occupations de lieu de travail. Après l'annonce par Mattéi de ses réformes, les gynécologues ont fait grève, demandant que l'on modère l'augmentation de leurs tarifs d'assurance, qui doivent passer de 9.156 à 16.000 euros. Les médecins aux stations de ski ont aussi fait grève pour demander des hausses de salaires et de meilleures conditions de travail.

Les travailleurs ont occupé l'usine ACT à Angers, que la direction compte liquider. Les boutiques locales les approvisionnent en nourriture.

Les travailleurs ont occupé l'usine Daewoo à Mont-Saint-Martin, qui fabrique des tubes cathodiques, et ont menacé de déverser des produits chimiques dangereux dans une rivière si la compagnie refuse de leur garantir de meilleures conditions dans le plan social prévu pour la fermeture de l'usine.

Les élections prud'homales du 11 décembre et la réaction gouvernementale qu'elles ont suscitée indiquent comment les cercles dirigeants essaieront de désamorcer l'opposition des travailleurs à leurs mesures. Les prud'hommes sont des magistrats non professionnels chargés d'arbitrer les disputes contractuelles dans un système de tribunaux organisé par industrie et par région. La moitié des magistrats sont nommés par les syndicats et puis choisis par le vote des travailleurs; l'autre moitié est nommée et élue par les patrons.

L'élection a suscité une faible réaction parmi les travailleurs. Le taux d'abstention de travailleurs était égal au taux d'abstention record de 67 pour cent, et les positions relatives des principales confédérations syndicales n'ont presque pas changé: la CGT (Confédération générale du travail) a reçu 32,5 pour cent du vote, la CFDT (Confédération française démocratique du travail) a légèrement amélioré son score avec 25,6 pour cent, et FO (Force ouvrière) a perdu environ 2 pour cent, avec 18,9 pour cent.

Le gouvernement et le quotidien conservateur Le Figaro ont répondu en déclarant une grande victoire, puisque la CFDT s'est ouvertement déclaré pour les réductions des retraites, mais FO a refusé de participer aux négociations pour modifier les retraites. Ils ont annoncé l'intention du gouvernement de mener de longues négociations avec les syndicats et les organisations patronales, qu'ils utiliseront pour présenter le résultat comme étant «équilibré».

Aucun des syndicats officiels n'a l'intention de lutter sérieusement pour protéger les pensions et les acquis sociaux. FO a bruyamment critiqué les projets de réforme des retraites (à la différence de la CFDT, qui a déclaré que ces réformes sont inévitables, surtout dans le secteur public), mais le syndicat n'a aucune intention de construire un mouvement social pour opposer le gouvernement Raffarin. Le journal Libération a même récemment publié une chronologie des négociations secrètes entre les chefs FO et le gouvernement qui tentaient ensemble de torpiller la grève des routiers du 24-25 novembre.

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