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Le complot terroriste de Toronto et le programme politique de l’establishment canadien

Par Keith Jones
19 juin 2006

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Le présumé complot terroriste de Toronto est présentement utilisé par l’élite dirigeante du Canada pour rapidement faire accepter à la population, sans qu’elle ne s’en rende compte, une importante poussée vers la droite des politiques étrangères et intérieures du Canada.

En créant l’image d’un Canada pris d’assaut par Al-Qaïda et des terroristes islamiques «de l’intérieur», le gouvernement conservateur, l’establishment de la sécurité nationale, les médias, et la malléable opposition officielle tentent de surmonter la résistance populaire à la participation du Canada à des guerres, à une plus étroite collaboration avec l’administration Bush, à une plus grande intégration économique et géopolitique avec les États-Unis, et à l’augmentation des pouvoirs répressifs de l’État.

Le premier ministre Stephen Harper a été prompt à présenter le présumé complot terroriste de Toronto comme la preuve qui confirmait ses affirmations que le Canada n’était pas immunisé contre le terrorisme. Il a aussi présenté le présumé complot pour justifier le rôle accru du Canada dans la répression de l’opposition au gouvernement afghan de Hamid Karzaï, mis en place par les États-Unis. 

«Ce pays est une cible terroriste autant que les États-Unis», a affirmé Harper lors d’une entrevue à la radio. «C’est pourquoi, non seulement le gouvernement agit nationalement contre les menaces terroristes, mais nous travaillons internationalement, en Afghanistan et à travers le monde, pour gérer ce problème». 

La mise au jour du réseau terroriste de Toronto survient à un moment critique pour le gouvernement conservateur, au pouvoir depuis quatre mois, et pour le milieu de la sécurité nationale du Canada. Le mois dernier, le gouvernement Harper avait pris la décision très controversée de prolonger et d’accroître la mission de contre-insurrection des Forces armées canadiennes en Afghanistan.

Le Parlement procède actuellement à une révision légale de la Loi antiterroriste canadienne. Adoptée en décembre 2001, cette loi a créé une nouvelle catégorie de crimes politiques pouvant entraîner des peines plus sévères, autorisé l’État à forcer des témoignages, et étendu la prérogative de l’État à empêcher, dans des cas de terrorisme, les accusés, leurs avocats, et le public d’avoir connaissance de la nature et de la source des preuves contre eux.

Et la semaine dernière, la Cour suprême a entendu une récusation sur la constitutionnalité des «certificats de sécurité nationale», instrument légal permettant à l’État de détenir des personnes, sans accusation.

Un scénario bien connu

L’élite dirigeante canadienne suit le scénario international consistant à utiliser une menace terroriste nettement exagérée pour mettre de l’avant un programme de droite préconçu.

L’administration Bush a profité des événements du 11 septembre 2001 pour réaliser les ambitions de l’élite américaine de s’emparer de têtes de pont stratégiques dans les régions riches en pétrole de l’Asie centrale et du Moyen-Orient et, par le Patriot Act, accroître considérablement les pouvoirs de l’État d’ espionner les opposants américains au gouvernement. Bush, le vice-président Cheney, et les partis républicain et démocrate ont invoqué, à de nombreuses reprises, la menace de futures attaques terroristes pour essayer de manipuler l’électorat et intimider les critiques de leurs actions, même parmi la classe dirigeante.

En Grande-Bretagne, le plus proche allié international de Bush, le gouvernement travailliste de Tony Blair, a utilisé les attentats de Londres de juillet dernier pour poursuivre la mise en place d’une série de lois antiterroristes fournissant à la police d’importants nouveaux pouvoirs et mettant en réalité fin au droit de l’habeas corpus. L’une des principales mesures de cette législation est une attaque considérable sur le droit à la liberté d’expression, supposément pour empêcher de fomenter et de «glorifier» le terrorisme.

Toutefois, ce sont les événements survenus en Australie qui ressemblent le plus à ceux qui se déroulent présentement au Canada. En novembre dernier, alors que le gouvernement de droite de John Howard essayait de forcer l’adoption d’une loi antiterroriste draconienne et que ce dernier faisait face à une opposition croissante à sa réforme anti-ouvrière, 850 policiers et agents des services de renseignement australiens ont procédé à des descentes dans des dizaines de résidences de Sidney et Melbourne et ont arrêté 17 hommes musulmans sous des accusations terroristes plutôt vagues.

Dans les jours qui ont suivi, la presse et les politiciens ont alimenté la peur et la panique du public en insistant que, selon Carl Scully, ministre de la police de Nouvelle Galle du Sud, l’État avait «démantelé une opération de grande envergure qui, si on lui avait permis de se rendre à terme... aurait été catastrophique». Plus tard, des représentants de la police ont dû avouer qu’ils n’avaient pas de preuve sur les lieux, les dates, ou les méthodes des présumées attaques planifiées.

La police et l’Organisation australienne des renseignements et de la sécurité ont aussi révélé qu’ils avaient les hommes sous étroite surveillance depuis presque 18 mois: par l’écoute des conversations téléphoniques, par une surveillance physique et à l’aide de précédentes descentes.

Toutes les circonstances qui entouraient la série de descentes de novembre dernier pointaient vers des motifs et de la manipulation politiques, dans le but d’aider le gouvernement Howard à mener son assaut sur les conditions de travail et les droits démocratiques.

Le fait que les médias australiens aient trompeté des allégations non fondées a complètement compromis le droit des accusés, dans le présumé complot terroriste, à un procès équitable. Sept mois après leur arrestation, ils demeurent enfermés 20 heures par jour dans des cellules d’isolement, sans avoir le droit de répondre publiquement aux accusations portées contre eux.

Howard, dont le gouvernement a déployé des troupes australiennes pour soutenir l’occupation américaine et britannique de l’Irak et a mené ses propres interventions militaires étrangères au Timor oriental et aux Îles Salomon, est devenu le mois dernier le premier chef de gouvernement étranger à visiter le Canada sous le règne des conservateurs: une mesure de l’estime que portent les conservateurs et le premier ministre Stephen Harper à Howard et à ses politiques à la Bush.

Dans tous les cas d’attaques terroristes et de présumées conspirations terroristes mentionnés ci-dessus, il y a eu une sérieuse inconsistance, sinon des trous béants, dans l’explication officielle. Des mois et, dans le cas du 11 septembre, des années après que la menace du terrorisme ait été utilisée pour apporter des changements fondamentaux dans la politique d’État, des questions clés quant au rôle joué par les forces de sécurité restent sans réponse.

De ce point de vue, le présumé complot terroriste de Toronto est conforme au modèle devenu familier. Même si l’on exclue la possibilité que des informateurs de la police aient joué un rôle dans la cristallisation du présumé complot terroriste de Toronto, et nous ne l’excluons pas, il est évident que le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) et la Gendarmerie royale du Canada (GRC), avec l’approbation d’abord du gouvernement libéral puis du gouvernement conservateur, faisaient de la manipulation.   

Des sources policières ont admis que les forces de sécurité avaient placé au moins certains des 17 présumés terroristes de Toronto sous surveillance depuis 2004 et avaient assez de preuves pour arrêter plusieurs d’entre eux il y a des mois de cela, mais ont choisi de ne pas le faire. Le SCRS et la GRC ont plutôt laissé grandir le complot terroriste afin de pouvoir mieux l’utiliser pour justifier les affirmations officielles que le Canada est en première ligne dans la guerre au terrorisme et orchestrer des arrestations au moment jugé le plus propice à favoriser leurs objectifs et ceux du gouvernement.

C’est seulement après que les présumés terroristes aient accepté une livraison par des policiers en civils de 3 tonnes de ce qu’ils croyaient être, selon des comptes rendus de presse, un engrais pouvant servir à la fabrication de bombes que la police a mené une descente pour «démanteler le complot terroriste». En plaçant un apparent matériau à bombe entre les mains des présumés terroristes,  le SCRS et la GRC cherchaient à donner de la crédibilité à leurs affirmations que le groupe de Toronto, formé en majorité de jeunes hommes et de garçons, avait la «capacité» de faire un carnage.

Autre geste théâtral, des membres de la police tactique armés de mitrailleuses ont été mobilisés pour les comparutions en cour des accusés, ces derniers étant enchaînés aux mains et aux pieds pendant toute la durée des procédures légales.

Les médias de la grande entreprise, il faut le souligner, ont été à la fois complices et acteurs clés dans la tentative du gouvernement conservateur et des forces de sécurité de semer la peur parmi le public. Au lieu de juger d’un oeil critique les affirmations du gouvernement, du SCRS et de la GRC, les médias ont monté un blitz de sensationnalisme dont le but était d’amplifier et d’embellir les affirmations des autorités que seule la prompte intervention des forces de sécurité ont épargné aux Canadiens une ou plusieurs atrocités terroristes.

Les médias et des politiciens libéraux et conservateurs en vue se plaignent depuis longtemps du fait que les Canadiens ne «comprennent rien» quand il s’agit de terrorisme, voulant dire par là que le public a fait preuve de résistance à leurs appels pour que le Canada augmente les budgets et pouvoirs des forces canadiennes de sécurité, coupe dans les dépenses sociales pour élargir et réarmer les Forces armées canadiennes (FAC), et suive l’exemple des États-Unis, de la Grande-Bretagne et de l’Australie dans l’adoption d’une politique étrangère beaucoup plus «musclée».

Une audience du comité sénatorial sur la sécurité nationale et la défense, tenue en février 2005 à Victoria en Colombie-Britannique, jette une lumière sur les conceptions qui règnent dans les cercles dirigeants. Des membres de la chambre haute du parlement canadien et un ancien haut gradé des FAC et de l’OTAN déploraient le fait que les Canadiens ne croyaient pas leur sécurité compromise et se lamentaient de l’«échec» des politiciens du pays à défendre vigoureusement une hausse des dépenses militaires malgré une grande opposition populaire. Tommy Banks, alors sénateur libéral, les a interrompus pour dire que la clé pour changer l’attitude du public envers l’armée et la sécurité nationale était un meilleur leadership politique «ou une attaque». Poursuivant l’idée de Banks, le contre-amiral retraité des FAC, Ken Summers, a déclaré: «Oui, et cela nous ramène au 11 septembre. Nous l’avons oublié…. Je souhaite presque, Dieu nous en garde, qu’il y en ait juste un petit ici, qui ferait comprendre aux Canadiens que ceci est important.»

Le gouvernement Harper et le programme du grand capital canadien

Peu après que l’administration Bush soit venue au pouvoir et ait commencé à mettre en oeuvre son programme de militarisme et de baisses massives d’impôt pour l’entreprise, les riches et les très riches, de puissances sections du milieu des affaires canadien ont commencé à exiger un changement important dans la politique du gouvernement fédéral.

Dans les huit années précédentes, le gouvernement libéral de Jean Chrétien avait mené les plus importantes coupures dans les dépenses sociales de l’histoire du Canada, puis avait dévoilé un programme de $100 milliards sur cinq ans en baisses d’impôts sur les revenus personnels et d’entreprise. Il avait également été applaudi par la classe dirigeante pour avoir répondu à la défaite évitée de justesse des forces fédéralistes dans le référendum de 1995 au Québec en adoptant une loi qui fait du parlement national l’arbitre de la validité de tout prochain référendum et menace un Québec sécessionniste de partition.

Mais devant une bourgeoisie américaine sous Bush qui cherche à renverser le déclin dans sa position mondiale par le militarisme et une réaction sociale intensifiée au pays, la grande entreprise canadienne en est venue de plus en plus à voir la promotion par Chrétien -- même si c’était plus de la rhétorique qu’autre chose -- d’un nationalisme canadien du type des années 70 qui souligne le contraste entre un Canada libéral, semi-égalitaire et pacifique à la république militariste du dollar au sud, comme étant un obstacle aux mesures décisives nécessaires pour démanteler l’assurance-maladie et les autres programmes restants de l’État-Providence et effectuer un tournant majeur dans la stratégie géo-politique du Canada.

Quant à la politique étrangère et militaire du Canada, le consensus au sein de l’élite se développe rapidement pour qu’elle incorpore deux changements interconnectés. Il faut enterrer la notion que l’armée canadienne est une force de maintien de la paix, raviver et promouvoir dans la population sa tradition guerrière pour que les FAC puissent être utilisées plus fréquemment et ouvertement dans des opérations de guerres et de contre-insurrections qui vont affirmer et défendre les intérêts du Capital canadien à l’échelle mondiale. La politique étrangère et de sécurité nationale du Canada doit être plus alignée sur celle de l’administration Bush pour maintenir l’influence du Canada à Washington et pour assurer au Canada une participation entière dans la forteresse nord-américaine naissante.

Étant donné le manque d’appui populaire pour l’Alliance canadienne et le Parti progressiste-conservateur, ainsi que les divisions entre ces deux partis, la grande entreprise canadienne a d’abord tenté de pousser le gouvernement fédéral carrément à droite en encourageant Paul Martin à organiser un putsch politique au sein du Parti libéral. Paul Martin, homme d’affaires multimillionnaire, a été, en tant que ministre des Finances sous Chrétien, le principal architecte des compressions budgétaires et des diminutions d’impôt des libéraux.

Mais l’élite dirigeante a rapidement perdu confiance en Martin. Quelques mois après qu’il soit devenu premier ministre, il était raillé par les médias de la grande entreprise pour être un éternel indécis. Martin a été attaqué pour avoir modestement augmenté les dépenses sociales dans l’espoir de gagner un mandat électoral et pour avoir manqué de leadership, c’est-à-dire ne pas avoir défié l’opinion publique sur des questions comme la participation canadienne au programme de défense antimissile américain.

Lors des élections fédérales de janvier 2006, la grande entreprise canadienne s’est rangée de façon décisive derrière l’idéologue néoconservateur Stephen Harper et son nouveau parti unifié, le Parti conservateur.

Malgré cet appui et malgré le fait que les médias de la grande entreprise ont repris les affirmations de Harper selon qui l’élection devait être un référendum sur la corruption libérale, les conservateurs ont à peine réussi à monter au pouvoir en tant que gouvernement minoritaire, n’obtenant que 36 pour cent du vote exprimé et pas un seul siège dans les plus grands centres urbains du Canada.

Depuis maintenant quatre mois qu’il forme le gouvernement, l’appui de l’élite de la grande entreprise au gouvernement conservateur de Harper est encore plus fort, comme le montrent les éditoriaux des principaux quotidiens et les communiqués de presse du Conseil canadien des chefs d’entreprise.

La grande entreprise a applaudi le gouvernement conservateur pour ses diminutions d’impôts pour les sociétés, son éviscération du programme national de garderies des libéraux, sa renonciation dans les faits de l’Accord de Kyoto sur les gaz à effet de serre et sa promesse de ramener le gouvernement fédéral à ses responsabilités de base, c’est-à-dire de réduire massivement les programmes sociaux fédéraux. Mais par-dessus tout, l’élite de la grande entreprise canadienne a applaudi les conservateurs pour avoir entrepris de défendre ses intérêts et ses ambitions à l’échelle mondiale.

Les conservateurs ont annoncé des augmentations importantes des dépenses militaires, faisant suite à la promesse de Harper de développer les FAC au point que les grandes puissances mondiales en tiennent compte, et ils ont consacré leurs énergies à resserrer leurs liens avec l’administration Bush. Satisfaire Washington est une des raisons pour lesquelles les conservateurs veulent renforcer la mission des FAC en Afghanistan, mais évidemment, pas la seule. En faisant très agressivement la promotion de l’intervention des FAC en Afghanistan, les conservateurs ont cherché à fouetter la ferveur militariste et patriotique et à habituer la population aux morts au combat.

Tout comme l’administration Bush a utilisé l’invasion de l’Afghanistan comme d’un marchepied pour la guerre en Irak, le gouvernement Harper et l’élite canadienne ont l’intention d’utiliser l’implication grandissante du Canada dans une campagne de contre-insurrection au sud de l’Afghanistan pour frayer la voie à d’autres interventions militaires et à d’autres guerres.

Mais ce cours ouvertement militariste et impérialiste menace de devenir le point de mire de l’opposition populaire au gouvernement. Dans les semaines qui ont précédé l’invasion illégale de l’Irak par les États-Unis et le Royaume-Uni en 2003, le Canada a connu les plus grandes manifestations de son histoire. Bush est très largement détesté au Canada.

Aussi, les conservateurs et l’élite dirigeante doivent recourir, comme l’ont fait Bush, Blair et Howard avant eux, à l’exploitation et la manipulation des attentats terroristes pour tenter de terroriser et de confondre la population et pour développer un contexte politique dans lequel ils pourront étiqueter ceux qui s’opposent à leurs politiques comme déloyaux.

Au même moment, la grande entreprise a lancé une campagne concertée pour remodeler le Parti libéral. Michael Ignatieff, qui est apparu comme le principal partisan «libéral» de l’invasion américaine en Irak et comme le principal défenseur des prétentions de l’administration Bush que «l’urgence terroriste» exige la suspension des libertés civiles traditionnelles, est devenu, selon les médias, le candidat à battre dans la course à la direction du Parti libéral.

Ignatieff, qui a appuyé la décision du mois dernier du gouvernement Harper d’élargir l’intervention militaire canadienne en Afghanistan, a récemment appelé le Parti libéral à abandonner ses «vaches sacrées», y compris l’appui du parti à une variante anti-américaine du nationalisme canadien et au système de santé public.

Bob Rae, l’autre candidat prétendument en bonne position dans la course à la direction du Parti libéral, donne expression, quoique sous une autre forme, à l’important virage vers la droite de l’ensemble de l’establishment politique. En tant que premier ministre de l’Ontario d’un gouvernement du Nouveau Parti démocratique (NPD) entre 1990 et 1995, Rae a sabré dans les dépenses sociales, les salaires et les emplois dans le secteur public et a débuté un programme d’allocations conditionnelles au travail, ouvrant la voie à l’arrivée au pouvoir du très à droite gouvernement conservateur de Mike Harris.

Rae critique maintenant ses propres actions en tant que premier ministre, disant qu’il aurait dû couper dans les services sociaux et publics plus tôt et de manière plus drastique, et qu’il comprend beaucoup mieux aujourd’hui la nécessité de «favoriser la croissance», c’est-à-dire de conformer encore plus complètement la politique gouvernementale aux exigences de la grande entreprise.

Bien que Rae ait formellement quitté les rangs du NPD social-démocrate, ce dernier ainsi que la bureaucratie syndicale se retrouvent tous sur la même trajectoire politique, travaillant de façon encore plus étroite et ouverte avec la grande entreprise et la droite politique dans la mise en oeuvre d’un assaut grandissant sur les emplois, les salaires et les droits démocratiques. 

Les syndicats du Québec, par leur soutien au Bloc québécois, aident en pratique à garder les conservateurs au pouvoir. (Le BQ fournit les votes nécessaires pour soutenir le gouvernement Harper au parlement.)

Dans un contexte où les travailleurs de l’auto font face à un assaut massif sur leurs emplois et conditions de travail, le syndicat des Travailleurs canadiens de l’automobile a coupé son association vieille de plusieurs décennies avec le NPD afin de poursuivre des relations plus étroites avec les libéraux.

Dans le dernier parlement, alors que la classe dirigeante prenait encore la mesure de Harper et de ses conservateurs, le NDP a aidé à soutenir les libéraux de Martin, pour ensuite épauler les conservateurs dans leur tentative d’utiliser l’accusation de corruption libérale en tant qu’écran de fumée dissimulant leurs propres desseins de droite.

Harper a été si impressionné par les proclamations répétées du NDP de vouloir travailler avec un gouvernement conservateur qu’il a offert à la fin de février de conclure une entente avec les sociaux-démocrates pour que ces derniers soutiennent son gouvernement pour «une période prolongée», apparemment de deux ans.

La réponse du NPD au présumé complot terroriste de Toronto souligne sa complicité et prostration face à la campagne de peur du gouvernement, de la police et des médias. Le chef du NPD Jack Layton a fait l’éloge des forces de sécurité du Canada, tandis qu’un autre nouveau démocrate en vue a répété les accusations lugubres et saugrenues de la presse et de la police que les présumés terroristes complotaient de décapiter des parlementaires.

Les sociaux-démocrates ont été si intimidés par l’atmosphère d’urgence nationale qui régnait la semaine dernière qu’ils ont «par erreur» voté en faveur du budget conservateur au parlement.

Les événements des deux dernières semaines doivent servir d’avertissement à la classe ouvrière. Pendant des décennies, les sociaux-démocrates et les bureaucrates syndicaux ont semé le mythe d’un capitalisme canadien plus généreux. Mais dans sa quête de «compétitivité internationale» dans la lutte pour les marchés, les ressources et l’influence géo-politique, la bourgeoisie canadienne, pas moins que ses rivales américaine, britannique, allemande ou française, embrasse le militarisme et la réaction sociale.

La poursuite d’un tel programme, qui est contraire aux intérêts de la grande majorité des Canadiens, pousse également l’élite canadienne à recourir à la politique de la provocation et à chercher des moyens extra-parlementaires pour surmonter la résistance populaire.

Le point tournant de la dernière élection fédérale fut la révélation par la haute direction de la GRC qu’elle menait une enquête sur des allégations de délit d’initié entourant une annonce budgétaire faite par les libéraux, révélation qui a servi à renforcer les accusations de corruption gouvernementale systématique lancées par les conservateurs.

Il y a un an ce mois-ci, la Cour suprême, dans sa décision sur l’affaire Chaouilli, a fourni à la classe dirigeante un mécanisme pour réaliser son objectif de longue date de démanteler le réseau universel de santé publique du pays, l’assurance-maladie.

En tant que défenseurs de l’ordre capitaliste, les syndicats et le NPD ne sont ni désireux ni capables de mener une lutte pour défendre les droits démocratiques, pas plus qu’ils ne l’ont été pour la défense des emplois, des conditions de travail et des services sociaux. Pour cela, il faut bâtir un nouveau parti de la classe ouvrière autour de principes socialistes et internationalistes.


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