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Publication de caricatures antimusulmanes par des médias européens : une provocation répugnante et calculée

Par le comité de rédaction du WSWS
Le 4 février 2006

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Le World Socialist Web Site condamne sans équivoque la publication par une série de journaux européens de caricatures diffamatoires représentant le prophète Mahomet comme un terroriste et un tueur. Ces caricatures grossières destinées à insulter et à attiser les émotions des Musulmans, sont une provocation politique. Leur publication, à l'origine par un journal danois de droite ayant des liens historiques avec le fascisme allemand et italien, avait pour dessein d'attiser un sentiment antimusulman et anti-immigré.

La décision du gouvernement danois de droite de défendre le journal qui publia initialement les caricatures ainsi que la décision de journaux en Norvège, France, Allemagne, Espagne, Italie, Belgique, Pays-Bas, Suisse, Islande et Hongrie, de droite comme de gauche, de les reproduire n'a rien à voir avec la liberté de la presse ou la défense de la laïcité. De telles affirmations bafouent ces principes démocratiques.

La dissémination de telles ordures fanatiques est plutôt liée au virage pris par les élites dirigeantes européennes qui veulent s'aligner plus clairement derrière les interventions néocoloniales de l'impérialisme américain au Moyen Orient et en Asie centrale. Ce n'est pas par hasard que ces publications surviennent au milieu de la boucherie qui se déroule actuellement en Iraq, et des nouvelles menaces à l'encontre des masses palestiniennes et de préparatifs pour imposer des sanctions, voire peut-être même une agression militaire contre l'Iran.

Du reste, il s'agit de la continuation et de l'escalade d'une politique délibérée en Europe, dont le fer de lance est la droite politique aidée et soutenue par les partis dits de « gauche » en vue de diaboliser la population musulmane grandissante, de l'isoler et de l'utiliser comme bouc émissaire pour la misère sociale croissante touchant de vastes couches de la classe ouvrière.

Au nom de la lutte contre le terrorisme, les gouvernements partout en Europe appliquent des mesures répressives ayant avant tout pour cible les populations musulmanes et immigrées tout en préparant le terrain pour la destruction des droits démocratiques de la classe ouvrière tout entière. Ces préparatifs vers un Etat policier vont de pair avec une offensive contre l'emploi, les salaires et le niveau de vie de la classe ouvrière et une concentration toujours plus grande des richesses dans les coffres d'une élite minoritaire riche et privilégiée.

Il n'est pas nécessaire d'être un croyant musulman ou de toute autre religion, pour comprendre l'indignation des Musulmans de par le monde qui ont exprimé leur outrage face aux dessins racistes que leur ont lancé à la figure les médias qui revendiquent vouloir défendre les valeurs laïques occidentales contre le péril oriental.

Vendredi, des protestations contre la publication des caricatures se répandirent au Moyen Orient, en Afrique du Nord et en Asie. On compta des milliers de personnes manifestant en Iraq, des dizaines de milliers en Cisjordanie et dans la bande de Gaza et quelques 50.000 personnes affluèrent sur une place à Khartoum, capitale du Soudan. Des Musulmans manifestèrent également en Grande-Bretagne et en Turquie.

Les événements à l'origine de la présente confrontation montrent clairement que la publication des caricatures était une provocation politique. Le journal Danois Jyllands-Posten, qui fut le premier à publier douze caricatures de Mahomet le 30 septembre dernier, soutient le gouvernement droitier du premier ministre Anders Fogh Rasmussen, gouvernement comprenant dans sa coalition un parti viscéralement anti-immigré et antimusulman.

Dans les années 1920 et 1930, Jyllands-Posten fut tristement célèbre pour ses affinités avec le fascisme italien et la dictature allemande nazie. En 1933, il plaida pour l'instauration d'une dictature au Danemark.

En septembre dernier, le journal demanda à quarante caricaturistes de dessiner des images du prophète Mahomet, ce qui est proscrit par la loi islamique et considéré comme un blasphème. Expliquant l'objectif provocateur et incendiaire de cette entreprise, le rédacteur en chef précisa que sont but était « de voir si les gens succomberaient à une autocensure, comme nous l'avons observé en d'autres occasions lorsqu'il s'agissait de questions musulmanes. »

Le journal décida ensuite de publier douze dessins. Sur l'un d'entre eux, on voit le prophète Mahomet coiffé d'un turban en forme de bombe dont ma mèche est déjà allumée, sur un autre, Mahomet sur un nuage à l'entrée du paradis disant à la file de candidats à l'attentat suicide qu'il est en rupture de stock de vierges pour les récompenser, et un troisième dessin dépeint Mahomet, un poignard à la main et flanqué de femmes très lourdement voilées.

En octobre, le premier ministre Rasmussen refusa de rencontrer les ambassadeurs de onze pays à prédominance musulmane qui avaient demandé à être reçus pour s'entretenir de leurs objections sur les caricatures. Donnant le ton pour les développements à venir, Rasmussen déclara que les caricatures étaient une expression légitime de la liberté de la presse et laissa entendre qu'il n'y avait rien à discuter.

L'affront s'intensifia quand un magazine norvégien publia les dessins en janvier. Le Danemark continua d'ignorer les protestations de groupes de Musulmans danois et d'autres organisations musulmanes jusque fin janvier quand l'Arabie saoudite et la Syrie rappelèrent leurs ambassadeurs du Danemark et que le régime d'Arabie saoudite commença à boycotter les produits danois.
Ce n'est que lorsque le boycott prit de l'ampleur et que la firme danoise Arla Foods, deuxième producteur laitier européen, annonça que ses ventes au Moyen Orient s'étaient complètement taries que le gouvernement danois et Jyllands-Posten firent part de leurs regrets tout en défendant la décision de publier les caricatures.

Cette semaine la polémique qui couvait explosa littéralement quand le journal français France Soir publia à son tour les caricatures. En défendant la parution des caricatures dans son édition de jeudi, le rédacteur en chef du journal écrivit que c'en était assez des leçons de ces bigots rétrogrades.

En France, d'autres journaux, dont Libération suivirent l'exemple en reproduisant tout ou partie de ces caricatures répugnantes. Le Monde, pour sa part, publia l'ébauche d'un visage, probablement celui de Mahomet, produit par l'écriture répétée de la phrase « Je ne dois pas dessiner Mahomet. »

Les journaux allemands Die Welt, Die Tageszeitung, Tagesspiegel et le Berliner Zeitung, les journaux hollandais Volksrant, NRC Handelblad et Elsevier, les journaux italiens La Stampa et Corriere della Sera, le journal espagnol El Periodico et en Belgique deux journaux de langue flamande furent parmi ceux qui publièrent tout ou partie des caricatures au cours de ces derniers jours.

En Grande-Bretagne, la BBC, ITV et Channel 4 montrèrent quelques-unes des caricatures aux informations télévisées.

Une indication des forces et des raisons politiques se cachant derrière ce déluge de caricatures racistes fut la décision de Geert Wilders, membre du parlement néerlandais qui avait proposé une loi interdisant aux femmes de porter la burka, d'afficher les caricatures sur son site web « en signe de soutien aux caricaturistes danois et pour défendre la liberté d'expression. »

Parmi les politiciens et les élus gouvernementaux venus à la rescousse du gouvernement danois et des médias qui publièrent les dessins, on trouve le ministre français de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy. Avec le cynisme qui le caractérise, Sarkozy qui, l'année dernière avait contribué à inciter les émeutes anti-police dans les banlieues habitées en majorité par des immigrés musulmans les qualifiant de « racaille » et de « gangrène », a à présent revêtu le manteau de la liberté de la presse pour soutenir une attaque de plus contre les Musulmans.

La tentative absurde d'appliquer à cet assaut anti-démocratique un vernis démocratique est démontrée par Sarkozy qui fut l'initiateur de l'état d'urgence qui avait foulé aux pieds les libertés en France. Le gouvernement de Sarkozy et de Villepin avait crée un précédent à de telles attaques antimusulmanes en interdisant aux filles le port du foulard islamique dans les écoles publiques et ce avec le soutien des partis socialiste, communiste et de Lutte Ouvrière, parti d' « extrême-gauche ». On fit également passer cette attaque ouverte contre la liberté de religion en général et les droits des Musulmans en particulier pour une défense de la laïcité et des valeurs républicaines.

Le contenu véritable de la prétendue croisade pour la laïcité et la liberté de la presse fut révélé avec la menace de déportation de masse de Musulmans français en application d'une loi promue par Sarkozy après les émeutes de l'année passée. La loi prévoit la déportation de tous les étrangers accusés ­ non pas condamnés ­ de délits. Parmi les centaines de jeunes interpellés par les CRS de Sarkozy au cours des échauffourées ceux qui ne sont pas de nationalité française sont à présent menacés d'expulsion.

Le nouveau gouvernement de grande coalition d'Angela Merkel a également appelé à la mise en oeuvre de mesures plus restrictives pour expulser les étrangers du sol allemand.

Les intérêts de politique étrangère derrière cette attaque anti-musulmane se révélèrent à l'annonce faite par le gouvernement néerlandais de projets d'envoyer des troupes supplémentaires en Afghanistan pour aider l'impérialisme américain.

Vendredi, le Département d'Etat américain publia un communiqué s'opposant à la publication des caricatures. « Ces caricatures ont en effet un caractère offensant à l'égard de la foi des Musulmans, » déclara le porte-parole du Département en ajoutant, « nous reconnaissons pleinement et respectons la liberté de la presse et d'expression, mais il faut qu'elle aille de pair avec la notion de responsabilité de la presse. L'incitation à la haine religieuse et ethnique de cette manière n'est pas acceptable. »

Cette intervention, émanant d'un gouvernement qui s'est à maintes reprises efforcé de museler la presse américaine et qui a organisé une attaque brutale contre les Musulmans aux Etats-Unis, est tout à fait hypocrite. Après les attentats terroristes du 11 septembre 2001 et prétextant la soi-disant « guerre contre le terrorisme », le gouvernement Bush fut à la tête des attaques lancées contre les Musulmans de par le monde.

Le « respect » de Washington pour la foi des Musulmans fut exposé aux yeux du monde entier dans les photos montrant les sévices sadiques infligés aux prisonniers à la prison d'Abu Ghraib en Irak, où les militaires et les agents des services secrets employèrent des tactiques destinées à exploiter les croyances et les sentiments musulmans.

La réponse officielle américaine à la publication des caricatures est en grande partie motivée par un souci immédiat de l'impact que cette provocation est susceptible d'avoir sur les opérations impérialistes de Washington en Irak, en Iran et ailleurs.

Certains de ceux qui défendent la publication des caricatures affirment qu'elles sont des exemples de satire, comme si des appels grossiers aux instincts les plus bas et les plus fanatiques pouvaient être mis sur un pied d'égalité avec d'authentiques critiques sociales et culturelles. En fait, les images placardées sur les pages des journaux européens et retransmises aux informations télévisées ont plus de points communs avec le genre de caricatures antisémites rendues tristement célèbres par le régime nazi qu'avec la satire.

Que de tels débordements puissent avoir un lien quelconque avec la lutte pour la laïcité et contre les croyances religieuses est absurde. Une authentique critique de la religion ne peut se faire qu'au plus haut niveau intellectuel, en faisant appel à la science et à la raison et non à l'ignorance et à la peur.

Le présent événement expose les dangers énormes auxquels la classe ouvrière est confrontée en raison de la décomposition visible de la démocratie dans tous les pays capitalistes du monde. La promotion du chauvinisme antimusulman et de toutes les formes de poison communautariste et nationaliste, est l'expression d'un système social qui est plongé dans une crise insoluble et qui est incapable de satisfaire les besoins les plus élémentaires des grandes masses de la population.

L'unique antidote à une politique si arriérée et réactionnaire est le développement d'un mouvement unifié des travailleurs de tous les pays, de toutes religions et nationalités en opposition à la guerre et pour la défense des droits démocratiques, contre les élites dirigeantes et le système qu'elles préconisent. Le programme sur lequel se fonde une telle lutte est l'internationalisme socialiste.


 

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