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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

L’anti-impérialisme et l’anti-américanisme : un échange

1er mars 2007

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Les lignes suivantes sont un échange avec une de nos lectrices à propos de l’article Accuser les Irakiens : le nouvel argument pour justifier le militarisme américain

Vous avez totalement raison ! Et vous êtes aussi les premiers à l’avoir écrit. Mon mari et moi avions remarqué cette tactique de diversion employée dans les discours politiques.

Mais peut-on attendre autre chose d’un jeu de cache-cache politique ? La tactique « Accuser l’Iran » semble avoir échoué (à ce jour), aussi ils doivent faire porter la responsabilité à quelqu’un d’autre. Les Irakiens semblent bien le choix le plus probable. Souvenez-vous, certains Américains croient toujours que Saddam Hussein était derrière les événements du 11 septembre.

Le fait que les massacres n’aient commencé qu’après l’invasion américaine a déjà été oublié par la population américaine. Vous n’avez qu’à continuer à parler de la tête rasée de Brittany Spears et du fait qu’elle ne porte pas de sous-vêtement, et du dernier X-Box, et ils oublient même qu’il y a une guerre.

Dans le récent documentaire sur la guerre en Irak, Ground Truth, un soldat âgé de 25 ans qui a perdu une main a dit qu’une fois revenu au pays, quelqu’un lui avait demandé comment cela était arrivé.

    Je l’ai perdue à la guerre.

    Quelle guerre ?

    La guerre en Irak.

    C’est vrai ? Est-ce qu’elle continue toujours ?

Les Etats-Unis n’ont jamais eu le droit d’envahir l’Irak, de même que les nazis n’avaient pas le droit d’envahir la Pologne, la France, la Tchécoslovaquie, la Finlande, la Russie, etc. Les peuples de ces pays ont saboté des trains nazis et tués autant de soldats allemands qu’il leur était possible. Avaient-ils raison ? Ou avaient-ils tort ?

Si un autre pays envahissait les Etats-Unis, les citoyens américains auraient-ils tort de saboter et de tuer les soldats envahisseurs ? Je crois que tout meurtre est une mauvaise chose, mais nous devrons appliquer ces règles.

Il est lamentable de voir les soldats américains jouer à la « victime innocente » lorsqu’ils envahissent un pays qui ne leur a rien fait, de bombarder ses villages, de torturer ses civils innocents, de violer ses filles de douze ans pour les brûler ensuite. Les survivants vont se venger sur le prochain soldat américain qu’ils verront. Et les soldats de cette guerre n’ont même pas l’excuse d’avoir été conscrits. Ils se sont portés volontaires pour aller tuer, mais ne peuvent comprendre pourquoi quelqu’un pourrait avoir le désir de tirer sur eux. Revenons sur Terre.

Les Américains se considèrent de façon paradoxale comme des saints ayant Dieu dans leur camp en même temps que des durs qui ont le droit de faire n’importe quoi à n’importe qui, si cela leur donne un peu plus de pétrole pour leurs utilitaires sport ou plus de terres, comme celles volées aux autochtones américains et au Mexique, ou le passage pour leurs navires, comme lorsqu’ils ont enlevé le Canal de Panama à la Colombie.

Je ne peux même pas comprendre pourquoi nous avons été en guerre avec le Vietnam, ou fomenté des assassinats en Indonésie, en Angola, au Chili et au Tchad, pour ne nommer que ceux-là.

J’aimerais que le gouvernement américain arrête au moins d’être si hypocrite et qu’il admette qu’il se fout totalement du fait qu’il tue des hommes, des femmes et des enfants innocents pour de l’argent, au lieu de justifier cela en déclarant qu’il amène la « démocratie » dans un autre pays, ou qu’« il le libère d’un dictateur maléfique » ou qu’il le sauve du « communisme » ou en mentant et en disant que l’Irak était derrière le 11 septembre ou qu’il avait des armes de destruction massive, ou en dénonçant le dernier croque-mitaine en vogue.

L’Irak n’a jamais attaqué les Etats-Unis, tout comme le Vietnam, l’El Salvador, le Guatemala, le Chili, le Mexique, Cuba, la Colombie, le Venezuela, le Panama et d’autres pays très petits et peu connus qui n’ont jamais attaqué les Etats-Unis. Et malgré cela, les Etats-Unis réussissent toujours à trouver un prétexte pour y tuer des personnes innocentes. Et tout ça, pour l’argent !

Désolé de me plaindre, je viens de finir Fiasco et je suis frustrée. Non seulement notre gouvernement est-il maléfique et avare, mais en plus, il est incroyablement et absolument incompétent !

Ce qui me rappelle la grande citation de Will Durant : « Une civilisation ne peut être été détruite à moins qu’elle soit déjà minée de l’intérieur. »

MB

20 février 2007

***

Cher MB,

Votre réponse à l’article de Patrick Martin, « Accuser les Irakiens: le nouvel argument pour justifier le militarisme américain », est la bienvenue. Nous pouvons certainement comprendre la colère et la frustration que vous ressentez à propos de la guerre rapace et criminelle menée par l’administration Bush. Mais le point fondamental ici est que vous n’êtes pas seule à penser ainsi.

L’opposition de masse à la guerre qui s’est révélée dans le rejet de la politique de Bush lors de l’élection législative de 2006 n’a toujours pas de véhicule politique pour s’exprimer. L’absence de véritable exutoire pour les sentiments anti-guerre à l’intérieur du système bipartite a été mise en évidence par la prostration postélectorale des « opposants » démocrates à la guerre.

Votre lettre indique que vous êtes plutôt familière avec les crimes commis par l’impérialisme américain durant les six dernières décennies. Mais il faut maintenant placer ces événements dans le cadre nécessaire d’une analyse ou, comme l’a écrit le grand philosophe Spinoza : « Ni rire ni pleurer, mais comprendre. »

Je dois donc vous arrêter lorsque vous écrivez : « Le fait que les massacres n’aient commencé qu’après l’invasion américaine a déjà été oublié de la population américaine. » Je crois que vous avez tendance à assimiler les distorsions et les mensonges évidents des médias capitalistes à la conscience de la très grande majorité du peuple américain qui n’est pas du tout demeurée immobile.

Comment expliquer les résultats des élections de 2006 ? L’inquiétude et la colère croissantes, et même la haine, dirigées contre la politique du gouvernement ont été observées par Bush et Cheney qui ont clairement démontré que l’opposition massive de la population n’aurait pas d’impact sur leur décision de poursuivre la guerre en Irak ou d’en lancer une autre contre l’Iran.

Je crois malheureusement que, jusqu’à un certain point, votre réaction aux accusations portées contre les Irakiens est d’accuser les Américains (le peuple américain en entier), et c’est là une mauvaise approche que vous reconsidérerez, j’espère. Il est indéniable que depuis les événements du 11 septembre, on a vu s’exprimer dans la population américaine de l’ignorance et de la confusion. Comment pourrait-il en être autrement ?

L’élite dirigeante américaine a, par l’entremise de ses médias, sans cesse cherché à répandre cette confusion et à masquer les véritables événements derrière l’étrange désistement de la sécurité intérieure et des services de renseignements à la veille du 11 septembre et, par la suite, les véritables motivations derrière l’explosion du militarisme américain.

Il est vrai que les partis républicain et démocrate exercent conjointement une dictature sur la vie politique, restreignant la portée du « débat » sur la guerre, comme si personne à l’extérieur de leur monde isolé ne savait que cela avait été leur décision de lancer cette guerre d’agression tragique pour le peuple irakien et pour des milliers de familles américaines. Les machinations des démocrates et des républicains sont devenues de plus en plus évidentes, embourbés qu’ils sont dans cette catastrophe qu’est la guerre en Irak.

Leur tentative de matraquer les Américains pour qu’ils soutiennent cette entreprise criminelle est allée dangereusement de travers. Il y a eu un virage important, bien qu’encore inarticulé, dans la pensée politique d'une grande section du peuple américain sur la guerre et le militarisme de l'élite dirigeante de ce pays. Les gens tirent leurs propres conclusions et des événements comme l'indifférence totale du gouvernement pour les victimes du désastre de Katrina, les attaques contre le droit à l’habeas corpus, l’érosion générale des droits démocratiques, et finalement, une polarisation socio-économique sans précédent ont fait leur chemin dans la conscience de millions de personnes.

Nous sommes d’accord pour dire que le peuple irakien a le droit de prendre les armes pour repousser les tentatives de recolonisation de leur pays et le pillage de leurs ressources naturelles. En même temps cependant, nous insistons on ne peut plus pour dire que les masses irakiennes ont besoin de façon urgente d’une perspective politique, tout autant que la population des Etats-Unis.  

Les socialistes ne font pas porter sur l’ensemble de la population d’un pays la responsabilité des crimes commis par leurs dirigeants. Nous nous opposons donc au sentiment antiallemand résiduel qui révèle une profonde ignorance des causes qui ont permis la monté d’Hitler et la victoire des fascistes, particulièrement le rôle pernicieux du stalinisme qui a pavé la voie pour la défaite historique de la classe ouvrière allemande.

De la même manière, nous refusons d’attribuer une responsabilité collective aux Américains pour les crimes de l'administration de Bush et même à cet égard, aux soldats des États-Unis, qui pour la plupart sont des conscrits économiques, entraînés dans cette situation par des circonstances qu’ils comprennent à peine eux-mêmes. La question du « soutien des troupes », lancée tant par les démocrates que par les républicains à la tête de ceux qui s’opposent véritablement à la guerre, est une fraude. Quel a été le résultat de ce « soutien » sinon la mort de centaine de milliers d’Irakiens et celle de plus de 3000 américains, sans compter plus de 20 000 blessés ?

Nous devons accuser sans détour ceux qui en portent la responsabilité. L’antiaméricanisme tel qu’il est promu dans certains cercles radicaux – et par des politiciens réactionnaires d’autres pays qui l’utilisent pour cacher leur propres intérêts nationalistes ainsi que les attaques qu’ils préparent contre leur propre classe ouvrière – dépeint la société américaine comme monolithique et sans contradictions sociales. Je pense que vous serez d’accord sur le fait que rien n’est plus loin de la vérité. Les États-Unis sont un pays extraordinairement diversifié, riche en divisions de classe d’un caractère explosif et potentiellement révolutionnaires.

Vous ne devez pas vous contenter d’une analyse superficielle et d’émotions. C’est l’élite dirigeante américaine et ses représentants politiques qui sont responsables du crime que représente la guerre d’agression contre l’Irak.

Je vous recommande fortement de lire un article que nous avons publié au lendemain du 11 septembre 2001, L'anti-américanisme : un « anti-impérialisme » trompeur . Nous y écrivions, « Pour Bush et ses semblables, “défendre la liberté et la démocratie”, signifie simplement le droit de l'élite américaine de faire ce qu'elle veut à travers le monde. Pour un citoyen américain ordinaire, ces mots ont un sens profondément différent. La réalité sinistre de la nouvelle “guerre contre le terrorisme” du gouvernement américain, avec son but grandiose de réorganiser une région entière du monde selon les intérêts géopolitiques américains, sera comprise par la conscience populaire pourvu que le travail nécessaire soit accompli par les internationalistes socialistes. » 

J’espère que vous continuerez de lire le World Socialist Web Site et continuerez à correspondre avec nous.

Sincèrement

Walter Gilberti, pour le bureau éditorial du WSWS.

26 février 2007

(Article original paru le 26 février 2007)


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