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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

France : Malgré le succès de la grève, les syndicats préparent la trahison du mouvement

Par Peter Schwarz
16 novembre 2007

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Au premier jour de leur grève contre les attaques sur les retraites préparées par le gouvernement du président Sarkozy, les cheminots ont pratiquement paralysé le réseau ferroviaire. D’après la direction de la SNCF, seul un train sur cinq était en circulation, mais de nombreuses gares parisiennes étaient quasi désertées. Les autoroutes autour de la capitale comptaient 350 km de bouchons.

Il n’y avait quasiment aucun train en circulation sur le RER (Réseau express régional), ni sur la plupart des lignes de métro. Electricité et Gaz de France ont aussi été touchés par le mouvement de grève de mercredi.

La grève a enregistré une participation inférieure de dix pour cent au mouvement du 18 octobre, date où les syndicats avaient appelé à la première grève d’un jour contre la « réforme » des retraites. Dans toutes les assemblées générales, les grévistes de la SNCF et de la RATP ont appelé à la reconduction de la grève jeudi.

Mercredi après-midi, les grévistes ont participé à des manifestations dans plusieurs villes, et de nombreux étudiants sont venus défiler pour marquer leur solidarité avec les travailleurs. Une vague de protestations est en train de s’étendre dans les universités pour s’opposer à la nouvelle loi qui est considérée comme le premier pas vers la privatisation. Mercredi, 33 universités sur 85 étaient fermées suite à des mouvements de grève des étudiants.

Plusieurs milliers de manifestants ont défilé à Lille, Marseille, Rennes, Toulouse, Bordeaux et Rouen. Malgré les difficultés de transport, 25 000 personnes se sont rassemblées à la gare Montparnasse à Paris.

L’état d’esprit des manifestants se caractérisait par une forte détermination à résister. Sébastien, qui est ouvrier d’entretien à la Gare Paris Saint-Lazare a dit au World Socialist Web Site que le personnel avait voté à cent pour cent en faveur de la reconduction de la grève. «Pour nous, il n’y a rien à négocier, » a-t-il dit. « Le gouvernement est très dur. Pour gagner, il faut élargir le mouvement, sinon on n’a aucune chance d’y arriver. »

Un jour avant, le président Sarkozy et son gouvernement avaient fortement insisté sur le fait qu’ils se montreraient inflexibles sur leur position. Mardi après-midi, Sarkozy avait pris la parole devant le parlement européen où il a appelé les députés et gouvernements européens à soutenir sa ligne.

 « J’ai engagé une politique de réformes, » a-t-il dit. « Ce n’est pas dans l’intérêt de l’Europe qu’elles échouent. C’est grâce à ces réformes, si elles réussissent, et elles réussiront, que la France assainira ses finances publiques, qu’elle respectera ses engagements. »

Sarkozy a ajouté que son élection du mois de mai dernier légitimait ses projets de réformes.   « Ces réformes, les Français les ont approuvées. Je leur ai tout dit avant les élections pour pouvoir tout faire après. Ces réformes, je les mènerai jusqu’au bout. Rien ne me détournera de mon objectif. C’est le meilleur service que la France puisse rendre à l’Europe. »

Au même moment, le premier ministre, François Fillon, mobilisait le groupe parlementaire du gouvernement à l’Assemblée nationale. Il est franchement impossible de ne pas aller jusqu’au bout des réformes, a-t-il dit aux députés ravis du parti de la majorité, UMP (Union pour un mouvement populaire) qui, juste quelques semaines auparavant avaient approuvé les 15 milliards d’euros de cadeaux fiscaux accordés aux riches. « Avec votre soutien, le gouvernement fera tout simplement son devoir, » a-t-il déclaré.

Lors de la session plénière au parlement, Fillon a répondu à une question posée par le premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, par une référence démagogique à ceux, parmi la population, qui sont hostiles à la grève. « Des millions de Français risquent d’être privés d’une liberté fondamentale, celle de se déplacer, et parfois même celle de travailler, » a-t-il dit.

Des agitateurs de droite dans le camp UMP poussent, depuis un moment, à des actions contre les cheminots. Ils ont préparé un tract et cherchent à organiser des manifestations de soutien au gouvernement. Jusqu’ici Sarkozy et Fillon ont bloqué leur initiative. Ils ne veulent pas envenimer la situation afin de donner aux syndicats la possibilité de capituler d’eux-mêmes. Si toutefois cela ne se produisait pas d’ici la fin de la semaine, la première contre-manifestation devrait se tenir dimanche.

Tout en cherchant à faire campagne contre la grève, Sarkozy et Fillon ont aussi indiqué qu’ils sont prêts à négocier. Suivant les instructions de Sarkozy, le ministre du Travail, Xavier Bertrand a régulièrement rencontré les dirigeants de chaque syndicat un par un, afin de les amadouer et de les monter les uns contre les autres.

Jusqu’à présent, le gouvernement a rejeté le type de réunion au sommet demandé par la CGT (Confédération générale du travail, dominée par le Parti communiste), et qui réunirait  syndicats, comités exécutifs des entreprises publiques concernées et le gouvernement. Le gouvernement n’est pas prêt à reculer sur les trois principaux points de sa « réforme » des régimes spéciaux des cheminots. Il insiste pour que se mettent en place des discussions bilatérales entre les syndicats et les comités exécutifs d’entreprise afin de décider de la forme exacte de ces trois points pour chacune des entreprises.

Ces trois points consistent en une augmentation de 37,5 à 40 du nombre d’annuités nécessaires pour avoir droit à une retraite complète, l’indexation des retraites sur les prix et non plus sur les salaires, et l’introduction d’une décote supplémentaire pour ceux qui prennent une retraite anticipée. Par ces mesures, le Trésor espère économiser les quelque 5 milliards qu’il paie chaque année pour compléter les retraites des cheminots, des gaziers et électriciens et des employés de l’Etat qui bénéficient des « régimes spéciaux. » Autrement dit, les retraites relativement basses de ces personnes seront diminuées de quelque 5 milliards d’euros.

Les dirigeants syndicaux n’affichent absolument pas une fermeté ou une détermination qui soit à la mesure de celle du gouvernement. Le dirigeant de la CGT, Bernard Thibaut a fait une concession majeure au gouvernement avant même que la grève ne débute. L’attitude de la CGT est particulièrement importante, étant donné qu’elle jouit de la plus grande influence auprès des cheminots.

Mardi soir, Thibaut a rencontré le ministre du Travail, Xavier Bertrand pour de longues discussions et a accepté la demande du gouvernement de négociations séparées au niveau de chaque entreprise. Afin de permettre à Thibaut de ne pas perdre la face, le gouvernement a consenti à des négociations trilatérales, ce qui signifie qu’à chaque fois, un représentant du gouvernement participera aussi aux pourparlers. Mais il n’y a eu aucun changement quant à position inflexible du gouvernement sur la nécessité des trois points de la « réforme. » Thibaut l’a reconnu indirectement. Mis à part les positions principales, a-t-il dit, il y a « au-delà des positions de principe de nombreuses dispositions qui … justifient des véritables négociations. »

La concession de Thibaut a été bien accueillie par le gouvernement. Le secrétaire général du président, Claude Guéant, a dit au journal Le Monde que l’exécutif avait accepté la proposition faite par la CGT. « Bernard Thibault a fait en sorte que la crise puisse se dénouer dès le premier jour du conflit»  a-t-il dit.

Mercredi matin, le ministre du Travail Xavier Bertrand a reçu les représentants des autres syndicats afin de préparer les négociations.

La plupart des commentaires dans les journaux présument que la CGT va essayer de mettre fin aux grèves soit jeudi soit vendredi et négocier. « La vraie difficulté, pour la CGT, d’après le quotidien Libération, sera d’obtenir dans la négociation des concessions suffisantes pour calmer ses troupes. »

Thibaut s’est jusqu’ici abstenu de s’engager publiquement, mais a laissé entendre qu’il allait dans cette direction. Entouré de caméras de télévision mercredi en tête du cortège parisien, il a expliqué qu’il voulait que la grève se poursuive jusqu’à ce que ses propositions reçoivent « une réaction officielle du gouvernement. »

 « La CGT a fait des propositions, » a-t-il dit, « nous attendons la réaction officielle du gouvernement. On devrait recevoir un courrier matérialisant la position du gouvernement. Nous verrons ce qu'il y a dans ce courrier. Je ne peux pas dire à ce stade si le conflit va s'arrêter. »

Des commentaires similaires ont été faits par Didier Le Reste, dirigeant de la CGT cheminots. Quand on lui a demandé si la grève allait se poursuivre, il a répondu « beaucoup dépendra de la réponse du gouvernement. »

Le président Sarkozy a déjà donné l’instruction au ministre du Travail d’envoyer aux syndicats une lettre de proposition de méthode, car, selon les dires du porte-parole du président, David Martinon, il existe une « opportunité pour que l'esprit de responsabilité l'emporte dans le conflit sur la réforme des régimes spéciaux. »

Mercredi encore, le premier secrétaire du PS François Hollande a souhaité qu’« on en termine dès ce soir » avec la grève. « Si le conflit dure, ça va gêner les usagers. Donc je souhaite, j’exige même maintenant, qu’on rentre dès ce matin dans un processus de négociation entreprise par entreprise. »

Si les syndicats mettent fin à la grève, cela représenterait une trahison historique. Ils donneraient à Sarkozy et à son gouvernement la possibilité d’isoler et de monter les uns contre les autres ceux qui sont touchés par cette « réforme » et de faire de la suppression des régimes spéciaux le point de départ d’attaques tous azimuts sur l’ensemble de la classe ouvrière.

Le quotidien conservateur Le Figaro, qui fait fonction de porte-parole de la campagne contre la grève, est bien conscient de la signification plus large de la confrontation actuelle. Dans un éditorial de mercredi, il a, à nouveau, insisté pour dire à quel point une percée contre les cheminots était essentielle pour mener à bien toutes les autres « réformes » du gouvernement. « Mener cette réforme-là, c’est se donner les moyens de mener toutes les autres, » a expliqué le journal.


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