wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Maintien de l'ordre contre un camp de manifestants écologistes en Grande-Bretagne : une grave atteinte aux droits démocratiques

Par Paul Bond
20 août 2008

Imprimez cet article | Ecrivez à l'auteur

Un camp écologiste d'une semaine dans le nord du Kent [Est de Londres] s'est terminé par des accusations répétées d'excès de zèle et d'agressivité contre la police. Environ 100 personnes ont été arrêtées au cours de cette action de protestation, dont 46 ont été inculpées, principalement d'entrave à l'action de la police. Le maintien de l'ordre dans le camp a couté plusieurs millions de livres, il constitue une atteinte grave aux droits démocratiques et aux libertés publiques.

Le camp avait été établi pour protester contre la construction d'une nouvelle centrale électrique au charbon à Kingsnorth, sur l'estuaire de la Medway. La compagnie d'électricité E.ON UK propose le remplacement de l'actuelle centrale au charbon par une nouvelle. Ce serait la première centrale au charbon construite en Grande-Bretagne depuis plus de 30 ans. La proposition doit encore être acceptée par John Hutton, dont le portefeuille de ministre du commerce, des entreprises et des réformes réglementaires comprend les questions de sécurité énergétique. La proposition a été transmise au bureau d'Hutton après avoir été acceptée par l'autorité locale, la municipalité de Medway.

Kingsnorth est la première d'une série de nouvelles centrales au charbon proposées pour différents sites au Royaume-Uni. Le gouvernement a fait de ces centrales un élément clef pour garantir l'approvisionnement en énergie. Les manifestants affirment que les centrales au charbon, avec leurs rejets de CO2 élevés, sont les moyens les plus polluants de produire de l'électricité. Entre 1000 et 2000 manifestants avaient rejoint le camp durant la semaine pour protester contre la construction de la centrale de Kingsnorth. À côté de l'activité militante immédiate, le camp organisait également des ateliers et des discussions.

L'adjoint du chef de la police du Kent, Garry Beauridge, a reconnu lors d'une conférence de presse que la police préparait son action envers le camp depuis avril de cette année. Cette action fit arriver sur les lieux 1400 officiers de police venant de 26 forces différentes à travers toute la Grande-Bretagne. Ils étaient aidés par une surveillance aérienne constante. Les autorités portuaires de Medway ont également autorisé la police à appliquer certaines de leurs ordonnances de police pour empêcher que les manifestants ne s'approchent de la centrale par la rivière.

Le coût final de cette opération n'est pas encore connu, mais il a été estimé entre 1 et 8 millions de livres [1,2 à 10 millions d'euros]. Il est question que la police du Kent dépose une demande au ministère de l'intérieur pour l'aider à payer la facture.

Il y a une tendance marquée ces dernières années de la part de la police à donner des chiffres inférieurs au nombre réel de manifestants. Dans le cas de Kingsnorth, elle a estimé l'affluence à 1000 personnes. D'après leurs propres données, ils ont donc mis en place une présence policière bien plus nombreuse que celle des manifestants. L'estimation des organisateurs est dans ce cas de 1500 personnes, ce qui donne un rapport de 1 policier pour chaque manifestant. Même l'estimation la plus élevée ne se monte qu'à 2000 personnes.

Le fait que la présence policière visait à décourager les protestations a été confirmé lorsque Beauridge a déclaré qu'il considérait « La majorité des manifestants » comme « des gens respectueux des lois, présents pour un motif légitime. » Il a justifié le nombre de policiers par la présence « d'un petit noyau dur de gens … prêts à utiliser des tactiques et des activités criminelles. » D'après un rapport, ce « petit noyau dur » était estimé à seulement 150 personnes. Comme l'a remarqué le porte-parole officiel du camp, Kevin Smith, « Chaque année, la police utilise l'existence supposée d'une minorité dure comme justification pour avoir la main lourde, et chaque année cette minorité dure ne se concrétise pas. »

Il est évident que la présence policière visait à dissuader toute forme de protestation. Les manifestants du camp ont décrit la présence permanente des hélicoptères de police qui servait à perturber les réunions et les discours. Il est également question de véhicules utilisés par les manifestants pour ravitailler le camp qui ont été confisqués par la police.

En particulier, les manifestants ont attiré l'attention sur les tactiques agressives de la police anti-émeutes, qui a utilisé des matraques et des boucliers pour les arrestations. Plusieurs manifestants ont été blessés lorsque la police les a chargés alors qu'ils tentaient de pénétrer dans un champ de maïs. Beauridge a maintenu qu'une telle réaction était « proportionnée…À cause du niveau de résistance, les policiers ont été autorisés à utiliser la matraque durant deux journées de la manifestation. Il y a des conditions légales strictes pour leur emploi et nous avons donné des avertissements clairs à chaque fois qu'une équipe de spécialistes était déployée. »

La députée des Verts, Caroline Lucas, qui a visité le camp, a déclaré qu'elle était « horrifiée que [la] police… ait utilisé des bombes au poivre, l'équipement anti-émeutes [et] l'intimidation physique. » La police surveillait les manifestants avec des chevaux, des chiens et des motos tout-terrain, ainsi qu'avec une couverture permanente des hélicoptères.

Pour maintenir ce niveau d'intimidation et de perturbation, la police a obtenu des pouvoirs étendus pour arrêter et fouiller les manifestants. La section 60 du Criminal Justice and Public Order Act [Loi sur la justice pénale et l'ordre public] est entrée en vigueur pour le leur permettre. Initialement, les dispositions de la section 60 n'étaient appliquées qu'à la zone du camp. Par la suite, elles ont été étendues à toute la péninsule de Hoo. Ces dispositions autorisent la police à arrêter et fouiller un suspect si un officier ayant le grade de commissaire ou supérieur croit qu'il pourrait se produire des violences sérieuses.

 À Kingsnorth, la section 60 a été utilisée pour espionner tous les visiteurs du camp. Un témoin a raconté avoir rejoint une queue pour être fouillé. Le policier chargé de la fouille ne savait pas qui avait autorisé les fouilles. Après avoir été palpé et son sac ouvert, il a reçu un brassard rose. Il a dû le montrer à trois autres policiers avant de pouvoir pénétrer dans le camp pour de bon. Il a été fouillé à nouveau quand il a voulu sortir. Certains manifestants ont également été menacés de fouille au corps. En un autre endroit, on raconte que la police a tenté d'utiliser la section 60 pour justifier la destruction de radeaux improvisés.

Lucas, avec le député du Parti libéral démocrate Norman Baker et le député travailliste Collin Challen, a écrit à la police du Kent pour exprimer son inquiétude à propos d'une telle utilisation de pouvoirs discrétionnaires. Lucas a averti que cela « minait nos libertés publiques. »

Lucas, avec d'autres, a également attiré l'attention sur un livret apparemment perdu par un des policiers qui surveillaient le camp. Ce livret, intitulé « Policing Protest [Surveiller les manifestations] » est édité par l'Unité nationale de coordination tactique sur l'extrémisme et offre « des conseils tactiques et des lignes de conduite sur la surveillance des extrémismes de l'intérieur concernant des questions spécifiques. »

La police a organisé un programme de confiscations systématiques pendant les fouilles. Elle a déclaré à la presse qu'elle avait confisqué beaucoup de couteaux, alors que les manifestants ont décrit cela comme une tactique d'exagération. La police a également montré aux journalistes un jeu de plateau satirique, War on Terror [Guerre contre le terrorisme], qu'ils avaient confisqué. Il semble y avoir eu une consigne pour rendre la vie aussi incommode que possible aux manifestants. Parmi les autres objets confisqués, il y avait de la colle, du savon, un costume de clown, de morceaux de tapis, du papier toilette, des escabeaux, des surligneurs, des marqueurs, des éléments des toilettes, et des banderoles.

Ils ont également confisqué les radios de secours et les gilets de sauvetage des manifestants. Un manifestant impliqué dans la manifestation le long de la rivière a décrit une rencontre avec les garde-côtes locaux. Les gardes-côtes les ont complimentés sur les précautions prises par les manifestants et ont critiqué la confiscation des gilets de sauvetage par la police, disant, « C'était irresponsable, ça aurait pu mettre des vies en danger. »

De telles tactiques visaient clairement à réprimer toute forme de contestation et décourager toute future manifestation. À cet égard, il est particulièrement inquiétant que l'Union nationale des journalistes (NUJ) ait eut à se plaindre que ses membres étaient aussi soumis aux mêmes fouilles, rudesses et surveillances. Le NUJ envisage de déposer plainte contre « Cette conduite injustifiable de la police. » D'après le NUJ, les journalistes étaient fouillés quand ils entraient et sortaient du camp. Les fouilles continuaient après que la police ait vu leur carte de journaliste. Des journalistes ont également été « rudoyés » par la police, et filmés alors qu'ils utilisaient le réseau WiFi du McDonalds local.

De tels événements indiquent une détermination à utiliser la manière forte contre toute forme de protestation légitime, et devrait être traitée comme une atteinte très sérieuse aux droits démocratiques.

(Article original publié le 15 août 2008)


Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés