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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Espagne : l'Église catholique relance l'offensive contre le droit à l'avortement

Par Paul Stewart
12 février 2008

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Pour les élections nationales de mars, le PSOE (Parti socialiste ouvrier espagnol) a retiré l'extension du droit à l'avortement de son programme.

Le PSOE a, une fois de plus, capitulé devant l'Église catholique et le parti d'opposition de droite, le Parti populaire (PP). Sa décision est intervenue après une manifestation à Madrid le 31 mars, organisée par la Conférence des évêques, au cours de laquelle les auditeurs se sont succédés pour dénoncer la politique du gouvernement sur l'avortement et la famille comme une rupture du consensus établi lors de la « transition » entre la dictature du général Francisco Franco (1939-1975) et les formes parlementaires de gouvernement en 1978. Les Accords entre l'Église et l'État, signés en 1979, étaient un de ces arrangements fondamentaux.

Contrairement au PSOE, l'Église a complètement abandonné l'approche circonspecte qu'elle avait adoptée dans ses relations avec les partis politiques depuis la chute de Franco. Durant les quatre dernières années, elle a accentué ses attaques publiques contre le PSOE, qui était arrivé au pouvoir en profitant de l'opposition massive de la population au soutien du PP à l'invasion de l'Irak et à la prétendue « guerre contre le terrorisme ».

Le PSOE a tenté d'apaiser la discorde et de rétablir le consensus de l'ère post-franquiste pour stabiliser le régime bourgeois, mais cela s'est révélé impossible.

Depuis la manifestation anti-avortement, le PSOE demande que la Conférence des évêques s’excuse auprès du gouvernement et retire ses accusations publiques. Le secrétaire à l'organisation du PSOE, José Blanco, a déclaré à propos de la manifestation, « J'avais l'impression que c'était un rassemblement du PP dirigé par des cardinaux » et il a accusé Église de « s'éloigner des fondements essentiels de la démocratie ».

Il a ajouté que la critique du PSOE par les évêques constituait une « attaque extrêmement sérieuse » de l'Église contre les institutions démocratiques de l'État, quelque chose d’« inédit » depuis que l'Espagne est passée à la démocratie, il y a trente ans. Blanco a affirmé, « Nous nous opposerons à cette offensive de la hiérarchie ecclésiastique, qui constitue le premier acte de la campagne électorale du PP » et « [nous] ne ferons aucunement marche arrière sur les législations qui ont étendu les droits des Espagnols ».

La vice-présidente du PSOE Maria Teresa Fernandez de la Vega a incité ses collègues à faire passer une loi avant les élections qui, sans étendre le droit à l'avortement, renforce les droits existants en matière de protection de l'anonymat des patientes, et à la combiner avec la promesse verbale d'étendre le droit à l'avortement si le parti était réélu. Une telle proposition faisait partie du programme pour les élections de mars 2004, mais elle a été discrètement abandonnée.

Les remarques de Blanco ne signifient pas que le PSOE se prépare à une confrontation avec l'Église, ce sont plutôt des appels adressés à la hiérarchie de l'Église pour qu'elle réalise les conséquences déstabilisatrices de sa campagne.

Blanco a dit que les évêques devaient « relire les évangiles », il a insisté pour que l'Église « évolue ». Ses commentaires ont été repris par le Christian Network [Réseaux chrétiens], une association de près de 150 organisations catholiques, qui a accusé dans un de ses communiqués la Conférence des évêques d'ignorer les profondes difficultés que rencontrent les familles. Le communiqué déclare « Ils ont ignoré la réalité de nombreux catholiques qui, avec des visions différentes, vivent et expérimentent la vie de famille, mais suivant les mêmes valeurs des évangiles »

Rachel Mallavibarrena Martinez de Castro, la porte-parole de Somos iglesia (Nous sommes l'Église), a déclaré, « Il semble que ce débat sur la famille ne s'est concentré que sur l'avortement, le divorce, et le mariage homosexuel » au lieu du travail et de l'égalité.

Le PSOE s'est joint à une section de l'Église catholique pour changer l'orientation politique de la Conférence des évêques. Le groupe Redes christianas [Réseaux chrétiens en Espagne] a imploré Église de retourner à ses campagnes dites traditionnelles en faveur de l'égalité entre hommes et femmes et pour la « démocratie », et ils ont déploré la nouvelle vision de la famille qui est promue par l'Église comme quelque chose de « monolithique » et qui n'est en accord qu'avec certaines sections de l'Église. Ces sections comprennent les représentants les plus âgés de la Conférence des évêques et du Vatican, dont le Pape.

La fracture dans les rangs du clergé n'est qu'un pâle reflet de la profonde hostilité populaire à la position politique actuelle de l'Église et à son rôle dans la société. La Conférence des évêques et le Vatican ont répondu à ces appels en invoquant le spectre d'un complot socialo-maçonnique, dénonçant les sections de l'Église comme étant influencées par le sécularisme, et en ressuscitant les slogans que l'Église utilisait quand elle soutenait le mouvement national fasciste de Franco en 1936.

Dans un entretien accordé au journal polonais l'Hebdomadaire catholique du dimanche, le 11 janvier, intitulé « Le spectre de la révolution espagnole » l'archevêque de Tolède, Antonio Canizares Llovera, a critiqué Zapatero pour sa « mise en place d'un programme séculier, dont le fondement est l'idéologie laïque. Vous pouvez observer ce phénomène partout en Europe. » Il a enchaîné, « Parfois, les gens ne se rendent pas compte de la puissance de cette influence, et ils sont asservis par cette idéologie. C'est pourquoi l'Église espagnole mène une mission de nouvelle d’évangélisation intensive. Nous sommes d'accord avec la déclaration de Jean Paul II selon laquelle l'Espagne doit être évangélisée et doit évangéliser. »

L'entretien se terminait par un assaut contre l'influence de la franc-maçonnerie dans le gouvernement du PSOE, « la sécularisation de la société et de la culture qui est aussi adoptée par l’Église, qui a fait que nous n'avions que peu d'énergie pour évangéliser... En Espagne, un récent livre de l'écrivain protestant César Vidal vient d'être publié. Son titre est Los masones : la historia de la sosiedad secreta mas poderosa [Les Franc-maçons : Histoire de la plus puissante des sociétés secrètes], publié par Planeta. Entre autres choses, le livre étudie l'influence maçonnique sur les grands événements de l'histoire espagnole récente, en particulier depuis l'élection en mars dernier du Parti socialiste ouvrier espagnol... la Franc-maçonnerie est responsable de la diffusion de la laïcité parce qu'elle affirme que Dieu qui s'est révélé lui-même en Jésus-Christ ne peut être pris en compte. Grâce aux moyens que les francs-maçons ont à leur disposition, ils ont pu pénétrer les milieux de l'administration étatique et de la culture. »

Pourquoi Église catholique ressuscite-t-elle ses slogans pro-fascistes et quelles sont les impulsions sociales profondes contre lesquelles elle réagit ? Cela a été résumé par le Pape Benoît XVI le 30 novembre dans son Spe Salvi (Sauvé par l'espoir), la deuxième partie d'un triptyque d'encycliques dans lequel il déclarait que l'humanité ne serait pas sauvée par la science ou la révolution sociale, mais uniquement par le Christ.

Il y affirme « Un monde qui est obligé de créer sa propre justice est un monde sans espoir. » La pauvreté ne pourrait pas être éradiquée de la surface de la Terre. « Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour arrêter la souffrance, mais la bannir du monde n'est pas en notre pouvoir », a écrit le Pape. « Seul Dieu en est capable. » Il a reconnu que le monde moderne a été formé par la Révolution française de 1789 et la Révolution russe de 1917, et inspiré par les travaux de Marx, et pour l'essentiel il en a appelé à toutes les religions pour s'unir dans le combat contre l'émergence de nouveaux mouvements, en particulier dans la jeunesse, inspirés par ces conceptions éclairées et scientifiques.

Le Premier ministre José Zapatero a tenté de restaurer l'autorité rapidement déclinante de l'Église. Quand les Accords entre Église et l'État ont dû être renouvelés à l'automne dernier, le PSOE avait l'opportunité de couper le soutien financier à Église catholique, mais il a préféré renouveler l'essentiel des accords. Au lieu de s'opposer à la béatification sans précédent par le Vatican de 498 prêtres catholiques tués quand l'Église soutenait le fascisme pendant la guerre civile de 1936 à 1939, il a légitimé la cérémonie en y envoyant des représentants du gouvernement qui étaient des membres éloignés des familles de deux des prêtres béatifiés.

En décembre dernier, Zapatero a annoncé le retour en politique de José Bono Martinez, qui avait pris sa retraite de ministre de la Défense l'année dernière. Il a été nommé directeur de la campagne électorale du PSOE. Bono est le plus connu des conservateurs catholiques du PSOE, il a passé des années à réconcilier les politiques du PSOE avec les enseignements de la bible. Peu après que le PSOE soit arrivé au pouvoir en 2004, Bono a déclaré qu'une « guerre » entre l'Église catholique et le gouvernement ne pourrait profiter qu'au PP et qu'un tel conflit serait un combat que le PSOE ne souhaitait pas. Ces déclarations répondaient aux avertissements faits par la droite selon lesquels le sécularisme ne devait pas être utilisé contre les croyants.  

Le recul du PSOE sur le droit à l'avortement n'a fait qu'enhardir la droite, qui, d'après un article du 17 janvier dans El Païs, prépare un grand rassemblement contre l'avortement avant les élections. « Les graves persécutions des dernières semaines contre les cliniques d'avortement qui sont supposées avoir enfreint les termes du Code pénal ont dépassé les limites du zèle administratif et judiciaire, elles sont entrées sur le terrain du fondamentalisme religieux, du particularisme éthique, et des politiques sectaires... Plusieurs associations catholiques, connues pour leur agressivité dans la campagne contre les cliniques d'avortement, préparent pour la fin février, à quelques jours seulement des élections, une manifestation de masse "pour la vie et contre l'avortement". »

Le 30 janvier, la Conférence des évêques espagnols a publié un communiqué intervenant ouvertement dans les élections. Le communiqué incitait les catholiques à ne pas voter aux élections de mars pour les partis politiques qui ont des relations avec les terroristes ou qui soutiennent le mariage homosexuel. Le communiqué déclarait que, bien que « les catholiques puissent soutenir et adhérer à divers partis, il est aussi vrai que tous les programmes [électoraux] ne sont pas également compatibles avec la foi et les exigences chrétiennes dans la vie. »

(Article original anglais paru le 6 février 2008)


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