wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

  WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

France: annonces, pendant les vacances de Noël, d’attaques sur les acquis sociaux

Par Alex Lantier
3 janvier 2008

Imprimez cet article | Ecrivez à l'auteur

L’annonce faite par le gouvernement de toute une série d’attaques sur les acquis sociaux pendant les vacances de Noël est un sévère avertissement aux travailleurs : le million de manifestants et de grévistes des mois d’octobre et novembre derniers contre les attaques sur les retraites n’a pas affaibli la détermination du gouvernement à faire passer en force ses « réformes. » Au contraire, celui-ci cherche à les amplifier – destruction des retraites, de la limite du temps de travail hebdomadaire et du droit de grève.

Le 26 décembre, le ministre du Travail Xavier Bertrand a publié un projet de décret réformant les régimes spéciaux de retraite (des employés des services publics, cheminots, électriciens et gaziers entre autres) accompagné d’un rapport au premier ministre François Fillon spécifiant la manière dont le projet de décret mettrait en place les coupes prévues.

Le gouvernement n’a reculé sur aucun point de sa réforme. Les salariés devront cotiser pendant 40 années au lieu de 37,5, et perdront 5 pour cent de leur pension pour chaque annuité manquante. Les retraites des régimes spéciaux seront indexées sur les chiffres officiels de l’inflation, fournis par le gouvernement, et non sur les hausses de salaire comme c’est le cas actuellement pour les régimes spéciaux, ce qui aura pour conséquence de réduire le pouvoir d’achat des retraites. Le décret met en place un système à deux vitesses dans lequel les travailleurs embauchés après le 1er janvier 2009 se verront refuser le droit à une retraite anticipée pour raison de pénibilité du travail.

Ce décret incorpore les attaques sur les régimes spéciaux de retraites dans une attaque plus large sur les droits de retraite de la classe ouvrière toute entière.

Il aligne la durée de cotisation des régimes spéciaux sur celle de la fonction publique. Le nombre d’annuités nécessaires pour avoir droit à une retraite à taux plein avait été fixé par la réforme des retraites de 2003 du premier ministre de l’époque Jean-Pierre Raffarin, et passera à 41 ans en 2016. Dans un article du 27 décembre, « Réforme des retraites: le gouvernement accélère, » le quotidien conservateur Le Figaro citait Xavier Bertrand : « Il n'y a aucune surprise. J'ai toujours dit que si le public et le privé passaient à 41 ans, par la suite les régimes spéciaux ne resteraient pas à 40 ans. »

Les négociations à venir sur les retraites, prévues pour début 2008 par la loi de 2003, vont sans aucun doute conduire à davantage de réductions. Dans un article daté du 26 décembre, Le Monde écrit que « leur intention d'allonger la durée du travail [...] nécessite d'être confirmée lors de la renégociation de l'ensemble de la réforme avec les partenaires sociaux prévue au cours du premier semestre 2008. Cette discussion doit également porter sur d'autres paramètres essentiels, comme les taux de cotisation et le niveau du ‘salaire de remplacement’, autrement dit le montant des pensions versées. »

Le 27 décembre le gouvernement a aussi annoncé des projets visant à permettre aux patrons de faire passer la durée hebdomadaire du travail de 35 à 48 heures, voire même à éliminer le paiement des heures supplémentaires. Dans une lettre adressée aux principales confédérations syndicales, le premier ministre Fillon leur a demandé « à quelles conditions de validité devrait être soumis un accord d'entreprise pour qu'il puisse librement déterminer les règles applicables en matière de durée du travail […]: seuil de déclenchement des heures supplémentaires, taux de majoration applicables. »

Si les lois françaises venaient à être abandonnées, l’unique restriction restante serait alors le maximum de 48 heures de travail par semaine de l’Union européenne. Fillon a ainsi repris la requête faite le 21 novembre par Laurence Parisot, présidente du Medef, la fédération patronale, de « poser sur la table la question de la suppression de la durée légale du travail. »

Les projets du gouvernement soulignent la faillite de la politique du ‘faire pression’ adoptée par les syndicats. Après les gigantesques manifestations et grèves de plusieurs semaines par de larges sections de travailleurs des entreprises touchées, le gouvernement n’a non seulement rien cédé, mais il cherche à extorquer plus encore aux travailleurs.

La question fondamentale n’est pas celle de la cupidité des politiciens bourgeois au pouvoir, bien que cela ait fait couler beaucoup d’encre ces derniers temps. En effet le président Nicolas Sarkozy a emprunté le jet privé de l’industriel milliardaire Vincent Bolloré pour s’envoler vers Louxor en Egypte et y passer ses vacances de Noël - et dépenser l’augmentation de salaire de 140 pour cent qu’il s’était accordée en octobre - à faire du shopping avec sa nouvelle compagne, l’ex-mannequin Carla Bruni.

L’objectif principal de la bourgeoisie française, dans ses attaques sur le niveau de vie des travailleurs, est de rétablir sa position sur le marché mondial, position qui a été érodée de façon significative ces dernières années, ses concurrents ayant accru leur profitabilité en réduisant radicalement les salaires et les prestations sociales. La France est à la traîne de des concurrents européens, notamment la Grande-Bretagne et l’Allemagne où les gouvernements sociaux démocrates ont attaqué l’Etat providence avec beaucoup plus de détermination. Pour donner un exemple statistique, le déficit commercial de la France n’a cessé de se creuser, passant de 2,4 milliards d’euros en 2003 à 5,3 milliards en 2004, 21,2 en 2005, 28 milliards en 2006 et pour 2007 une projection fait état de 30 milliards d’euros.

Sarkozy a accédé au pouvoir en grande partie parce que le patronat français était convaincu qu’il réduirait le niveau de vie des travailleurs de façon plus agressive. Sa force politique aux yeux de l’élite dirigeante et des médias qui lui sont favorables dépend de sa poursuite de ces attaques sur les travailleurs. Comme l’a écrit un journaliste bourgeois, Eric Le Boucher du Monde, avant les grèves de novembre, les milieux économiques « savent que le président n'a pas le choix. S'il cède, il est chiraquisé. »

Dans un tel contexte, les proclamations des syndicats qu’ils utiliseront les grèves pour influencer les négociations avec le gouvernement, y compris les appels à des grèves d’un jour fin janvier, ne servent à rien. Ayant tout fait pour que les grèves d’octobre et novembre soient de portée limitée, ayant ensuite négocié avec le gouvernement en décembre, les principales fédérations syndicales ont rempli le rôle que leur avait assigné Sarkozy : celui d’isoler et de contenir le mouvement de masse et, une fois la grève terminée, de donner au gouvernement carte blanche pour imposer toutes les conditions qu’il veut.

La transformation de la bureaucratie syndicale en un relai de l’influence de l’Etat sur la classe ouvrière au service du patronat avance à grands pas. Janvier 2008 sera le premier mois où la loi sur le « service minimum », limitant la participation à des grèves dans les transports en commun, entrera en vigueur. La loi stipule une période minimum de notification avant de pouvoir faire grève (rendant ainsi illégales les grèves sauvages), oblige les travailleurs à déclarer publiquement et individuellement à leur employeur s’ils feront grève et entraîne des amendes pour les sociétés de transports qui n’assureraient pas le niveau prescrit de service minimum.

Commentant le « dispositif d'alarme sociale » de la société de transports parisiens sur lequel se base la loi sur le service minimum, le quotidien de droite Le Figaro écrit, « cette procédure [de la RATP] a entraîné une baisse sensible du nombre de conflits : 90 pour cent des litiges sont résolus par le dialogue. »

Il existe aussi la possibilité d’une pratique qui reviendrait à une corruption légale de représentants syndicaux de la part de l’Etat. Le 27 décembre on a appris l’existence d’une lettre écrite par Sarkozy pour sélectionner des dirigeants syndicaux et dans laquelle il projetait d’accorder officiellement aux syndicats des subventions de l’Etat en échange de leur acceptation des réformes sur la durée hebdomadaire du temps de travail.

Avec de telles mesures, l’Etat cherche à mettre fin à la grève comme moyen de lutte pour la classe ouvrière; le taux de chômage élevé et l’intimidation des employeurs ont déjà provoqué un déclin aigu des grèves dans le secteur privé ces dernières années.

La démarche du gouvernement consistant à attaquer le niveau de vie de toute la population travailleuse révélera les objectifs réels de Sarkozy, qui ont jusqu’ici été largement présentés au public comme une question d’équité entre les différentes catégories de salariés.

D’après un sondage IFOP publié par Dimanche ouest France, la politique économique de Sarkozy est déjà largement discréditée. Sur la question du pouvoir d’achat, un de ses slogans de campagne les plus amplement diffusés, « travailler plus pour gagner plus » les trois quarts des personnes interrogées ont dit ne pas s’attendre à ce que le gouvernement augmente leur pouvoir d’achat, une tendance qui ne sera que renforcée par les efforts de l’Etat pour éliminer le paiement des heures supplémentaires. Seuls 42 pour cent s’attendent à ce que Sarkozy fasse baisser le chômage et 31 pour cent la pauvreté, soit une baisse de 11 et 14 pour cent respectivement par rapport à août 2007.

Mais du fait que, fondamentalement, tous les partis politiques de l’establishment, dont ceux de la gauche officielle, sont d’accord avec la politique de Sarkozy, ce mécontentement ne s’est pas encore mué en un mouvement capable de renverser les réformes prévues par le gouvernement. Cela ne fait que soulever plus clairement encore la nécessité d’une lutte politique pour faire tomber le gouvernement, une lutte basée sur une perspective socialiste et internationaliste. 

Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés