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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

L’analyse du mémo de la Commission du 11 septembre sur les vidéos des interrogatoires

Par Joe Kay
4 janvier 2008

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Le mémo rédigé par le directeur de la Commission du 11 septembre, Philip Zelikow, n’est que le dernier indice en date indiquant que la dissimulation et la destruction des cassettes vidéo exposant l’interrogatoire de prisonniers de la CIA sont parties intégrantes d’un complot dans lequel sont impliqués des responsables de haut rang de la Maison Blanche et de la CIA (Voir : « La Maison Blanche et la CIA ont dissimulé à la Commission du 11 septembre les vidéos relatives à la torture lors d’interrogatoires »).

Dès le début, la Commission du 11 septembre, composée à la fois de personnalités dirigeantes du Parti démocrate et du Parti républicain, était censée être une opération de blanchiment. Son but était de camoufler des questions fondamentales, dont le rôle joué par les gouvernements précédents, démocrate et républicain, et par la CIA dans le financement et la promotion d’Oussama ben Laden ainsi que d’autres islamistes radicaux qui ont mis en place Al Quaïda et de camoufler aussi toute une série d’anomalies qui indiquent une éventuelle duplicité de la part de sections de l’appareil d’Etat dans les attentats du 11 septembre même. Le fait qu’il a été refusé à la Commission d’accéder à des preuves essentielles de l’interrogatoire d’un soi disant haut responsable d’Al Quaïda, Abou Zoubaydah, est une indication de plus de son vrai rôle.

Selon le rapport de Zelikow, la demande initiale adressée par la Commission à l’agence de renseignement américaine pour l’obtention d’informations relatives aux interrogatoires avait été faite le 6 juin 2003. La Commission avait spécifiquement cité 40 personnes, y compris Zoubaydah et Abd al-Rahim al-Nashiri, les deux personnes dont la CIA a reconnu avoir détruit les vidéos des interrogatoires. La requête avait été adressée à la CIA, au ministère de la Défense et au FBI.

Zelikow rapporte que les requêtes pour informations « précisait également que si un document demandé était caché à la Commission, même temporairement, l’agence devait immédiatement identifier le document ou catégorie de documents caché ‘et ce avec suffisamment de spécificité pour permettre d’attaquer de façon significative une telle dissimulation.’ »

Un porte-parole de la CIA a affirmé au cours du week-end que les cassettes n’avaient pas été détruites avant 2005 « parce que l’on avait pensé que la Commission pourrait réclamer à un moment donné les enregistrements. » Ceci est à la fois une duperie et un aveu accablant. La déclaration reconnaît implicitement que des responsables de haut niveau de la CIA étaient au courant de l’existence des cassettes à ce moment précis.

En réponse à ces demandes comme aux demandes ultérieures, la Commission n’a reçu que des rapports sur les interrogatoires préparés par la CIA. Elle n’a même pas reçu de transcription. « Après avoir vérifié et analysé ce matériel, les membres de la Commission ont conclu que cette information n’était pas aussi détaillée qu’ils l’avaient escompté, » écrit Zelikow. D’autres requêtes ont donc été faites pour de plus amples informations.

Cette explication contredit l’affirmation du directeur de la CIA, Michael Hayden, selon laquelle les enregistrements avaient seulement été détruits une fois que toutes les données pertinentes avaient été assimilées dans les rapports d’information. La Commission du 11 septembre avait fait comprendre qu’elle considérait ces rapports comme inadéquats, et la CIA en avait été informée.

Zelikow rapporte que des demandes ultérieures avaient été faites au conseiller général de la CIA, Scott Muller, les 14 et 16 octobre 2003. Les demandes mentionnaient spécifiquement Zoubaydah entre autres.

Une requête contenait des questions sur « le processus de traduction lors des interrogatoires, » « la manière dont les interrogateurs avaient traité les incohérences apparues dans les récits des détenus, » « le contexte dans lequel des questions particulières avaient été posées afin de tirer au clair l’information donnée, » « et plus d’information afin d’évaluer la crédibilité et l’attitude des détenus lors des déclarations. »

Cette Commission du 11 septembre était évidemment préoccupée par le fait que les informations fournies par les prisonniers n’étaient pas crédibles. En effet, certains rapports, y compris celui fait par Ron Suskind dans son livre publié en 2006, The One Percent Doctrine (La doctrine du un pour cent), ont suggéré que Zoubaydah était un malade mental et que le rôle qu’il a joué dans Al Quaïda pourrait bien avoir été moins important que ne l’avait indiqué la CIA. Le fait que l’information donnée par Zoubaydah ait été extraite sous la torture entacherait aussi la crédibilité de ce qu’il a dit.

Selon Zelikow, la réaction de la CIA « a été de produire d’autres rapports disséminés et de fournir des réponses générales et signalétiques écrites aux questions relatives au contexte et au caractère des interrogatoires… La CIA n’a pas révélé que des interrogatoires n’ont jamais été enregistrés ou qu’elle ait conservé des informations détaillées sous une forme ou une autre concernant les questions que lui a posées la Commission. »

S’ensuivirent d’autres requêtes relatives à des informations impliquant de plus en plus fréquemment des responsables gouvernementaux de niveau hiérarchique de plus en plus élevé. Zelikow rapporte que lors d’une réunion avec le directeur de la CIA de l’époque, George Tenet, le vice-président de la commission Lee Hamilton avait demandé « que la CIA fournisse des documents adéquats même si la Commission ne les a pas expressément réclamés. » Tenet n’avait fait aucune mention de cassettes vidéo.

Il est possible, pour ne pas dire probable, qu’au moins quelques membres de la commission étaient au courant de l’existence de ces cassettes mais qu’ils ne les avaient pas officiellement réclamées pour les visionner parce que leur existence était un secret si soigneusement gardé. Dans tous les cas, Zelikow allègue que la Commission était à tel point excédée par le blocage de la CIA qu’elle avait menacé de rendre le conflit public.

« La Commission plénière avait considéré cette question lors d’une réunion le 5 janvier 2004 et avait décidé que les réponses données par la CIA étaient insuffisantes, » écrit Zelikow. « Elle avait chargé le personnel de préparer une lettre aux responsables gouvernementaux, lettre qui rendrait le conflit public. Il y eut alors des discussions entre Hamilton et le conseiller de la Maison Blanche, Alberto Gonzales, et plusieurs réunions entre les avocats de la CIA et les membres de la Commission. »

Manifestement, ces discussions avec Gonzales ont résulté en une sorte d’accord afin de contenir le conflit. Toutefois, elles n’ont entraîné aucune amélioration sensible dans l’information fournie à la Commission.

Zelikow cite une note datée du 15 janvier 2004 et adressée à Gonzales, au conseiller général de la CIA, Scott Muller, et au sous-secrétaire à la Défense, Steve Cambone, disant que la Commission était « prête à travailler de manière créative avec vous sur tous les sujets qui nous permettent d’aider la communauté du renseignement lors des contre-interrogatoires des conspirateurs sur de nombreux détails critiques, en clarifiant pour nous ce que les conspirateurs disent vraiment et en nous permettant d’évaluer la crédibilité de ces réponses. »

Une autre réunion s’était tenue avec Hamilton et Gonzales, Tenet, le secrétaire à la Défense, Donald Rumsfeld et le sous procureur général adjoint, service criminel, Christ Wray.

« Durant toutes les réunions tenues en 2004, aucun des responsables gouvernementaux n’avait fait allusion à l’existence d’enregistrements des interrogatoires ou à des informations supplémentaires que le gouvernement posséderait et qui répondraient aux demandes formulées par la Commission, » rapporte Zelikow.

Dans le texte même de son rapport, la Commission avait dû reconnaître qu’au moins deux chapitres du rapport se basent fortement sur des informations recueillies dans des rapports d’interrogatoires de la CIA et bien que la Commission n’ait jamais eu accès aux transcriptions ni aux enregistrements vidéo.

Alors que les enregistrements ont probablement été cachés et détruits plus tard dans le but de camoufler la torture de Zoubaydah et d’al-Rahim al-Nashiri, un autre mobile a bien pu être celui de détruire les preuves de ce que ces prisonniers et notamment Zoubaydah ont vraiment dit. Zoubaydah aurait cité comme contacts plusieurs membres haut placés de la monarchie saoudienne et une personnalité influente du renseignement pakistanais.

Zelikow fait allusion à ce fait en écrivant, « Plus tard dans son enquête et réagissant à des allégations faites par la presse qu’Abou Zoubaydah avait fait allusion à un prince saoudien lors de son interrogatoire, la Commission a demandé ‘quelles étaient les informations dont disposait la CIA’ si de telles affirmations avaient été faites lors des interrogatoires de Zoubaydah… Nous ne pouvons trouver trace d’une réponse donnée par la CIA. »

Cette non-réponse est extrêmement significative vu qu’à la fois la monarchie saoudienne et les services de renseignement pakistanais entretiennent des liens étroits avec l’appareil d’Etat américain, y compris la CIA et le gouvernement Bush. Le fait qu’une personnalité de haut rang d’Al Quaïda ait cité ces individus est un indice supplémentaire que les attentats du 11 septembre aient pu se produire alors que des sections du gouvernement américain en avaient connaissance voire peut-être même y ont prêté assistance.

D’autres rapports, y compris celui fait par Gerald Posner dans son livre Why America Slept et James Risen dans son livre State of War, affirment que Zoubaydah a communiqué des numéros de téléphone personnels de princes saoudiens et qu’il possédait des cartes de crédit de comptes bancaires saoudiens que seul l’Etat saoudien a pu avoir autorisés. Posner note que les quatre responsables nommés par Zoubaydah sont tous morts peu de temps après l’interrogatoire. Les relevés des cartes de crédit ont disparu.

Finalement, selon Zelikow, le directeur adjoint du service de renseignement a déclaré le 29 juin 2004 à la Commission que la CIA « a entrepris et achevé toutes les démarches convenables nécessaires pour trouver les documents dans sa possession, sous sa garde ou répondant » aux demandes formelles de la Commission et « a fourni ou a rendu disponible pour examen » tous ces documents. Ceci n’est pourtant pas exact.

Zelikow conclut son mémo en faisant remarquer que le fait de cacher des enregistrements pourrait être une violation des lois fédérales, ainsi que d’une loi qui fait un délit du camouflage d’un « fait matériel » ou de « toute déclaration matériellement fausse » dans une « enquête ou révision » menée sous l’autorité du Congrès ou de la branche exécutive du gouvernement.

L’intégralité du mémo de Zelikow est disponible sur le site web du New York Times.

(Article original paru le 24 décembre 2007)


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