Le président des États-Unis, George Bush,
s'est exprimé devant la Knesset [assemblée] israélienne jeudi, axant ses
remarques sur l'alliance de Washington avec l'Etat sioniste dans la
« lutte contre le terrorisme et l'extrémisme » et déclarant qu'Israël
était une « patrie pour le peuple élu ».
Le président américain, effectuant une visite
de trois jours qui coïncidait avec le 60e anniversaire d'Israël, n'a fait
qu'une vague allusion au peuple palestinien, évoquant un Etat palestinien —
dans 60 ans. Il n'a fait aucune proposition pour faire avancer le
« processus de paix » israélo-palestinien.
Au contraire, Bush a profité de son discours
pour lancer une attaque à peine déguisée contre le sénateur Barrack Obama, le
favori dans la course à l'investiture démocrate pour l'élection présidentielle,
en comparant l'appel à des négociations avec l'Iran et la Syrie aux
« tentatives d'apaisement » des nazis dans les années 30.
Trois députés israéliens d'origine arabe ont
été expulsés de la chambre au début du discours de Bush après avoir déployé une
banderole où il était écrit, « We shall overcome [Nous vaincrons] »
et montré des photos d'enfants palestiniens et irakiens assassinés.
Parallèlement, deux membres de droite de la
Knesset sont sortis avec fracas pour protester lorsque le premier ministre
Ehoud Olmert a fait référence dans ses remarques introductives à une
« solution à deux Etats » au problème israélo-palestinien, une
remarque qui, d'après les médias, a été accueillie par un silence général
ponctué de rires nerveux.
Au moment même où Bush et Olmert parlaient, le
gouvernement israélien montrait la fausseté de sa supposée recherche de paix en
continuant son offensive brutale contre la bande de Gaza et en bouclant tous
les territoires palestiniens.
Israël assiège Gaza, la zone la plus densément
peuplée du monde, tentant d'affamer les Palestiniens jusqu'à ce qu'ils se
soumettent. Ce châtiment collectif cruel et illégal est sensé être en
représailles aux tirs de roquettes contre Israël qui ont tué 15 personnes en
huit ans. Seul le ravitaillement en produits de première nécessité peut
parvenir à Gaza et même celui-ci a été complètement arrêté en janvier. Les
réductions continues des réserves de carburant de 70 pour cent ont entraîné des
coupures d'électricité et d'eau courante, le rejet chaque jour de 40 millions
de litres d'eaux usées sur les plages de Gaza et l'amoncellement de tonnes de
déchets dans les rues. La puanteur y est accablante.
Plus de 80 pour cent de la population de Gaza
dépend de l'assistance humanitaire, l'aide alimentaire des Nations unies
nourrit près de 1,1 million de personnes sur une population de 1,4 million.
Mais même celle-ci est menacée, l'UNRWA [UN's Relief and Work Agency – Office
de secours et de travaux des Nations unies] ayant été forcé d'arrêter ses
distributions pendant plusieurs jours le mois dernier, après que ses véhicules
ont manqué de carburant. Maintenant encore, ses opérations ne tiennent qu'à un
fil.
Selon un rapport de la Banque mondiale publié
le mois dernier, le taux de Palestiniens vivant en situation de « grande
pauvreté » est passé de 21,6 pour cent en 1998 à 35 pour cent en 2006. Le
taux de chômage officiel était de 29 pour cent avant les fermetures qui ont
entraîné l'arrêt de 95 pour cent de l'industrie à Gaza, ainsi le chômage et la
grande pauvreté – définie comme l'incapacité à répondre aux besoins humains de
consommation de base – sont « certainement plus élevés ». La Banque mondiale
estime que sans les apports financiers de l'étranger et l'aide alimentaire de
l'ONU, le taux de grande pauvreté à Gaza atteindrait près de 67 pour cent.
En même temps, Israël a mené une guerre sans
répit contre la bande de Gaza, assassinant ses opposants et tuant des centaines
de Palestiniens, dont beaucoup de civils et d'enfants, en blessant beaucoup
plus et démolissant leurs foyers.
La Banque mondiale décrit une situation à
peine meilleure, et qui ne peut qu’empirer, en Cisjordanie. Là-bas, le
régime fantoche à la solde des États-Unis, l'Autorité palestinienne, dirigée
par Mahmoud Abbas contrôle une entité tronquée : 40 pour cent en ont été
confisqués pour des colonies, actuelles ou en projet, qui abritent actuellement
450 000 israéliens, avec des postes avancés, des routes, des zones
militaires exclusives, des limites de communes et des juridictions coloniales
régionales. Ces mesures ont découpé la Cisjordanie en une série de cantons
isolés, séparés de Jérusalem Est, cœur de la Cisjordanie et capitale théorique
d’un Etat palestinien, tandis que ses nappes phréatiques sont utilisées pour
arroser les pelouses des colons et remplir leurs piscines, privant les
Palestiniens de leurs ressources en eau déjà limitées.
Les Palestiniens sans autorisation spéciale
sont exclus des principales régions agricoles de la vallée du Jourdain, et les
producteurs sont isolés de leur marché à Jérusalem Est. Le mur qui sépare
Israël de la Cisjordanie et au-delà duquel les Palestiniens ne peuvent se
rendre, est situé profondément à l'intérieur du territoire de l'Autorité
palestinienne, déplaçant et appauvrissant encore de nombreux Palestiniens, en
particulier à Jérusalem Est, qui doivent faire un choix entre leur foyer ou
leur lieu de travail.
Les cinq points d'accès commerciaux à Israël
vont devoir utiliser, comme à Gaza, un système de transfert « dos à
dos » du fret, qui n’est pas à même de transporter les 95 pour cent du
commerce palestinien qui traversent Israël ou lui sont destinés sans de longs
délais et des coûts supplémentaires. Cela va perturber davantage l'économie
cisjordanienne et plonger encore plus de Palestiniens en situation de grande
pauvreté.
Au total, le PNB des territoires occupés a
baissé de 14 pour cent depuis son pic de 1999. Mais comme leur population
s'accroît de quatre pour cent par an, le PNB par habitant a rapidement chuté à
40 pour cent en dessous de ce pic. Quatre millions de Palestiniens en
Cisjordanie et à Gaza n'ont survécu que grâce aux prêts, aux apports financiers
des membres de leurs familles travaillant à l'étranger et à l'aide
internationale.
Ces crimes n’ont provoqué aucun commentaire,
sans même parler de critiques, de la part des dirigeants mondiaux. Un ancien
président des États-Unis, Jimmy Carter, fut l'un des rares à condamner ce qui
se passait à Gaza et à l'appeler par son vrai nom. Il a soutenu que « Le
monde ne doit pas rester passif alors que des innocents sont traités
cruellement. Il est temps que des voix fortes en Europe, aux États-Unis,
en Israël et ailleurs s’élèvent et condamnent la tragédie humanitaire qui
s'abat sur le peuple palestinien. »
Naturellement, son appel est tombé dans
l'oreille d'un sourd.
La Nakba
et la création de la diaspora palestinienne
Les crimes commis contre les Palestiniens
commencèrent au moment des préparatifs de la création de l'Etat israélien en
1948. Alors qu'Israël célèbre son 60e anniversaire, les Palestiniens
commémorent « la catastrophe », ou al-Nakba pour utiliser le
terme arabe. En Cisjordanie, il y a eu des rassemblements au son des sirènes
d'alarme et le lancement de milliers de ballons noirs, tandis qu'à Gaza, le
Hamas organisait une marche en direction d'un poste frontière israélien fermé.
La Nakba a entraîné l'exil forcé et la
dispersion de la moitié de la population palestinienne ainsi que
l'expropriation de leurs biens. C'était un exemple brutal de nettoyage
ethnique.
À l'origine majoritaires en Palestine, ils
sont devenus une minorité, persécutés dans leur propre pays, réduits à mener
une existence misérable dans les camps de réfugiés ou à chercher l'exil à
l'étranger. Le mouvement sioniste ne proposait pas la lutte pour les droits
démocratiques et sociaux des Juifs comme solution à la persécution des Juifs
d'Europe et à la plus grande tragédie du 20e siècle, l'Holocauste, il proposait
leur existence séparée dans un nouvel Etat, Israël. Cet Etat allait être établi
sur une partie du patchwork d'Etats que la Grande-Bretagne et la France avaient
créé à partir du vieil empire ottoman après la Première Guerre mondiale.
À la suite de la Deuxième Guerre mondiale, la
création d'Israël était considérée avec compassion par des millions de gens
dans le monde, horrifiés par la catastrophe qui s'était abattue sur les Juifs.
Cela, ainsi que les calculs politiques des grandes puissances, amena les Nations
unies à voter la partition de la Palestine en deux Etats en 1947. Elle prit
effet le 15 mai 1948, lorsque le mandat que la Grande-Bretagne avait reçu de la
Société des nations pour diriger le pays expira : un Etat pour les Juifs,
dont la moitié de la population serait palestinienne, et un pour les
Palestiniens. Ce serait un état théocratique basé sur l'exclusivité religieuse.
L'établissement d'Israël et la guerre qui s'en
suivit entraînèrent l'expulsion forcée de leur foyer de 750 000
Palestiniens, alors que les Israéliens s'arrogeaient 80 pour cent du pays
contrôlé par les Anglais durant le Mandat. Le roi Abdullah de Transjordanie,
l'Etat client de la Grande-Bretagne, prit le contrôle de la Cisjordanie, et
l'Égypte prit le contrôle de Gaza, les deux régions devinrent un lieu d'accueil
pour beaucoup de réfugiés expulsés Israël.
Ce fut l'une des plus importantes migrations
forcées de l'histoire moderne. Beaucoup furent expulsés sous la menace des
armes, d'autres s’enfuirent par peur. Israël présente ces expulsions, ainsi que
quelques massacres occasionnels commis par des groupes terroristes sionistes,
comme celui de Deir Yassin en avril 1948, comme des représailles contre les
actions hostiles des Palestiniens et contre la guerre qui éclata le 15 mai 1948
lorsque les voisins arabes d'Israël attaquèrent l'état naissant.
Des historiens israéliens ont démontré que ce
n'était pas le cas. The Ethnic Cleansing of Palestine [Le nettoyage
ethnique de la Palestine, ouvrage non traduit] d'Ilan Pappe explique que près
de 300 000 expulsions eurent lieu avant la guerre ; qu'elles étaient
délibérées et conçues comme un moyen de provoquer une guerre qui permettrait à
Israël d'acquérir plus de territoires que ce que l'ONU lui accordait. Les
dirigeants sionistes déclarèrent ouvertement en mars 1948 qu'ils s'empareraient
des terres et expulseraient la population indigène par la force suivant leur
tristement célèbre plan Dalet.
Ceux qui fuirent ne furent pas autorisés à
retourner en Israël. Ils devinrent des réfugiés, vivant dans des villes de
tentes et des taudis en Jordanie, en Syrie et au Liban, et se dispersèrent de
par le monde. D'après l'ONU, les premiers réfugiés et leurs descendants sont
maintenant au nombre de quatre millions.
Expulser les Palestiniens, s'emparer de leurs
terres sans compensation, et révoquer leur citoyenneté et leur droit au retour constituaient
les conditions préalables fondamentales pour l'établissement d'une majorité
juive. De plus, Israël chercha immédiatement à encourager l'immigration et
promulgua la Loi sur le retour en 1950 et la Loi sur la citoyenneté en 1952,
accordant à chaque Juif dans le monde le droit à la citoyenneté immédiate dès
son arrivée.
Les expropriations continuèrent après 1948.
Parmi les Palestiniens restés en Israël, beaucoup furent expulsés de leur foyer
et réinstallés ailleurs en Israël. Ils sont toujours des citoyens de seconde
zone et jusque dans les années 60 ils étaient soumis aux lois militaires
établies par la Grande-Bretagne à l'époque du Mandat.
Les Arabes vivant en Israël, qui forment
maintenant 20 pour cent de la population, sont confrontés à une discrimination
constante. Ils n'ont pas le droit d'épouser des Palestiniens hors d'Israël et
d'amener leurs conjoints vivre avec eux. Il leur est quasiment impossible de
trouver des emplois dans les industries qualifiées de comme
« stratégiques », comme l'électricité et l'eau, ou de louer des
terres au Fond national juif, et ce malgré une décision de la Cour suprême en
leur faveur. Leurs cités, leurs villes et leurs villages perçoivent moins
d'aides financières du budget national.
Israël n'a pu survivre que parce qu'elle sert
d'Etat garnison recevant le soutien des grandes puissances – d'abord de la
France et de la Grande-Bretagne, puis des États-Unis. Washington utilise Israël
à ses propres fins géopolitiques, pour contrôler cette région riche en pétrole.
Du point de vue des États-Unis, les Palestiniens, et la classe ouvrière et les
pauvres des campagnes arabes dans leur ensemble, constituent une menace. Israël
a ainsi toujours eu les mains libres pour étendre son territoire et pour
réprimer les Palestiniens.
En 1967, après la défaite des Etats arabes
dans la Guerre de juin, Israël devint le maître de Jérusalem Est, de la
Cisjordanie et de la bande de Gaza, contrôlant ainsi toute la Palestine, ainsi
que le plateau du Golan syrien et des parties de l'Égypte, ce qui entraîna un
autre transfert de population. Environ 250 000 réfugiés parmi ceux qui
s'étaient établis dans les camps de Cisjordanie et de Gaza en 1948,
s'enfuirent. Durant les années qui suivirent, comme les conditions se
détérioraient, des milliers quittèrent les territoires occupés pour étudier et
chercher du travail à l'étranger, en particulier dans le Golfe. On refuse
maintenant à tous le droit de rentrer dans leur pays. Selon des sources
israéliennes, le nombre de Palestiniens qui ont quitté la Cisjordanie et Gaza
entre 1967 et 2003 était de 414 800.
Aujourd'hui, les premiers réfugiés et leurs
descendants, ainsi que ceux qui le sont devenus après la guerre de 1967, recensés
par l'UNRWA, sont au nombre de 4,5 millions dans les territoires occupés, au
Liban, en Syrie et en Jordanie. Mais, il faut ajouter aux réfugiés recensés,
5,2 millions de Palestiniens vivants à l'étranger, près de 3 millions d'entre
eux en Jordanie, 1,7 millions dans les autres pays arabes, et 600 000
autres en Europe et les Amériques.
L'échec
du mouvement national palestinien
Cette répression terrible a produit un
mouvement politique de masse pour la libération nationale des Palestiniens.
Mais l'expérience de ce projet national s'est révélée être une impasse.
Pendant une longue période, la libération de
la Palestine était conçue comme participant d’un projet plus grand du
nationalisme arabe qui mettrait fin à la domination impérialiste dans la
région, sous la direction du président égyptien, Gamal Abdul Nasser. Mais après
les défaites de 1967 et 1973, les prétentions des Etats arabes, Syrie, Jordanie
et Égypte, à être les soutiens officiels de la lutte palestinienne contre
Israël se sont estompées.
En 1968, Yasser Arafat et sa faction, le
Fatah, assumèrent un rôle prépondérant dans l'Organisation pour la libération
de la Palestine (OLP) et cherchèrent à mener leur propre lutte indépendante.
Bien que populaire et radical, c'était fondamentalement un mouvement bourgeois.
Son objectif était un état démocratique séculier – mais un état capitaliste où
la bourgeoisie palestinienne serait libre d'exploiter sa propre classe
ouvrière.
En dépit de son héroïsme, l'OLP était
incapable de mener un combat victorieux contre Israël et ses soutiens
impérialistes.
Arafat chercha le soutien d'Etats arabes comme
la Jordanie et la Syrie, tentant d'utiliser leurs propres conflits avec Israël
ainsi que la lutte d'influence globale entre l'Union Soviétique et les
États-Unis pour disposer d'une marge de manœuvre et d'un degré d'indépendance.
Plusieurs Etats arabes avaient leurs propres factions au sein de l'OLP.
Mais, bien que les dirigeants arabes aient été
prêts, à l'occasion, à apporter un soutien limité aux Palestiniens pour gagner
un peu d'opinions favorables pour leurs régimes corrompus et pour faire
pression sur leur rival israélien, leur principal souci était de maintenir
leurs relations commerciales avec les puissances impérialistes auxquelles ils
restaient subordonnés. En premier lieu, ils ne voulaient pas trop contrarier
Washington et ils étaient déterminés à éviter la contagion de la discorde et de
la révolution dans leur propre classe ouvrière et leur paysannerie.
Les uns après les autres, les soi-disant amis
d'Arafat le trahirent, toujours avec des conséquences tragiques. Durant vingt
ans, l'OLP reçut des coups cruels et
répétés de la part des régimes arabes,
notamment le massacre de Palestiniens par la Jordanie lors du « Septembre
noir » de 1970, la complicité de la Syrie dans le massacre commis par la
Phalange libanaise aux camps de Karantina et Tel al Zaatar en 1975 et les
massacres de Sabra et Shatilla au Liban en 1982.
Dans le contexte des derniers jours de l'Union
Soviétique et de la tendance à la restauration du capitalisme, la bureaucratie
stalinienne sous Michael Gorbatchev s'étant déclarée en faveur d'une solution
politique au conflit avec Israël et ayant promis de réduire ses fournitures
d'armes à ses clients du Moyen-Orient, les régimes arabes (à la seule exception
de la Libye) s’alignèrent sur Washington contre l'Irak en 1991.
En décembre 1988, Arafat signa une déclaration
dictée par le département d'Etat américain, garantissant la sécurité d'Israël,
acceptant que la paix avec Israël soit « une stratégie et non une
manoeuvre dilatoire », et renonçant au « terrorisme ». En 1993,
il signa les Accords d'Oslo – renonçant officiellement à l'objectif initial de
l'OLP de libérer la totalité de la Palestine de 1948 et acceptant finalement la
création d'un Etat palestinien sur seulement 22 pour cent du territoire, aux
côtés de l'Etat Israël, et dont l’Etat palestinien promettait de défendre la
sécurité.
Une fois que l'Autorité palestinienne (AP) a
été établie conformément aux accords d'Oslo, la véritable nature de classe de
l'OLP s’est révélée clairement. L'AP est devenue le moyen pour la bourgeoisie
palestinienne d'exploiter la classe ouvrière et de devenir fabuleusement riche.
Elle disposait du plus grand nombre de policiers par habitant au monde. Le
Fatah a été associé à la corruption, au gâchis et à l'inefficacité au point que
même Arafat ne pouvait le cacher.
Alors qu'Arafat renâclait quant à lui à
accéder aux exigences les plus draconiennes de Washington, son successeur,
Mahmoud Abbas, au nom de la couche de millionnaires corrompus qu'il
représente, n'a pas de tels scrupules.
Le Hamas a été le bénéficiaire politique de
cette situation : il a gagné du soutien non seulement en raison de
l'incapacité de l'OLP à mettre fin à l'oppression nationale des Palestiniens et
à sa corruption, mais aussi à cause de l'incapacité de l'AP à résoudre les
problèmes sociaux les plus pressants. S'il y avait les moindres services
sociaux dans l'AP, ils étaient surtout fournis par le Hamas, grâce aux
contributions des royaumes arabes.
Le processus d'Oslo qui avait démarré en
fanfare en 1993 s'est terminé par le confinement des Palestiniens dans des
quasi-camps de prisonniers. Cela démontre que l'OLP, dans sa perspective de
former un nouvel Etat capitaliste par une nouvelle division du Moyen-Orient,
s'est montrée incapable de réaliser les espoirs de liberté et d'égalité des
travailleurs palestiniens et des masses opprimées. Le Hamas ne propose aucune
alternative, avec son appel à la création d'un Etat islamique sur les mêmes
bases économiques. Sa montée en puissance représente un développement
rétrograde dans le mouvement national palestinien – le prix payé pour l'échec
politique de l'OLP. Sa perspective n'est pas séculière, c'est celle d'un Etat
religieux qui imite celui des extrémistes sionistes, lesquels prétendent faire
de la Palestine tout entière un Etat juif sans place pour les autres peuples.
Une
nouvelle perspective
Aucun mouvement national n'a été plus radical
que l'OLP d'Arafat. Mais cela ne fait que souligner l'importance de sa désintégration.
La cause ne doit pas en être cherchée dans les trahisons de dirigeants
particuliers, mais dans l'échec d'une perspective historique selon laquelle la
bourgeoisie nationale serait capable d'assurer la libération des masses arabes.
Il n'est possible de comprendre le sort du
mouvement national palestinien que du point de vue de la théorie de la
révolution permanente de Léon Trotsky, qui ne partait pas du niveau économique
ou des relations de classes internes d'un Etat donné, mais plutôt de la lutte des
classes mondiale et du développement d'une économie capitaliste internationale.
Dans les pays arriérés et anciennes colonies,
cette perspective a démontré que la bourgeoisie – subordonnée aux grandes
puissances impérialistes qui dominaient l'économie mondiale, et craignant sa
propre classe ouvrière – n'était plus en position de faire sa propre révolution
démocratique, ou de mettre fin à la domination impérialiste.
Cette tâche ne pouvait être menée à bien que
par la mobilisation politique de la classe ouvrière, indépendante et soutenue
par les masses paysannes opprimées, dans la lutte pour le pouvoir. Le caractère
permanent de cette révolution tient en premier lieu au fait que la classe
ouvrière, ayant pris le pouvoir, ne pourrait se limiter à des tâches démocratiques,
mais serait obligée de prendre des mesures à caractère socialiste. En second
lieu, les obstacles à la construction du socialisme imposés par le faible
niveau de développement économique ne peuvent être franchis que par le
développement de la révolution dans les pays capitalistes avancés, qui
atteindra son apogée avec la transformation socialiste du monde entier.
Pour qu'il soit mis fin à six décennies de
querelles sanglantes, la tâche qui s'impose aux travailleurs arabes et juifs
consiste à forger une lutte commune contre toutes les élites bourgeoises de la
région soutenues par l'impérialisme et pour la construction d'une société
socialiste qui ferait partie de la lutte pour les États-Unis socialistes du
Moyen-Orient. Cela supprimerait les frontières artificielles séparant les
peuples et les économies de la région, et permettrait aux vastes ressources
naturelles et humaines de la région d'être utilisées pour répondre aux besoins
essentiels de tous ses habitants.