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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Réunion à Paris pour commémorer la vie et l’œuvre de Keerthi Balasuriya

Par notre correspondant
27 mars 2008

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Le Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI) a tenu une réunion à Paris le 16 mars pour commémorer le vingtième anniversaire de la mort, à l’âge de 39 ans, du dirigeant trotskyste sri lankais Keerthi Balasuriya.

Ont pris la parole lors de cette réunion Chris Marsden du Parti de l’égalité socialiste (PES) britannique, Amuthan, rédacteur en chef de la page tamoule du World Socialist Web Site et Peter Schwarz, secrétaire du CIQI et dirigeant du PES allemand.

Athyan, un dirigeant du CIQI de la communauté tamoule de Paris, qui présidait la réunion a dit que la lutte de Keerthi est une source d’inspiration pour les plus jeunes générations dans le monde entier et a donné pour exemple le jeune cadre trotskyste tamoul, Raveenthiranathan Senthil Ravee, qui est mort tragiquement l’année dernière dans un accident de voiture à l’âge de 32 ans.

Marsden a exposé en détail le rôle des trotskystes du Parti bolchevique léniniste de l’Inde, qui se basant sur la théorie de la révolution permanente développée par Trotsky avait conduit la lutte, dans les années 40, pour l’émancipation du Sri Lanka (qui s’appelait alors le Ceylan) du colonialisme britannique. Sa section du Ceylan, le Parti Lanka Sama Samaja (LSSP) s’était battu pour que cette lutte soit menée par la classe ouvrière par-delà les divisions ethniques et religieuses, avec la perspective de renverser toute forme d’oppression et de construire le socialisme. Leur lutte contre la constitution raciste, imposée par l’impérialisme britannique, qui privait la minorité tamoule de sa citoyenneté et de la reconnaissance officielle de sa langue, leur fit prendre la tête de luttes de masse, notamment de la grève générale (hartal) de 1953.

 « La tragédie, a dit Marsden, c’est que ceci allait s’avérer être le point culminant de la lutte politique, basée sur des principes, du LSSP. » Par la suite le parti s’adapta au cadre parlementaire, au nationalisme et au communautarisme, un processus lié au développement de tendances centristes et révisionnistes au sein de la Quatrième Internationale, conduites par Michel Pablo et Ernest Mandel.

Marsden a rappelé la série de trahisons de la direction du LSSP, trahisons responsables de la séparation des travailleurs et paysans tamouls de la majorité cingalaise de la population et la descente dans les 25 années de guerre civile continue qui débuta par les pogroms de 1983.

« Ce n’est qu’à la lumière de ce développement que l’on peut réellement apprécier la signification de Keerthi Balasuriya et d’autres qui restèrent fidèles au trotskysme », a dit Marsden. « Ils étaient peu nombreux, mais la position qu’ils adoptèrent fut d’une importance inestimable et d’une portée historique mondiale… Sans leur prise de position politique, la réputation du socialisme et du trotskysme aurait par la suite et à jamais été victime du poids de la trahison politique du LSSP. »

« Sur tous les fronts, Keerthi chercha à défendre l’indépendance politique et les intérêts historiques de la classe ouvrière », a expliqué Marsden. « Quand la crise politique au sein de la section britannique d’alors du CIQI, le Workers Revolutionary Party, éclata en 1985, il joua un rôle crucial dans la lutte conduite par le Comité international pour restaurer et renouveler la perspective du trotskysme. »

Avant sa mort tragique par infarctus en décembre 1987, Keerthi était engagé dans un travail programmatique intensif cherchant à comprendre les implications politiques du développement sans précédent de la production mondialisée dans la perspective de la révolution socialiste et sur cette base, « pour faire le bilan de l’expérience historique de la classe ouvrière avec les mouvements nationalistes bourgeois et les Etats dits indépendants crées sous les auspices de la bourgeoisie nationale. »

« Par ces discussions, le CIQI est arrivé à la conclusion que les mouvements séparatistes et communautaristes de l’époque actuelle représentent une réponse de la part de la bourgeoisie régionale, basée sur l’ethnie, pour se libérer des Etats centralisés existants, mais uniquement pour se garantir son propre droit à l’exploitation de la classe ouvrière et des ressources naturelles essentielles et ainsi avoir ses propres relations avec les puissances majeures et les entreprises transnationales.

« De tels mouvements n’ont pas de contenu authentiquement démocratique ou anti-impérialiste. Ils sont l’antithèse de la lutte de la classe ouvrière pour s’unifier internationalement et mettre fin à la division du monde en Etats-nations capitalistes antagonistes. C’est uniquement sur cette base que l’on peut mettre fin à l’oppression impérialiste. »

Ainsi, a conclu Marsden, la vie et l’oeuvre de Keerthi font à présent « partie intégrante du corpus socialiste révolutionnaire, c'est-à-dire le programme et la perspective essentiels historiquement développés pour libérer l’humanité du joug de l’oppression de classe. »

Amuthan a parlé de l’époque où, en tant que réfugié des pogroms anti-tamouls et fortement influencé par les concepts de libération nationale, mais sans illusion dans les partis nationalistes bourgeois, il avait rencontré Keerthi pour la première fois lors d’une université d’été internationale du CIQI en Allemagne. « J’étais nouvellement entré au parti. Le tout premier jour, Keerthi était venu vers moi au moment du déjeuner… Notre discussion avait porté sur la situation politique au Sri Lanka et en Inde et le caractère des groupes nationaux. Les deux pays avaient accepté de signer l’Accord indo-sri lankais en 1987 qui avait eu un énorme impact politique sur le sous-continent indien. Le caractère réactionnaire de la bourgeoisie nationale des pays sous-développés apparut clairement une fois de plus. »

Amuthan a rappelé qu’à cette époque le CIQI n’était pas très connu parmi les Tamouls. « Maintenant, 20 ans plus tard, nous avons établi une autorité politique solide pour une perspective socialiste internationale parmi la communauté tamoule européenne. »

Tous les groupes nationalistes tamouls, certains se réclamant du socialisme, étaient d’accord avec la signature de l’Accord indo-sri lankais: « Cela eut pour conséquence une confusion politique énorme parmi la population tamoule d’Europe. Des sections de jeunes qui étaient contre ce pacte quittèrent ces mouvements. Mais il n’existait pas de perspective politique alternative. »

Keerthi « expliqua le caractère de classes de ces mouvements et leur relation à la classe ouvrière, » a dit Amuthan. « Il fit remarquer que leur capitulation devant le gouvernement indien était la conséquence logique de leur perspective capitaliste. Ils comptaient plus sur l’aide de la bourgeoisie indienne que des masses tamoules. Leur perspective se borne à obtenir le droit exclusif d’exploiter les travailleurs et les masses. C’est le contraire même d’une lutte authentique pour les droits démocratiques. »

 « Il insistait pour dire qu’on ne pouvait atteindre la réalisation des droits démocratiques que par une révolution socialiste et expliquait les perspectives de la section sri lankaise du CIQI. »

Amuthan a dit à l’auditoire rassemblé que Keerthi, un mois avant sa mort, avait « travaillé en étroite collaboration avec ses camarades internationaux sur la déclaration du Comité international sur l’Accord indo-sri lankais ». La version tamoule de « La situation au Sri Lanka et les tâches politiques de la RCL » (Revolutionary Communist League, prédécesseur de l’actuelle section sri lankaise du CIQI, le Socialist Equality Party) fut l’un des documents les plus débattus parmi les jeunes les plus politiquement conscients de la fin des années 1980. En Europe, les sections du Comité international gagnèrent un nombre important d’adhérents et de sympathisants tamouls.

La nature des Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE), groupe nationaliste bourgeois menant une lutte armée pour un Etat séparé dans le nord tamoul de l’île, est apparu sous son vrai jour : « La transformation du LTTE de "combattants pour la liberté" comme ils le revendiquaient, en une élite privilégiée est apparue avec clarté lors de la signature de l’accord de cessez-le-feu de 2002. Le développement des affaires et les projets d’investissements sont devenus le programme politique de ses représentants et intermédiaires, ce qui a eu pour conséquence que la communauté en exil lui a retiré son soutien. »

Amuthan a dit que le nationalisme tamoul perdait rapidement du terrain dans les pays occidentaux. « La guerre en Irak, le chômage, les inégalités sociales et la lutte des étudiants et des travailleurs dans les pays où ils vivent ont eu un impact sur leur réflexion politique. Ils ne considèrent plus que la solution aux aspirations démocratiques des masses tamoules puisse se réaliser par la conception étroite de créer un minuscule Etat capitaliste dans les régions tamoules. »

Peter Schwarz a ensuite pris la parole, « Keerthi a accompli son travail politique à une époque où les trahisons combinées de la social-démocratie, du stalinisme et du pablisme pesaient lourd sur la classe ouvrière et les cadres trotskystes du Comité international restaient relativement isolés.

 « Mais il était convaincu que les contradictions inhérentes au capitalisme mondial provoqueraient une nouvelle période révolutionnaire de luttes de masse et que la destinée de ces luttes dépendrait entièrement de l’existence ou non d’une direction révolutionnaire, formée et blindée dans les leçons de la lutte contre le pablisme. »

 « Les deux années séparant la scission du WRP et la mort prématurée de Keerthi le 18 décembre 1987 furent sans aucun doute les plus fructueuses de sa vie politique. Il fit une contribution substantielle aux centaines de pages de documents produits par le Comité international pendant et après la scission…Ces documents ont posé les fondations de l’immense travail théorique, politique et organisationnel accompli par le Comité international durant les deux dernières décennies, notamment en ce qui concerne le développement du World Socialist Web Site comme voix authentique du marxisme international.

La crise insoluble du système financier mondial déclenchée par le resserrement du crédit des subprimes, la débâcle de l’impérialisme américain en Irak et la bataille pour l’hégémonie mondiale entre les grandes puissances « conduiront inévitablement à de nouvelles guerres et à une reprise des luttes de classes féroces, » a expliqué Schwarz. « Le camarade Keerthi a passé sa vie entière à préparer la classe ouvrière à ces luttes inévitables à venir. »

Il a rappelé à l’auditoire que nous célèbrerons bientôt le 40e anniversaire du soulèvement de mai-juin 1968 en France, « le plus grand mouvement révolutionnaire de la période d’après-guerre dans les pays capitalistes avancés… Ici en France, plus de 10 millions de travailleurs ont fait une grève générale que seule la trahison du Parti communiste stalinien a permis de maîtriser. »

Cela fait partie d’un mouvement massif qui a balayé le monde au début des années 1970. La contre offensive de la bourgeoisie a signifié l’abandon de « la politique économique keynésienne qui constituait la base du compromis social de la période d’après-guerre. Elle a levé la réglementation nationale en matière de finance et de commerce et ouvert les vannes du processus connu sous le nom de mondialisation. Cela s’est accompagné d’une attaque massive sur la classe ouvrière, incarnée par la destruction du syndicat des contrôleurs aériens PATCO par le président américain Ronald Reagan et la défaite de la grève des mineurs britanniques par le premier ministre britannique Margaret Thatcher. »

La riposte des vieilles organisations réformistes fut d’abandonner leurs précédentes tentatives d’organiser un compromis social dans le cadre de l’Etat-nation et d’imposer à la place « des attaques massives sur la classe ouvrière pour faire en sorte que leur bourgeoisie nationale conserve sa compétitivité sur le marché mondial. »

Quant aux régimes staliniens d’Europe de l’Est, à l’Union soviétique et à la Chine, « la mondialisation a révélé au grand jour la nature frauduleuse de leur revendication que le socialisme peut se construire dans un seul pays, dans le cadre d’un seul Etat-nation. »

 « La mondialisation et la fin de la Guerre froide ont révélé la faillite complète des organisations nationalistes petites-bourgeoises, » a poursuivi Schwarz. Privées de la possibilité de manœuvrer entre Moscou et Washington, « elles ont abandonné leurs prétentions anti-impérialistes et rivalisent pour obtenir le soutien de Washington ou de tout autre puissance impérialiste… Elles cherchent toutes à conclure un marché avec l’impérialisme, qui leur permette d’être des partenaires subalternes dans l’exploitation de "leur" propre classe ouvrière »  

Un petit Etat tamoul au nord du Sri Lanka « serait un outil au service des intrigues de l’impérialisme dans la région. Il ne peut y avoir de démocratie sur une telle base. »

Schwarz a mis en garde l’auditoire sur le fait que la politique étrangère agressive des Etats-Unis et l’augmentation des conflits et de la militarisation des grandes puissances rivales créait une situation ressemblant à celle qui avait conduit à la Première Guerre mondiale. « La question à présent est la suivante : L’impérialisme va-t-il plonger l’humanité dans une nouvelle guerre mondiale nucléaire probablement fatale, ou bien la classe ouvrière internationale va-t-elle empêcher cela en renversant le capitalisme et en construisant la société sur des fondations plus élevées, socialistes ? »

Il a attiré l’attention sur la résurgence de la lutte des classes dans toute l’Europe: « Mais qui va fournir une perspective à la classe ouvrière ? Les partis sociaux-démocrates, et les partis socialiste et communiste qui ne cessent de virer à droite depuis ces quarante dernières années ? Les syndicats qui trahissent les luttes, les unes après les autres, et qui agissent auprès des travailleurs comme les gendarmes de la direction ? Ou bien ceux qui, hier glorifiaient Mao Zedong, Yasser Arafat et les sandinistes et qui aujourd’hui glorifient Hugo Chavez et Eva Morales ? Y a-t-il quelqu’un qui pense sérieusement qu’un militaire comme Chavez qui donne aux masses quelques aides tirées des immenses revenus pétroliers du Venezuela, peut apporter une solution aux problèmes auxquels est confrontée la classe ouvrière internationale ?

 « Seul le Comité international de la Quatrième Internationale a une perspective, fermement ancrée sur une analyse de la situation mondiale et des expériences historiques du 20e siècle, » a dit Schwarz. « Nous luttons pour la mobilisation indépendante de la classe ouvrière sous la bannière de l’internationalisme socialiste. »

 « Honorer l’héritage de Keerthi, c’est éduquer les jeunes générations à l’histoire et aux enseignements tirés des expériences stratégiques de la classe ouvrière… les leçons et principes incarnés par le CIQI. »

(Article original anglais paru le 25 mars 2008)

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