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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Les élections européennes

Que cachent les tensions avec les Etats-Unis ?

Par Peter Schwarz
10 juin 2009

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Les élections européennes de ce weekend ont lieu dans un contexte de violentes tensions nationales et internationales. Les conflits de l’Allemagne, avec la France d’une part, et avec les Etats-Unis de l’autre, s’intensifient à tel point que les conflits nationaux au sein de l’Europe menacent de faire éclater l’Union européenne. 

Berlin et Washington accumulent les désaccords quant à la manière de gérer la crise financière et économique internationale. La chancelière allemande Angela Merkel a attaqué mardi le gouvernement américain avec une véhémence inhabituelle. Devant un auditoire de représentants économiques à Berlin, Merkel a déclaré qu’elle regardait « avec grand scepticisme » les pouvoirs cédés à la Réserve fédérale américaine en raison de la crise économique. Elle a aussi critiqué la banque centrale britannique, la Bank of England. La presse financière américaine et britannique a réagi avec indignation. Le Financial Times de Londres a publié à la une « Merkel moleste les banques centrales » [Merkel mauls central banks], tandis que le Wall Street Journal a qualifié d’« inhabituelle » la critique publique de Merkel.

Que se cache-t-il derrière ce conflit ?

Malgré ses effets négatifs, les milieux politiques dirigeants en Allemagne ont vu dans la crise financière mondiale l’occasion de renverser la suprématie de Wall Street et de la City. Malgré tous ses efforts, le centre financier de Francfort n’a jamais été en mesure de rivaliser sérieusement avec Londres et New York. La force de l’économie allemande est ses industries d’exportation, mais c’est justement ce secteur qui a été frappé par la crise des marchés financiers. Les fonds spéculatifs internationaux, qui ont fait l’achat de nombreuses compagnies allemandes, ont fini par rencontrer de plus en plus de résistance à leurs activités en Allemagne. Lorsque l’effondrement de Lehman Brothers entraîna à sa suite nombre de banques allemandes et plongea l’économie mondiale en récession, la conclusion qui fut tirée en Allemagne était claire : les Etats-Unis étaient responsables de la crise.

Mais tous les espoirs qui voyaient Washington adopter un rôle plus modeste en réponse à la crise et être plus enclin, sous la gouverne du nouveau président Barack Obama, à coopérer d’égal à égal avec les Européens ont été anéantis. Face à la crise, le capitalisme américain n’a que redoublé d’ardeur pour résoudre ses problèmes aux dépens du reste du monde.

Les montants faramineux que l’administration Obama a offerts à Wall Street ont détruit tous espoirs de réorganiser les marchés financiers et alimentent les craintes d’une inflation incontrôlable qui aurait des conséquences désastreuses pour les industries d’exportation allemandes. Ce sont ces craintes que Merkel exprimait lors de son discours à Berlin.

Elle a accusé les gouvernements de Washington et Londres d’injecter des billions de dollars dans leurs institutions financières avec l’intention de les ramener à leurs positions traditionnelles de pouvoir, c’est-à-dire comme elles étaient avant l’introduction de nouvelles régulations sur les marchés financiers internationaux. Elle a « très clairement » vu que les marchés financiers regagnant du pouvoir rendraient leurs réglementations plus difficiles et que cela constituait un danger. Merkel a ajouté que, « Tous ceux qui vont émerger en quelque sorte renforcés de cette crise vont tenter de résister à de futures contraintes. » Elle a noté avec inquiétude que les banques avaient déjà un choix remarquable d’occasions de spéculation, « notamment la gestion des crédits gouvernementaux », parce que les Etats ont dépensé tellement d’argent pour leur sauvetage.

Le Süddeutsche Zeitung a commenté que dans plusieurs capitales « il était de plus en plus évident que la crise financière avait été déclenchée par des distorsions sur le marché de l’immobilier aux Etats-Unis, mais que sa véritable origine était très différente : les années de politique monétaire trop généreuse, en particulier, par les Etats-Unis. »

Les gouvernements allemands et français, qui sont dans des situations similaires, réagissent à la pression américaine en cherchant à avancer, en étant de plus en plus agressifs, leurs propres intérêts impérialistes. Deux jours avant son discours à Berlin, la chancelière Merkel s’est jointe au président Sarkozy pour écrire un article intitulé « 10 thèses pour une Union européenne forte ». Le point fort de l’article affirmait que, « L’Europe doit jouer un rôle de premier plan dans le monde ».

Le ton anti-américain des thèses commence avec une analyse des causes de la crise financière et économique internationale. « Le libéralisme sans règles a échoué. Cet échec a conduit à la crise que nous affrontons aujourd’hui », déclare l’article. « Le modèle que nous voulons, c’est celui de l’économie de marché responsable, qui privilégie l’entrepreneur et le salarié sur le spéculateur, l’investissement de long terme sur le profit immédiat. »

Voici deux politiciens conservateurs qui profitent de relations étroites avec les plus hautes sphères du monde des affaires et qui ne peuvent, en aucun cas, être accusés d’avoir une quelconque sympathie pour le socialisme. Leur attaque sur le marché, la spéculation et le profit ne peut être comprise que comme une attaque sur le capitalisme américain.

Merkel et Sarkozy appellent à une « véritable régulation européenne dans le secteur financier » et à un « commerce mondial loyal basé sur la réciprocité ». Advenant un échec du cycle de Doha sur les négociations concernant le commerce mondial, ils menacent de faire bande à part en envisageant « des solutions européennes provisoires ».

Cela est suivi d’un engagement inconditionnel envers un rôle international plus important pour le capitalisme européen : « L’Europe doit être plus ambitieuse pour son industrie,  pour ses entreprises. Elle doit favoriser l’émergence d’entreprises européennes puissantes à l'échelle mondiale ; et nos politiques de renforcement de la compétitivité de l’industrie européenne doivent y contribuer. »

Le conflit avec les Etats-Unis a aussi pour effet de transformer l’Union européenne elle-même. Sous la pression des Américains, les forces centrifuges gagnent en importance sur le continent européen, menaçant de faire exploser l’UE. Il semble assuré que les forces extrêmement nationalistes et chauvines vont se trouver renforcées au terme de l’élection européenne.

Aux Pays-Bas, où le vote a eu lieu jeudi dernier, le Parti de la liberté, anti-musulman, dirigé par le populiste de droite Geert Wilders a terminé deuxième. Obtenant 16 pour cent des voix, il n’était pas loin derrière les chrétiens-démocrates du premier ministre Jan Peter Balkenende qui ont obtenu 20 pour cent des voix. Le Parti travailliste, un parti social-démocrate, est arrivé en troisième position avec seulement 13 pour cent des voix exprimées.

En Grande-Bretagne, on s’attend à ce que le Parti de l’indépendance du Royaume-Uni, un parti anti-UE, obtienne plus de voix que le Parti travailliste au pouvoir. Ce dernier devrait connaître une débâcle électorale. Les tories du Parti conservateur, qui sont en avance dans les sondages pour former le prochain gouvernement britannique, sont en négociations avec des groupes ultranationalistes comme le parti polonais Droit et Justice (PiS) des frères Kaczynski pour former un nouveau groupe parlementaire au Parlement européen. Dans la prochaine session parlementaire, les tories prévoient quitter le Parti populaire européen, un regroupement des principaux partis conservateurs soutenant l’Union européenne. Un gouvernement eurosceptique en Grande-Bretagne, qui fait partie du groupe des quatre principaux pays membres, laisserait planer un doute sur l’existence même de l’Union européenne.

Ces forces de droite ne jouissent pas d’un soutien de masse. Elles bénéficient du très faible intérêt des électeurs pour les élections européennes, avec un taux de participation d’environ 30 pour cent, et du déclin des partis sociaux-démocrates à la suite de leurs attaques pendant des années contre les travailleurs. Néanmoins, ces forces d’extrême-droite représentent un véritable danger. L’éclatement de l’Europe en Etats-nations et en région en concurrence aura des conséquences sociales et politiques dévastatrices. Cela évoque les abominations nationalistes qui ont accablé l’Europe dans la première moitié du 20e siècle et que l’on a vues plus récemment dans les Balkans.

Les travailleurs ne peuvent pas et ne doivent pas défendre l’Union européenne. L’UE est un outil des capitalistes européens. Plus ceux-ci sont agressifs en cherchant à étendre leur influence à l’étranger, plus ils attaquent avec force la classe ouvrière européenne. Ce processus est primordial dans le démantèlement des droits démocratiques et sociaux. La catastrophe sociale actuelle en Europe de l’Est est largement le produit de la politique de l’UE. La colère et l’indignation qui s’expriment par les forts taux d’abstention aux élections portent sur l’UE et ses institutions. Les forces de la droite, toutefois, cherchent à exploiter cette colère et à la canaliser dans la direction du chauvinisme.

Les travailleurs ne peuvent demeurer indifférents ou passifs devant ces développements. Ils doivent prendre l’initiative d’unir l’Europe sur une base socialiste. La défense des droits sociaux et des droits démocratiques doit être liée à une lutte pour un programme socialiste international et pour la formation des Etats unis socialistes d’Europe. C’est la perspective qui est mise de l’avant par le Parti de l’égalité sociale (PSG), la section allemande de la Quatrième Internationale. Un vote pour le PSG ce dimanche est un premier pas dans le développement d’un parti socialiste international dans toute l’Europe.

(Article original anglais paru le 6 juin 2009)


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